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19/12/2012 | FRANCE | N°11-10535

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 décembre 2012, 11-10535


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 octobre 2010), que, le 10 juin 1998, la Caisse fédérale de crédit mutuel du Nord de la France (BCMNF) et la Banque coopérative mutuelles du Nord (BCMN), aux droits de laquelle se trouve la société Banque commerciale du marché nord Europe (BCMNE), ont conclu avec la société Nord Financement une convention de partenariat comprenant une clause compromissoire ; que, par contrat du 24 mai 2005, comprenant une clause attributive de juridicti

on, la BCMNE a consenti à la société Holding Financière Houvenaeghel ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 octobre 2010), que, le 10 juin 1998, la Caisse fédérale de crédit mutuel du Nord de la France (BCMNF) et la Banque coopérative mutuelles du Nord (BCMN), aux droits de laquelle se trouve la société Banque commerciale du marché nord Europe (BCMNE), ont conclu avec la société Nord Financement une convention de partenariat comprenant une clause compromissoire ; que, par contrat du 24 mai 2005, comprenant une clause attributive de juridiction, la BCMNE a consenti à la société Holding Financière Houvenaeghel un prêt, contre-garanti en partie par la société Nord Financement ; qu'à la suite du placement en liquidation judiciaire de la société Houvenaeghel, la BCMNE a demandé à la société Nord Financement de lui payer une certaine somme au titre de cette contre-garantie et, face au refus de cette dernière, a mis en oeuvre la procédure d'arbitrage prévue au contrat du 10 juin 1998 ; que la constitution du tribunal arbitral s'étant heurtée à des difficultés, le juge d'appui, saisi par la société Nord Financement, a désigné un troisième arbitre ; que la BCMNE a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que BCMNE fait grief à l'arrêt de déclarer son appel irrecevable, alors, selon le moyen :
1°/ qu'un obstacle juridique disproportionné à ce qu'il entend protéger ne peut faire échec au droit d'accès effectif au juge du justiciable ; qu'en l'espèce, la société BCMNE avait démontré que la clause compromissoire invoquée par la société Nord Financement était manifestement inapplicable ; qu'en déclarant l'appel irrecevable, sans examiner ni si l'ordonnance du juge d'appui n'était pas manifestement abusive, ni si la clause compromissoire n'était pas manifestement inapplicable, la cour d'appel a interprété l'article 1457 du code de procédure civile, de telle sorte qu'il constitue un obstacle disproportionné au regard du principe qu'il protège et de nature à rompre l'égalité des armes entre les parties, et a ainsi violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que l'article 1457 du code de procédure civile, qui dispose que l'ordonnance peut être frappée d'appel lorsque le président déclare n'y avoir lieu à désignation de l'arbitre pour une des causes prévues à l'article 1444 (al. 3), n'interdit pas nécessairement l'appel lorsque le juge fait droit à la demande de désignation ; que lorsque le juge d'appui a écarté, au prix d'une erreur de droit manifeste, un moyen tiré de ce que la clause compromissoire était manifestement inapplicable, la décision peut, de ce chef, être frappée d'appel ; qu'en décidant l'inverse, la cour d'appel a violé les articles 543 et 1457 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'ordonnance par laquelle le juge d'appui désigne un arbitre n'étant pas susceptible de recours, sauf en cas d'excès de pouvoir, et le juge d'appui, ayant, dans l'exercice de ses pouvoirs, procédé à la désignation d'un arbitre sur le fondement d'une clause compromissoire qu'il a estimé applicable, c'est à bon droit que la cour d'appel, après avoir relevé à juste titre qu'il reviendrait au tribunal arbitral, une fois constitué, d'apprécier l'étendue de son pouvoir en application de l'article 1466 du code de procédure civile, a retenu que l'appel formé par la BCMNE était irrecevable ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Banque commerciale du marché Nord Europe aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Banque commerciale du marché Nord Europe
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré la BCMNE irrecevable en son appel ;
AUX MOTIFS QUE «il est constant que le président du tribunal de commerce de Lille a été saisi par la SA Nord Financement aux fins de voir désigner un tiers arbitre destiné à achever la constitution de la commission d'arbitrage prévue à l'article 11 d'une convention cadre intervenue le 10 juin 1998 entre la BCMNE et la SA Nord Financement au titre d'un partenariat dans une coopération de crédit, un litige étant né entre les parties au sujet d'une contre-garantie donnée par la société Nord Financement à l'occasion d'un contrat de prêt octroyé le 24 mai 2005 par la BCMNE à la société holding financière HOUVENAEGHEL en application de la convention de partenariat ; que la saisine du juge des référés s'inscrit donc dans l'application des dispositions de l'article 1444 du Code de procédure civile ; qu'or aux termes de l'article 1457 du même Code, dans les cas prévus aux articles 1444, 1454, 1456 et 1463, le président statue par une ordonnance non-susceptible de recours ; que l'article 1457 du Code de procédure civile ne prévoit qu'une exception en son aliéna 2 lorsque le président déclare n'y avoir lieu à désignation pour une des causes prévues à l'article 1444 (al.3) c'est-à-dire lorsque la clause compromissoire est soit manifestement nulle, soit insuffisante pour permettre de constituer le tribunal arbitral ; que la BCMNE n'est pas fondée, en ajoutant au texte par une interprétation inverse à soutenir que la voie de l'appel existe lorsque le juge d'appui considère la clause compromissoire comme applicable ; qu'il reviendra au contraire au tribunal arbitral une fois constitué d'apprécier l'étendue de son pouvoir en application des dispositions de l'article 1466 du Code de procédure civile ; qu'en conséquence, il y a lieu de déclarer la BCMNE irrecevable en son appel » ;
1°) ALORS QU' un obstacle juridique disproportionné à ce qu'il entend protéger ne peut faire échec au droit d'accès effectif au juge du justiciable ;qu'en l'espèce, la société BCMNE avait démontré que la clause compromissoire invoquée par la société NORD FINANCEMENT était manifestement inapplicable ; qu'en déclarant l'appel irrecevable, sans examiner ni si l'ordonnance du juge d'appui n'était pas manifestement abusive, ni si la clause compromissoire n'était pas manifestement inapplicable, la cour d'appel a interprété l'article 1457 du Code de procédure civile, de telle sorte qu'il constitue un obstacle disproportionné au regard du principe qu'il protège et de nature à rompre l'égalité des armes entre les parties, et a ainsi violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
2°) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE l'article 1457 du Code de procédure civile, qui dispose que l'ordonnance peut être frappée d'appel lorsque le président déclare n'y avoir lieu à désignation de l'arbitre pour une des causes prévues à l'article 1444 (al. 3), n'interdit pas nécessairement l'appel lorsque le juge fait droit à la demande de désignation ; que lorsque le juge d'appui a écarté, au prix d'une erreur de droit manifeste, un moyen tiré de ce que la clause compromissoire était manifestement inapplicable, la décision peut, de ce chef, être frappée d'appel ; qu'en décidant l'inverse, la cour d'appel a violé les articles 543 et 1457 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-10535
Date de la décision : 19/12/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ARBITRAGE - Convention d'arbitrage - Clause compromissoire - Désignation des arbitres - Désignation par le juge d'appui - Ordonnance - Voies de recours - Détermination - Portée

ARBITRAGE - Convention d'arbitrage - Clause compromissoire - Désignation des arbitres - Désignation par le juge d'appui - Excès de pouvoir - Exclusion - Cas ARBITRAGE - Arbitre - Pouvoirs - Désignation sur sa propre compétence - Portée POUVOIRS DES JUGES - Excès de pouvoir - Définition - Exclusion - Cas - Juge d'appui désignant un arbitre sur le fondement d'une clause compromissoire estimée applicable

L'ordonnance par laquelle le juge d'appui désigne un arbitre n'étant pas susceptible de recours, sauf en cas d'excès de pouvoir, et un juge d'appui, ayant, dans l'exercice de ses pouvoirs, procédé à la désignation d'un arbitre sur le fondement d'une clause compromissoire qu'il a estimé applicable, c'est à bon droit, sans méconnaître les exigences du procès équitable, qu'une cour d'appel, après avoir relevé à juste titre qu'il reviendrait au tribunal arbitral, une fois constitué, d'apprécier l'étendue de son pouvoir en application de l'article 1466 du code de procédure civile, a déclaré irrecevable l'appel formé contre une ordonnance du juge d'appui portant désignation d'un arbitre


Références :

article 1457 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2011-48, du 13 janvier 2011

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 28 octobre 2010

Sur l'absence de recours immédiat contre l'ordonnance d'un juge d'appui désignant un arbitre, au profit d'un recours différé devant le tribunal arbitral, à rapprocher :1re Civ., 30 octobre 2006, pourvoi n° 04-17167, Bull. 2006, I, n° 442 (irrecevabilité). Sur l'absence de recours contre l'ordonnance d'un juge d'appui désignant un arbitre, sauf en cas d'excès de pouvoir, à rapprocher :1re Civ., 22 septembre 2010, pourvoi n° 08-21313, Bull. 2010, I, n° 175 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 déc. 2012, pourvoi n°11-10535, Bull. civ. 2012, I, n° 264
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, I, n° 264

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: Mme Maitrepierre
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Defrenois et Levis

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.10535
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