LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Mustapha X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BOURGES, en date du 29 juin 2010, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de viols aggravés, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 144 et suivants et 591 du code de procédure pénale, de la présomption d'innocence, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté de M. X... ;
"aux motifs que M. X... a été mis en examen et placé sous mandat de dépôt le 1er avril 2008, puis condamné pour viol aggravé de son ex-concubine et a interjeté appel de sa condamnation, par arrêt du 8 mai 2010, à la peine de huit années d'emprisonnement ; qu'il avait menacé son ex-concubine avec une seringue, injectant un produit, lui avait introduit un vibromasseur dans le vagin puis l'anus, l'avait obligée à lui faire une fellation, puis lui avait imposé une pénétration anale avec son sexe, la faisant hurler de douleur ; qu'il a affirmé qu'il était allé chez son ex-concubine pour récupérer une somme d'argent et qu'ils avaient eu un rapport sexuel consenti, son ex-concubine pratiquant alors pour la première fois le rapport anal ; que la voisine a déclaré avoir entendu un cri ; qu'il harcelait son ex-concubine ; qu'il n'a pu être interpellé qu'après la délivrance, le 18 mars 2008, d'un mandat de recherche ; qu'il était alors sans profession et vivait à l'hôtel ; qu'il ne présente pas de garantie de représentation suffisante, étant né au Maroc et célibataire sans attache particulière, n'ayant ni compagne ni enfant ; qu'il fait état de ses difficultés de santé, qui sont réelles ; que son état lui permet cependant de travailler puisqu'il produit une proposition de contrat de travail ; qu'il bénéficie de soins appropriés à l'établissement public de santé de Fresnes ; qu'il présente, selon l'expert psychiatre, une psychorigidité et une hypertrophie du moi, lesquelles rendent difficiles la prise en compte d'autrui ; qu'il risque de réitérer ce comportement, étant dans le déni ; qu'ainsi, les dispositions du contrôle judiciaire s'avèrent manifestement insuffisantes ; que la détention provisoire est l'unique moyen d'empêcher une pression sur la victime et les témoins, de prévenir le renouvellement de l'infraction et de garantir le maintien de l'accusé à la disposition de la justice ;
"alors qu'en rejetant la demande de mise en liberté après avoir pourtant constaté que M. X... était en détention depuis plus de deux ans, connaissait des difficultés de santé, au point d'être hospitalisé, et avait une promesse d'embauche, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale" ;
Et sur le moyen relevé d'office, pris de la violation de l'article 144 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 144 du code de procédure pénale, ensemble le décret n° 2010-355 du 1er avril 2010 relatif à l'assignation à résidence avec surveillance électronique ;
Attendu que la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s'il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs définis par l'article susvisé et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique ;
Attendu que, pour rejeter la demande de mise en liberté de M. X..., la chambre de l'instruction énonce que la détention provisoire est l'unique moyen d'empêcher une pression sur la victime et les témoins, de prévenir le renouvellement de l'infraction et de garantir le maintien de l'accusé en détention, les dispositions du contrôle judiciaire s'avérant au cas d'espèce insuffisantes ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans s'expliquer, par des considérations de droit et de fait, sur le caractère insuffisant de l'assignation à résidence avec surveillance électronique, la chambre de l'instruction a méconnu Ies textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bourges, en date du 29 juin 2010, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bourges et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Guérin conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Villar ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;