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03/07/2012 | FRANCE | N°10-23013

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 juillet 2012, 10-23013


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 juin 2010) que Mme X... a travaillé pour le groupement d'intérêt économique Pari Mutuel Hippodrome (GIE PMH) à temps partiel du 2 août 1987 au 31 mars 2004, date de son départ à la retraite ; que le bénéfice de l'allocation de retraite supplémentaire (ARS) versée par l'organisme de retraite et de prévoyance des employés des sociétés de courses (ORPESC) lui ayant été refusé au motif qu'elle n'avait pas travaillé au minimum 200 he

ures par trimestre durant quinze ans, elle a fait assigner l'ORPESC devant le trib...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 juin 2010) que Mme X... a travaillé pour le groupement d'intérêt économique Pari Mutuel Hippodrome (GIE PMH) à temps partiel du 2 août 1987 au 31 mars 2004, date de son départ à la retraite ; que le bénéfice de l'allocation de retraite supplémentaire (ARS) versée par l'organisme de retraite et de prévoyance des employés des sociétés de courses (ORPESC) lui ayant été refusé au motif qu'elle n'avait pas travaillé au minimum 200 heures par trimestre durant quinze ans, elle a fait assigner l'ORPESC devant le tribunal de grande instance pour dire que ses statuts étaient contraires aux principes d'égalité et de non-discrimination entre hommes et femmes ;
Attendu que l'ORPESC fait grief à l'arrêt de dire que l'article 21 de ses statuts était inopposable à Mme X..., que celle-ci avait droit au bénéfice de l'ARS et d'ordonner une expertise pour déterminer les sommes dues alors, selon le moyen :
1°/ que l'article 141 du Traité CE, devenu article 157 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, dispose que « chaque État membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur » et précise qu'« aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier » ; que l'octroi d'une allocation de retraite (ARS) par un régime qui n'est financé ni par l'employeur, ni par des cotisations sur les salaires versés aux salariés à l'entreprise ne constitue pas une rémunération au sens de ce texte ; qu'au cas présent, l'ORPESC était un organisme à vocation sociale ayant notamment pour objet d'assurer aux salariés des sociétés de course une allocation de retraite ; que ce régime était financé par les gains non réclamés par les parieurs répartis, en application de l'articles 32 du décret n° 83-878 du 4 octobre 1983 puis de l'article 36 du décret n° 97-456 du 5 mai 1997, par la Fédération Nationale des Courses Françaises après approbation des Ministres de l'Agriculture et du Budget ; que dès lors que les prestations de retraite supplémentaires versées aux anciens salariés des sociétés de course résultaient uniquement de la redistribution de sommes qui n'étaient pas la propriété de l'employeur, mais celle de l'Etat, elles ne constituaient pas des rémunérations au sens de l'article 141 du Traité CE, devenu 157 TFUE, lequel n'était donc pas applicable en la cause ; qu'en estimant néanmoins devoir faire application des dispositions de ce texte, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence d'une contribution directe ou indirecte de la société Pari Mutuel Hippodrome, employeur de Mme X..., en vue du versement à ses salariés de l'allocation de retraite prévue par les statuts de l'ORPESC, a privé sa décision de toute base légale au regard l'article 141 du Traité CE, devenu 157 TFUE, et de l'article 36 du décret n° 97-456 du 5 mai 1997 ;
2°/ que la discrimination indirecte est celle qui, sans utiliser le critère du sexe pour justifier une différence de traitement, a pour effet de désavantager une population composée de manière prépondérante de salariés de l'un ou l'autre sexe ; que l'existence d'une telle discrimination au regard d'un avantage implique, d'une part, de prendre en compte l'ensemble des travailleurs couverts par la norme prévoyant l'avantage en cause et, d'autre part, de comparer la part de travailleurs ne bénéficiant pas de l'avantage au sein des mains d'oeuvre masculines et féminines ; que cette preuve statistique incombe à celui qui invoque l'existence d'une discrimination ; qu'au cas présent, le régime des ARS défini par les statuts de l'ORPESC était destiné, non pas aux seuls salariés du GIE PMH, mais aux salariés de l'ensemble des sociétés de courses adhérentes ou anciennes adhérentes ainsi que des groupements des sociétés de course approuvés par l'autorité de tutelle justifiant d'au moins deux cents heures rémunérées par trimestre, ce qui inclut un très grand nombre de salariés à temps partiel ; que l'existence d'une discrimination indirecte ne pouvait donc s'apprécier au regard des salariés de l'ensemble des sociétés de courses adhérentes à l'ORPESC travaillant moins de 200 heures par trimestre ; qu'en estimant néanmoins que la comparaison ne pouvait porter sur l'« effectif d'un même établissement » et que la discrimination serait caractérisée du fait que « le temps partiel affecte essentiellement les femmes au sein du GIE PMH », la cour d'appel a violé l'article 141 du Traité CE, devenu 157 TFUE ;
3°/ que les dispositions relatives au travail à temps partiel sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'à leurs salariés ; qu'au cas présent, il était constant que l'ORPESC n'a jamais été l'employeur de Mme X..., de sorte que les dispositions relatives au temps partiel n'étaient pas applicables au litige ; qu'en estimant néanmoins devoir condamner l'ORPESC à verser à Mme X... une allocation de retraite à compter du 1er avril 2004, au motif que l'article 21 des statuts de l'ORPESC subordonnant le bénéfice de l'allocation à l'accomplissement de 200 heures par trimestre aurait été contraire à l'article L. 3123-11 L. 212-4-5 ancien , du code du travail relatif à l'exécution du contrat de travail à temps partiel, les premiers juges ont violé ce texte par fausse application, ensemble l'article L. 3111-1 du code du travail ;
Mais attendu d'abord que pour l'application de l'article 141 du Traité instituant la Communauté européenne (devenu 157 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne) est seul déterminant le critère tiré de la constatation que la prestation litigieuse trouve son origine dans l'affiliation à un régime visant une catégorie particulière de travailleurs, salariés ou indépendants, réunis dans le cadre d'une entreprise ou d'un groupement d'entreprises, d'une branche économique ou d'un secteur professionnel ou interprofessionnel, peu important ses modalités de financement ou de gestion ;
Et attendu qu'en retenant que l'allocation de retraite supplémentaire versée par l'ORPESC constituait un avantage payé indirectement par l'employeur en raison de l'emploi du travailleur au sens de l'article 141 du Traité CE et que le régime de retraite complémentaire du personnel actif ou retraité des sociétés et des écuries de courses qui concerne les salariés d'un secteur professionnel déterminé, était un régime professionnel de sécurité sociale au sens du droit communautaire auquel s'appliquait directement l'article 141 du Traité CE, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Attendu ensuite que lorsqu'il convient d'examiner si une réglementation est conforme aux exigences de l'article 141, paragraphe 1, du Traité CE, c'est en principe le champ d'application de cette réglementation qui détermine le cercle des personnes susceptibles d'être incluses dans la comparaison ;
Et attendu qu'après avoir constaté que la condition prévue par l'article 21 des statuts de l'ORPESC, d'avoir été rémunéré au moins 200 heures par trimestre pendant quinze ans pour pouvoir bénéficier du régime de l'ARS, affectait les salariés à temps partiel, la cour d'appel a relevé d'une part, que parmi les sept entités relevant du régime de retraite complémentaire, seul le GIE PMH employait un nombre significatif de travailleurs à temps partiel, et d'autre part, qu'au sein de cette structure, la part des travailleurs féminins à temps partiel par rapport au total des travailleurs féminins (81,45 %) était plus élevée que celle des hommes à temps partiel par rapport au total des travailleurs masculins (40 %) ; qu'ayant ainsi fait ressortir que parmi l'ensemble des travailleurs soumis à ladite réglementation, un pourcentage considérablement plus élevé de travailleurs féminins que masculins était affecté, elle en a exactement déduit, en l'absence de justification objective par l'ORPESC, que l'article 21 de ses statuts constituait une violation du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins sous la forme d'une discrimination indirecte à l'encontre des femmes ;
Attendu enfin que contrairement à ce que soutient le moyen en sa troisième branche, la cour d'appel a fondé sa décision non pas sur l'article L. 3123-11 du code du travail mais sur l'article 141 du Traité CE ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'ORPESC aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'ORPESC à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juillet deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour l'association Organisme de retraite et de prévoyance des employés des sociétés de courses
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'article 21 des statuts de l'ORPESC était inopposable à Madame X..., d'AVOIR dit que Madame X... avait droit au bénéfice de l'ARS prévue par les statuts de l'ORPESC à compter de son départ en retraite le 1er avril 2004, et d'AVOIR ordonné une expertise pour déterminer les sommes dues à Madame X... depuis le 1er avril 2004 et le montant de la pension supplémentaire lui revenant mensuellement ;
AUX MOTIFS QUE « que l'ORPESC critique le jugement entrepris en soutenant que l'article 22 de ses statuts/règlements, en ce qu'il conduit à ne pas valider de droits de retraite au titre d'un trimestre lorsque le nombre d'heures travaillées est inférieur à 200, ne viole pas le principe d'égalité ni au regard du Traité de la Communauté européenne ni au regard de la Constitution française ; que Madame X... maintient que dès lors que les femmes sont plus nombreuses à travailler à temps partiel au sein du GIE PMH, l'article 21 crée une discrimination indirecte entre les hommes et les femmes en privant celles-ci du bénéfice du versement de l'Allocation de Retraite Supplémentaire (ARS) ; qu'il convient de relever à titre liminaire que le tribunal s'est prononcé sur l'inopposabilité de l'article 21 des statuts de l'ORPESC à Madame X... qui l'avait saisi d'une telle demande et non de celle de l'article 22 qui porte sur le calcul de l'ARS ; que ceci ayant été rappelé, que l'article 21 des statuts de l'ORPESC, association qui se compose de membres adhérents dont le GIE PMH, ancien employeur de Madame X..., fait partie, pose les conditions d'admission au régime de l'ARS ; qu'il dispose que : « Relèvent des ARS en tant que membres participants les salariés comptant quinze années de service auprès des membres adhérents. Par année de service on entend toute période au cours de laquelle le membre participant justifiera avoir été salarié pendant quatre trimestres consécutifs. Par trimestre on entend tout trimestre au cours duquel le salarié aura été rémunéré pendant au moins deux cents heures. Les interruptions d'activités seront validées dans les mêmes conditions que celles du régime de base de la sécurité sociale » ; que cet article conditionne ainsi l'admission au régime de l'ARS à l'ancienneté déterminée par le nombre d'heures travaillées par trimestre ce qui a pour effet d'en priver les salariés à temps partiel et partant, essentiellement les femmes, plus nombreuses que les hommes à exercer des fonctions à temps partiel au sein du GIE PMH, ce point n'étant pas contesté par l'appelant ; que l'ORPESC prétend, pour la première fois en cause d'appel, que les dispositions de l'article 141 du Traité CE selon lesquelles « chaque Etat membre assurer l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail de même valeur » dont se prévaut Madame X... ne lui sont pas opposables et, à supposer qu'elles le soient, affirme que le régime de l'ARS ne crée aucune discrimination entre les sexes, la comparaison devant s'opérer globalement en prenant en compte l'ensemble des salariés relevant dudit régime et non pas se restreindre au seul PMH ; mais que s'agissant des dispositions de l'article 141 précitées dont l'ORPESC estime qu'elles lui sont inopposables au motif que la jurisprudence communautaire ne traiterait que des régimes de retraite institués volontairement par une entreprise ou une profession et matérialisant un lien direct entre l'avantage de retraite et le revenu d'activité ce qui exclurait l'extension de l'application du principe d'égalité aux régimes de l'ARS dont le financement est assuré par les seuls gains non réclamés et donc indépendants de l'emploi, cette affirmation est contraire à l'interprétation que la Cour de justice de l'Union européenne a faite de ces dispositions (arrêt C-366/99 et C-206/00 des 29 novembre et 13 décembre 2001) ; qu'en effet, d'une part la CJUE a, dans les deux arrêts susvisés, placé au rang des régimes professionnels au sens de l'article 141 du traité CE le régime des pensions civiles et militaires de l'Etat auquel s'applique le principe d'égalité édicté par ledit article ; que cette interprétation a été réaffirmée par arrêt du 12 septembre 2002 (C-351-00) ; que, d'autre part, la Cour de justice qualifie de rémunération liée à l'emploi les prestations octroyées au titre d'un régime de pension qui est fonction, pour l'essentiel, de l'emploi qu'occupait l'intéressé, ce qui est le cas en l'espèce ; qu'elle rappelle dans l'arrêt précité que les modalités de financement et de gestion du régime de pension ne constituent pas un élément décisif pour apprécier si ledit régime relève de l'article 141 du traité ; qu'ainsi, le régime de l'ARS entre bien dans le champ d'application de l'article 141 du Traité CE ; que l'ORPESC soutient qu'en toute hypothèses, il convient de relever que la démonstration juridique reviendrait non pas à écarter radicalement le principe d'égalité mais à en imposer une application au travers du principe de « discrimination indirecte » ; qu'il fait valoir pour la première fois devant la cour qu'il doit être procédé à une comparaison globale, c'est-à-dire une comparaison portant sur l'ensemble des salariés relevant du régime de l'ARS et non pas à une comparaison restreinte au GIE PMH ; qu'il affirme que le résultat de cette comparaison ne relève aucune différence considérable entre la proportion d'hommes et de femmes employés respectivement à temps partiel pour une durée inférieure à 200 heures par trimestre ; que l'appelant produit à l'appui de son argumentation un tableau sur lequel figure l'effectif des sept structures relevant du régime litigieux ainsi que la répartition du temps de travail des hommes et des femmes supérieur et inférieur à 200 heures par trimestre ; que ce tableau, outre qu'il concerne un effectif existant au 31 juillet 2009 et non en 2004, est dénué de force probante dès lors que les informations sur lesquelles il repose n'ont pas été communiquées ; que, par ailleurs, Madame X... fait justement remarquer que parmi les sept entreprises relevant du régime ORPESC seules deux emploient des salariés à temps partiel, soit le Groupement Technique des Hippodromes Parisiens, GTHP, et le PMH, étant relevé que le GTHP n'en compte que 9 ; que la comparaison ne peut porter que sur l'effectif d'un même établissement au sein duquel les conditions de travail des salariés sont les mêmes ; qu'ainsi que l'a relevé le tribunal, il est établi que le temps partiel affecte essentiellement les femmes du GIE PMH qui employait au 8 novembre 2004, 63 % de femmes et 37 % d'hommes et que 81,45 % des salariés étaient employées à temps partiel pour 40 % des salariés, ce qui constitue un écart très important ; que l'ORPESC n'apporte aucun élément objectif étranger à toute discrimination fondée sur le sexe justifiant une différence de traitement ; que l'article 21 des statuts de l'ORPESC présente donc un caractère discriminatoire indirect en violation des dispositions de l'article 41 du Traité de la Communauté européenne ; que partant, il doit être déclaré inopposable à Madame X... abstraction faite de tout autre moyen surabondant, et le jugement entrepris confirmé ; que l'équité commande d'allouer à Madame X... la somme de 4.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel » ;
AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE « Madame X... a travaillé à temps partiel au sein du GIE PMH du 2 août 1987 au 31 mars 2004 ; qu'aux termes de l'article 29.6 de la convention collective du 28 décembre 2000 du GIE PMH, les salariés bénéficient de la protection sociale découlant des statuts de l'ORPESC ; que Madame X... soutient que cet organisme ne peut lui opposer qu'elle ne remplit pas la condition de rémunération pendant « au moins deux cents heures par trimestre » posée par l'article 21 des statuts pour lui refuser le bénéfice de l'Allocation de Retraite Supplémentaire (ARS) du fait de l'exercice de son activité de salariée à temps partiel ; qu'elle invoque à cet égard l'illégalité de l'article 21 en raison de son caractère discriminatoire indirect sur le fondement notamment des dispositions de l'article 119 du Traité de Rome qui prône l'égalité de rémunération entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail, du principe constitutionnel d'égalité de traitement auquel l'arrêté ministériel approuvant les statuts de l'ORPESC ne peut déroger, de l'article L. 212-4-5 du code du travail relatif à l'égalité de traitement entre salariés à temps partiel et salariés à temps complet, ainsi que du caractère purement potestatif au sens de l'article 1147 du code civil des obligations tirées de cet article ; que le défendeur soutient que le régime des ARS s'apparente plus à une libéralité qu'à un droit dans la mesure où il est financé par les gains non réclamés et ne repose pas sur un financement obligatoire de ses membres participants, fait valoir qu'il existe des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe au regard du caractère limité des ressources du régime des ARS qui ne permettait pas d'en étendre le bénéfice à tous les salariés et du caractère pleinement objectif du critère du nombre minimal d'heures adopté exclusif de tout caractère potestatif, ajoutant que la prétendue différence de traitement ne présente aucun caractère considérable quant à la proportion de femmes et d'hommes travaillant à temps partiel dans le GIE par rapport à celle du niveau national ; que l'article 21 des statuts de l'ORPESC relatif aux conditions d'admission au régime des ARS dispose : « Relèvent du régime des ARS en tant que membres participants les salariés comptant quinze années de service auprès des membres adhérents. Par année de service on entend toute période au cours de laquelle le membre participant justifiera avoir été salarié pendant quatre trimestres consécutifs. Par trimestre on entend tout trimestre au cours duquel le salarié aura été rémunéré pendant au moins deux cents heures. Les interruptions d'activités seront validées dans les mêmes conditions que celles du régime de base de la sécurité sociale » ; qu'en posant comme condition exclusive d'admission au régime de l'Allocation de Retraite Supplémentaire (ARS) une ancienneté reposant sur un mode de calcul prenant en compte une durée du travail d'au moins deux cents heures par trimestre, l'ORPESC a exclu les salariés à temps partiel qui ne la remplissent pas du bénéfice de ces prestations ; que Madame X... établit que le travail à temps partiel au sein du GIE PMH touche essentiellement des femmes puisqu'en effet l'on y dénombrait au 8 novembre 2004, 63 % des femmes et 37 % d'hommes et que 81,45 % des salariés de sexe féminin était employées à temps partiel pour 40 % des salariés de sexe masculin ; qu'ainsi cette mesure frappé un nombre beaucoup plus important de femmes que d'hommes ; que pour autant cette mesure n'est pas objectivement justifiée par des facteurs étrangers à toute discrimination sur le sexe, puisqu'en effet le déséquilibre du régime allégué et non établi par des éléments comptables ne saurait en tout état de cause expliquer en lui-même un tel choix ; qu'il s'ensuit qu'en excluant du bénéfice des ARS les salariés travaillant moins de deux cents heures par trimestre alors que les femmes sont beaucoup plus nombreuses que les hommes parmi les travailleurs à temps partiel, l'article 21 des statuts présente un caractère discriminatoire indirect en violation des dispositions de l'article 119 du Traité de Rome (devenu l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne) relatives à l'égalité de rémunération entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail ; que de surcroît, cet article porte atteinte au principe constitutionnel d'égalité auquel nul ne peut déroger ; qu'à cet égard, il convient d'observer que si le financement des ARS, repose sur les gains de cours non réclamées et non sur le versement d'une cotisation du salarié, il ne saurait pour autant s'agir d'une libéralité en ce que ce versement trouve sa contrepartie dans le travail effectué pour le compte du GIE PMH, fondateur de l'ORPESC ; que de même, l'article 21 des statuts n'est pas conforme à l'article L. 212-4-5 du code du travail qui ne permet que de prévoir des modalités spécifiques d'application des droits conventionnels pour les salariés à temps partiel et non d'exclure un salarié du bénéfice de la convention collective du seul fait qu'il exerce un travail à temps partiel ; qu'en excluant Madame X... du bénéfice des ARS au seul motif qu'elle n'a travaillé à temps partiel pour moins de 200 heures, l'ORPESC a violé l'article L. 212-4-5 du code du travail ; que l'ORPESC ne peut valablement soutenir que ce dernier article ne lui est pas opposable en ce qu'il régit les relations des salariés avec l'employeur, alors même que les conditions d'admission au régime des ARS sont fixées par ses statuts et que le financement en est assuré par l'employeur ; qu'enfin, si la condition d'un temps de travail minimum est posée pour bénéficier notamment du régime général de l'assurance maladie, de l'assurance invalidité ou de l'assurance chômage, force est de reconnaître qu'il s'agit d'une condition alternative avec celle relative au versement de cotisations sur une base minimum qui est imposée aux salariés à temps partiel qui bénéficient des prestations sociales ; qu'en conséquence, il convient de dire que l'article 21 des statuts de l'ORPESC est inopposable à Madame X... dont l'ancienneté pour déterminer ses droits doit être calculée comme si elle avait travaillé à temps plein ; qu'il convient de même de dire que Madame X... a droit au bénéfice de l'ARS prévue par les statuts de l'ORPESC à compter de son départ en retraite le 1er avril 2004 et de désigner un expert avec la mission et dans les conditions visées au dispositif du présent jugement ; qu'il convient de dire que Madame X... devra verser une provision de 2.000 euros au greffe du tribunal avant le 31 janvier 2007 ; que la somme de 3.000 euros sera allouée à Madame X... en vertu de l'article 700 du code de procédure civile » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'article 141 du Traité CE, devenu article 157 TFUE, dispose que « chaque État membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur » et précise qu'« aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier » ; que l'octroi d'une allocation de retraite (ARS) par un régime qui n'est financé ni par l'employeur, ni par des cotisations sur les salaires versés aux salariés à l'entreprise ne constitue pas une rémunération au sens de ce texte ; qu'au cas présent, l'ORPESC était un organisme à vocation sociale ayant notamment pour objet d'assurer aux salariés des sociétés de course une allocation de retraite ; que ce régime était financé par les gains non réclamés par les parieurs répartis, en application de l'articles 32 du décret n° 83-878 du 4 octobre 1983 puis de l'article 36 du décret n° 97-456 du 5 mai 1997, par la Fédération Nationale des Courses Françaises après approbation des Ministres de l'Agriculture et du Budget ; que dès lors que les prestations de retraite supplémentaires versées aux anciens salariés des sociétés de course résultaient uniquement de la redistribution de sommes qui n'étaient pas la propriété de l'employeur, mais celle de l'Etat, elles ne constituaient pas des rémunérations au sens de l'article 141 du Traité CE, devenu 157 TFUE, lequel n'était donc pas applicable en la cause ; qu'en estimant néanmoins devoir faire application des dispositions de ce texte, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence d'une contribution directe ou indirecte de la société PMH, employeur de Madame X..., en vue du versement à ses salariés de l'allocation de retraite prévue par les statuts de l'ORPESC, a privé sa décision de toute base légale au regard l'article 141 du Traité CE, devenu 157 TFUE, et de l'article 36 du décret n° 97-456 du 5 mai 1997 ;
ALORS, D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE la discrimination indirecte est celle qui, sans utiliser le critère du sexe pour justifier une différence de traitement, a pour effet de désavantager une population composée de manière prépondérante de salariés de l'un ou l'autre sexe ; que l'existence d'une telle discrimination au regard d'un avantage implique, d'une part, de prendre en compte l'ensemble des travailleurs couverts par la norme prévoyant l'avantage en cause et, d'autre part, de comparer la part de travailleurs ne bénéficiant pas de l'avantage au sein des mains d'oeuvre masculines et féminines ; que cette preuve statistique incombe à celui qui invoque l'existence d'une discrimination ; qu'au cas présent, le régime des ARS défini par les statuts de l'ORPESC était destiné, non pas aux seuls salariés du GIE PMH, mais aux salariés de l'ensemble des sociétés de courses adhérentes ou anciennes adhérentes ainsi que des groupements des sociétés de course approuvés par l'autorité de tutelle justifiant d'au moins deux cents heures rémunérées par trimestre, ce qui inclut un très grand nombre de salariés à temps partiel ; que l'existence d'une discrimination indirecte ne pouvait donc s'apprécier au regard des salariés de l'ensemble des sociétés de courses adhérentes à l'ORPESC travaillant moins de 200 heures par trimestre ; qu'en estimant néanmoins que la comparaison ne pouvait porter sur l'« effectif d'un même établissement » et que la discrimination serait caractérisée du fait que « le temps partiel affecte essentiellement les femmes au sein du GIE PMH », la cour d'appel a violé l'article 141 du Traité CE, devenu 157 TFUE ;
ALORS, ENFIN, QUE les dispositions relatives au travail à temps partiel sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'à leurs salariés ; qu'au cas présent, il était constant que l'ORPESC n'a jamais été l'employeur de Madame X..., de sorte que les dispositions relatives au temps partiel n'étaient pas applicables au litige ; qu'en estimant néanmoins devoir condamner l'ORPESC à verser à Madame X... une allocation de retraite à compter du 1er avril 2004, au motif que l'article 21 des statuts de l'ORPESC subordonnant le bénéfice de l'allocation à l'accomplissement de 200 heures par trimestre aurait été contraire à l'article L. 3123-11 L. 212-4-5 ancien , du code du travail relatif à l'exécution du contrat de travail à temps partiel, les premiers juges ont violé ce texte par fausse application, ensemble l'article L. 3111-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-23013
Date de la décision : 03/07/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Discrimination entre salariés - Discrimination fondée sur le sexe - Discrimination indirecte - Critères - Appréciation - Modalités - Détermination

Lorsqu'il convient d'examiner si une réglementation est conforme aux exigences de l'article 141 paragraphe 1 du Traité CE, c'est en principe le champ d'application de cette réglementation qui détermine le cercle des personnes susceptibles d'être incluses dans la comparaison. Doit être approuvé l'arrêt qui, pour déclarer, en l'absence de justification objective étrangère à toute discrimination fondée sur le sexe, l'article 21 des statuts de l'organisme de retraite et de prévoyance des employés des sociétés de courses inopposable à la salariée en ce qu'il constitue une discrimination indirecte à l'encontre des femmes, constate que la condition prévue par ce texte, d'avoir été rémunéré au moins 200 heures par trimestre pendant quinze ans pour pouvoir bénéficier de l'allocation de retraite supplémentaire, affecte les salariés à temps partiel et relève que, parmi l'ensemble des travailleurs soumis à ladite réglementation, la part des femmes à temps partiel par rapport au total des travailleurs féminins (81,45%) est considérablement plus élevée que celle des hommes à temps partiel par rapport au total des travailleurs masculins (40%)


Références :

Sur le numéro 2 : article 141 du Traité CE (devenu article 157 du Traité sur le fonctionnement de l'UE)

article 36 du décret n° 97-456 du 5 mai 1997

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 juin 2010

Sur le n° 2 : Sur un cas de discrimination indirecte fondée sur le sexe, à rapprocher :Soc., 6 juin 2012, pourvoi n° 10-21489, Bull. 2012, V, n° 168 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 jui. 2012, pourvoi n°10-23013, Bull. civ. 2012, V, n° 206
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, V, n° 206

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Weissmann
Rapporteur ?: Mme Mariette
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 06/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.23013
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