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09/01/2013 | FRANCE | N°11-26418

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 janvier 2013, 11-26418


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X... ont conclu avec la société Distribution casino France plusieurs contrats de cogérance non salariée, le dernier, en date du 3 septembre 1990, pour l'exploitation d'un magasin de vente au détail situé à Marseille ; que M. X... a été, par application de l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés, "gérants-mandataires" du 18 juillet 1963 révisé et étendu par arrêté du 25 avril 1985, dé

signé délégué syndical à compter d'octobre 2001 et a été élu délégué du per...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X... ont conclu avec la société Distribution casino France plusieurs contrats de cogérance non salariée, le dernier, en date du 3 septembre 1990, pour l'exploitation d'un magasin de vente au détail situé à Marseille ; que M. X... a été, par application de l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés, "gérants-mandataires" du 18 juillet 1963 révisé et étendu par arrêté du 25 avril 1985, désigné délégué syndical à compter d'octobre 2001 et a été élu délégué du personnel en juin 2004 ; que les intéressés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment à la requalification de leur contrat de gérance en contrat de travail et à la résiliation judiciaire de ce dernier aux torts de la société ;

Sur les premier, deuxième, sixième moyens et le cinquième moyen en ce qu'il concerne Mme X... :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens, qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle et l'article L. 782-7, recodifié L. 7322-1, du code du travail ;
Attendu qu'en application de ce principe et de ce texte, une clause de non-concurrence stipulée dans le contrat d'un gérant non salarié de succursale de maison d'alimentation de détail n'est licite que si elle comporte l'obligation pour la société de distribution de verser au gérant une contrepartie financière ; que la stipulation d'une clause de non-concurrence nulle cause nécessairement un préjudice au gérant ;
Attendu que pour débouter M. et Mme X... de leur demande au titre de la clause de non-concurrence, l'arrêt retient que la relation contractuelle n'est pas rompue ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté que la clause de non-concurrence stipulée au contrat de gérance ne comportait pas de contrepartie financière au bénéfice des gérants, la cour d'appel a violé le principe et le texte susvisés ;
Et sur le quatrième moyen :
Vu les articles L. 2251-1, L. 7322-1, L. 7322-3, L. 2143-17, L. 2315-3, L. 3232-1, L. 3232-3, D. 3231-5 et D. 3231-6 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que le temps nécessaire à l'exercice des fonctions de représentant du personnel est de plein droit considéré comme temps de travail et payé à l'échéance normale ; que ce représentant ne doit subir aucune perte de rémunération du fait de l'exercice de sa mission ; que si les accords collectifs peuvent déterminer la rémunération minimum garantie des gérants non salariés des succursales de commerce de détail alimentaire compte tenu de l'importance de la succursale et des modalités d'exploitation de celle-ci, il demeure qu'en application de l'article L. 7322-3 du code du travail, la rémunération convenue ne peut jamais être inférieure au SMIC ; qu'en conséquence, lorsque le représentant est payé en tout ou en partie par des commissions, la somme qui lui est allouée pendant une période où du fait de ses fonctions il ne peut travailler, doit être calculée d'après son salaire réel et être au moins égale au SMIC ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande d'indemnité complémentaire au titre des heures de délégation, l'arrêt retient qu'en application de l'article 37-C, b, de l'accord du 18 juillet 1963, le gérant mandataire non salarié perçoit au titre de l'indemnisation de ses heures de délégation une indemnité de 106 euros par mois pour sa fonction de représentant syndical gérant non salarié au sein d'un "établissement succursales" regroupant habituellement plus de 500 gérants ; qu'il est rémunéré au moyen de commissions proportionnelles aux ventes qu'il réalise et que c'est précisément la raison pour laquelle il est indemnisé de ses heures de délégation de manière forfaitaire ; que s'il est exact que le gérant mandataire non salarié investi de mandats conventionnels de représentation peut bénéficier des dispositions légales, c'est sous réserve des aménagements expressément et limitativement prévus par l'accord précité, ce qui est le cas de l'article 37 qui aménage l'indemnisation des heures de délégation ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le montant de l'indemnité conventionnelle pour les heures de délégation était inférieur au SMIC, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le cinquième moyen, en ce qu'il concerne M. X... :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation sur la disposition rejetant la demande au titre des heures de délégation entraîne celle de la disposition concernant la résiliation judiciaire du contrat de gérance de M. X... ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. et Mme X... de leur demande au titre de la clause de non-concurrence et M. X... de ses demandes d'indemnité complémentaire pour heures de délégation et de résiliation judiciaire du contrat de gérance, l'arrêt rendu le 15 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société Distribution casino France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Distribution Casino France à payer à M. et Mme X... la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf janvier deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. et Mme X... de leur demande tendant à voir requalifier le contrat de co-gérance conclu avec la société Distribution Casino France en contrat de travail à durée indéterminée, et de leurs demandes subséquentes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les demandes principales présentées par Mme X... : la société Casino confie la gestion de ses magasins intégrés à des personnes, au titre desquelles compte l'appelante, qui ont le statut légal de gérants non salariés de succursales de commerce de détail alimentaire régi par les articles L.7322-1 et suivants du code du travail liant le propriétaire du fonds au gérant, lequel jouit d'une indépendance dans l'organisation de son propre travail, tout en bénéficiant de garanties de nature social ; qu'en application des articles L.311-2 et L.311-3, 6 du code de la sécurité sociale, les gérants non salariés sont obligatoirement affiliés aux assurances sociales du régime général, conduisant ainsi la société Casino à procéder à une déclaration préalable auprès de l'URSSAF et à précompter des cotisations sociales sur les commissions versées ; que ces gérants sont en outre pris en charge par le régime commun d'assurance chômage conduisant, là encore, la société Casino à cotiser et à faire cotiser les gérants non salariés à ce régime et à leur délivrer, en fin de contrat de cogérance, une attestation mentionnant la période d'activité et une autre leur permettant de recevoir les prestations servies par Pôle emploi ; qu'ainsi tout l'environnement législatif et réglementaire intéressant ces gérants de succursales de commerce de détail alimentaire fait que ces personnes ne sont pas des salariés ; que les premiers juges admettent les nombreuse sujétions imposées par le propriétaire du fonds de commerce et la cour renvoie à la lecture de leur décision sur ce point ; mais que, et cette seule considération serait suffisante, le pouvoir du gérant mandataire de recruter et de licencier le personnel de l'établissement qu'il gère -en l'espèce les époux ont X... ont embauché et débauché du personnel-, d'organiser et de définir ses horaires de travail sous son entière responsabilité juridique et financière, ainsi que de définir ses conditions d'exploitation, est incompatible avec l'existence d'un rapport de subordination ; que la cour en conséquence confirmera le jugement entrepris en ce qu'il rejette la demande de requalification du contrat de co-gérance liant les parties en un contrat de travail ;
ET AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les demandes principales présentées par M. X... ; que l'argumentation de M. X... étant rigoureusement similaire à l'argumentation développée par son épouse, la cour renvoie aux motifs précédemment adoptés pour rejeter ses demandes de requalification du contrat de co-gérance en un contrat de travail, de paiement des sommes de 2.395,30 euros et 76.779,57 euros au titre de frais exposés ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES JUGEMENTS QU'il résulte des dispositions de l'article L.782-l du code du travail alors en vigueur devenu l'article L.7322-2 du code du travail nouveau que «est gérant non salarié toute personne qui exploite, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des commerces de détail alimentaire ou des coopératives de consommation lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de son travail et lui laisse toute latitude d'embaucher des salariés ou de se faire remplacer à ses frais et sous son entière responsabilité ; que la clause de fourniture exclusive avec vente à prix imposé est une modalité commerciale qui ne modifie pas la nature du contrat » ; que le contrat conclu entre les parties, dénommés « contrat de cogérance », qui entre dans la catégorie des contrats de gérants non salariés, prévoient, notamment, que les cogérants, qui sont constitués par un couple, «sont indépendants dans leur gestion », sont rémunérés «par une commission fixe sur les ventes» et peuvent se faire substituer par un tiers sous leur responsabilité ; que M. X... (Mme Y...) soutient que le contrat de cogérance conclu avec la société Distribution Casino France s'analyserait, en réalité, en un contrat de travail ; que c'est à la partie qui invoque l'existence d'une relation salariale d'apporter la preuve du contrat de travail ; que le lien de subordination juridique est l'élément déterminant du contrat de travail, s'agissant du seul critère permettant de le différencier d'autres contrats comportant l'exécution d'une prestation rémunérée ; que ce sont les circonstances de fait qui déterminent l'existence d'une situation de dépendance dans l'exercice du travail ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que M. X... (Mme Y...) estime que l'absence d'autonomie dans la gestion du magasin qui est caractérisée par le caractère imposé de la décoration, de la présentation des rayonnages, des produits, de l'étiquetage serait de nature à établir l'existence d'un lien de subordination ; que néanmoins, il résulte des dispositions du texte précité que les modalités commerciales de l'exécution du contrat de gérance, y compris la clause de fourniture exclusive avec vente à prix imposé, ne sauraient modifier la nature du contrat, et ne relèvent pas des conditions de travail du gérant non salarié ; qu'il en est de même du passage des commandes, du processus de vente et de la gestion des périmés ; que M. X... (Mme Y...) produit un document intitulé « guide HACCP petit casino» et prétend qu'il s'agirait d'un véritable règlement intérieur ; qu'en réalité il s'agit, comme son nom l'indique, d'un guide destiné à informer les cogérants sur les protocoles à suivre dans le cadre de la gestion sanitaire des produits alimentaires, ces protocoles, largement répandues, ne sont pas l'oeuvre du mandant, mais s'appliquent à l'industrie et au commerce qui produisent, vendent ou utilisent des produits alimentaires ; qu'il n'est, par ailleurs, nullement allégué que le mandant contrôlerait l'application de ces protocoles et sanctionnerait le cas échéant le défaut d'application ; qu'en outre, n'est concernée que la modalité commerciale de l'exécution du contrat en vue d'assurer une parfaite conservation des produits et d'éviter d'exposer la clientèle à des risques sanitaires ; que M. X... (Mme Y...) prétend également trouver la preuve de l'existence d'un lien de subordination dans l'existence d'horaires de travail qui seraient imposés par la société Distribution Casino France ; que les cogérants devraient être présents avant l'ouverture du magasin pour recevoir les livraisons et après la fermeture pour communiquer le chiffre d'affaires au directeur commercial ; qu'en outre, la société Distribution Casino France contrôlerait les heures d'ouverture et de fermeture grâce à la mise en réseau informatique de la caisse enregistreuse ; que le contrat de cogérance prévoit en son article 1° que l'ouverture du magasin sera assurée « conformément aux coutumes locales des commerçants-détaillants d'alimentation générale» et il n'est nullement prouvé par le demandeur que la société Distribution Casino France lui aurait imposé des horaires d'ouverture du magasin qui ne seraient pas conformes aux usages locaux, ce qui serait, d'ailleurs, contraire à l'intérêt commercial commun ; qu'il est parfaitement établi que les livraisons ont lieu avant l'ouverture du magasin, ce qui nécessite la présence d'un des cogérants, sans que, cependant, il en résulte que la société Distribution Casino France impose une heure déterminée qui est fonction des contraintes du livreur et de l'organisation de sa tournée ; que quant au fait que la société Distribution Casino France soit à même de vérifier l'heure d'ouverture ou de fermeture du magasin, il s'agit toujours d'une modalité commerciale de l'exécution du contrat de gérance, sans que soient concernées les conditions de travail personnelles de chacun des cogérants qui peuvent être présents comme bon leur semble, soit tous les deux à l'ouverture, ce qui est peu probable, soit un seul et selon leur choix, ce qui leur laisse une totale autonomie pour organiser leur journée de travail ; que s'il est, demandé aux cogérants de faire des propositions de date pour la prise des congés payés, en raison de l'organisation de leur remplacement qui est pris en charge par la société Distribution Casino France, il n'est nullement établi que celle-ci leur aurait imposé une date non sollicitée ou les aurait sanctionnés en raison de leur refus d'accepter la date retenue par le mandant ; qu'en ce qui concerne le remplacement pendant le congé, il est dans la logique du mandat qu'en l'absence des cogérants le mandataire reprenne temporairement la responsabilité des biens sous mandat, le mandataire, qui a la faculté d'embaucher sous sa responsabilité, ne peut, cependant, se faire substituer par un tiers sans l'agrément du mandant ; qu'il ne résulte, par conséquent, nullement des circonstances précitées que le cogérant se voit imposer ses conditions de travail par la société Distribution Casino France ; que M. X... (Mme Y...) soutient que la société Distribution Casino France exerce un contrôle permanent et une ingérence quotidienne dans la tenue de la comptabilité grâce aux fiches de caisse et à la mise en réseau informatique des caisses ; que la société Distribution Casino France ne se contenterait pas de donner des orientations d'ordre général mais de véritables instructions impératives assorties de sanctions pouvant aller jusqu'à la résiliation du contrat de gérance ; que M. X... (Mme Y...) se réfère au contrat (article 16) qui prévoit que constituent des fautes lourdes les manquants de marchandises ou d'espèces provenant de la vente de même que le refus caractérisé de suivre la politique commerciale de l'entreprise ; que cependant, ce contrôle auquel s'ajoute l'inventaire périodique ne relève également que des modalités d'exécution du contrat de gérance et ne concerne pas les conditions de travail des cogérants ;
1) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que dans leurs conclusions d'appel, les époux X... faisaient valoir qu'ils ne jouissaient d'aucune liberté dans l'organisation de leur temps de travail et qu'ils étaient soumis à un horaire de travail imposé par la société Distribution Casino France, de sorte qu'ils étaient présents sur les lieux entre 5 et 6 heures du matin pour réceptionner la livraison et après la fermeture du magasin intervenant à 19h30 heures, pour effectuer les tâches administratives (ccl. p.17 à p.20) et versaient à ce titre les attestations de M. Z..., M. A..., M. B..., M. C..., Mlle D..., Mme E..., M. F..., Mme G..., Mlle H... et de Mlle I... ; qu'en écartant la demande de requalification du contrat de gérance en contrat de travail de droit commun, sans examiner et se prononcer sur ces attestations qui lui étaient soumises, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE dans leurs conclusions délaissées, les appelants soutenaient que la société Distribution Casino France contrôlait les jours et heures d'ouverture et les jours fériés, pour en déduire qu'ils étaient dans un lien de subordination (ccl. p.18, § 12 à p. 20, § 1 à 7) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen des écritures des consorts X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE dans leurs conclusions délaissées (ccl. p.26, 27, 29 et 30), les appelants se prévalaient des arrêts de la cour d'appel de Paris et de Rennes des 6 mai et 30 juin 2010, statuant dans un litige similaire qui avaient retenu un lien de subordination et soulignaient que la cour d'appel de Rennes, au regard des attestations de représentants de la direction chargés de contrôler les gérants dénommés « managers » avait jugé que « s'il est exact que ces attestations ne visent pas le cas précis des appelants, elles mettent en évidence le fait que cette politique commerciale était nationale et s'appliquait à l'ensemble des gérants » (arrêt, p.6, § 2) et versaient aux débats en ce sens les attestations de M. J... et de M. K..., anciens managers de la société Casino ; qu'en omettant d'examiner ces pièces, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4) ALORS QUE selon l'article L.782-1 du code du travail, devenu l'article L.7322-1 du mêmes code, les personnes qui exploitent, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des maisons d'alimentation de détail de consommation sont qualifiées "gérants non-salariés" lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de leur travail et leur laisse toute latitude d'embaucher du personnel ou de se substituer des remplaçants à leurs frais et sous leur entière responsabilité ; que la cour d'appel qui, par motifs adoptés, a constaté « qu'en ce qui concerne le remplacement pendant le congé, il est dans la logique du mandat qu'en l'absence des cogérants le mandataire reprenne temporairement la responsabilité des biens sous mandat, le mandataire, qui a la faculté d'embaucher sous sa responsabilité, ne peut, cependant, se faire substituer par un tiers sans l'agrément du mandant », ce dont il résulte que les époux X... ne disposaient d'aucune faculté de se substituer, sous leur responsabilité, leurs remplaçants, de sorte qu'ils étaient placés dans un lien de subordination caractérisé emportant application du droit commun du contrat de travail à durée indéterminée, n'a pas déduit de ses constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient et a violé l'article L.7322-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. et Mme X... de leurs demandes tendant au paiement d'heures supplémentaires et d'une indemnité pour travail dissimulé ;
AUX MOTIFS QUE s'il est exact que le gérant non salarié relevant des dispositions des articles L.7322-l et suivants du code du travail (anciens articles L.782-1 du même code) bénéficie de la législation sur la durée du travail et est en conséquence fondé à réclamer le paiement d'heures supplémentaires, c'est à la condition que ce gérant démontre que le propriétaire du fonds lui a imposé des. heures de travail excédant la durée légale ; que Mme X... ne démontre pas par la production de tickets de caisse enregistreuse, mentionnant, des horaires d'ouverture de son magasin au-delà de la durée légale du temps de travail, l'existence d'instructions émanant de la société Casino lui imposant de tels horaires ;
ET AUX MOTIFS QUE sur les heures supplémentaires, M. X... produit au dossier des décomptes manuscrits mais, comme dans le cas de son épouse, nulle pièce ne permet de retenir que la société Casino lui a imposé des dépassements d'horaire ; que sa demande en paiement d'heures supplémentaires sera à nouveau rejetée et le rejet de sa demande indemnitaire pour travail dissimulé est la conséquence directe du motif précédemment adopté ;
ALORS QUE le nombre d'heures de travail effectuées doit être examiné en fonction des tâches effectives et imposées pour satisfaire aux clauses contractuelles liant les parties ; qu'en jugeant que les décomptes d'heures versés aux débats par les époux X... ne prouvaient pas le dépassement de la durée légale du temps de travail à la demande de la société Distribution Casino France, sans rechercher si la multiplicité des tâches à accomplir, en dehors de la tenue du magasin pendant ses heures d'ouverture, n'induisait pas un tel dépassement pour respecter les clauses contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.3171-4 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. et Mme X... de leur demande indemnitaire au titre de la nullité de la clause de non-concurrence ;
AUX MOTIFS QUE sur la clause de non concurrence Mme X... ne peut obtenir une indemnité de ce chef puisque la relation contractuelle liant la partie n'est pas rompue ;
ET AUX MOTIFS QUE l'argumentation de M. X... étant rigoureusement similaire à l'argumentation développée par son épouse, la cour renvoie aux motifs précédemment adoptés pour rejeter ses demandes de requalification du contrat de co-gérance en un contrat de travail, de paiement des sommes de 2.395,30 euros et 76.779,57 euros au titre de frais exposés, ainsi que de paiement de la somme de 83.084 € au titre d'une clause de non-concurrence ;
ALORS QUE la stipulation dans le contrat de travail d'une clause de non-concurrence nulle cause nécessairement un préjudice ; qu'en écartant la demande des époux X... au motif inopérant que « la relation contractuelle liant la partie n'est pas rompue », la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil et L.7322-1 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à voir condamner la société Distribution Casino France à lui payer la somme de 15.804,30 € à titre d'indemnité complémentaire pour les heures de délégation ;
AUX MOTIFS QUE M. X... est représentant syndical gérant non salarié et délégué mandataire non salarié ; qu'en application de l'accord collectif du 18 juillet 1963, les gérants mandataires non salariés sont doté d'institutions représentatives ; que M. X... est représentant syndical gérant non salarié ; qu'en application de l'article 37-C, b, de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales supermarchés, hypermarchés, des gérants mandataires du 18 juillet 1963, dans sa mise à jour au 1er mars 2008, M. X... perçoit au titre de l'indemnisation de ses heures de délégation une indemnité de 106 euros par mois pour sa fonction de représentant syndical gérant non salarié au sein d'un "établissement succursales" regroupant habituellement plus de 500 gérants et 79,50 € par mois en sa qualité de délégué gérant mandataire non salarié ; que le droit conventionnel prévoit que cette indemnisation est forfaitaire ; qu'au motif qu'il existe une identité de nature entre le mandat conventionnel détenu par un gérant non salarié et ceux prévus par la loi, M. X... demande à la cour de retenir qu'il a droit à un crédit de 20 heures par mois au titre de sa délégation syndicale et de 15 heures par mois au titre de délégué du personnel conformément au code du travail ; puis, au motif que le droit conventionnel ne peut être moins favorable que la loi, M, X... demande ensuite à la cour de juger qu'il a droit à une rémunération de ses 35 heures mensuelles au moins égale au SMIC, partant lui ouvrant droit au paiement de la différence entre le forfaits de 185,50 euros et la rémunération minimum légale ; que son contradicteur réplique à bon droit que les gérants mandataires non salariés sont rémunérés au moyen de commissions proportionnelles aux ventes qu'ils réalisent et que c'est précisément la raison pour laquelle ils sont indemnisés de leurs heures de délégation de manière forfaitaire ; que s'il est exact que les gérants mandataires non salariés investis de mandats conventionnels de représentation peuvent bénéficier des dispositions légales, c'est sous réserves des aménagements expressément et limitativement prévus par l'accord précité ; qu'or, son article 37 aménage expressément et limitativement l'indemnisation des heures de délégation ; qu'il s'ensuit que la demande en paiement de la somme de 15.804,30 euros à ce titre sera rejetée ;
ALORS QU'un accord collectif national ne peut comporter des dispositions moins favorables que celles des lois et règlements ; que l'article 37 de l'accord collectif national concernant les gérants non salariés des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés "gérants mandataires" du 18 juillet 1963, dans sa mise à jour au 1er mars 2008, prévoit une indemnisation des heures de délégation forfaitaire inférieure au SMIC ; qu'en écartant la demande de M. X... au motif que l'article 37 de l'accord collectif précité aménageait expressément et limitativement l'indemnisation des heures de délégation quant cet aménagement constituait une disposition moins favorable que celle des lois et règlements, la cour d'appel a violé les articles L L.2251-1 et L.7322-1 du code du travail.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté les époux X... de leur demande tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de gérance aux torts exclusifs de la société Distribution Casino France ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... se plaint d'une baisse sensible de son chiffre d'affaires à la suite de l'installation le 9 mars 2007 d'une superette Casino située à 150 mètres de son magasin, d'une superficie du double par rapport à ce dernier, ouvert 7 jours sur 7, ce en totale illégalité avec les contrats de co-gérance qui prévoient un repos hebdomadaire ; que Mme X... ajoute que cette superette pratique de prix moins élevés que les prix pratiqués dans son magasin, de sorte que sa clientèle crée après 18 années de labeur, se détourne ; mais que les motifs d'une discrimination sont les suivants : origine, sexe, orientation sexuelle, âge, situation de famille, grossesse, caractéristiques génétiques, appartenance ou non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, opinions politiques, activités syndicales ou mutualistes, exercice normal du droit de grève, convictions religieuses, apparence physique, nom, état de santé ou handicap ; qu'or l'appelante n'invoque aucun de ces critères discriminants ; que si la cour avait été saisie d'une demande tendant à apprécier le comportement fautif de la société Casino dans l'exécution du contrat de co-gérance liant les parties, la thèse développée par Mme X... aurait pu être entendue ; mais qu'en liant sa saisine à la seule constatation de faits de discrimination, l'appelante s'est privée de cette opportunité ;
ET AUX MOTIFS QUE M. X... poursuit la résiliation judiciaire du contrat de gérance aux torts exclusifs de la société Distribution Casino France aux motifs suivants défaut de reconnaissance de son statut de salarié, non-paiement des heures supplémentaires, non prise en charge de ses frais exposés pour le compte de l'employeur, harcèlement, discrimination ; que le jugement entrepris ne traite pas de ces demandes subsidiaires ; le conseil de la société Casino conclut au rejet de cette demande de résiliation judiciaire en contestant tous les motifs invoqués ; que sur le défaut de reconnaissance d'un statut de salarié, le non-paiement d'heures supplémentaires et l'absence de prise en charge de frais exposés pour le compte de l'employeur : que les motifs précédemment adoptés font que c'est à bon droit que la société Casino n'a pas admis ce statut, qu'elle a refusé le paiement d'heures supplémentaires, ainsi que la prise en charge de divers frais d'exploitation, en conséquence de quoi cette société n'encourt à ce titre aucun reproche susceptible de fonder la demande de résiliation judiciaire ;
ET AUX MOTIFS QUE sur la discrimination, l'appelant n'invoque aucun des critères discriminants précédemment rappelés ; que les griefs évoqués par M. X... étant inexistants, sa demande de résiliation judiciaire sera rejetée ;
ALORS QUE le juge doit trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'au soutien de leur demande en résiliation judiciaire du contrat de gérance aux torts de la société Distribution Casino France, les époux X... invoquaient des faits de concurrence déloyale commis par cette dernière à leur préjudice, improprement qualifiés de discrimination ; qu'en écartant la demande au motif que les faits qui la justifiait étaient qualifiés de discrimination et qu'il ne lui était pas demandé d'apprécier le comportement fautif de la société distribution Casino France dans l'exécution du contrat de gérance, la cour d'appel a méconnu son office et a violé l'article 12 du code de procédure civile.
SIXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail du fait du caractère tardif de la décision de la société Distribution Casino France d'organiser une visite de reprise ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... est en arrêt de travail pour maladie non professionnelle depuis le 5 mars 2008 ; qu'elle a informé la société Casino, par courrier du 15 septembre 2010, qu'à la suite d'une décision en date du 8 septembre 2009, elle fut placée, en raison d'une invalidité réduisant sa capacité de travail des deux tiers, en catégorie 2, reconnue à dater du 1er octobre 2010 ; qu'elle sollicite l'organisation d'une visite médicale de reprise ; que le 28 avril 2011, la société Casino informait Mme X... qu'elle fera le nécessaire auprès de la médecine du travail pour organiser la visite de reprise ; que la société Casino admet donc la demande de Mme X... et son retard à s'exécuter n'est à ce jour source d'aucun préjudice ;
ALORS QUE le retard dans l'organisation d'une visite de reprise, imputable à celui sur qui pèse la décision de l'organiser, constitue un manquement grave de l'employeur à ses obligations, qui cause nécessairement un préjudice au gérant mandataire non salarié ; que la cour d'appel qui a constaté que le retard dans l'organisation de la visite de reprise de Mme X... était imputable à la société Distribution Casino France, ce dont il résultait que celle-ci avait gravement manqué à ses obligations et qu'il en résultait nécessairement un préjudice pour Mme X..., n'a pas déduit de ses constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient et a violé les articles 1134 du code civil, R.4624-21 et R.4624-22 du code du travail, ensemble l'article 9, alinéa 3, de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 concernant les maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés, « gérants mandataires ».


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-26418
Date de la décision : 09/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Accords collectifs - Accords particuliers - Gérants mandataires des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés du 18 juillet 1963, modifié et étendu - Institutions représentatives des gérants - Article 37 - Indemnisation des heures de délégation - Modalités - Détermination - Rémunération au moins égale au SMIC - Nécessité

STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS - Gérant - Gérant non salarié - Succursale de maison d'alimentation de détail - Bénéfice des avantages de la législation sociale - Etendue - Portée

Il résulte des articles L. 2251-1, L. 7322-1, L. 7322-3, L. 2143-17, L. 2315-3, L. 3232-1, L. 3232-3, D. 3231-5 et D. 3231-6 du code du travail que si les accords collectifs peuvent déterminer la rémunération minimum garantie des gérants non salariés des succursales de commerce de détail alimentaire compte tenu de l'importance de la succursale et des modalités d'exploitation de celle-ci, il demeure qu'en application de l'article L. 7322-3 du code du travail, la rémunération convenue ne peut jamais être inférieure au SMIC. En conséquence, lorsque le représentant est payé en tout ou en partie par des commissions, la somme qui lui est allouée pendant une période où du fait de ses fonctions il ne peut travailler, doit être calculée d'après son salaire réel et être au moins égale au SMIC


Références :

article 37-C, b, de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés et hypermarchés concernant les gérants mandataires du 18 juillet 1963, modifié
articles L. 2251-1, L. 7322-1, L. 7322-3, L. 2143-17, L. 2315-3, L. 3232-1, L. 3232-3, D. 3231-5 et D. 3231-6 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15 septembre 2011

Sur la nécessité d'une rémunération au moins égale au SMIC s'agissant d'un gérant non salarié, à rapprocher :Soc., 24 mars 1988, pourvoi n° 85-43587, Bull. 1988, V, n° 217 (rejet). Sur la portée de l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés et hypermarchés concernant les gérants mandataires du 18 juillet 1963, modifié, à rapprocher :Soc., 13 janvier 2010, pourvoi n° 09-60107, Bull. 2010, V, n° 8 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 jan. 2013, pourvoi n°11-26418, Bull. civ. 2013, V, n° 4
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, V, n° 4

Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Lalande
Rapporteur ?: M. Linden
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.26418
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