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09/12/2014 | FRANCE | N°12-87494

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 décembre 2014, 12-87494


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- La société River club,
- M. Mouras X...,
- Mme Djamila Y..., agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants de leurs enfants El Malik, Lina et Yassin X...,
- L'association Enfance et partage, parties civiles,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de GRENOBLE, en date du 24 octobre 2012, qui a renvoyé la première devant le tribunal correctionnel du chef d'homicide involontaire et a confirmé l'ordonnance d

e non-lieu rendue par le juge d'instruction pour MM. Didier Z..., Gérard A..., Gauti...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- La société River club,
- M. Mouras X...,
- Mme Djamila Y..., agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants de leurs enfants El Malik, Lina et Yassin X...,
- L'association Enfance et partage, parties civiles,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de GRENOBLE, en date du 24 octobre 2012, qui a renvoyé la première devant le tribunal correctionnel du chef d'homicide involontaire et a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction pour MM. Didier Z..., Gérard A..., Gautier B..., Loïc C...du chef d'homicide involontaire ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 28 octobre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président et conseiller rapporteur, MM. Beauvais, Straehli, conseillers de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de M. le conseiller GUÉRIN, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, de la société civile professionnelle ROCHETEAU et UZAN-SARANO, de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle DIDIER et PINET et de Me LE PRADO, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 1er août 2009, à l'Argentière-la-Bessé (Hautes-Alpes), au cours d'une activité de nage en eau vive organisée dans la Durance par la société River club, à laquelle se livrait un groupe de neuf mineurs âgés de 11 à 15 ans, qui était conduit par un moniteur en formation, M. D...
B..., et suivi par un maître nageur, M. Loic C..., Anissa X..., âgée de 11 ans, a été brusquement coincée par une barre de fer qui l'a immergée sans que le maître nageur puisse la saisir au passage ; que l'enfant a été dégagée par des rafteurs qui lui ont vainement pratiqué un massage cardiaque jusqu'à l'arrivée, environ 20 minutes plus tard, de secours qui la transportaient à l'hôpital où son décès était constaté ; qu'une information ayant été ouverte du chef, notamment, d'homicide involontaire, la société River club et son directeur, M. Didier Z..., étaient mis en examen, et M. Gérard A..., moniteur-coordinateur au sein de cet organisme, M. Gautier B...et M. Loïc C...étaient entendus en qualité de témoins assistés ; que le juge d'instruction a rendu le 8 mars 2012 une ordonnance de non-lieu dont ont interjeté appel le procureur de la République, les époux X... et l'association Enfance et partage ;

En cet état ;

Sur le moyen unique de cassation, proposé pour la société River club, pris de la violation des articles 121-2, 121-3 et 221-6 du code pénal, R. 227-13 du code de l'action sociale et des familles (dans sa rédaction issue du décret n° 2009-679 du 11 juin 2009), A. 322-43 à A. 322-52 du code du sport, 591 et 593 du code de procédure pénale, contradiction de motifs ;

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a ordonné le renvoi de la société River Club devant le tribunal correctionnel de Gap pour avoir, à l'Argentière-La-Bessée, le 1er août 2009, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, causé involontairement la mort d'Anissa X..., en l'espèce en ne procédant pas à un repérage préalable des lieux, rendant ainsi impossible la détection d'un obstacle dangereux ayant causé le décès de la victime ;

" aux motifs qu'en définitive l'instruction a permis d'établir que l'accident avait été causé exclusivement et directement par la présence d'une barre de fer en partie immergée dans l'eau, obstacle qui s'était vraisemblablement déplacée récemment car, à défaut, il n'aurait pas manqué d'être repéré la saison précédente (D 53, D 331, D 428, D 662) et même dans les jours précédant le drame par les nombreux utilisateurs de la rivière (D 333, D 334, D 335, D 338), ce qui n'avait pas été le cas en l'espèce ; qu'en outre, une opération de nettoyage de la rivière, réalisée avant l'accident à l'occasion du championnat de France de 2009, n'avait pas permis d'en déceler, ni même d'en suspecter, la présence (D 136, D 666) ; que l'origine même de cette barre de fer n'a pu être établie avec certitude, malgré les investigations entreprises dans le cadre de la procédure d'instruction ; qu'il s'agit probablement de l'élément d'un pont détruit à proximité dans les années 70, sans qu'il soit possible d'identifier la personne l'ayant déposée à cet endroit (D 102, D 348, D357, D658, D 659, D 664, D 663, D 670) ; que la présence de cette barre de fer ne peut donc être imputée aux organisateurs de la sortie en hydrospeed du 1er août 2009, dont le comportement n'a en conséquence pas causé directement le dommage, ni a quiconque ; qu'en revanche, l'instruction a permis d'établir que les crues de la Durance avaient régulièrement pour conséquence de modifier le lit de la rivière et de faire ressurgir aléatoirement des matériaux divers ; que la présence d'un obstacle dangereux à cet endroit n'était donc pas totalement imprévisible et ne peut donc caractériser un cas de force majeure, ce d'autant plus que les enquêteurs (D 342) ont constaté dans la zone de l'accident la présence dans l'eau de nombreuses branches formant autant d'obstacles susceptibles de constituer un danger pour la pratique des sports en eaux vives et que, par ailleurs, la barre, en partie émergée, était visible depuis la surface (D 46, D 47, D 150) ; que dès lors, le non repérage de la barre à l'origine de l'accident, lui-même consécutif à l'absence fautive de reconnaissance préalable des lieux, constitue une cause indirecte du dommage ; que cette faute, en lien avec le dommage relève de la responsabilité de la personne morale EURL River Club dont l'organisation défaillante n'a pas permis d'inclure la prévention du risque résultant des changements de configuration de la rivière et de l'apparition subséquente d'obstacles dangereux pour la nage en eaux vives qu'en effet, par son abstention de repérage systématique et préalable des lieux, I'EURL River Club a contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'a pas permis de l'éviter ; que toutefois, il n'apparaît pas que cette absence de repérage constitue à l'encontre des personnes physiques impliquée dans l'organisation de la sortie, une faute caractérisée ayant exposé autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer ; qu'en effet, le caractère aléatoire du surgissement dans le cours d'eau d'un élément de pont détruit de nombreuses années auparavant, ne leur permettait pas de connaître avec suffisamment de certitude la réalité et la gravité du risque auquel elles exposaient de jeunes enfants ; qu'en conséquence, il convient :- infirmant partiellement la décision du magistrat instructeur en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à suivre contre I'EURL River Club, d'ordonner le renvoi de l'EURL River Club devant le tribunal correctionnel de Gap du chef d'homicide involontaire par personne morale sur Anissa X... ;- de confirmer l'ordonnance du magistrat instructeur pour le surplus ;

" 1°) alors que les personnes morales ne sont responsables pénalement que des infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants ; qu'au cas d'espèce, en estimant qu'il existait contre l'EURL River Club des charges suffisantes tendant à lui imputer un homicide involontaire par la commission d'une faute ayant constitué une cause indirecte du dommage, tenant à l'absence de repérage de la barre en fer à l'origine de l'accident, sans donner aucune explication sur la ou les personnes physiques, ayant la qualité d'organe ou de représentant de la personne morale, qui se serait matériellement rendue coupable de cette abstention, quand une telle identification est une condition nécessaire, non seulement à la caractérisation du délit, mais en amont au renvoi de la personne morale devant la juridiction correctionnelle, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

" 2°) alors que les juges du fond ont constaté qu'il résultait de l'instruction que la barre de fer à l'origine de l'accident n'avait pas été repérée la saison précédente, ni même dans les jours précédant le drame par les nombreux utilisateurs de la rivière et qu'en outre, une opération de nettoyage de celle-ci avait été réalisée à l'occasion du championnat de France qui s'était déroulé la même année et n'avait permis ni de déceler, ni de suspecter la présence de cet objet, dont l'origine même n'avait pu être établie avec certitude malgré les investigations mises en oeuvre ; qu'en retenant dans le même temps que la présence de cet obstacle à cet endroit n'était pas totalement imprévisible et aurait pu faire l'objet d'un repérage utile avant l'accident, la chambre de l'instruction, qui a statué par des motifs contradictoires, a de nouveau violé les textes susvisés ;

" 3°) alors que les normes applicables à la pratique de la nage en eau vive, en particulier les articles A. 322-43 à A. 322-52 du code du sport, ne prévoient en aucune manière une obligation de repérage systématique et préalable des lieux par l'organisateur d'une sortie en rivière de type « hydrospeed » comme au cas d'espèce ; qu'en retenant qu'il existait à la charge de l'EURL River Club des éléments suffisants de nature à justifier son renvoi devant la juridiction correctionnelle du chef d'homicide involontaire, pour avoir indirectement contribué à la réalisation du dommage en méconnaissant son obligation de repérage systématique et préalable des lieux, sans s'expliquer sur l'origine d'une telle obligation à la charge de la personne morale, la chambre de l'instruction n'a en toute hypothèse pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés " ;

Attendu que le moyen se borne à critiquer les énonciations de l'arrêt relatives aux charges que la chambre de l'instruction a retenues contre la prévenue ; que ces énonciations ne présentant aucune disposition que le tribunal saisi de la poursuite n'aurait pas le pouvoir de modifier, le moyen est irrecevable en application de l'article 574 du code de procédure pénale ;

Mais sur le premier moyen de cassation proposé pour M. Mourad X..., Mme Djamila Y...et l'association Enfance et partage, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-3, 111-5, 121-2, 121-3, 221-6 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre à l'encontre de M. Z..., M. A..., M. B...et M. C...pour homicide involontaire par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité imposée par la loi ou le règlement ;

" aux motifs que sur l'existence d'un manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ayant pu provoquer le décès d'Anissa X..., c'est à tort que le ministère public et les parties civiles estiment que les responsabilités susceptibles d'être imputées aux différents intervenants à la sortie du 1er août 2009 devraient être analysées au regard de l'arrêté préfectoral des Hautes Alpes en date du 19 mai 1993 ; qu'en effet en droit, si une réglementation préfectorale peut aggraver, dans un sens plus restrictif, des mesures réglementaires prises au plan national, ce n'est qu'à la condition que les circonstances locales la justifient ; qu'en l'espèce, il n'existe aucune particularité géographique du département des Hautes Alpes, notamment par rapport aux autres départements alpins ou pyrénéens, qui justifie une prééminence de l'arrêté préfectoral du 19 mai 1993 sur l'arrêté ministériel du 4 mai 1995 et sur la législation nationale postérieure ; que d'ailleurs, l'abrogation officielle de l'arrêté préfectoral du 19 mai 1993 par le préfet des Hautes Alpes le 18 novembre 2009 confirme l'absence de circonstances locales justifiant une réglementation spécifique aux Hautes Alpes postérieurement au 4 mai 1995, d'où il suit que cet arrêté préfectoral était caduc à partir de cette date ; qu'en effet, il ne peut être sérieusement soutenu que des modifications substantielles de la géographie des Hautes Alpes aient pu justifier une règlementation plus sévère entre 1993 et 2009 qu'entre 2009 et aujourd'hui ; qu'enfin, le ministère public lui-même reconnaît dans ses réquisitions (D942) que l'autorité administrative estimait caduc et inapplicable aux faits de l'espèce l'arrêté préfectoral du 19 mai 1993 (D171) ; qu'il serait dès lors paradoxal, et contraire au principe de légalité posé par les articles 111-3 du code pénal et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, d'asseoir une infraction pénale sur la méconnaissance d'une réglementation dont l'administration chargée de la faire respecter estime elle-même qu'elle est abrogée ; qu'il convient dès lors de se référer, pour apprécier la réglementation applicable à la sortie du 1er août 2009, au seul article R227-13 du code de l'action sociale et des familles, lequel précise : " lorsque l'organisateur d'une activité sportive proposée dans le cadre d'un accueil collectif de mineurs relève d'un prestataire, qui agit par contrat avec I'organisateur du séjour, ce sont alors les dispositions réglementaires relatives aux établissements d'activités physiques et sportives régies par le code du sport qui s'appliquent " ; qu'en effet, la ville d'Etampes ayant fait appel, dans le cadre d'un séjour de vacances et par contrat, au prestataire de service EURL River Club, c'est bien dans le cadre de ce texte, renvoyant aux dispositions générales des articles A322-43 à A322-52 du code du sport, qu'il convient d'analyser les responsabilités susceptibles d'être imputées aux différents intervenants à l'activité d'hydro-speed le jour du drame ;

" 1°) alors qu'une exception d'illégalité d'un acte administratif doit être présentée avant toute défense au fond ; qu'il ne résulte pas des conclusions ni des pièces de la procédure que la société River Club ni MM. Z..., A..., B..., C...ont soulevé, avant toute défense au fond, l'exception d'illégalité de l'arrêté préfectoral du 19 mai 1993 ; qu'en écartant néanmoins l'arrêté du 19 mai 1993, la chambre de l'instruction qui a ainsi statué sur une exception qui n'était pas soulevée devant elle avant toute défense au fond, a méconnu les dispositions précitées ;

" 2°) alors que lorsqu'une disposition législative, support légal d'une incrimination, demeure en vigueur, l'abrogation de textes réglementaires pris pour son application n'a pas d'effet rétroactif ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'arrêté préfectoral du 19 mai 1993 n'a été expressément abrogé que par un arrêté préfectoral du 18 novembre 2009, soit postérieurement à la date des faits commis le 1er août 2009 ; que la chambre de l'instruction a estimé que l'abrogation rétroagissait au 4 mai 1995 et a écarté l'application aux faits de l'arrêté préfectoral du 19 mai 1993 ; qu'en se prononçant ainsi tandis que les faits ont été commis avant l'entrée en vigueur de l'arrêté du 18 novembre 2009 et que la disposition législative, support légal de l'infraction d'homicide involontaire, n'a pas été modifiée, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

" 3°) alors qu'en tout état de cause, le pouvoir en vertu duquel le ministre de la jeunesse et des sports réglemente l'activité de la nage en eaux vives sur l'ensemble du territoire national, n'ôte pas au préfet le pouvoir de rendre cette réglementation plus restrictive dans le département des Hautes-Alpes ; que l'arrêté préfectoral du 19 mai 1993 relatif à la pratique de la nage en eaux vives dans le département des Hautes Alpes comporte des règles de sécurité spécialement applicables à ce département dérogeant aux règles de l'arrêté ministériel du 4 mai 1995 relatif aux garanties de technique et de sécurité dans les établissements organisant la pratique ou l'enseignement de la nage en eau vive, du canoë, du kayak, du raft ainsi que de la navigation à l'aide de toute autre embarcation propulsée à la pagaie sur l'ensemble du territoire national ; qu'en considérant que l'arrêté du 4 mai 1995 avait implicitement abrogé l'arrêté du 19 mai 1993, la chambre de l'instruction a méconnu la règle selon laquelle le pouvoir de police exercé par le ministre sur l'ensemble du territoire français ne prive pas le préfet de la possibilité d'user des pouvoirs de police pour assurer la sécurité publique sur sa circonscription ;

" 4°) alors qu'une réglementation postérieure n'en abroge implicitement une antérieure que si ses dispositions sont incompatibles avec les précédentes ; que les parties civiles faisaient ainsi valoir dans leur mémoire régulièrement déposé que le respect des mesures prescrites par l'arrêté du 19 mai 1993 entraînait nécessairement le respect de celles prévues par l'arrêté du 4 mai 1995 moins contraignant ; qu'en se bornant à énoncer qu'aucune particularité géographique ne justifiait une prééminence de l'arrêté préfectoral du 19 mai 1993 sur l'arrêté du 4 mai 1995, la chambre de l'instruction n'a pas répondu à cet argument péremptoire et n'a pas légalement justifié sa décision ;

" 5°) alors qu'il découle du principe de légalité des délits et des peines que seuls les textes législatifs ou réglementaires fixent le champ d'application des dispositions pénales ; que l'opinion d'une autorité administrative ne peut pas modifier les conditions d'application prévues par les lois en vigueur ; qu'en énonçant que l'arrêté du 19 mai 1993 était caduc en raison de l'opinion de l'autorité administrative estimant inapplicable aux faits de l'espèce cet arrêté, la chambre de l'instruction a méconnu les dispositions susvisées et le principe de légalité " ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'avant de confirmer l'ordonnance de non-lieu en ce qui concerne MM. Z..., A..., B...et C..., l " arrêt retient, par les motifs repris au moyen, que les responsabilités susceptibles d'être imputées aux différents intervenants à l'activité de nage en eau vive du 1er août 2009 ne doivent pas être analysées au regard de l'arrêté préfectoral en date du 19 mai 1993, ayant pour objet les mesures de sécurité applicables lors de l'utilisation des cours d'eau du département des Hautes-Alpes, devenu caduc en raison de l'entrée en vigueur d'un arrêté ministériel du 4 mai 1995 ; que les juges ajoutent qu'il ne peut être sérieusement soutenu que les modifications substantielles de la géographie des Hautes-Alpes aient pu justifier une réglementation plus sévère entre 1993 et 2009 que depuis 2009 ;

Mais attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui excluent l'application des dispositions spéciales de l'arrêté, en date du 19 mai 1993, du préfet des Hautes-Alpes, qui n'a été abrogé que le 18 novembre 2009, soit après la survenance de l'accident, sans expliquer en quoi les règles plus strictes qu'il édictait avaient un caractère incompatible avec celles fixées par la réglementation nationale applicable aux établissements organisant la pratique et l'enseignement de la nage en eau vive, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de cassation proposés :

I-Sur le pourvoi formé par la société River club :

Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;

Sur les autres pourvois :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Grenoble, en date du 24 octobre 2012, en ses seules dispositions confirmant l'ordonnance de non-lieu concernant MM. Didier Z..., Gérard A..., Gautier B..., LoÏc C..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Chambéry, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Grenoble et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le neuf décembre deux mille quatorze ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-87494
Date de la décision : 09/12/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

LOIS ET REGLEMENTS - Arrêté ministériel - Arrêté préfectoral antérieur non expressément abrogé - Abrogation implicite - Conditions - Réglementation nouvelle - Caractère incompatible - Détermination - Nécessité

L'application d'un arrêté préfectoral non abrogé relatif à la nage en eau vive ne peut, nonobstant l'entrée en vigueur d'un arrêté ministériel applicable aux établissements organisant la nage en eau vive, être exclue sans que le juge explique en quoi les règles plus strictes qu'il édicte sont incompatibles avec la réglementation nationale


Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Grenoble, 24 octobre 2012

Sur l'abrogation implicite d'un texte réglementaire par une réglementation nouvelle si ses dispositions sont incompatibles avec les précédentes et rendent impossible leur maintien en vigueur, à rapprocher :Crim., 23 juin 1993, pourvoi n° 92-81909, Bull. crim. 1993, n° 221 (3) (cassation sans renvoi). Sur le caractère permanent des arrêtés ou règlements pris par l'autorité compétente tant qu'ils n'ont pas été rapportés ou qu'ils ne sont pas devenus inconciliables avec les règles édictées par une disposition nouvelle, à rapprocher :Crim., 9 juillet 2003, pourvoi n° 03-82119, Bull. crim. 2003, n° 138 (2) (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 déc. 2014, pourvoi n°12-87494, Bull. crim. criminel 2014, n° 257
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2014, n° 257

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président et rapporteur)
Avocat général : Mme Le Dimna
Rapporteur ?: M. Guérin
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Didier et Pinet, SCP Piwnica et Molinié, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.87494
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