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09/07/2013 | FRANCE | N°11-27235

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 09 juillet 2013, 11-27235


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société par actions simplifiée Logistics organisation
X...
(la société LOG), qui est présidée par M. X..., a été constituée entre la société Services immobiliers logistiques (la société SIL), qui détient la majorité du capital et est contrôlée par M. X..., et MM. Y...et Z...; que sur le fondement de l'article 14 des statuts de la société LOG qui autorise l'exclusion d'un associé en cas d'exercice d'une activité concurrente, l'assemblée générale de c

ette société a prononcé l'exclusion de M. Z...sans que ce dernier ait pris part au v...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société par actions simplifiée Logistics organisation
X...
(la société LOG), qui est présidée par M. X..., a été constituée entre la société Services immobiliers logistiques (la société SIL), qui détient la majorité du capital et est contrôlée par M. X..., et MM. Y...et Z...; que sur le fondement de l'article 14 des statuts de la société LOG qui autorise l'exclusion d'un associé en cas d'exercice d'une activité concurrente, l'assemblée générale de cette société a prononcé l'exclusion de M. Z...sans que ce dernier ait pris part au vote ; qu'invoquant l'irrégularité de cette stipulation statutaire, M. Z...a fait assigner la société LOG et M. X... en annulation de la délibération de l'assemblée générale ayant prononcé son exclusion ; qu'il a sollicité également une mesure d'expertise sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société LOG et M. X... font grief à l'arrêt d'avoir annulé la délibération de l'assemblée générale des associés qui a voté l'exclusion de M. Z...et ordonné la réintégration de ce dernier dans ses droits d'associés, alors, selon le moyen :
1°/ que chaque partie supporte la charge de la preuve des faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions ; que dès lors qu'il était constaté que M. X... avait proposé à M. Z...de participer au vote, nonobstant les termes contraires des statuts, il appartenait à M. Z...de rapporter la preuve que cette proposition avait ensuite été retirée, si bien qu'en faisant peser sur M. X... et la société LOG la charge de la preuve du maintien de cette offre de voter et du refus subséquent de M. Z...de l'accepter, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article 9 du code de procédure civile ;
2°/ qu'il appartient au juge de préciser les éléments de preuve sur lesquels il se fonde et de procéder à leur analyse, même sommairement, de sorte qu'en retenant que suite à la remarque faite par le conseil de M. Z...de ce que la proposition de participer au vote était faite en violation des statuts, M. X... s'était alors ravisé et avait retiré son offre, sans préciser, ni a fortiori analyser, même sommairement, le document sur lequel elle aurait fondé cette affirmation, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que toute clause statutaire contraire à une disposition impérative du droit des sociétés, dont la violation n'est pas sanctionnée par la nullité de la société, est réputée non écrite si bien qu'en énonçant qu'il n'entrait pas dans les pouvoirs de M. X... de modifier à sa guise la disposition statutaire querellée, une telle modification nécessitant l'accord unanime des associés conformément à l'article L. 227-19 du code de commerce, quand cette disposition statutaire, contraire aux dispositions d'ordre public de l'article 1844 du code civil était réputée non écrite et ne pouvait donc être appliquée, la cour d'appel a violé l'article 1844-10 du code civil par refus d'application ;
4°/ que si tout associé a droit de prendre part aux décisions collectives, le non-respect de ce droit n'est sanctionné par la nullité que pour autant qu'il en résulte une incidence potentielle de son vote sur le sens de la délibération adoptée de sorte qu'en prononçant la nullité de la délibération litigieuse, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si, dans la mesure où la société SIL disposait à elle seule de la majorité des voix, la décision d'exclusion prononcée à l'encontre de M. Z...n'aurait pas été adoptée, peu important que celui-ci ait pu effectivement prendre part au vote, ce dont il résultait que M. Z...n'avait subi aucun grief, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1844 et 1844-10 du code civil ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 1844, alinéas 1 et 4, du code civil que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives et de voter et que les statuts ne peuvent déroger à ces dispositions que dans les cas prévus par la loi ; qu'il résulte encore de l'article 1844-10, alinéa 2, du même code que toute clause statutaire contraire est réputée non écrite ; que l'arrêt constate que l'article 14 des statuts de la société LOG, sur le fondement duquel a été convoquée l'assemblée générale appelée à statuer sur l'exclusion de M. Z..., contrevient aux dispositions légales précitées ; qu'il retient qu'il n'entrait pas dans les pouvoirs du président de la société de modifier à sa guise la stipulation statutaire contestée, une telle modification nécessitant l'accord unanime des associés ; qu'ayant ainsi fait ressortir que l'exclusion de M. Z...était intervenue sur le fondement d'une clause statutaire contraire à une disposition légale impérative et donc pour le tout réputée non écrite, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deux premières branches, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer une recherche que ses constatations et appréciations rendaient inopérante, en a déduit à bon droit que la délibération ayant prononcé cette exclusion devait être annulée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Sur la recevabilité du moyen, contestée par la défense :
Attendu que le moyen est de pur droit, le pourvoi ne se prévalant d'aucun fait qui n'ait été connu par les juges du fond, soumis à leur appréciation et constaté dans la décision attaquée ; que la fin de non-recevoir n'est pas fondée ;
Et sur le moyen :
Vu l'article 145 du code de procédure civile ;
Attendu que pour confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, l'arrêt relève que M. Z...fait valoir qu'il entend se ménager des éléments de preuve susceptibles de lui être utiles dans l'optique d'une action en responsabilité contre le dirigeant de la société LOG ; qu'il retient qu'il s'agit là d'un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les mesures d'instruction ne peuvent être ordonnées sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile que sur requête ou en référé, avant tout procès, la cour d'appel, qui n'a pas statué en qualité de juge des requêtes ou des référés, a excédé ses pouvoirs et violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement en ses dispositions relatives à la mesure d'expertise, l'arrêt rendu le 15 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable la demande d'expertise formée par M. Z...;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens y compris ceux afférents à l'arrêt partiellement cassé ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils, pour la société Logistics organisation
X...
et M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé la délibération de l'assemblée générale des associés du 24 juin 2010 qui a voté l'exclusion de M. Jimmy Z...et ordonné la réintégration de ce dernier dans la plénitude de ses droits d'associé de la société LOG à compter de cette date,
AUX MOTIFS QUE
La SAS LOG et Monsieur Franck X... font valoir qu'il a été offert à Monsieur Jimmy Z...de prendre part au vote et que celui-ci a refusé ; Monsieur Jimmy Z...réplique pour sa part que suite à la remarque faite par son conseil de ce que cette proposition était faite en violation des statuts, Monsieur Franck X... s'était alors ravisé et avait retiré son offre ;
l'attestation établie par le commissaire aux comptes, à la demande de Monsieur Franck X..., rédigée ainsi qu'il suit : « Lors de l'assemblée générale du 24 juin 2010, M. X..., président de séance, a invité Monsieur Z...à prendre part au vote, Maître DELFLY, avocat de M. Z..., est intervenu et a affirmé que celui-ci ne pouvait pas prendre part au vote relatif à son exclusion » est insuffisante à combattre cette version des faits et, en tout état de cause, ne permet pas d'établir le maintien effectif de l'offre et un refus subséquent de M. Z...de prendre part au vote ;
par ailleurs, et contrairement à ce que soutient M. X..., il n'entrait certainement pas dans ses pouvoirs de modifier à sa guise la disposition statutaire querellée, une telle modification nécessitant l'accord unanime des associés conformément à l'article L. 227-19 du Code de commerce ;
il sera enfin relevé que le procès-verbal de l'assemblée générale du 24 juin 2010 ne contient aucune mention de la proposition faite ni a fortiori ne porte mention d'un refus de prendre part au vote émanant de M. Z...; aucune atteinte au principe de cohérence n'est ainsi démontrée. ;
ALORS QUE chaque partie supporte la charge de la preuve des faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions ; que dès lors qu'il était constaté que M. X... avait proposé à M. Z...de participer au vote, nonobstant les termes contraires des statuts, il appartenait à Monsieur Z...de rapporter la preuve que cette proposition avait ensuite été retirée si bien qu'en faisant peser sur M. X... et la société LOG la charge de la preuve du maintien de cette offre de voter et du refus subséquent de M. Z...de l'accepter, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil, ensemble l'article 9 du Code de procédure civile,
ALORS QUE, D'AUTRE PART, il appartient au juge de préciser les éléments de preuve sur lesquels il se fonde et de procéder à leur analyse, même sommairement de sorte qu'en retenant que suite à la remarque faite par le Conseil de M. Z...de ce que la proposition de participer au vote était faite en violation des statuts, M. Franck X... s'était alors ravisé et avait retiré son offre, sans préciser, ni a fortiori analyser, même sommairement, le document sur lequel elle aurait fondé cette affirmation, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile,
ALORS ENSUITE QUE toute clause statutaire contraire à une disposition impérative de droit des sociétés, dont la violation n'est pas sanctionnée par la nullité de la société, est réputée non écrite si bien qu'en énonçant qu'il n'entrait pas dans les pouvoirs de M. X... de modifier à sa guise la disposition statutaire querellée, une telle modification nécessitant l'accord unanime des associés conformément à l'article L. 227-19 du Code de commerce, quand cette disposition statutaire, contraire aux dispositions d'ordre public de l'article 1844 du Code civil était réputée non écrite et ne pouvait donc être appliquée, la Cour d'appel a violé l'article 1844-10 du Code civil par refus d'application,
ALORS ENFIN QUE si tout associé a droit de prendre part aux décisions collectives, le non-respect de ce droit n'est sanctionné par la nullité que pour autant qu'il en résulte une incidence potentielle de son vote sur le sens de la délibération adoptée de sorte qu'en prononçant la nullité de la délibération litigieuse, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si, dans la mesure où la société SIL disposait à elle seule de la majorité des voix, la décision d'exclusion prononcée à l'encontre de M. Z...n'aurait pas été adoptée, peu important que celui-ci ait pu effectivement prendre part au vote, ce dont il résultait que M. Z...n'avait subi aucun grief, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1844 et 1844-10 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné une expertise in futurum, sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE
" A l'appui de sa demande, Monsieur Jimmy Z...fait valoir qu'il entend se ménager des éléments de preuve susceptibles de lui être utiles dans l'optique d'une action en responsabilité contre le dirigeant de la société et par ailleurs principal actionnaire, à qui il reproche d'avoir vidé de toute substance la société LOG pour pouvoir, après l'avoir exclu de la société, racheter ses actions à vil prix ; Il s'agit bien là d'un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige ",
ET AUX MOTIFS ADOPTES, QUE
" les questions légitimement posées par M. Jimmy Z...alors qu'il avait encore la qualité d'actionnaire minoritaire n'ont pas reçu de réponses satisfaisantes ; que l'expertise de gestion ne doit pas être obligatoirement décidée par le juge des référés qui ne constitue qu'un moyen d'accélération de la procédure et que la demande présentée dans le cadre de droit commun de la procédure est parfaitement recevable ; que le tribunal estime que sa demande d'expertise présente un caractère sérieux ; qu'en ordonnant une expertise " in futurum ", le Tribunal ne préjuge pas de la recevabilité d'une action " ut singuli " qui devra être appréciée lors de son éventuelle introduction ; que l'expertise ne pourra porter que sur les 3 derniers exercices du fait de la prescription édictée par l'article L. 225-254 du Code de commerce ; que le champ d'application de l'expertise doit être limité à des opérations de gestion déterminées et pertinentes ; que l'expertise de gestion ne doit pas interférer avec l'expertise d'évaluation des droits sociaux de M. Jimmy Z...pour le rachat de ses parts ; le Tribunal fera droit à la demande d'expertise fondée sur l'article 145 du code de procédure civile sur les points suivants :
- déterminer la nature et le montant des flux financiers, commerciaux et administratifs avec la société SIL au cours des exercices 2007, 2008 et 2009,
- donner son avis sur l'intérêt de la société LOG à ces opérations,
- dire si ces opérations ont été autorisées au titre des conventions réglementées,
- déterminer les circonstances juridiques et financières qui ont conduit au transfert des clients REDCATS et MGF de la société LOG à la société SIL,
- donner son avis sur la nécessité de ces transferts et leur incidence sur les résultats de la société LOG,
- donner son avis sur l'intérêt pour la société LOG de céder le crédit-bail à la société SIL,
- donner son avis sur la base de réalisation de cette cession, cette expertise sera entreprise aux frais de M. Jimmy Z...et l'expert aura la faculté de s'adjoindre un sachant en matière immobilière (jugement p. 7 et 8),
ALORS QUE les mesures d'instruction in futurum ne peuvent être ordonnées que sur requête ou en référé si bien qu'en faisant droit à la demande d'expertise in futurum présentée par M. Z...en vue d'une éventuelle action en responsabilité dirigée contre M. X... et la société LOG, la Cour d'appel, qui ne statuait pas en qualité de juge des requêtes ou de juge des référés, a excédé ses pouvoirs et violé l'article 145 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-27235
Date de la décision : 09/07/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

MESURES D'INSTRUCTION - Sauvegarde de la preuve avant tout procès - Décision - Cour d'appel - Qualité de juge des requêtes ou des référés - Défaut - Excès de pouvoir

Méconnaît les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile en vertu desquelles les mesures d'instruction ne peuvent être ordonnées sur le fondement de ce texte que sur requête ou en référé, avant tout procès, la cour d'appel qui, ne statuant pas en qualité de juge des requêtes ou des référés, fait droit à la demande d'expertise d'une partie faite en vue de se ménager des éléments de preuve susceptibles de lui être utiles dans l'optique d'une action en responsabilité contre le dirigeant d'une société


Références :

articles 1844, alinéas 1 et 4, et 1844-10, alinéa 2, du code civil

article 145 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 15 septembre 2011

Sur le n° 1 : Sur le droit de tout associé de participer aux décisions collectives et de voter, et sur les cas de dérogations statutaires, dans le même sens que : Com., 23 octobre 2007, pourvoi n° 06-16537, Bull. 2007, IV, n° 225 (cassation). Sur le n° 2 : A rapprocher :Com., 16 avril 1991, pourvoi n° 89-14237, Bull. 1991, IV, n° 144 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 09 jui. 2013, pourvoi n°11-27235, Bull. civ. 2013, IV, n° 123
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 123

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. Carre-Pierrat
Rapporteur ?: M. Fédou
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.27235
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