LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 16 juin 2015), que, salarié de 1968 à 1979 de la Société européenne des produits réfractaires (la société), M. X... a adressé le 22 avril 2011 à la caisse primaire d'assurance maladie du Vaucluse (la caisse) une déclaration de maladie professionnelle accompagnée d'un certificat médical faisant état d'un cancer broncho-pulmonaire primitif ; que le 27 septembre 2011, la caisse a informé la société de la prise en charge de la maladie au titre du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles ; que la société a saisi une juridiction de sécurité sociale en inopposabilité de cette décision ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le ou les précédents employeurs de la victime d'une affection prise en charge au titre de la législation professionnelle peuvent se prévaloir, aux fins d'inopposabilité à leur égard de la décision de la caisse, des manquements de celle-ci dans l'instruction du dossier à l'égard du dernier employeur de la victime ; qu'ayant constaté qu'elle n'était pas le dernier employeur du salarié et que le dernier employeur avait seulement été interrogé à l'occasion de l'enquête de la caisse sans qu'aucune instruction contradictoire ait été conduite à son égard, la cour d'appel n'a pu juger que la décision de prise en charge lui était opposable, sans violer les articles R 441-11 et R 441-14 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que le dernier employeur est celui dont la victime a été le salarié en dernier lieu ; qu'en jugeant qu'elle devait être tenue pour le dernier employeur ayant exposé le salarié au risque, ce qui n'en faisait pas le dernier employeur, la cour d'appel a violé les articles R 441-11 et R 441-14 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que l'employeur qui a reçu une information complète sur la procédure d'instruction, n'est pas recevable à se prévaloir, aux fins d'inopposabilité à son égard de la décision de la caisse, des manquements de celle-ci dans l'instruction du dossier à l'égard du dernier employeur de la victime ;
Et attendu qu'après avoir rappelé que la société devait être tenue comme le dernier employeur ayant exposé le salarié au risque, l'arrêt retient que la caisse justifie avoir informé celle-ci le 20 mai 2011 de ce qu'elle avait accusé réception de la déclaration de maladie professionnelle faite, en lui en adressant copie, ainsi que du certificat médical initial, ensuite le 22 juillet 2011 du recours au délai complémentaire d'instruction, enfin le 7 septembre 2011 de la date prévisible de clôture de l'instruction au 27 septembre 2011, en l'informant aussi de sa faculté de consultation du dossier, avant de lui notifier enfin le 27 septembre 2011 la prise en charge de la maladie professionnelle déclarée et qu'ainsi, elle a respecté son obligation d'information ;
Qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a décidé à bon droit que la décision de prise en charge de la maladie de M. X... devait être déclarée opposable à la société ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Société européenne des produits réfractaires aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Société européenne des produits réfractaires ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la Société européenne des produits réfractaires
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'ensemble des demandes de la Société Européenne de Produits Réfractaires tendant à voir constater que la caisse primaire d'assurance-maladie du Vaucluse a méconnu ses obligations réglementaires dans le cadre de l'instruction qu'elle a menée à son égard ; constater que les conditions du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles ne sont pas réunies ; dire et juger que la présomption d'imputabilité de la maladie de M. X... ne joue pas à son égard ; et constater que la décision de prise en charge de la maladie de M. X... et toutes décisions subséquentes à celle-ci lui sont inopposables ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte des pièces versées aux débats que M. X... a déclaré en réalité le 22 avril 2011 une maladie professionnelle avec certificat médical établi le 13 avril 2011 diagnostiquant un « cancer bronchopulmonaire primitif provoqué par l'inhalation de poussières d'amiante, tableau n° 30 bis du régime général » ; que la déclaration de demande de reconnaissance de maladie professionnelle mentionne : – sur la nature de la maladie : « cancer poumon/amiante » ; – sur la date de première constatation médicale : « 21/12/2010 » ; – sur la durée de la maladie : « SEPR 84 Le Pontet de 1979 à 1982 – Poste occupé : Démouleur four Jargas » ; que si la déclaration ne porte pas mention du dernier employeur, il ne fait pas débat que M. X... a travaillé pendant son activité professionnelle : – de 1968 à 1979 comme ouvrier de la Société Européenne de Produits Réfractaires (SEPR) ; – de 1982 à 1983 comme maçon ; – de 1984 à 1996 comme agent commercial de la société Tupperware ; – de 1998 à 2000 comme employé de commerce de la SARL Gas Provence ; – de 2001 à 2002 comme agent d'entretien auprès d'un viticulteur ; – de 2004 à 2005 comme agent d'entretien et de maintenance auprès de nouveau de la SARL Gas Provence ; qu'ensuite, et après une période de chômage à compter de 2005, l'assuré a fait valoir ses droits à la retraite en 2007 ; que le tableau n° 30 bis des maladies professionnelles concerne le cancer broncho-pulmonaire primitif provoqué par l'inhalation des poussières d'amiante et mentionne un délai de prise en charge de 40 ans, sous réserve d'une durée d'exposition au risque de 10 ans ; qu'il prévoit dans la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer cette maladie les travaux suivants : « travaux directement associés à la production des matériaux contenant de l'amiante ; travaux nécessitant l'utilisation d'amiante en vrac ; travaux d'isolation utilisant des matériaux contenant de l'amiante ; travaux de retrait d'amiante ; travaux de pose et de dépose de matériaux isolants à base d'amiante ; travaux de construction et de réparation navale ; travaux d'usinage, de découpe et de ponçage de matériaux contenant de l'amiante ; fabrication de matériels de friction contenant de l'amiante ; travaux d'entretien ou de maintenance effectués sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante ; que la SALR Gas Provence étant le dernier employeur de M. X..., la CPAM du Vaucluse a procédé à une enquête la concernant, dont il est résulté que, sur la période de travail ne couvrant pas la durée d'exposition au risque exigée par le tableau, l'activité de l'entreprise ne vient pas suffisamment justifier d'une exposition aux risques CMR, notamment les produits utilisés, même si le contrôleur du travail a pu noter dans son rapport que « l'intéressé a pu être exposé dans les lieux de son travail à des matériaux tels que toitures en amiante notamment » ; que par ailleurs, si aucun texte de loi n'impose à l'organisme, dans le cadre de la procédure en reconnaissance de maladie professionnelle, de rechercher l'ensemble des différents employeurs du salarié souffrant de l'affection, la société SEPR, mentionnée dans la déclaration de maladie professionnelle, devait bien être recherchée comme le dernier employeur susceptible d'avoir exposé l'assuré au risque et devant se voir appliquer de fait la présomption d'imputabilité de l'origine professionnelle ainsi déclarée, et cela conformément aux dispositions de l'article R 441-11 du code de la Sécurité sociale ; qu'il résulte de l'enquête une exposition de l'assuré aux risques et cela dans le cadre de partie de travaux figurant dans la liste limitative du tableau n° 30 bis, en l'espèce les travaux de pose et de dépose de matériaux isolants à base d'amiante et ceux d'entretien ou de maintenance effectués sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante et, pour une durée d'exposition correspondant à celle prescrite ; que la société SEPR ne renversant pas la présomption d'imputabilité de la maladie professionnelle en démontrant que le travail y était totalement étranger, la CPAM du Vaucluse a donc légitimement pris en charge le 27 septembre 2011 au titre de la législation relative aux risques professionnels l'affection déclarée, inscrite au tableau considéré, clairement identifiée par le certificat médical initial produit et les conclusions du tableau ainsi rempli ; que pour les motifs susvisés, la société SEPR devait bien être tenue pour le dernier employeur ayant exposé au risque M. X... et, à cet égard, la CPAM du Vaucluse justifie l'avoir d'abord informée le 20 mai 2011 de ce qu'elle avait accusé réception de la déclaration de maladie professionnelle faite, en lui en adressant copie, ainsi que du certificat médical initial, ensuite le 22 juillet 2011 du recours au délai complémentaire d'instruction, enfin le 7 septembre 2011 de la date prévisible de l'instruction au 27 septembre 2011 la prise en charge de la maladie professionnelle déclarée ; que le caractère certain de l'envoi par la caisse du courrier de clôture ne peut par ailleurs être remis en question et la société ne justifie aucunement dans ses écritures de son déplacement pour la consultation du dossier ni d'une impossibilité pour ce faire ; que la caisse doit donc être tenue pour avoir respecté son obligation d'information envers la société SEPR et avoir bien respecté aussi à son égard, tenant le questionnaire adressé à elle et ayant valeur d'enquête, le principe du contradictoire ; ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE la société SEPR soutient que la procédure n'aurait pas été régulière ; qu'en effet, le dernier employeur de M. X... n'est pas la SEPR et qu'aucune instruction n'aurait été faite auprès de son dernier employeur ; que la caisse n'aurait réalisé aucune enquête au sens de l'article D 461-9 du code de la Sécurité sociale auprès de la SEPR ; qu'en l'espèce, le 20 mai 2011, la caisse a accusé réception à l'employeur de la déclaration de maladie professionnelle et lui en a adressé une copie accompagnée du certificat médical ; que le 22 juillet 2011, le recours au délai complémentaire a été signalé à l'employeur et à l'assuré ; que le 7 septembre 2011, la caisse a avisé l'employeur par lettre recommandée avec accusé de réception de la consultation possible du dossier « préalablement à la prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie « cancer broncho-pulmonaire provoqué par l'inhalation de poussières d'amiante » qui interviendra le 27 septembre 2011 ; que le 27 septembre 2011, la prise en charge de la maladie professionnelle a été notifiée à l'employeur SEPR par lettre recommandée avec accusé de réception ; que dès lors, jusqu'au terme de l'instruction, l'employeur a conservé la possibilité de consulter, dans les locaux de la CPAM, les pièces du dossier ; que la procédure a donc été parfaitement suivie par la caisse ;
1°) ALORS D'UNE PART QUE le ou les précédents employeurs de la victime d'une affection prise en charge au titre de la législation professionnelle peuvent se prévaloir, aux fins d'inopposabilité à leur égard de la décision de la caisse, des manquements de celle-ci dans l'instruction du dossier à l'égard du dernier employeur de la victime ; qu'ayant constaté que la société SEPR n'était pas le dernier employeur du salarié et que le dernier employeur avait seulement été interrogé à l'occasion de l'enquête de la caisse sans qu'aucune instruction contradictoire ait été conduite à son égard, la cour d'appel n'a pu juger la décision de prise en charge opposable à la société SEPR, sans violer les articles R 441-11 et R 441-14 du code de la Sécurité sociale ;
2°) ALORS D'AUTRE PART QUE le dernier employeur est celui dont la victime a été le salarié en dernier lieu ; qu'en jugeant que la société SEPR devait être tenue pour le dernier employeur ayant exposé le salarié au risque, ce qui n'en faisait pas le dernier employeur, la cour d'appel a violé les articles R 441-11 et R 441-14 du code de la Sécurité sociale.