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17/10/2013 | FRANCE | N°12-23437

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 octobre 2013, 12-23437


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles 15 et 16 du code de procédure civile ;
Attendu que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile, les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ; que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut retenir, dans

sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles 15 et 16 du code de procédure civile ;
Attendu que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile, les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ; que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties, que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ;
Attendu que l'arrêt retient que M. et Mme X..., appelants du jugement du 6 septembre 2010, ont conclu le 29 novembre 2011 et M. et Mme Y...le18 novembre 2011 et que l'ordonnance de clôture a été prononcée le 30 novembre 2011 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. et Mme Y...avaient conclu le 1er décembre 2011 pour demander le rejet des débats des conclusions signifiées par M. et Mme X... la veille du prononcé de l'ordonnance de clôture, la cour d'appel a méconnu les exigences des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à M. et Mme Y...;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour les époux Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
(Moyen d'annulation)
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné les époux Y...à supprimer la terrasse recouverte de pavés autobloquants et créée par eux en façade sud de leur maison, dit que le mur séparatif des deux fonds est mitoyen, débouté les époux Y...de leur demande tendant à ce que les époux X... soient condamnés à supprimer l'exhaussement pratiqué par eux et dit que la demande des époux Y...tendant à ce qu'il soit jugé que le mur ne peut dépasser une hauteur de 1, 80 mètre à compter du niveau du sol naturel du fonds inférieur est sans objet ;
AUX MOTIFS QUE dans leurs dernières écritures déposées le 29 novembre 2011, les époux X... concluent à l'infirmation du jugement entrepris dans ses dispositions relatives au mode réparatoire de l'aggravation de la servitude d'écoulement des eaux grevant leur fonds, au caractère privatif du mur séparatif et à la suppression de divers éléments de végétation ; qu'ils demandent en conséquence que les Y...soient condamnés, sous astreinte de 300 euros par jour de retard dans le délai de deux mois suivant la signification de l'arrêt à intervenir, à faire cesser l'écoulement anormal des eaux dont ils sont victimes et ce notamment par la canalisation des eaux de toiture vers le domaine public et la canalisation des parties imperméabilisées de leur terrain vers des réceptacles munis d'une pompe de relevage aboutissant au domaine public ; que le mur litigieux étant, par ailleurs, déclaré mitoyen le jugement dont appel qui les a condamnés à démolir la partie rehaussée dudit mur doit en conséquence être infirmé ; que c'est à tort, enfin, qu'ils ont été condamnés à supprimer les bougainvilliers, les jardinières, la haie de lauriers-tins, le laurier sauce et le baudrier ; que les dispositions du jugement relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile doivent également être infirmées ; qu'ils demandent, enfin, que les époux Y...soient condamnés à leur payer la somme de 6. 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre tous les frais et dépens ; que l'ordonnance de clôture est en date du 30 novembre 2011 ;
ALORS QUE les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ; que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ensemble les exigences de la défense ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les conclusions d'une partie que si son adversaire a déposé d'un temps suffisant pour en débattre contradictoirement ; que la cour ne pouvait ici fonder sa décision sur les conclusions signifiées par les époux X... le 29 novembre 2011, soit la veille de la clôture, sans prendre en considération les conclusions d'incident des époux Y...tendant à ce que fussent écartées des débats ces conclusions produites in extremis, ainsi que les pièces qui leur étaient annexées, dès lors qu'ils n'avaient pas disposé d'un temps suffisant pour y répondre utilement, d'où il suit que l'arrêt n'est pas légalement justifié au regard des articles 15 et 16 du code de procédure civile, ensemble au regard de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, violés.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire par rapport au premier)
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le mur séparatif des deux fonds est mitoyen et débouté, en conséquence, les époux Y...de leur demande tendant à ce que les époux X... soient condamnés à supprimer l'exhaussement pratiqué par eux sur ledit mur ;
AUX MOTIFS QUE la demande des époux Y...tendant à la condamnation des époux X... à supprimer la surélévation à laquelle ils ont procédé sur le mur séparatif des deux fonds, suppose que soit déterminée au préalable le régime juridique applicable audit mur ; que les deux fonds voisins, cadastrés section BNP n° 262 et n° 263 sont issus de la division d'une plus grande parcelle, alors cadastrée section BNP n° 237, selon un document d'arpentage dressé par le géomètre expert A...le 23 mars 1972 ; que ce document représente la limite séparative entre les deux fonds par deux traits accolés l'un à l'autre de teintes verte et rose avec mention sur la légende que le liseré vert détermine le périmètre de la parcelle vendue à Jean B...(auteur des époux Y...) et le liseré rose, celui de la parcelle restant la propriété des époux C...; que si des talus sont figurés sur ce plan sur les trois côtés Nord, Est et Ouest de la parcelle, aucun talus ou mur n'apparaît sur son côté Sud formant une limite entre les deux propriétés ; que l'expert judiciaire F...se trompe lorsqu'il indique qu'à l'examen détaillé, on peut constater sous le trait surligné, une hachure oblique limitée d'un seul côté, révélant, selon lui, que le mur appartient en totalité au fonds dominant, et donc aux époux Y...; que le plan, même examiné à la loupe, ne comporte, en effet, ainsi que le fait justement remarquer l'expert privé des époux X..., François D..., sous les traits vert et rose, aucune hachure pouvant indiquer la présence d'un mur ou d'un talus ; que Roland E..., successeur de Jean-Marie A..., déclare, dans une attestation délivrée le 6 octobre 2011, que sur le plan A..., il existe deux traits formant une limite de propriété en dessous desquels ne figure aucune hachure ; que cette limite a été implantée par M. A...pour diviser cadastralement la parcelle d'origine et elle ne suivait aucun mur existant à l'époque ; qu'aucune représentation graphique d'un quelconque mur ne figure sur ce plan au niveau de cette limite ; que ce mur, qui ne contient pas des terres compte tenu de l'absence et de la faiblesse de dénivelé des sols à cet endroit, a une fonction de clôture et non de soutènement ; que ce mur, servant de séparation, doit donc bénéficier de la présomption de mitoyenneté édictée par l'article 653 du Code civil ; que l'attestation de l'ancienne propriétaire, Pierrette B..., et les lettres émanant des époux Y...eux-mêmes en date des 7 décembre 2004 et 31 janvier 2005, mentionnent clairement le caractère mitoyen du mur séparatif de leurs deux fonds ; que les époux X... étaient dès lors en droit, conformément aux dispositions de l'article 658 du Code civil, de faire exhausser le mur mitoyen sans être obligés d'obtenir au préalable le consentement de leurs voisins ; que les époux Y...doivent en conséquence, par infirmation du jugement entrepris, être déboutés de leur demande tendant à la suppression de la partie du mur ainsi surélevée ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la cour ne pouvait tout à la fois, sauf à entacher sa décision d'une éclatante contradiction de motifs, retenir d'un côté, que la maison des époux X... est située « en contrebas » de celle appartenant aux époux Y...(arrêt p. 3, § 1), que le fonds X... est assujetti, envers le fonds des époux Y..., à recevoir ses eaux de pluie (arrêt p. 6, § 1) et encore que la création de la terrasse des époux Y...« contribue à la concentration des eaux vers un même point bas et donc à l'aggravation de la servitude dénoncée par l'expert lequel confirme, au vu des photographies produites par les époux X..., que la zone de jardin située sous les déversoirs des exutoires est inondée en cas de pluie et ravinée en cas de fortes précipitations » (arrêt p. 7, § 2) et nier, d'un autre côté, jusqu'à l'existence même d'un dénivelé, pour dire que le mur litigieux n'avait qu'une fonction de clôture et non de soutènement (arrêt p. 8, dernier §) ; que l'arrêt encourt donc la censure pour violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, les juges du fond doivent examiner tous les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; que dès lors, la cour ne pouvait se fonder sur l'attestation de l'ancienne propriétaire des époux Y..., Mme Pierrette B..., qualifiant maladroitement le mur de mitoyen (attestation d'août 2008 constituant la pièce n° 8 des époux X...), sans prendre en considération l'attestation postérieure de Mme B..., en date du 29 juin 2009, confirmant l'existence dès 1972 d'un mur de soutènement en pierres sèches, mur qui avait été à cette époque reconstruit à l'identique et financé en totalité par Mme B...et son mari (attestation du 29 juin 2009, constituant la pièce n° 12 des époux Y...; v. aussi leurs dernières écritures, p. 9, § 5 et 6) ; qu'à cet égard également, la cour méconnaît les exigences des articles 455 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Cour européenne des droits de l'homme, violés ;

ET ALORS QUE, ENFIN, il appartient aux juges de donner ou de restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; que la déclaration d'une partie ne peut être retenue contre elle que si elle porte sur un point de fait et non sur un point de droit ; qu'il s'ensuit que la cour ne pouvait, pour retenir la qualification juridique de mur mitoyen, s'appuyer sur les lettres émanant des époux Y...mentionnant le caractère mitoyen du mur séparatif litigieux, sauf à violer les articles 12 du code de procédure civile et 1355 du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire par rapport au deuxième)
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré sans objet la demande des époux Y...tendant à voir limiter la hauteur du mur litigieux à 1, 80 mètre, mesurée à compter du niveau du sol naturel du fonds inférieur ;
AUX MOTIFS QUE le mur ayant désormais une hauteur de 1, 80 mètre, la demande préventive des époux Y...tendant à ce qu'il soit jugé que le mur ne peut dépasser une hauteur de 1, 80 mètre à compter du niveau du sol naturel du fonds inférieur, est sans objet ;
ALORS QUE, faisant observer que, mesuré depuis le fonds inférieur des époux X..., le mur tel que rehaussé atteignait la hauteur de 2, 60 mètres et les privait de toute vue sur la mer et de l'ensoleillement dont ils bénéficiaient jusqu'alors, les époux Y...avaient demandé, sur le fondement de l'article 663 du Code civil, que la hauteur du mur soit à tout le moins ramenée à la hauteur de 1, 80 mètre, également mesurée depuis le fonds des époux X... (cf. leurs dernières écritures p. 10 in fine et le dispositif de ces mêmes écritures p. 13, alinéa 11) ; qu'en écartant cette demande abusivement qualifiée de préventive, au motif qu'elle serait sans objet puisque le mur était déjà d'une hauteur de 1, 80 mètre, sans préciser si cette hauteur était mesurée à partir du niveau du sol naturel du fonds inférieur des époux X..., comme le réclamaient les exposants, ou s'il s'agissait de la hauteur mesurée depuis le fonds supérieur des époux Y..., auquel cas la demande ne pouvait être déclarée sans objet, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles 4 et 31 du code de procédure civile, violés.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-23437
Date de la décision : 17/10/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Procédure de la mise en état - Ordonnance de clôture - Dépôt des conclusions des parties - Dépôt postérieur à l'ordonnance - Recevabilité - Cas - Conclusions demandant la révocation de l'ordonnance de clôture ou le rejet des débats des conclusions ou productions de dernière heure de l'adversaire - Portée

PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Conclusions - Dépôt - Dépôt postérieur à l'ordonnance de clôture - Recevabilité - Cas - Conclusions demandant la révocation de l'ordonnance de clôture ou le rejet des débats des conclusions ou productions de dernière heure de l'adversaire - Portée PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Principe de la contradiction - Violation - Cas - Conclusions demandant la révocation de l'ordonnance de clôture ou le rejet des débats des conclusions ou productions de dernière heure de l'adversaire

Méconnaît les exigences des articles 15 et 16 du code de procédure civile la cour d'appel qui statue sans se prononcer sur les conclusions déposées par une partie le lendemain de l'ordonnance de clôture pour demander le rejet de celles signifiées par son adversaire la veille de ladite ordonnance


Références :

articles 15 et 16 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 03 mai 2012

A rapprocher : 2e Civ., 14 décembre 2006, pourvoi n° 05-19939, Bull. 2006, II, n° 354 (cassation). Sur l'application du principe de la contradiction au cas des conclusions de dernière heure, à rapprocher :1re Civ., 20 février 2008, pourvoi n° 07-12676, Bull. 2008, I, n° 57 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 17 oct. 2013, pourvoi n°12-23437, Bull. civ. 2013, II, n° 203
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, II, n° 203

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Lathoud
Rapporteur ?: M. Pimoulle
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Ghestin

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.23437
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