LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1612 et 1614 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 novembre 2012), qu'un jugement du 14 décembre 2010 a déclaré parfaite depuis le 9 juin 2009, la vente par la société Perrier d'un immeuble à la société Sifer ; qu'un litige étant survenu entre les parties au moment de la signature de l'acte notarié sur la date d'entrée en jouissance, la société Perrier a déposé une requête en interprétation ;
Attendu que pour dire que l'entrée en jouissance devait se faire à la date de paiement du prix de vente, l'arrêt retient que c'est à tort que le tribunal a interprété le jugement du 14 décembre 2010 en disant que les fruits appartenaient à l'acquéreur à compter de la date à laquelle la vente était parfaite alors que, par application de l'article 1612 du code civil, le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose si l'acheteur n'en a pas payé le prix et que la société Sifer n'a pas payé celui-ci le 9 juin 2009 mais lors de la régularisation de la vente ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, sauf convention contraire, tous les fruits de l'immeuble appartiennent à l'acquéreur depuis le jour de la vente et que son obligation de payer le prix résulte de l'exécution complète par le vendeur de son obligation de délivrance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ; Condamne la société Perrier aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Perrier à payer la somme de 3 000 euros à la société Sifer ; rejette la demande de la société Perrier ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Sifer.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR réformé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et dit que l'entrée en jouissance doit se faire à la date du paiement du prix de vente ;
AUX MOTIFS QUE « sur le fond, dans son jugement du 14 décembre 2010 le tribunal a dit parfaite la vente au motif qu'il a constaté un accord des parties sur la chose et sur le prix ; que s'agissant de la date d'entrée en jouissance, c'est à tort que le tribunal a interprété cette décision en disant que les fruits appartenaient à l'acquéreur à compter de la date à laquelle la vente était parfaite, alors que, par application de l'article 1612 du code civil, le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose si l'acheteur n'en a pas payé le prix ; qu'en l'espèce, il est constant que la SA SIFER n'a pas payé le prix le 9 juin 2009 puisque celui-ci n'a été acquitté que lors de la régularisation de la vente devant le notaire » ;
1°/ ALORS, d'une part, QU'aux termes des articles 1604 et 1651 du code civil, l'obligation, pour l'acheteur, de payer le prix de vente résulte de l'exécution complète, par le vendeur, de son obligation de délivrance ; que l'article 1612 du même code, qui prévoit que le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose si l'acheteur n'en a pas payé le prix, offre une simple faculté au vendeur, sans subordonner, dans l'hypothèse d'une vente d'immeuble, l'entrée en jouissance de l'acheteur au paiement du prix de vente ; qu'en énonçant cependant, pour décider que la société Sifer n'avait pas droit aux fruits à la date à laquelle la vente était parfaite, que, par application de l'article 1612 du code civil, le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose si l'acheteur n'en a pas payé le prix, la cour d'appel a violé l'article 1612 du code civil par fausse interprétation, ensemble les articles 1604 et 1651 du même code ;
2°/ ALORS, d'autre part, QU'aux termes de l'article 1614 du code civil, la chose doit être délivrée en l'état où elle se trouve au moment de la vente ; que, depuis ce jour, tous les fruits appartiennent à l'acquéreur ; qu'aux termes de l'article 1583 du code civil, la vente est parfaite entre les parties et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès lors qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ; qu'en énonçant cependant, pour décider que la société Sifer n'avait pas droit aux fruits à la date à laquelle la vente était parfaite, que, par application de l'article 1612 du code civil, le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose si l'acheteur n'en a pas payé le prix, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées par refus d'application.