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17/12/2013 | FRANCE | N°12-15916

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 17 décembre 2013, 12-15916


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 janvier 2012), que Mme X..., aux droits de laquelle viennent aujourd'hui les consorts Y..., a donné à bail, par acte authentique des 13 novembre et 27 décembre 1907, à Mme Z..., aux droits de laquelle viennent aujourd'hui les consorts A..., deux terrains sur lesquels étaient édifiés des constructions dont Mme Z... était propriétaire pour les avoir reçus des précédents locataires qui les avait édifiés ; qu'il était précisé

qu'à la cessation du bail la bailleresse aurait la faculté de conserver ces con...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 janvier 2012), que Mme X..., aux droits de laquelle viennent aujourd'hui les consorts Y..., a donné à bail, par acte authentique des 13 novembre et 27 décembre 1907, à Mme Z..., aux droits de laquelle viennent aujourd'hui les consorts A..., deux terrains sur lesquels étaient édifiés des constructions dont Mme Z... était propriétaire pour les avoir reçus des précédents locataires qui les avait édifiés ; qu'il était précisé qu'à la cessation du bail la bailleresse aurait la faculté de conserver ces constructions après estimation d'expert et qu'à défaut les preneurs devraient les enlever à leur frais ; qu'à la suite de plusieurs renouvellements du bail et divers contentieux en résultant, les parties ont convenu par une transaction des 20 et 25 avril 2006 que leurs relations locatives ne portaient que sur le terrain nu, les consorts A... étant confirmés en leur qualité de seuls propriétaires des constructions, et étaient régies par le bail renouvelé du
29 juin 1978 à l'exception d'une clause d'accession sans indemnité ; que les consorts Y... ont alors délivré congé le 4 juillet 2007 aux consorts A..., en demandant la suppression aux frais de ces derniers des constructions ; qu'ils les ont assignés en validité de congé et expulsion ;
Attendu que les consorts Y... font grief à l'arrêt de dire que les consorts A... ont la qualité de tiers de bonne foi au sens de l'article 555 du code civil et ont droit à une indemnisation à la suite de leur éviction du fait du congé, alors, selon le moyen, que le terme de bonne foi employé par l'article 555 alinéa 4 du code civil s'entend par référence à l'article 550 et ne vise que celui qui possède comme propriétaire en vertu d'un titre translatif de propriété dont il ignore le vice ; que le titre en cause s'entend uniquement d'un titre de propriété du sol sur lequel la construction est établie ; qu'en énonçant que les consorts A...- B... étaient de bonne foi sur le fondement d'un titre leur conférant la propriété, non du terrain sis... à Paris 12ème, mais des seules constructions édifiées sur ce terrain, la cour d'appel a violé l'article 555 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les constructions en cause avaient été édifiées, avec l'assentiment des propriétaires, sur des terrains donnés à bail et en l'absence de toute convention réglant le sort de ces constructions, la cour d'appel en a exactement déduit que l'article 555 du code civil devait régir les rapports des parties en fin de bail et que les consorts Y... ne pouvaient réclamer aux consorts A..., tiers de bonne foi, sur le fondement de la transaction des 20 et 25 avril 2006, la suppression de celles-ci ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils pour les consorts Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les consorts A...- B... ont la qualité de tiers de bonne foi au sens de l'article 555 du code civil et d'AVOIR dit que le droit de propriété qu'avaient les consorts A...- B... sur les constructions justifie leur indemnisation suite à leur éviction par l'effet du congé, indemnisation correspondant au choix des consorts X...- Y... soit à la plus-value procurée aux terrains dont ils sont propriétaires par ces constructions, soit au coût des matériaux et de la main d'oeuvre nécessaires à l'édification de ces constructions à la date du remboursement, d'AVOIR, avant dire droit au fond, sur le montant de l'indemnité devant être allouée aux consorts A...- B... désigné un expert et, enfin, d'AVOIR fixé le montant de l'indemnité d'occupation due par les consorts A...- B... depuis le 1er janvier 2009 jusqu'au versement de l'indemnisation devant leur revenir au montant du dernier loyer contractuel, outre les charges et taxes prévues au bail, y compris la taxe foncière sur les immeubles bâtis ;
AUX MOTIFS QUE « le terme de « bonne foi » employé par l'article 555, alinéa 4 du code civil, appliquée par le tribunal, s'entend par référence à l'article 550 du même code et ne vise que celui qui possède comme propriétaire en vertu d'un titre translatif de propriété ; qu'au cas d'espèce, par la transaction des 20 et 25 avril 2006 mettant fin au litige opposant les parties, les consorts A...- B... ont été explicitement « confirmés en leur qualité de seuls propriétaires des constructions édifiées sur le terrain nu sis... à Paris 12 » ; que, par cette convention, les parties ont expressément consacré le démembrement de la propriété du sol et des constructions ; que, bien que le bail des terrains sur lesquels les constructions ont été édifiées confère à la propriété de ces dernières un caractère temporaire, cependant, la transaction constitue un titre au sens de l'article 550 du code civil, de sorte que les consorts A...- B... sont des possesseurs de bonne foi des constructions pour les posséder comme propriétaires et que les consorts Y...- X... ne peuvent ni réclamer la suppression des constructions par application de l'article 555 du code civil ni exiger la restitution de la chose louée dans son état primitif par application de l'article 1730 du même code ; que l'application de l'article 555 du code civil exclut celle des articles 1634 du code civil et 7f de la loi du 6 juillet 1989 et ce d'autant, pour ce dernier texte, que le bail ayant lié les parties était régi par les articles 1713 et suivants du code civil ; que c'est donc à bon droit que le tribunal a fait application de l'article 555, alinéa 4 du code civil ; que le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions, sans qu'il y ait lieu à évocation sur le montant du remboursement auquel les consorts A...- B... peuvent prétendre à la suite du dépôt du rapport d'expertise ordonné en première instance » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « les baux successifs qui rappelaient que les constructions étaient la propriété des consorts A...- B... ou de leurs auteurs combattaient efficacement la présomption de propriété édictée à l'article 552 du code civil selon laquelle la propriété du sol emporte la propriété des constructions édifiées sur celui-ci ; que jusqu'à la conclusion du bail du 29 juin 1978, les parties avaient réglé le sort des constructions lors de la fin des baux, par la clause prévoyant de les indemniser si les consorts X...- Y... ou leurs auteurs décidaient de les conserver ou, dans le cas contraire, en prévoyant leur destruction aux frais des preneurs ; que l'obligation contractuelle qui pouvait ainsi incomber aux consorts A...- B... ou à leurs auteurs de détruire leurs constructions venaient conventionnement affecter leur droit de propriété lors de la fin des baux en écartant à leur détriment l'application des dispositions de l'alinéa 4 de l'article 555 du code civil qui n'est pas d'ordre public, lesquelles dispositions obligent le propriétaire du fonds à indemniser le tiers de bonne foi ; que les dispositions du protocole d'accord selon lesquelles les parties conviennent que les consorts A...- B... sont « confirmés en leur qualité de seuls propriétaires des constructions édifiées », sans restriction aucune, sont exclusives de l'application des précédentes dispositions conventionnelles selon lesquelles les bailleurs pouvaient exiger la destruction aux frais des preneurs des constructions, sous peine de se voir spolier sans indemnité de leurs biens, en violation des dispositions de l'article 545 du code civil ; que s'il peut être ainsi admis que les constructions font accession aux consorts X...- Y... lors de la fin du bail par application de l'article 555 du code civil, les dispositions de l'alinéa 4 de cet article non écartées par le protocole d'accord, interdisent au propriétaire du fonds d'exiger du tiers de bonne foi la suppression des ouvrages mais l'obligent à l'indemniser, les consorts A...- B... ayant un titre régulier opposable aux consorts X...- Y..., titre excluant qu'ils soient contraints à la restitution des fruits selon le critère retenu par les dispositions susvisées pour apprécier leur bonne foi ; que le démembrement opéré entre la propriété du sol et celle des constructions oblige à combiner les droits respectifs des parties ; que si le droit de propriété des consorts A...- B... sur leurs constructions ne saurait faire échec à la prohibition des baux perpétuels et à la cessation des relations contractuelles qui a pour effet par le jeu de l'accession de réunir la propriété du sol et des constructions entre les mains des seuls consorts X...- Y..., ce droit de propriété justifie qu'à leur cessation, les consorts A...- B... soient indemnisés au choix des consorts X...- Y... soit de la plus-value que confèrent au fonds les constructions dont ils étaient propriétaires, soit du coût des matériaux et de la main d'oeuvre nécessaires à l'édification de ces constructions évalué à la date du remboursement ; qu'il est nécessaire de procéder à la désignation d'un expert avec mission d'évaluer l'indemnité pouvant revenir aux consorts A...- B... selon les deux branches de l'alternative précitée aux frais des consorts X...- Y... qui ont mis fin aux relations contractuelles ; que dans l'attente qu'il soit statué au vu du résultat de la mesure d'expertise, il est sursis à statuer sur les autres demandes et les dépens seront réservés ; que l'indemnité d'occupation dont les consorts A...- B... sont redevables depuis la date du 1er janvier 2009 jusqu'au versement de l'indemnisation devant leur revenir sera fixée au montant du premier loyer contractuel, outre les charges et taxes prévues au bail y compris la taxe foncière sur les immeubles bâtis ; qu'il est nécessaire et compatible avec la nature du litige d'ordonner l'exécution provisoire » ;
ALORS QUE le terme de bonne foi employé par l'article 555 alinéa 4 du code civil s'entend par référence à l'article 550 et ne vise que celui qui possède comme propriétaire en vertu d'un titre translatif de propriété dont il ignore le vice ; que le titre en cause s'entend uniquement d'un titre de propriété du sol sur lequel la construction est établie ; qu'en énonçant que les consorts A...- B... étaient de bonne foi sur le fondement d'un titre leur conférant la propriété, non du terrain sis... à Paris 12ème, mais des seules constructions édifiées sur ce terrain, la cour d'appel a violé l'article 555 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 12-15916
Date de la décision : 17/12/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROPRIETE - Constructions sur le terrain d'autrui - Article 555 du code civil - Conditions d'application - Absence de convention

BAIL (règles générales) - Preneur - Obligations - Restitution de la chose louée en fin de bail - Remise en l'état d'origine - Travaux de construction autorisés par le bailleur - Nouveau preneur tiers de bonne foi - Obligation de supprimer les constructions (non) BAIL (règles générales) - Preneur - Travaux, modifications ou transformations - Constructions autorisées - Article 555 du code civil - Conditions d'application - Absence de convention sur leur sort

La cour d'appel, qui relève que des constructions ont été édifiées sur des terrains donnés à bail avec l'assentiment des propriétaires, en l'absence de convention en réglant le sort, en déduit exactement que l'article 555 du code civil doit régir les rapports des parties et que la suppression de ces constructions ne peut être réclamée aux nouveaux preneurs, tiers de bonne foi


Références :

article 555 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 janvier 2012

Sur les conditions d'application de l'article 555 du code civil, à rapprocher :3e Civ., 17 novembre 1971, pourvoi n° 70-13346, Bull. 1971, III, n° 565 (cassation) ;3e Civ., 10 novembre 1999, pourvoi n° 97-21942, Bull. 1999, III, n° 211 (1) (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 17 déc. 2013, pourvoi n°12-15916, Bull. civ. 2013, III, n° 167
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, III, n° 167

Composition du Tribunal
Président : M. Terrier
Avocat général : M. Laurent-Atthalin
Rapporteur ?: M. Echappé
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.15916
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