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05/06/2014 | FRANCE | N°13-16053

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 juin 2014, 13-16053


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 7 février 2013), que la société Capstone systems industry (la société Capstone) a acquis de la société Inalt un ensemble immobilier aux termes d'un acte notarié contenant l'obligation, assortie d'une clause pénale, de libérer les lieux à une certaine date ; que faute pour cette dernière société d'avoir libéré les lieux à la date convenue, la société Capstone a fait pratiquer sur le fondement de cet acte authentique deux sais

ies de droits d'associés et de valeurs mobilières au préjudice de la société Inalt...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 7 février 2013), que la société Capstone systems industry (la société Capstone) a acquis de la société Inalt un ensemble immobilier aux termes d'un acte notarié contenant l'obligation, assortie d'une clause pénale, de libérer les lieux à une certaine date ; que faute pour cette dernière société d'avoir libéré les lieux à la date convenue, la société Capstone a fait pratiquer sur le fondement de cet acte authentique deux saisies de droits d'associés et de valeurs mobilières au préjudice de la société Inalt, qui a contesté ces mesures ;
Attendu que la société Capstone fait grief à l'arrêt de prononcer la réduction de la clause pénale à hauteur de moitié, de déclarer la société Inalt redevable au titre de la clause pénale des seules sommes de 194 500 euros pour la période du 1er juin 2009 au 24 juin 2010 et de 90 000 euros pour la période du 25 juin 2010 au 21 décembre 2010 et en conséquence de cantonner les effets de la saisie des droits d'associé et de valeurs mobilières du 25 juin 2010 à la somme de 251 228,12 euros en principal, intérêts et frais et ceux de la saisie du 23 décembre 2010 à la somme de 144 112,50 euros en principal, intérêts et frais, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il n'appartient pas au juge de l'exécution de modifier la clause pénale ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire par fausse application ;
2°/ que le juge qui modère la peine qu'il prononce au titre de la clause pénale ne peut allouer une somme inférieure au montant du dommage éventuellement subi par le créancier ; qu'en réduisant de moitié la clause pénale contractuellement stipulée entre la société Inalt et la société Capstone, quand ses propres constatations établissaient que la valeur locative des biens en cause était supérieure à la clause pénale journalière contractuellement stipulée, ce dont il résultait que le montant de la clause pénale était d'ores et déjà inférieur au préjudice éventuellement subi et ne pouvait être excessif, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi l'article 1152, alinéa 2, du code civil par fausse application ;
3°/ que le caractère excessif du montant de la clause pénale résulte de la disproportion manifeste entre l'importance du préjudice subi et le montant conventionnellement fixé ; qu'en jugeant excessive la clause pénale sans établir le montant du préjudice subi par la société Capstone , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152, alinéa 2, du code civil ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît de manière exclusive des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée même si elles portent sur le fond du droit ; que c'est à bon droit que la cour d'appel, saisie de l'appel du jugement d'un juge de l'exécution, a retenu sa compétence pour statuer sur la demande de modération de la clause pénale contenue dans l'acte notarié fondant les poursuites ;
Et attendu qu'ayant relevé que si la renonciation de la société Capstone au bénéfice de la clause pénale ne pouvait être considérée comme établie, il y avait eu des projets d'accord entre les parties à cette fin, qu'il ne pouvait non plus être méconnu que l'occupation des lieux par la société Inalt s'inscrivait dans le cadre de relations plus larges entre les parties et de projets communs, que la société Capstone ne démontrait pas que, sans l'occupation des lieux par la société Inalt, elle aurait pu mener des projets d'utilisation à bonne fin desdits locaux, ces projets n'ayant échoué que du fait de cette occupation, qu'elle ne justifiait de la conclusion d'un accord qu'en octobre 2011, soit plusieurs mois après la libération des lieux subordonnée encore à un accord des parties sur l'ensemble des clauses du bail, qu'elle ne précisait pas et a fortiori ne démontrait pas ce qu'il était actuellement advenu de ce bien depuis l'expulsion de la société Inalt, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié le caractère excessif de la clause pénale et sa réduction à hauteur de moitié, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Capstone systems industry aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Capstone systems industry ; la condamne à payer à la société Inalt la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Capstone systems industry
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la réduction de la clause pénale à hauteur de moitié, d'AVOIR déclaré la société INALT redevable au titre de la clause pénale des seules sommes de 194.500 € pour la période du 1er juin 2009 au 24 juin 2010 et de 90.000 € pour la période du 25 juin 2010 au 21 décembre 2010 et d'AVOIR en conséquence cantonné les effets de la saisie des droits d'associé et de valeurs mobilières du 25 juin 2010 à la somme de 251.228,12 € en principal, intérêts et frais et ceux de la saisie du 23 décembre 2010 à la somme de 144.112,50 € en principal, intérêts et frais ; AUX MOTIFS QU'« il n'est pas contesté que la clause litigieuse constitue une clause pénale ; qu'en vertu des dispositions de l'article 1152 du code civil, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire, toute stipulation contraire étant réputée non écrite ; que rien ne s'oppose à ce que le juge de l'exécution statue sur une demande à cette fin dès lors qu'en vertu de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, il connaît de manière exclusive des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; qu'en vain la SCI INALT fait valoir qu'elle n'occupait que partiellement les lieux dès lors que la société CAPSTONE SYSTEMS INDUSTRY affirme sans être démentie qu'elle a disposé des clés de l'ensemble des locaux jusqu'au 22 décembre 2011 ; qu'en tout état de cause, une occupation même partielle constitue un obstacle à la libre disposition de son bien par le propriétaire ; qu'il apparaît certes, au vu des prix habituellement pratiqués, que la valeur locative des biens en cause est supérieure à la clause pénale journalière contractuellement stipulée mais qu'il ne saurait être contesté que si la renonciation de la société CAPSTONE SYSTEMS INDUSTRY au bénéfice de la clause pénale ne peut être considérée comme établie, il y a eu des projets d'accord entre les parties à cette fin ; qu'il ne peut non plus être méconnu que l'occupation des lieux par la SCI INALT s'inscrivait dans le cadre de relations plus larges entre les parties et de projets communs ; qu'enfin la société CAPSTONE SYSTEMS INDUSTRY ne démontre pas que sans l'occupation des lieux par la SCI INALT, elle aurait pu mener des projets d'utilisation à bonne fin desdits locaux, ces projets n'ayant échoué que du fait de cette occupation ; qu'elle ne justifie de la conclusion d'un accord qu'en octobre 2011, soit plusieurs mois après la libération des lieux, subordonné encore à un accord des parties sur l'ensemble des clauses du bail ; qu'elle ne précise pas et a fortiori ne démontre pas ce qu'il est actuellement advenu de ce bien depuis l'expulsion de la SCI INALT ; que dans ces conditions, la clause pénale apparaît manifestement excessive et qu'elle doit être réduite de moitié » ;
1°) ALORS QU'il n'appartient pas au juge de l'exécution de modifier la clause pénale ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel violé l'article L. 213-6 du Code de l'organisation judiciaire par fausse application ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le juge qui modère la peine qu'il prononce au titre de la clause pénale ne peut allouer une somme inférieure au montant du dommage éventuellement subi par le créancier ; qu'en réduisant de moitié la clause pénale contractuellement stipulée entre la société INALT et la société CAPSTONE SYSTEMS INDUSTRY, quand ses propres constatations établissaient que la valeur locative des biens en cause était supérieure à la clause pénale journalière contractuellement stipulée, ce dont il résultait que le montant de la clause pénale était d'ores et déjà inférieur au préjudice éventuellement subi et ne pouvait être excessif, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi l'article 1152, alinéa 2 du Code civil par fausse application ; 3°) ALORS QU'en toute hypothèse, le caractère excessif du montant de la clause pénale résulte de la disproportion manifeste entre l'importance du préjudice subi et le montant conventionnellement fixé ; qu'en jugeant excessive la clause pénale sans établir le montant du préjudice subi par la société CAPSTONE SYSTEMS INDUSTRY, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152, alinéa 2, du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-16053
Date de la décision : 05/06/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

JUGE DE L'EXECUTION - Compétence - Difficultés relatives aux titres exécutoires - Demande de modération de la clause pénale contenue dans l'acte notarié fondant les poursuites

Il résulte de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire que le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit. Par suite, c'est à bon droit qu'une cour d'appel saisie de l'appel d'un jugement du juge de l'exécution retient sa compétence pour statuer sur la demande de modération de la clause pénale, contenue dans l'acte notarié fondant les poursuites


Références :

article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 07 février 2013

A rapprocher :Avis de la Cour de cassation, 16 juin 1995, n° 09-50.008, Bull. 1995, Avis n° 9 ;2e Civ., 18 juin 2009, pourvoi n° 08-10843, Bull. 2009, II, n° 165 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 jui. 2014, pourvoi n°13-16053, Bull. civ.Bull. 2014, II, n° 127
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2014, II, n° 127

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Mucchielli
Rapporteur ?: Mme Lemoine
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Bénabent et Jéhannin

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.16053
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