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04/02/2014 | FRANCE | N°12-29348

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 février 2014, 12-29348


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, que par contrat du 30 septembre 1997, la société Holding Financière Y... (la société HFS), qui avait créé un réseau de commercialisation de produits de boulangerie-pâtisserie, a concédé à M. et Mme X..., à titre personnel et en leur qualité de fondateurs de la société Franval, une sous-licence non exclusive de son savoir-faire et des droits d'exploitation de la marque " Le Pétrin Ribeirou " ; que la société Franval ayant décidé de quit

ter ce réseau, la société HFS a consenti à la résiliation du contrat pour le 1...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, que par contrat du 30 septembre 1997, la société Holding Financière Y... (la société HFS), qui avait créé un réseau de commercialisation de produits de boulangerie-pâtisserie, a concédé à M. et Mme X..., à titre personnel et en leur qualité de fondateurs de la société Franval, une sous-licence non exclusive de son savoir-faire et des droits d'exploitation de la marque " Le Pétrin Ribeirou " ; que la société Franval ayant décidé de quitter ce réseau, la société HFS a consenti à la résiliation du contrat pour le 16 avril 2006 ; que M. et Mme X... et les autres associés membres de la famille X... ont réuni le 11 mai 2006 une assemblée aux fins de modifier l'objet de la société Franval ; que la société SDPR, filiale de la société HFS, titulaire du solde du capital de la société Franval, s'est abstenue de participer à cette assemblée ; qu'un arrêt du 26 janvier 2012 a jugé irrévocablement que la société SDPR, aux droits de laquelle se trouve la société HFS, avait commis un abus de minorité en refusant de participer à cette assemblée ; qu'ultérieurement, la société Franval a fait assigner en référé la société HFS, ayant pour dirigeant M. Y..., afin que soit désigné un mandataire ad hoc, avec pour mission d'exercer le droit de vote en lieu et place de celle-ci à l'occasion d'une nouvelle assemblée extraordinaire à réunir dans les meilleurs délais et de voter en faveur de la modification de l'objet social ; que M. Y... est intervenu volontairement à l'instance ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société HFS et M. Y... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'intervention volontaire de ce dernier, alors, selon le moyen :
1°/ que l'intervention volontaire est subordonnée à la seule existence d'un intérêt pour celui qui la forme ; qu'en rejetant l'intervention volontaire de M. Y... pour des motifs inopérants et sans constater qu'il n'aurait aucun intérêt à intervenir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 330 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en retenant que le litige ne concernait nullement M. Y... à titre personnel, sans tenir compte, ainsi qu'il lui était demandé, de l'origine familiale de l'entreprise et de l'implication personnelle de M. Y... dans les affaires de la société, en sa qualité d'instigateur du mode d'organisation juridique des sociétés franchisées et du réseau à l'enseigne le Pétrin Ribeirou, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 330 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le litige opposant les sociétés Franval et HFS ne concernait pas M. Y... à titre personnel, ce dont il résultait que ce dernier n'avait pas d'intérêt à intervenir pour la conservation de ses droits, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu que la société HFS et M. Y... font grief à l'arrêt d'avoir désigné un mandataire ad hoc dans les termes de la mission confiée à ce dernier, alors, selon le moyen, qu'en se contentant de relever, pour retenir que le maintien de la référence au " Pétrin Ribeirou " dans les statuts de la société Franval constituait un trouble manifestement illicite, que le refus de la société HFS de voter la modification de l'objet statutaire de la société Franval empêchait celle-ci de fonctionner conformément à son objet réel existant depuis plus de six ans, sans préciser en quoi la société Franval avait été empêchée de fonctionner, la cour d'appel n'a pas caractérisé un trouble manifestement illicite et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 873 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le refus de la société HFS de voter en faveur de la modification de l'objet statutaire de la société Franval empêchait celle-ci de fonctionner conformément à son objet réel tel qu'il existait depuis plus de six ans, la cour d'appel, qui a caractérisé le trouble manifestement illicite qu'il convenait de faire cesser, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la première branche du moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur ce moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 873 du code de procédure civile ;
Attendu que le juge ne peut fixer le sens du vote du mandataire ad hoc désigné par lui ;
Attendu qu'en donnant au mandataire ad hoc mission de voter en faveur de la modification de l'objet de la société Franval, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a donné au mandataire ad hoc mission de voter en faveur de la modification de l'objet de la société Franval, l'arrêt rendu le 4 octobre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Infirme l'ordonnance de référé du 11 avril 2012, mais seulement en ce qu'elle a précisé que le mandataire qu'elle désignait serait tenu de voter pour la modification de l'objet de la société Franval ;
Dit que chaque partie conserve la charge de ses propres dépens, y compris ceux afférents aux instances devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Franval ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour la société Holding financière Y... et M. Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté l'intervention volontaire de Monsieur Y... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Monsieur Y... n'est autre que le gérant de la société HFS, et ce n'est qu'en cette qualité qu'il est mentionné par la société FRANVAL ; par suite l'ordonnance sera confirmée pour avoir rejeté son intervention volontaire dans un litige qui ne le concerne nullement à titre personnel » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « l'intervention volontaire de M. Y... Jean-Pierre alourdit les débats sans y apporter d'élément permettant au juge d'être mieux éclairé » ;
1°) ALORS QUE l'intervention volontaire est subordonnée à la seule existence d'un intérêt pour celui qui la forme ; qu'en rejetant l'intervention volontaire de Monsieur Y... pour des motifs inopérants et sans constater qu'il n'aurait aucun intérêt à intervenir, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 330 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en retenant que le litige ne concernait nullement Monsieur Y... à titre personnel, sans tenir compte, ainsi qu'il lui était demandé, de l'origine familiale de l'entreprise et de l'implication personnelle de Monsieur Y... dans les affaires de la société, en sa qualité d'instigateur du mode d'organisation juridique des sociétés franchisées et du réseau à l'enseigne le Pétrin Ribeirou, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 330 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit qu'il y avait urgence à voir stopper une situation néfaste pour la gestion sereine de la société Franval et désigné Maître Z... en qualité de mandataire ad hoc avec mission « d'exercer le droit de vote aux lieu et place de la société HFS, dans l'intérêt de la société Franval, de tenir une assemblée générale extraordinaire à réunir dans les meilleurs délais et dans le respect des statuts, en vue de voter dans le sens de décisions conformes à l'intérêt social, soit de voter pour la modification de l'objet social de la société Franval » ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Monsieur Y... n'est autre que le gérant de la société HFS, et ce n'est qu'en cette qualité qu'il est mentionné par la société FRANVAL ; par suite l'ordonnance sera confinée pour avoir rejeté son intervention volontaire dans un litige qui ne le concerne nullement à titre personnel ; que le pourvoi en cassation formé par la société HFS contre l'arrêt du 26 janvier 2012 n'est pas suspensif de l'exécution de celui-ci, notamment pour la partie du dispositif ayant invité la société FRANVAL à faire désigner d'urgence en référé un mandataire chargé de représenter la société HFS à l'occasion d'une nouvelle assemblée générale extraordinaire à réunir dans les meilleurs délais dans le respect des statuts, avec comme ordre du jour la modification de l'objet social ; que la règle de l'article 4 du Code de Procédure Pénale selon laquelle la mise en mouvement de l'action publique peut entraîner le sursis au jugement de l'action civile ou commerciale n'est pas applicable devant le juge des référés ; que c'est donc à bon droit que l'ordonnance a débouté la société HFS de sa demande de sursis à statuer fondée sur sa plainte avec constitution de partie civile du 2 août 2010 devant le Juge d'Instruction du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN ; que depuis le 17 avril 2006 la société FRANVAL ne fait plus partie du réseau de franchise LE PETRIN RIBEIROU, et ce dernier représenté par la société HFS a non seulement expressément contribué à cette séparation, mais aussi délibérément choisi de libérer tant cette franchisée que ses 2 associés à titre personnel de la clause de non-concurrence pesant sur eux " afin de leur permettre de continuer à exploiter toute activité se rapportant à la boulangerie traditionnelle " ; que par suite iI n'existe aucun motif justifiant que la société SDPR aujourd'hui la société HFS, bien qu'associée minoritaire de la société FRANVAL, s'oppose à la disparition dans l'article 2 alinéa 2 des statuts de cette société de toute référence au PETRIN RIBEIROU ; que le fait que la société FRANVAL ait quitté le réseau LE PETRIN RIBEIROU il y a plus de 6 ans n'exclut pas l'application de l'article 873 alinéa I du Code de Procédure Civile permettant hors tout cas d'urgence et " même en présence d'une contestation sérieuse " de " faire cesser un trouble manifestement illicite " tel que le maintien de la référence précitée ; que c'est par suite à juste titre qu'a été retenu un abus de minorité commis par la société HFS, laquelle par son refus de voter la modification de l'objet statutaire de la société FRANVAL empêche celle-ci de fonctionner conformément à son objet réel existant depuis plus de 6 ans ; qu'au surplus la première société n'a jamais reproché à la seconde une concurrence déloyale caractérisée par l'utilisation illicite du savoir-faire LE PETRIN RIBEIROU, ce qui signifie que la société FRANVAL exerce une activité de boulangerie distincte et différente de celle de la franchise LE PETRIN RIBEIROU ; que l'ordonnance est donc confirmée » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « l'intervention volontaire de M. Y... Jean-Pierre alourdit les débats sans y apporter d'élément permettant au juge d'être mieux éclairé ; qu'il résulte de l'arrêt avant-dire-droit de la Cour d'Appel d'Aix en Provence que le refus de participation de la société H. F. S. à l'Assemblée Générale l'a été dans le but de rendre impossible le fonctionnement de la SARL FRANVAL et d'éliminer un concurrent ; qu'il y a urgence qu'il soit statué conformément à l'arrêt de la Cour d'Appel ; qu'il apparaît que le litige opposant les parties nécessite l'intervention d'un mandant avant-dire-droit ; qu'il sera fait droit à la demande de la SARL FRANVAL concernant la désignation d'un mandataire ad hoc, à ses frais avancés » ;
1°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; qu'en retenant, pour juger le refus de la société HFS de voter la modification de l'objet statutaire constitutif d'un trouble manifestement illicite, que la société HFS n'avait jamais reproché à la société Franval une concurrence déloyale caractérisée par l'utilisation illicite du savoir-faire « Le Pétrin-Ribeirou », cependant que dans son mémoire ampliatif, déposé au soutien du pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 26 janvier 2012, régulièrement produit aux débats, la société HFS indiquait avoir engagé une procédure en contrefaçon et concurrence déloyale à l'encontre de la société Franval, la Cour d'appel a dénaturé le contenu du mémoire ampliatif de la société HFS, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
2°) ALORS QU'en se contenant de relever, pour retenir que le maintien de la référence au Pétrin Ribeirou dans les statuts de la société Franval constituait un trouble manifestement illicite, que le refus de la société HFS de voter la modification de l'objet statutaire de la société Franval empêchait celle-ci de fonctionner conformément à son objet réel existant depuis plus de 6 ans, sans préciser en quoi la société Franval avait été empêchée de fonctionner, la Cour d'appel n'a pas caractérisé un trouble manifestement illicite et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 873 du Code de procédure civile.
3°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, si le juge des référés a le pouvoir de prescrire les mesures qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite, notamment celle consistant à désigner un administrateur provisoire lorsque le fonctionnement normal de la société est paralysé, il ne saurait tout à la fois lui confier la mission d'exercer aux lieu et place d'un associé le droit de vote et lui imposer le sens de ce vote ; qu'en désignant Maître Z... en qualité de mandataire ad hoc avec mission d'exercer le droit de vote aux lieu et place de la société HFS, tout en imposant au mandataire de « voter pour la modification de l'objet social de la société Franval », la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article 873 du Code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-29348
Date de la décision : 04/02/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REFERE - Mesures conservatoires ou de remise en état - Trouble manifestement illicite - Applications diverses - Mandataire ad hoc - Désignation - Fixation concomitante du sens du vote (non)

Il résulte de l'article 873 du code de procédure civile que le juge ne peut fixer le sens du vote du mandataire ad hoc désigné par lui


Références :

article 873 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 04 octobre 2012

A rapprocher :Com., 9 mars 1993, pourvoi n° 91-14685, Bull. 1993, IV, n° 101 (3) (cassation) ;3e Civ., 16 décembre 2009, pourvoi n° 09-10209, Bull. 2009, III, n° 287 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 fév. 2014, pourvoi n°12-29348, Bull. civ. 2014, IV, n° 31
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, IV, n° 31

Composition du Tribunal
Président : M. Petit (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Debacq
Rapporteur ?: M. Fédou
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Bénabent et Jéhannin

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.29348
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