LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Ali X...,
contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, en date du 2 juillet 2013, qui, dans l'information suivie contre lui du chef notamment de vol aggravé, a dit non admis son appel de l'ordonnance du juge d'instruction ayant ordonné son dessaisissement ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 novembre 2013 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Moreau conseiller rapporteur, M. Pometan, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de M. le conseiller MOREAU, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LE BAUT ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en datedu 13 septembre 2013, prescrivant l'examen du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 186 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'ordonnance attaquée a dit l'appel de M. X... non admis ;
"aux motifs que l'ordonnance de dessaisissement rendue le 15 mai 2013 par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Melun, n'est pas de celles dont l'article 186 du code de procédure pénale autorise l'appel ; qu'en application de l'article 186, alinéa 6, du code de procédure pénale, l'appel de M. X... ne sera pas admis ;
"1°) alors que l'article 186, alinéa 3, du code de procédure pénale autorise l'appel de l'ordonnance par laquelle le juge a, d'office ou sur déclinatoire, statué sur sa compétence ; que l'ordonnance de dessaisissement d'un juge d'instruction au profit d'un autre juge d'instruction appartenant à un tribunal différent constitue une ordonnance statuant sur la compétence ; que l'ordonnance de dessaisissement du juge d'instruction du tribunal de grande instance de Melun au profit du juge d'instruction du tribunal de grande instance de Paris est dès lors susceptible d'appel comme statuant sur la compétence ; qu'en décidant néanmoins que ladite ordonnance n'était pas susceptible d'appel, le président de la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs ;
"2°) alors que le droit au recours juridictionnel effectif est garanti par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que les exceptions à l'irrecevabilité de principe de l'appel contre les ordonnances du juge d'instruction édictée par l'article 186 du code de procédure pénale, ne sauraient, sans porter une atteinte disproportionnée au droit d'accès à un tribunal, être interprétées restrictivement ; qu'il se déduit nécessairement d'une ordonnance de « dessaisissement » que le juge d'instruction statue sur sa compétence et que cette ordonnance est dès lors susceptible d'appel en application de l'article 186, alinéa 3, du code de procédure pénale ; que toute autre interprétation porterait une atteinte disproportionnée au droit d'accès à un tribunal ; qu'en déclarant cependant non admis l'appel interjeté à l'encontre d'une telle ordonnance, le président de la chambre de l'instruction a méconnu les exigences conventionnelles" ;
Vu l'article 186, alinéa 3, du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, les parties peuvent interjeter appel de l'ordonnance par laquelle le juge d'instruction a, d'office ou sur déclinatoire, statué sur sa compétence ;
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que sur réquisitions du ministère public, le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Melun, saisi contre M. Ali X... d'infractions connexes à celles ayant fait l'objet d'une ouverture d'information devant la juridiction spécialisée de Paris, s'est dessaisi, avec l'accord de ce juge, par ordonnance en date du 15 mai 2013 ;
Attendu que le président de la chambre de l'instruction a déclaré l'appel porté contre cette ordonnance irrecevable aux motifs que "l'ordonnance susvisée n'est pas de celles dont l'article 186 du code de procédure pénale autorise l'appel " ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que l'appel était prévu par les dispositions particulières ci-dessus visées, le président de la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs ;
D'où il suit que l'annulation est encourue ;
Par ces motifs :
ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance susvisée du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 2 juillet 2013 ;
CONSTATE que, du fait de l'annulation prononcée, la chambre de l'instruction se trouve saisie de l'appel du mis en examen ;
ORDONNE le retour de la procédure à cette juridiction autrement présidée ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'ordonnance annulée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre décembre deux mille treize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;