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29/06/2011 | FRANCE | N°10-13807

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 29 juin 2011, 10-13807


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Jean X... est décédé le 26 juin 1998, en laissant pour lui succéder trois enfants issus de deux premiers mariages et Mme Béatrice Y..., son épouse en troisième noces commune en biens à laquelle il avait fait donation le 13 juin 1980, pour le cas ou elle lui survivrait, à son choix, de l'usufruit de l'universalité de tous les biens et droits immobiliers et mobiliers qui composeront sa succession sans aucune exception, ou du quart en pleine propriété et des trois quarts en usufruit, ou de l

a quotité disponible ordinaire ; que celle-ci a opté le 7 novembre ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Jean X... est décédé le 26 juin 1998, en laissant pour lui succéder trois enfants issus de deux premiers mariages et Mme Béatrice Y..., son épouse en troisième noces commune en biens à laquelle il avait fait donation le 13 juin 1980, pour le cas ou elle lui survivrait, à son choix, de l'usufruit de l'universalité de tous les biens et droits immobiliers et mobiliers qui composeront sa succession sans aucune exception, ou du quart en pleine propriété et des trois quarts en usufruit, ou de la quotité disponible ordinaire ; que celle-ci a opté le 7 novembre 2007 pour l'usufruit de l'universalité de la succession de son époux ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 792 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 ;
Attendu que pour retenir le recel successoral commis par Mme Y... sur la somme de 69 979,71 euros, l'arrêt attaqué retient qu'elle avait prélevé sur le compte qu'elle détenait en commun avec son époux, une somme provenant de la vente d'un bien propre de ce dernier, puis sciemment dissimulé le sort de ces fonds, qui n'avait été révélé qu'à l'occasion de l'instance de référé expertise diligentée par les héritiers, quand ils auraient dû être portés à l'actif de la succession, peu important l'option ultérieurement exercée en exécution de la donation ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant opté pour l'usufruit de la totalité de la succession, Mme X..., réputée avoir, dès l'ouverture de celle-ci, la jouissance de tous les biens la composant, ne disposait pas de droits de même nature que ceux des autres héritiers, de sorte qu'il n'y avait pas lieu à partage entre elle et ces derniers et que la dissimulation des fonds ne pouvait être qualifiée de recel successoral, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu' il a dit que Mme Y... s'était rendue coupable de recel successoral concernant la somme de 60 979,71 euros et, en conséquence, condamné celle-ci à restituer cette somme à MM. Jean-Louis et Bernard X..., en qualité d'héritiers réservataires, dit que cette somme porterait intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 1998, que les intérêts se capitaliseraient annuellement dans les conditions de l'article 1154 du code civil et que Mme Béatrice Y... ne pourrait prétendre à aucune part de cette somme divertie dans les opérations de liquidation partage de la succession, l'arrêt rendu le 8 décembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté pour tardiveté les conclusions déposées par Mme Y... le 30 octobre 2009 ainsi que les nouvelles pièces qui y sont annexées ;
AUX MOTIFS QUE Mme Y... a déposé des conclusions le 30 octobre 2009 soit deux jours avant la clôture, alors que la partie adverse l'avait sommée de conclure à deux reprises les 13 juillet et 30 septembre 2009. De nouvelles pièces étant annexées à ces conclusions que les intimés n'ont pas eu le temps d'examiner, il y a lieu de faire droit à la demande rejet ;
ALORS QUE le juge ne peut écarter des débats les conclusions déposées avant l'ordonnance de clôture sans préciser les circonstances particulières qui ont empêché de respecter le principe de la contradiction ; qu'il ressort de la procédure que les conclusions déposées par Mme Y... le 30 octobre 2009, soit deux jours avant la clôture, étaient strictement identiques à celles déposées le 17 juillet 2008 et se bornaient à produire trois pièces nouvelles ; qu'en ne faisant pas ressortir les raisons pour lesquelles le délai restant disponible avant la clôture était insuffisant pour permettre aux consorts X... de procéder à l'examen des trois nouvelles pièces versées aux débats par Mme Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 15 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que Mme Béatrice Y... s'était rendue coupable de recel successoral concernant la somme de 60.979,71 € et, en conséquence, de l'AVOIR condamnée à restituer cette somme à MM. Jean-Louis et Bernard X..., en qualité d'héritier réservataire, dit que cette somme porterait intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 1998 et que les intérêts se capitaliseraient annuellement dans les conditions de l'article1154 du Code civil et dit que Mme Béatrice Y... ne pourrait prétendre à aucune part de cette somme divertie dans les opérations de liquidation partage de la succession ;
AUX MOTIFS QUE concernant les 400.000 francs, c'est à juste titre et par des motifs que la Cour adopte entièrement que le premier juge a considéré que Mme Y... a sciemment dissimulé cette somme et s'est rendue coupable d'un recel successoral en retenant notamment qu'elle n'apportait pas la preuve de ce que cette somme constituerait pour partie un dédommagement du paiement par la communauté d'une partie du bien et une gratification pour l'aide apportée à son époux dépassant les charges normales du mariage, qu'elle avait sciemment occulté le sort de ces fonds et que la lettre de son conseil en date du 28 décembre 1998 n'apportait aucune réponse aux question polies mais explicites du notaire ; que le fait que le notaire ait pu avoir connaissance de la vente ne change rien au fait que cette somme n'apparaissait plus sur aucun compte et qu'en conséquence le notaire ne pouvait l'indiquer dans l'actif de la succession ; que, par ailleurs, quelle que soit l'option successorale choisie par Mme Y..., cette somme devait se trouver sur les comptes de la succession ou de l'indivision à l'ouverture de la succession et être déclarée comme actif de ladite succession pour que toutes les parties en aient connaissance ; que le fait que la communauté n'ait pas été liquidée ne fait disparaître ni l'élément matériel, ni l'élément moral du recel successoral car il appartenait au seul notaire de procéder à sa liquidation et non à Mme Y... de se servir elle-même s'agissant d'un propre de son époux qui n'entrait pas dans l'actif communautaire ; qu'enfin, le fait que cela ait pu être M. X... lui-même qui ait transféré la somme de 400.000 francs sur le compte personnel de son épouse, ce qui n'est pas démontré, n'enlève rien au recel successoral dont elle serait, dans ce cas-là complice ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que Mme Y... s'est rendue coupable d'un recel successoral de la somme de 60.979,61 €, l'a condamné à restituer cette somme à Messieurs Jean-Louis et Bernard X... avec intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 1998, ordonné la capitalisation des intérêts et a dit qu'elle ne pourrait prétendre à aucune part sur la somme divertie ;
1) ALORS QU'en l'absence d'indivision entre l'usufruitier et les nus-propriétaires, dont les droits sont de nature différente, il ne peut y avoir lieu à partage entre le premier et les seconds ; qu'ainsi, faute de partage, le conjoint commun en biens survivant usufruitier de la totalité de la succession de son époux précédé ne peut commettre un recel d'un effet de la succession au préjudice des héritiers, ceux-ci n'ayant de droit qu'en nue-propriété dans la succession de leur auteur ; qu'en décidant que Mme Y... s'est rendue coupable du recel d'une somme de 60.979,61 € dépendant de la succession de son époux prédécédé peu important l'option successorale choisie, quand celle-ci ne pouvait fausser les opérations de partage à son profit dans la mesure où, en raison de l'option choisie en exécution de la donation entre époux du 13 juin 1980, elle était seule usufruitière de l'intégralité des biens successoraux (concl. p. 5), ce que les consorts X... reconnaissaient dans leurs propres conclusions (concl. p. 2 et 3), la Cour d'appel a violé les articles 792 et 815 du Code civil, ce dernier dans sa rédaction applicable au litige ;
2) ALORS QUE si l'usufruit comprend des choses dont on ne peut faire usage sans les consommer, comme l'argent, l'usufruitier a le droit de s'en servir, mais à la charge de rendre, à la fin de l'usufruit, soit des choses de même quantité et qualité soit leur valeur estimée à la date de la restitution ; qu'ayant opté pour l'usufruit de la totalité de la succession de son époux prédécédé, ainsi qu'elle le rappelait dans ses conclusions, ce qui était également rappelé par les intimés, Mme Y... devenait de plein droit propriétaire de la somme de 60.979,61 € dépendant de l'actif successoral et avait titre pour en disposer, de sorte qu'elle ne pouvait se rendre coupable de recel ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 587 et 792 du Code civil, ce dernier dans sa rédaction applicable au litige.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-13807
Date de la décision : 29/06/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

SUCCESSION - Recel - Domaine d'application - Exclusion - Cas - Dissimulation par le conjoint du sort des fonds provenant de la vente d'un bien propre du de cujus

Les peines édictées par l'article 792 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, ne s'appliquent qu'aux personnes appelées au partage de la succession et supposent que les biens recelés soient inclus dans ce partage. Dès lors, viole ce texte la cour d'appel qui énonce, pour retenir le recel successoral de l'épouse survivante, que celle-ci a sciemment dissimulé le sort des fonds provenant de la vente d'un bien propre de son conjoint, alors que l'épouse ayant opté pour l'usufruit de la totalité de la succession, était réputée avoir, dès l'ouverture de celle-ci, la jouissance de tous les biens la composant et ne disposait pas de droits de même nature que ceux des autres héritiers, de sorte qu'il n'y avait pas lieu à partage entre eux


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 08 décembre 2009

Sur l'exclusion du domaine d'application du recel successoral, à rapprocher :1re Civ., 19 mars 2008, pourvoi n° 07-10810, Bull. 2008, I, n° 88 (cassation partielle)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 29 jui. 2011, pourvoi n°10-13807, Bull. civ. 2011, I, n° 138
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, I, n° 138

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Gauthier
Rapporteur ?: M. Pluyette
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.13807
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