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08/07/2014 | FRANCE | N°13-18390

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juillet 2014, 13-18390


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 avril 2013), que le 22 novembre 2006, un accord collectif sur le travail de nuit dans les magasins ouvrant à la clientèle jusqu'à 22 heures a été signé au sein de l'UES Monoprix ; que le 31 juillet 2009, un avenant à l'accord collectif initial a été conclu ; que le syndicat CGT commerce distribution services a saisi le tribunal de grande instance pour qu'il soit constaté que l'accord de 2006 et son avenant de 2009 étaient nuls et de nul effet

en raison de l'opposition qu'il avait régulièrement formée à l'ent...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 avril 2013), que le 22 novembre 2006, un accord collectif sur le travail de nuit dans les magasins ouvrant à la clientèle jusqu'à 22 heures a été signé au sein de l'UES Monoprix ; que le 31 juillet 2009, un avenant à l'accord collectif initial a été conclu ; que le syndicat CGT commerce distribution services a saisi le tribunal de grande instance pour qu'il soit constaté que l'accord de 2006 et son avenant de 2009 étaient nuls et de nul effet en raison de l'opposition qu'il avait régulièrement formée à l'entrée en vigueur de l'accord de 2006 le 23 novembre 2006 ;
Attendu que les sociétés composant l'UES Monoprix font grief à l'arrêt de dire que l'opposition formée par le syndicat CGT sur l'accord de 2006 était valable, et que l'accord et son avenant ne pouvaient en conséquence pas être mis en application, alors, selon le moyen :
1°/ que l'opposition du syndicat majoritaire à l'accord collectif qu'il n'a pas signé doit être notifiée à tous les signataires de l'accord sous peine d'irrecevabilité ; que cette opposition est irrecevable dès lors qu'elle n'a pas été notifiée aux délégués syndicaux qui ont effectivement signé, pour le syndicat, l'accord collectif ; que la cour d'appel a constaté que l'accord du 20 novembre 2006 avait été signé, pour la CFDT, par Mme Y... et Mme Z... et, pour la CFTC, par Mme A... ; que la cour d'appel qui relevé que la preuve d'une notification de l'opposition de la CGT à Mme Z... n'était pas rapportée ; qu'en jugeant néanmoins régulière l'opposition de la CGT, au motif que l'opposition avait été notifiée au siège de la CFDT, tandis que cette opposition n'avait pas été notifiée à l'ensemble des signataires de l'accord, la cour d'appel a violé l'article L. 132-2-2 du code du travail, en sa rédaction applicable en l'espèce ;
2°/ qu'un syndicat a été représenté par plus d'un délégué pour la signature d'un accord collectif du travail, l'opposition du syndicat majoritaire à l'accord collectif qu'il n'a pas signé, qui doit être notifiée à tous les signataires de l'accord personnellement à peine d'irrecevabilité, doit être notifiée à tous les délégués syndicataires, quand bien même ceux-ci seraient intervenus pour le même syndicat; que la cour d'appel a constaté que l'accord du 20 novembre 2006 avait été signé, pour la CFDT, par Mmes Y... et Z... ; qu'elle a relevé que la preuve d'une notification de l'opposition de la CGT à Mme Z... n'était pas rapportée ; qu'en jugeant néanmoins régulière l'opposition de la CGT, au motif que le défaut de remise de l'opposition à Mme Z..., qui était l'une des deux signataires CFDT, n'avait aucune incidence sur la validité de l'opposition, la cour d'appel a violé l'article L. 132-2-2 du code du travail, en sa rédaction applicable en l'espèce ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 2231-8 du code du travail dans sa rédaction alors applicable que l'opposition à un accord collectif, pour être régulière, doit être notifiée aux signataires de cet accord, donc à chacune des organisations syndicales ayant signé l'accord ; qu'il en résulte que la notification est régulière dès lors qu'elle est adressée, dans les délais, soit à l'un des délégués syndicaux ayant représenté le syndicat signataire à la négociation de l'accord, soit directement à l'organisation syndicale représentative l'ayant désigné ;
Et attendu que la cour d'appel a constaté que le syndicat CFDT avait été régulièrement destinataire de l'opposition formée par le syndicat CGT par la notification effectuée à l'un de ses deux délégués syndicaux ayant participé à la signature de l'accord ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés demanderesses aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne in solidum à payer à la fédération CGT commerce distribution services la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour les sociétés Monoprix, Monoprix exploitation, LRMD, Aux Galeries de la Croisette et SMC et Cie.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit non écrits l'accord du 20 novembre 2006 et l'avenant du 31 juillet 2009, d'avoir par conséquent fait interdiction aux sociétés de l'UES Monoprix de mettre en oeuvre ces accords, sous peine d'astreinte, et d'avoir condamné les sociétés de l'UES Monoprix à payer au syndicat CGT commerce distribution services la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts ; AUX MOTIFS QUE, sur l'opposition formée à l'accord du 22 novembre 2006, l'accord collectif du 22 novembre 2006 sur le travail de nuit dans les magasins ouvrant à la clientèle jusqu'à 22 heures et au siège social a été signé par la direction et par Mmes Z... et Y... pour la CFDT et Mme A... pour la CFTC ; qu'il n'est pas contesté que la CGT était syndicat majoritaire et n'a pas signé cet accord ; que selon l'article 2232-12 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce, soit antérieure à la loi du 20 août 2008, l'accord collectif qui n'est pas signé par un des syndicats majoritaires n'est valable qu'à défaut d'opposition exprimée dans un délai de 8 jours à compter de la date de notification de cet accord ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le syndicat CGT a effectivement fait une opposition motivée dans le délai de 8 jours qui lui était ouvert, l'opposition ayant été formée le 23 novembre ; que les sociétés de l'UES Monoprix soutiennent que cette opposition n'a pas été valablement faite puisqu'elle n'a pas été adressée à l'ensemble des parties signataires ; qu'il est justifié par les pièces du dossier que la fédération CGT a adressé son opposition dans le délai de 8 jours à la direction de l'entreprise, au ministère du travail, au siège du syndicat CFDT services, à Mme Y..., au siège de la CFTC force de ventes, à Mme A... ; que si la CGT produit une copie du courrier adressé à Mme Z..., elle ne peut produire le justificatif de l'envoi ; que cependant, ce seul manquement dans les notifications de l'opposition ne peut la rendre irrecevable ; qu'en effet, tant la direction que les deux syndicats signataires ont été régulièrement informés de l'opposition ; que Mme Y... pour la CFDT l'a également été ; que Mme A..., pour la CFTC, a écrit à l'employeur qu'elle n'avait pas reçu l'opposition, mais la fédération CGT produit un accusé de réception qui, s'il n'est pas parfaitement lisible, permet de vérifier que le courrier adressé à la déléguée syndicale à un magasin Monoprix de Caen a été remis le 27 novembre à une personne qui a estimé pouvoir recevoir ce pli ; que le défaut de remise de l'opposition à Mme B..., qui était une des deux signataires CFDT, n'a donc aucune incidence sur la validité de l'opposition ; que le jugement qui a considéré que l'opposition formée par la fédération CGT à l'accord signé le 22 novembre 2006 était valable et que, dès lors, cet accord était réputé non écrit, sera confirmé sur ce point ; que sur l'avenant signé le 31 juillet 2009, les sociétés de l'UES du groupe Monoprix ayant considéré que l'opposition formée par la CGT était irrecevable, ont fait application de l'accord du 22 novembre 2006 et ont négocié avec les organisations syndicales un avenant sur le travail de nuit en date du 31 juillet 2009 ; que cet avenant à un accord réputé non écrit n'avait aucune effectivité ; qu'il sera cependant relevé à toutes fins utiles qu'il a été signé par la direction de l'entreprise, le syndicat CFDT et le syndicat CGC ; que notifié le 7 septembre 2009, il a fait l'objet d'une opposition motivée par la CGT le 10 septembre 2009 ; que la fédération CGT justifie de ce qu'elle a régulièrement notifié son opposition à la direction de Monoprix, au syndicat CGC, au syndicat CFDT, à Mme Y..., signataire de l'accord pour la CFDT, et à Mme C..., signataire de l'accord pour la CGC ; qu'en tout état de cause, cet avenant est également réputé non écrit puisqu'ayant été frappé d'opposition dans les termes fixés par les articles L 2231-8 et 2231-9 du code du travail ainsi que L 2232-12, dans leur rédaction postérieure à la loi du 20 août 2008 ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, sur l'opposition à l'accord du 20 novembre 2006, l'article L 2231-9 du code du travail (comme avant lui l'article L132-2-2 V al 2) dispose que les conventions ou accords frappés d'opposition majoritaire, ainsi que ceux qui n'ont pas obtenu l'approbation de la majorité des salariés, sont réputés non écrits ; que l'opposition est exprimée par écrit et motivée ; qu'elle est notifiée aux signataires dans un délai de 8 jours à compter de la notification de l'accord ; que les signataires s'entendent aussi bien des organisations syndicales que des personnes physiques représentant ces organisations ; que l'accord signé le 20 novembre 2006 a fait l'objet d'une opposition de la CGT par lettre du 23 novembre 2006 postée le 24 novembre 2006 aux organisations syndicales dont la CFDT, la CFTC, à Monoprix, ainsi qu'aux signataires de l'accord Mlle Y..., Mme Z..., Mme A... ; que par application de l'article 668 du code de procédure civile, la date de notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition ; que, par suite, la date de signature de l'accusé de réception n'a pas d'influence sur la date de la notification, pas plus que la production de l'AR ; que dès lors Monoprix n'est pas en droit de prétendre que la notification aurait été faire hors délai ou n'aurait pas été faite à toutes les parties ; que le droit d'opposition est motivé en ce que l'accord permettrait à Monoprix d'ouvrir n'importe quel magasin de nuit et en ce que les contreparties financières sont insuffisantes ; que par suite c'est à bon droit que la CGT soutient que l'accord est réputé non écrit ; que sur l'avenant du 31 juillet 2009, Monoprix ne conteste même pas la validité de l'opposition, se bornant à prétendre que l'avenant suivrait le régime de l'accord de 2006 ; que l'accord est réputé non écrit et il en est de même de l'avenant ; 1°) ALORS QUE l'opposition du syndicat majoritaire à l'accord collectif qu'il n'a pas signé doit être notifiée à tous les signataires de l'accord, à peine d'irrecevabilité ; que cette opposition est irrecevable dès lors qu'elle n'a pas été notifiée aux délégués syndicaux qui ont effectivement signé, pour le syndicat, l'accord collectif ; que la cour d'appel a constaté que l'accord du 20 novembre 2006 avait été signé, pour la CFDT, par Mmes Patricia Y... et Christine Z... et, pour la CFTC, par Mme Chantal A... ; que la cour d'appel a relevé que la preuve d'une notification de l'opposition de la CGT à Mme Z... n'était pas rapportée ; qu'en jugeant néanmoins régulière l'opposition de la CGT, au motif que l'opposition avait été notifiée au siège de la CFDT, tandis que cette opposition n'avait pas été notifiée à l'ensemble des signataires de l'accord, la cour d'appel a violé l'article L.132-2-2 du code du travail, en sa rédaction applicable en l'espèce ; 2°) ALORS QUE dès lors qu'un syndicat a été représenté par plus d'un délégué pour la signature d'un accord collectif du travail, l'opposition du syndicat majoritaire à l'accord collectif qu'il n'a pas signé, qui doit être notifiée à tous les signataires de l'accord personnellement à peine d'irrecevabilité, doit être notifiée à tous les délégués signataires, quand bien même ceux-ci seraient intervenus pour le même syndicat ; que la cour d'appel a constaté que l'accord du 20 novembre 2006 avait été signé, pour la CFDT, par Mmes Patricia Y... et Christine Z... ; qu'elle a relevé que la preuve d'une notification de l'opposition de la CGT à Mme Z... n'était pas rapportée ; qu'en jugeant néanmoins régulière l'opposition de la CGT, au motif que le défaut de remise de l'opposition à Mme Z..., qui était l'une des deux signataires CFDT, n'avait aucune incidence sur la validité de l'opposition, la cour d'appel a violé l'article L.132-2-2 du code du travail, en sa rédaction applicable en l'espèce.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-18390
Date de la décision : 08/07/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Entrée en vigueur - Opposition - Notification - Destinataires - Détermination - Portée

Selon l'article L. 2231-8 du code du travail, l'opposition à un accord collectif, pour être régulière, doit être notifiée aux signataires de cet accord, donc à chacune des organisations syndicales ayant signé l'accord. Il en résulte que la notification est régulière dès lors qu'elle est adressée, dans les délais, soit à l'un des délégués syndicaux ayant représenté le syndicat signataire à la négociation de l'accord, soit directement à l'organisation syndicale représentative l'ayant désigné. Doit par conséquent être approuvée la cour d'appel qui a dit l'opposition régulière dès lors qu'un syndicat signataire avait été régulièrement destinataire de cette opposition par la notification effectuée à l'un de ses deux délégués syndicaux ayant participé à la signature de l'accord


Références :

article L. 2231-8 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 02 avril 2013

Sur la notification de l'opposition aux signataires de l'accord, à rapprocher:Soc., 9 février 1994, pourvoi n° 91-14580, Bull. 1994, V, n° 49 (rejet) ;Soc., 20 mars 1996, pourvoi n° 93-40939, Bull. 1996, V, n° 103 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2014, pourvoi n°13-18390, Bull. civ. 2014, V, n° 182
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, V, n° 182

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Lalande
Rapporteur ?: Mme Pécaut-Rivolier
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.18390
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