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23/01/2014 | FRANCE | N°12-27318

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 23 janvier 2014, 12-27318


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 5 décembre 2011), que les ayants droit de Mathieu X..., décédé le 23 mai 1990 d'un accident du travail jugé imputable à la faute inexcusable de son employeur la société Sogea par un arrêt du 6 juin 1994 qui a alloué à sa veuve une rente majorée de conjoint survivant ont introduit le 18 septembre 1998 une instance en réparation de leur préjudice moral devant une juridiction civile qui s'est déclarée incompétente au profit d'une

juridiction de sécurité sociale devant laquelle ils ont poursuivi l'instan...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 5 décembre 2011), que les ayants droit de Mathieu X..., décédé le 23 mai 1990 d'un accident du travail jugé imputable à la faute inexcusable de son employeur la société Sogea par un arrêt du 6 juin 1994 qui a alloué à sa veuve une rente majorée de conjoint survivant ont introduit le 18 septembre 1998 une instance en réparation de leur préjudice moral devant une juridiction civile qui s'est déclarée incompétente au profit d'une juridiction de sécurité sociale devant laquelle ils ont poursuivi l'instance ;
Attendu que les ayants droit font grief à l'arrêt de déclarer leur action prescrite alors, selon le moyen, que la prescription biennale n'est applicable qu'aux demandes de victimes ou d'ayants droit ayant pour objet le versement ou le remboursement de prestations sociales ou d'indemnités prévues par la législation professionnelle, à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie ou du caractère inexcusable de la faute de l'employeur ; que pour déclarer les ayants droit de leur auteur, Mathieu X..., victime d'un accident du travail jugé entièrement imputable à la faute inexcusable de l'employeur, la société Sogea Guadeloupe, irrecevables en leur demande d'indemnisation de leur préjudice moral, la cour d'appel a affirmé que cette demande engagée le 18 septembre 1998 était tardive par application de la prescription biennale ayant recommencé à courir, après son interruption, à compter de l'arrêt rendu le 6 juin 1994 ayant retenu la faute inexcusable de la société Sogea Guadeloupe ; qu'en opposant à cette demande indemnitaire, la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale, pourtant inapplicable, la cour d'appel a violé les articles L. 431-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale pris ensemble par fausse interprétation et fausse application ;
Mais attendu que l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale prévoit l'indemnisation des chefs de préjudice en cause et son versement direct aux bénéficiaires par les caisses de sécurité sociale qui en récupèrent ensuite le montant auprès de l'employeur de sorte qu'elle entre dans les prévisions de l'article L. 431-2 qui dispose que les droits aux prestations et indemnités figurant au livre IV se prescrivent par un délai de deux ans qu'interrompt l'action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident lorsque celui-ci est susceptible d'entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Et attendu qu'après avoir exactement retenu que, si la prescription biennale a pu être interrompue par l'action engagée par la veuve de la victime devant la juridiction de sécurité sociale pour voir reconnaître la faute inexcusable de l'employeur et bénéficier d'une rente de conjoint majorée, le cours de cette prescription a repris à la suite de l'arrêt du 6 juin 1994, la cour d'appel en a déduit à bon droit que l'acte introductif d'instance du 18 décembre 1998 ayant été délivré à la requête des ayants droit plus de deux ans après cet arrêt, leur nouvelle action était prescrite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour les consorts X...

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré Mme Marceline X...-Y... et MM. Claude X... et Mesmin X... irrecevables en leur demande pour cause de prescription ;
AUX MOTIFS QUE dans sa décision n° 2010-8- QPC du 18 juin 2010, le Conseil constitutionnel a dit que les dispositions des articles L. 451-1 et L. 452-2 à 5 du code de la sécurité sociale étaient conformes à la Constitution, sous réserve de son considérant 18, lequel est rédigé de la façon suivante : « Considérant, en outre, qu'indépendamment de cette majoration, la victime ou, en cas de décès, ses ayants droit peuvent, devant la juridiction de sécurité sociale, demander à l'employeur la réparation de certains chefs de préjudice énumérés par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ; qu'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de ce texte ne sauraient toutefois, sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d'actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes, devant les mêmes juridictions, puissent demander à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale » ; qu'il y a lieu de constater que la réserve émise par le Conseil constitutionnel ne concerne nullement les dispositions de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale édictant une prescription de deux ans pour l'action de la victime (ou de ses ayants droit) aux fins d'obtenir les prestations et indemnités prévues par le livre IV dudit code ; que la décision du Conseil constitutionnel doit s'interpréter de telle façon que les dispositions de l'article L. 452-3 ne puissent faire obstacle aux demandes de réparation formées devant les juridictions de sécurité sociale par la victime ou ses ayants droit, à l'égard de l'employeur, pour l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV de la sécurité sociale ; qu'autrement dit, la liste des préjudices susceptibles d'être réparés sur le fondement de l'article L. 452-3, n'est pas limitative, contrairement à la jurisprudence précédemment établie ; qu'il n'en demeure pas moins que la réparation de ces préjudices, selon l'alinéa 3 de l'article L. 452-3, est versée directement aux bénéficiaires par la caisse de sécurité sociale qui en récupère le montant auprès de l'employeur, et que les dispositions procédurales relatives à l'action de la victime ou des ayants droit à l'égard de la caisse doivent être respectées, et en particulier celles de l'article L. 431-2 relatives à la prescription biennale ; qu'en l'espèce, si la prescription biennale a pu être interrompue par l'action engagée par Mme Y... veuve X... devant le tribunal des affaires de sécurité sociale pour voir reconnaître la faute inexcusable de l'employeur et bénéficier d'une rente de conjoint majorée, le cours de la prescription a repris à la suite de l'arrêt de la cour de céans du 6 juin 1994 ; qu'en conséquence, l'acte d'huissier du 18 septembre 1998, par lequel les consorts X... ont fait citer la société Sogea Guadeloupe devant le tribunal de grande instance de Pointe à Pitre aux fins d'obtenir réparation de leur préjudice moral, ayant été délivré plus de deux ans après l'arrêt du 6 juin 1994, il y a lieu de constater que l'action des demandeurs est éteinte par l'effet de la prescription ;
ALORS QUE la prescription biennale n'est applicable qu'aux demandes de victimes ou d'ayants droit ayant pour objet le versement ou le remboursement de prestations sociales ou d'indemnités prévues par la législation professionnelle, à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie ou du caractère inexcusable de la faute de l'employeur ; que pour déclarer Mme X...-Y... et ses deux enfants, MM. Claude et Mesmin X..., ayants droit de leur auteur, M. Mathieu X..., victime d'un accident du travail jugé entièrement imputable à la faute inexcusable de l'employeur, la société Sogea Guadeloupe, irrecevables en leur demande d'indemnisation de leur préjudice moral, la cour d'appel a affirmé que cette demande engagée le 18 septembre 1998 était tardive par application de la prescription biennale ayant recommencé à courir, après son interruption, à compter de l'arrêt rendu le 6 juin 1994 ayant retenu la faute inexcusable de la société Sogea Guadeloupe ; qu'en opposant à cette demande indemnitaire, la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale, pourtant inapplicable, la cour d'appel a violé les articles L. 431-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale pris ensemble par fausse interprétation et fausse application.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-27318
Date de la décision : 23/01/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Prescription - Prescription biennale - Article L. 431-2 du code de la sécurité sociale - Domaine d'application - Indemnisation du préjudice moral - Action des ayants droit

PRESCRIPTION CIVILE - Prescription biennale - Sécurité sociale - Accident du travail - Article L. 431-2 du code de la sécurité sociale - Domaine d'application - Indemnisation du préjudice moral - Action des ayants droit (oui)

La demande d'indemnisation du préjudice moral des ayants droit d'une victime prédécédée d'un accident du travail jugé imputable à la faute inexcusable de son employeur est soumise à la prescription biennale de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale


Références :

Cour d'appel de Basse-Terre, 5 décembre 2011, 09/01463
articles L. 431-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 05 décembre 2011

A rapprocher : 2e Civ., 8 octobre 2009, pourvoi n° 08-17141, Bull. 2009, II, n° 242 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 23 jan. 2014, pourvoi n°12-27318, Bull. civ. 2014, II, n° 17
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, II, n° 17

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : Mme de Beaupuis
Rapporteur ?: M. Cadiot
Avocat(s) : Me Brouchot

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.27318
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