LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Met hors de cause Mme X... ;
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette branche qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985 dans leur rédaction issue de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 et les articles L. 434-1et L. 434-2 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte du dernier de ces textes que la rente versée indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part le déficit fonctionnel permanent ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été blessée dans un accident de la circulation, constituant un accident du travail, dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Mme Y..., assurée auprès de la société Haftpelichtverband der Deutschen Industrie Versicherungs (la société HDI) ; que Mme X... a assigné ces derniers en indemnisation ;
Attendu que pour débouter la caisse primaire d'assurance maladie de Paris (la caisse) de son recours subrogatoire contre Mme Y... et son assureur pour la rente accident du travail, l'arrêt retient que l'objet de cette rente est de contribuer à la réparation du préjudice subi par l'intéressée dans sa vie professionnelle du fait de son handicap et non à celle du déficit fonctionnel permanent, lequel comprend exclusivement les incidences de ce handicap sur la vie personnelle de la victime ; que dans ces conditions, la caisse qui n'établit pas avoir effectivement préalablement et de manière incontestable, versé une prestation indemnisant le déficit fonctionnel permanent de la victime est donc mal fondée en sa demande ;
Qu'en statuant ainsi, limitant l'objet de la rente accident du travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne Mme Y... et la société Haftpelichtverband der Deutschen Industrie Versicherungs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP GATINEAU et FATTACCINI, avocat aux Conseils pour la CPAM de Paris
Il est fait grief à la décision attaquée d'avoir débouté la Caisse primaire d'assurance maladie de PARIS de son recours subrogatoire contre Madame Y... et son assureur pour la rente accident du travail qu'elle verse à Madame X... ;
AUX MOTIFS QUE les dispositions de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 s'appliquent aux instances en cours et aux recours exercés par les caisses de sécurité sociale dans une action engagée par la victime d'un accident du travail ; qu'en vertu de ces dispositions, les recours subrogatoires des tiers payeurs s'exercent, poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge à l'exclusion des préjudices à caractère personnel ; que lorsque la victime n'a reçu des tiers payeurs qu'une indemnisation partielle, elle peut exercer ses droits contre le responsable, pour ce qui lui reste dû, par préférence aux tiers payeurs ; que cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ; que la CPAM soutient qu'elle est fondée à exercer son recours, au titre de la rente accident du travail qu'elle sert à la victime sur le montant de l'indemnité allouée en réparation du préjudice fonctionnel permanent ; que toutefois, s'agissant d'un poste de préjudice personnel, la Caisse doit, pour exercer son recours sur ce poste, établir qu'elle a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation l'indemnisant de manière incontestable ; que cependant, aux termes de l'article L 431-1, 4° du Code de la sécurité sociale, la rente accident du travail est versée aux ''victimes atteintes d'une incapacité permanente de travail" ; que d'autre part, l'article L.434-2 du même code précise que le taux de l'incapacité permanente de la victime est déterminé notamment, d'après sa qualification professionnelle ; qu'enfin, le montant de la rente est fonction du salaire ; qu'il résulte de ces éléments que l'objet de cette rente est de contribuer à la réparation du préjudice subi par l'intéressé dans sa vie professionnelle du fait de son handicap et non à celle du déficit fonctionnel permanent, lequel comprend exclusivement les incidences de ce handicap sur la vie personnelle de la victime ; que dans ces conditions, la CPAM qui n'établit pas avoir effectivement, préalablement et de manière incontestable, versé une prestation indemnisant le déficit fonctionnel permanent de la victime est donc mal fondée en sa demande ; que son recours s'exercera sur le montant des dépenses de santé qu'elle a prises en charge pour 1.826,33 et des indemnités journalières qu'elle a versées à la victime à concurrence de la somme de 10.407,05 , soit au total 12.233,38 ;
1) ALORS QUE la rente accident du travail, versée aux victimes atteinte d'une incapacité permanente de travail, répare à la fois la dimension physiologique de celle-ci (gêne fonctionnelle) et son éventuelle dimension économique (perte de revenus) ; qu'en l'espèce, la Caisse primaire d'assurance maladie faisait valoir que la rente accident du travail allouée à Madame X... avait pour objet de réparer les conséquences du déficit fonctionnel permanent dont avait été victime l'intéressée, l'expert n'ayant retenu aucun préjudice à caractère professionnel consécutif à l'accident ; qu'en limitant l'objet de la rente accident du travail à son seul aspect économique et professionnel pour en exclure l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent et débouter la Caisse de son recours sur ce poste de préjudice, la Cour d'appel a violé l'article L 431-1 et L 432-2 du Code de la sécurité sociale ;
2) ALORS QUE le juge ne peut modifier les termes du litige tels que déterminés par les prétentions des parties ; qu'en l'espèce, au soutien de son recours sur le poste « déficit fonctionnel permanent » à hauteur de 16.500 euros, la Caisse primaire d'assurance maladie PARIS soutenait avoir effectivement et préalablement indemnisé le poste de préjudice personnel que constitue « le déficit fonctionnel permanent » et ce, dans le cadre de la rente accident du travail à effet du 31 janvier 2001 allouée à Madame X... ; que Madame X... ne contestait aucunement s'être vue verser par la Caisse une prestation indemnisant le déficit fonctionnel permanent, qu'elle évaluait, à l'instar de l'organisme de sécurité sociale, à la somme de 16.500 euros ; qu'en affirmant que la Caisse n'établissait pas le versement de cette prestation pour la débouter de son recours sur ce poste, la Cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation des articles 4 et 7 du Code de procédure civile.