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20/05/2015 | FRANCE | N°14-13188

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 20 mai 2015, 14-13188


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 juin 2013), que M. et Mme X... ont signé le 30 mai 2008 un compromis de vente avec M. Y... portant sur une parcelle appartenant à ce dernier ; que la SAFER Provence Alpes Côte d'Azur (la SAFER) a, le 12 septembre 2008, notifié son intention de préempter ; que la parcelle a ensuite été rétrocédée à un tiers ; que M. et Mme X... ont assigné la SAFER en nullité de la décision de préemption et de la vente qui a suivi ;

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alo...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 juin 2013), que M. et Mme X... ont signé le 30 mai 2008 un compromis de vente avec M. Y... portant sur une parcelle appartenant à ce dernier ; que la SAFER Provence Alpes Côte d'Azur (la SAFER) a, le 12 septembre 2008, notifié son intention de préempter ; que la parcelle a ensuite été rétrocédée à un tiers ; que M. et Mme X... ont assigné la SAFER en nullité de la décision de préemption et de la vente qui a suivi ;
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que le délai de deux mois imparti à la SAFER pour faire connaître sa décision quant à l'exercice de son droit de préemption n'interdit pas au propriétaire du bien rural de rétracter son offre de vente, lorsqu'elle constitue une simple pollicitation, ni de se prévaloir de la caducité de sa promesse de vendre, lorsque la réitération par acte authentique n'est pas intervenue à la date prévue au compromis ; que pour débouter M. et Mme X... de leur demande de nullité de la préemption, l'arrêt retient que la SAFER, qui a été informée de la déclaration d'intention d'aliéner le 17 juillet 2008, disposait pour préempter d'un délai de deux mois au cours duquel la caducité du compromis ne pouvait lui être opposée, de sorte qu'en faisant connaître son intention de préempter par lettre recommandée avec accusé de réception présentée le 12 septembre 2008, la SAFER a régulièrement exercé son droit de préemption, nonobstant le fait que le compromis devait être réitéré au plus tard à cette date ; qu'en statuant ainsi, bien que la caducité du compromis de vente pût être opposée à la SAFER avant l'expiration du délai de deux mois prévu pour l'exercice de son droit de préemption, la cour d'appel a violé les articles L. 143-8 et L. 412-8 du code rural et de la pêche maritime ;
2°/ que lorsqu'un délai de validité du compromis a été convenu entre le vendeur et l'acquéreur évincé, l'exercice de son droit de préemption par la SAFER est sans effet si elle ne fait connaître sa décision de préempter qu'après que l'avant-contrat soit devenu caduc ; que pour débouter les époux X... de leur demande de nullité de la préemption, l'arrêt se borne à retenir que s'il était stipulé que le compromis devait être réitéré au plus tard le 12 septembre 2008, la SAFER a régulièrement exercé son droit de préemption à cette échéance, en faisant connaître son intention de préempter par lettre recommandée avec accusé de réception présentée le 12 septembre 2008 ; qu'en se déterminant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée, si la SAFER avait fait connaître sa décision de préempter avant que le vendeur n'exprime, dans un courrier daté du 12 septembre 2008, sa volonté de se prévaloir de la caducité du compromis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143-8 et L. 412-8 du code rural et de la pêche maritime ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la SAFER, informée le 17 juillet 2008 de l'intention de M. Y... d'aliéner une parcelle de terre, a, par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 12 septembre 2008, fait connaître sa décision de préempter et exactement retenu que le délai de validité convenu entre M. Y... et M. et Mme X..., acquéreurs évincés, n'était pas opposable à la SAFER qui disposait d'un délai de deux mois pour préempter en application des articles R. 143-4 et 6 du code rural et de la pêche maritime, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a déduit à bon droit que la procédure de préemption formalisée avant l'expiration de ce délai était régulière ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. et Mme X... de l'ensemble de leurs demandes ;
Aux motifs que « sur la caducité du compromis, la SAFER, qui a été informée de la déclaration d'intention d'aliéner par l'étude de Maître Lagnel-Ripert le juillet 2008, a fait connaître son intention de préempter par lettre recommandée avec accusé de réception présentée le 12 septembre 2008 aux époux X... et à la SAFER sic ; que la SAFER disposait d'un délai de deux mois pour préempter en application des articles R. 143-4 et 6 du code rural ; qu'il ne peut lui être opposé de caducité du compromis dans ce délai ; qu'en l'espèce, ledit compromis devait être réitéré au plus tard le 12 septembre 2008, mais l'exercice par la SAFER de son droit de préemption est régulièrement intervenu à cette échéance ; que sur la réalité d'un bail verbal, les époux X... se prévalent d'un bail verbal sur la parcelle litigieuse ; que le compromis de vente liant les époux X..., acheteurs, et Maurice Y..., vendeur, précise que la parcelle objet du compromis "est actuellement libre depuis le départ volontaire du fermier (bail verbal), M. Z..." ; les époux X... entendent prouver l'existence d'un bail verbal par la production d'une attestation irrégulière en la forme au regard des exigences de l'article 202 du code de procédure civile, de Mme Y..., selon laquelle elle a donné à bail verbal aux époux X... le 29 septembre 2006 la parcelle AA 0073, après son abandon par Joël Z... ; qu'il n'est justifié d'aucun prix ou perception de loyer, et compte tenu de la mention d'absence de bail figurant expressément dans l'acte notarié du 30 mai 2008, il sera considéré que la preuve du bail allégué n'est pas rapportée ; qu'il ne peut dès lors être invoqué par les époux X... d'indivisibilité des baux avec celui portant sur la parcelle AA n° 0101 ; que sur la nullité de la préemption du 12 septembre 2008 et de la vente qui a suivi, en application de l'article L. 143-3 du code rural, "à peine de nullité, la SAFER doit justifier sa décision de préemption par référence explicite et motivée à l'un ou à plusieurs des objectifs ci-dessus définis, et la porter à la connaissance des intéressés" ; qu'"elle doit également motiver et publier la décision de rétrocession et annoncer préalablement à toute rétrocession son intention de mettre en vente les fonds acquis par préemption ou à l'amiable" ; que la SAFER a motivé l'exercice de son droit de préemption "en fonction des objectifs suivants (art. L. 143-2 du code rural) : 2°) l'agrandissement et l'amélioration de la répartition parcellaire des exploitations existantes conformément à l'article L. 331-2 du code rural, et pour les motifs suivants : Parcelle située en zone NC1 du Plan d'Occupation des Sols de Grans. L'intervention de la SAFER permettrait de satisfaire des besoins d'agrandissement et/ou de restructuration parcellaire, après arbitrage entre les différentes candidatures agricoles locales, dans le respect des priorités du Schéma Directeur Départemental des Structures. Sans préjudice de la situation de l'acquéreur notifié, on peut citer le cas notamment d'un éleveur ovin et producteur de foin voisin, disposant d'une structure d'exploitation modeste représentant 0.44 Unité de Référence. La publicité d'appel de candidatures pourra révéler d'autres demandes qui seront alors examinées par les instances de la SAFER" ; que pour prétendre que la SAFER aurait commis un détournement de pouvoir, les époux X... soutiennent qu'elle a préempté pour satisfaire le projet de M. A... et ainsi le favoriser alors que son exploitation est éloignée de la parcelle litigieuse et qu'il avait amplement sollicité les époux Y... pour qu'ils lui cèdent cette parcelle ; que seule la légalité des opérations de rétrocession et non leur opportunité doit être contrôlée par le juge judiciaire ; que le fait que la SAFER ait évoqué au moment de l'exercice de son droit de préemption "le cas notamment d'un éleveur ovin et producteur de foin voisin, disposant d'une structure d'exploitation modeste représentant 0.44 Unité de Référence" qui le rendait identifiable et qui a finalement été retenu en la personne de M. A... pour la rétrocession, ne permet pas de caractériser le détournement de pouvoir allégué, alors que le choix du rétrocessionnaire n'était pas fait dès le stade de la préemption, et qu'il était expressément indiqué que l'appel de candidatures pourrait révéler d'autres demandes qui seraient alors examinées ; que les opérations de préemption et de rétrocession n'ont donc pas lieu d'être annulées et le jugement ayant rejeté les demandes des époux X... sera confirmé » (arrêt attaqué, pages 4 et 5) ;
Alors, premièrement, que le délai de deux mois imparti à la SAFER pour faire connaître sa décision quant à l'exercice de son droit de préemption n'interdit pas au propriétaire du bien rural de rétracter son offre de vente, lorsqu'elle constitue une simple pollicitation, ni de se prévaloir de la caducité de sa promesse de vendre, lorsque la réitération par acte authentique n'est pas intervenue à la date prévue au compromis ; que pour débouter les époux X... de leur demande de nullité de la préemption, l'arrêt retient que la SAFER, qui a été informée de la déclaration d'intention d'aliéner le 17 juillet 2008, disposait pour préempter d'un délai de deux mois au cours duquel la caducité du compromis ne pouvait lui être opposée, de sorte qu'en faisant connaître son intention de préempter par lettre recommandée avec accusé de réception présentée le 12 septembre 2008, la SAFER a régulièrement exercé son droit de préemption, nonobstant le fait que le compromis devait être réitéré au plus tard à cette date ; qu'en statuant ainsi, bien que la caducité du compromis de vente pût être opposée à la SAFER avant l'expiration du délai de deux mois prévu pour l'exercice de son droit de préemption, la cour d'appel a violé les articles L. 143-8 et L. 412-8 du code rural et de la pêche maritime ;
Alors, secondement, que lorsqu'un délai de validité du compromis a été convenu entre le vendeur et l'acquéreur évincé, l'exercice de son droit de préemption par la SAFER est sans effet si elle ne fait connaître sa décision de préempter qu'après que l'avant-contrat soit devenu caduc ; que pour débouter les époux X... de leur demande de nullité de la préemption, l'arrêt se borne à retenir que s'il était stipulé que le compromis devait être réitéré au plus tard le 12 septembre 2008, la SAFER a régulièrement exercé son droit de préemption à cette échéance, en faisant connaître son intention de préempter par lettre recommandée avec accusé de réception présentée le 12 septembre 2008 ; qu'en se déterminant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée, si la SAFER avait fait connaître sa décision de préempter avant que le vendeur n'exprime, dans un courrier daté du 12 septembre 2008, sa volonté de se prévaloir de la caducité du compromis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143-8 et L. 412-8 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-13188
Date de la décision : 20/05/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL - Préemption - Exercice - Délai de validité d'une offre de vente - Délai convenu entre le vendeur et l'acquéreur - Opposabilité à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (non)

SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL - Préemption - Exercice - Délai - Régularité - Portée

Le délai de validité d'un compromis convenu entre vendeur et acquéreur n'étant pas opposable à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) qui dispose d'un délai de deux mois pour préempter en application des articles R. 143-4 et R. 143-6 du code rural et de la pêche maritime, la procédure de préemption formalisée avant l'expiration de ce délai de deux mois est régulière, quand bien même le compromis n'aurait pas été réitéré et serait devenu caduc


Références :

articles L. 143-8, L. 412-8, R. 143-4 et R. 143-6 du code rural et de la pêche maritime

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 20 juin 2013

Sur l'inopposabilité du délai de validité d'un compromis de vente à l'exercice du droit de préemption d'une SAFER, à rapprocher :3e Civ., 20 septembre 2006, pourvoi n° 05-16991, Bull. 2006, III, n° 182 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 20 mai. 2015, pourvoi n°14-13188, Bull. civ. 2015 n°5,III,n°50
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015 n°5,III,n°50

Composition du Tribunal
Président : M. Terrier
Avocat général : M. Charpenel (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Dagneaux
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 26/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.13188
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