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10/06/2010 | FRANCE | N°09-15445

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 juin 2010, 09-15445


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les trois moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 5 mai 2009), que dans un litige opposant Mme X... à M. Y..., celui-ci a déposé une requête tendant au renvoi pour cause de suspicion légitime de l'affaire pendante devant le tribunal de grande instance de Rennes ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de rejeter la requête, alors, selon le moyen :
1° / que l'arrêt mentionnant que la demande de suspicion légitime n'a pas été débattue en audience publique encourt l'an

nulation en application de l'article 351 du code de procédure civile, ensemble...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les trois moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 5 mai 2009), que dans un litige opposant Mme X... à M. Y..., celui-ci a déposé une requête tendant au renvoi pour cause de suspicion légitime de l'affaire pendante devant le tribunal de grande instance de Rennes ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de rejeter la requête, alors, selon le moyen :
1° / que l'arrêt mentionnant que la demande de suspicion légitime n'a pas été débattue en audience publique encourt l'annulation en application de l'article 351 du code de procédure civile, ensemble 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
2° / que le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice ; qu'en prononçant l'arrêt en chambre du conseil, sans retenir l'un des motifs susvisés susceptibles de légitimer l'atteinte au principe de publicité, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3° / que si le président saisi d'une demande de renvoi pour cause de suspicion légitime s'oppose à celle-ci, il transmet l'affaire au président de la juridiction immédiatement supérieure et celle-ci doit statuer dans le mois ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour d'appel que le 8 décembre 2008, le président du tribunal de grande instance de Dinan s'est opposé à la requête en suspicion légitime de M. Y... et a saisi le premier président de la cour d'appel de Rennes lequel a distribué l'affaire à cette chambre par ordonnance du 9 février 2009 ; que l'audience a eu lieu en chambre du conseil le 21 avril 2009 ; que l'arrêt a été prononcé par Mme A... président de chambre en chambre du conseil le 5 mai 2009, soit plus de 5 mois après la transmission de l'affaire au président de la cour d'appel de Rennes, d'où il suit une violation de l'article 359, alinéa 2, du code de procédure civile et de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
4° / que le ministère public, dans le cas où il est partie jointe, et sauf si la loi impose sa présence à l'audience, peut faire connaître son avis à la juridiction soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition des parties, soit oralement à l'audience ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas de l'arrêt que les conclusions écrites que le ministère public, présent à l'audience, a déposé aient été mises à la disposition des parties, ni qu'elles aient été soutenues oralement à l'audience ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 16 et 431 du code de procédure civile ;
5° / que conformément à l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le droit pour une personne à ce que sa cause soit entendue équitablement comporte le respect du principe de l'égalité des armes ; qu'en l'espèce, il ne résulte pas de l'arrêt que M. Y... qui était comparant en personne ait été mis dans la possibilité de répondre au substitut général, présent à l'audience, d'où il suit une violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu que la procédure de récusation et de renvoi pour cause de suspicion légitime, qui ne porte pas sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale et ne concerne pas une contestation sur un droit ou une obligation de caractère civil, n'entre pas dans le champ d'application de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Et attendu que la méconnaissance du délai prévu par l'article 359 du code de procédure civile n'est assortie d'aucune sanction ;
Attendu enfin que, selon les articles 351 et 359 du code de procédure civile, il est statué sans qu'il soit nécessaire d'appeler les parties ; qu'il en résulte qu'en l'absence de débat et de toute disposition en ce sens, le ministère public n'avait pas à communiquer ses conclusions ou à les mettre à la disposition des parties, afin qu'elles aient la possibilité d'y répondre ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juin deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils pour M. Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué de mentionner que l'affaire a été débattue en chambre du conseil et l'arrêt prononcé en chambre du conseil.
- ALORS QUE D'UNE PART l'arrêt mentionnant que la demande de suspicion légitime n'a pas été débattue en audience publique encourt l'annulation en application de l'article 351 du code de procédure civile, ensemble 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ;
- ALORS QUE D'AUTRE PART le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice ; qu'en prononçant l'arrêt en chambre du conseil, sans retenir l'un des motifs susvisés susceptibles de légitimer l'atteinte au principe de publicité, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:
- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la requête en suspicion légitime de Monsieur Y....
- AU MOTIF QUE le 8 décembre 2008, le Président du Tribunal de Grande Instance de DINAN s'est opposé à la requête en suspicion légitime de Monsieur Y... et a saisi le Premier Président de la cour d'appel de RENNES lequel a distribué l'affaire à cette chambre par ordonnance du 9 février 2009 ; que l'audience a eu lieu en chambre du conseil le 21 avril 2009 ; que l'arrêt a été prononcé par Madame A... président de chambre en chambre du conseil le 5 mai 2009 ;
- ALORS QUE si le Président saisi d'une demande de renvoi pour cause de suspicion légitime s'oppose à celle-ci, il transmet l'affaire au Président de la juridiction immédiatement supérieure et celle-ci doit statuer dans le mois ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour que le 8 décembre 2008, le Président du Tribunal de Grande Instance de DINAN s'est opposé à la requête en suspicion légitime de Monsieur Y... et a saisi le Premier Président de la cour d'appel de RENNES lequel a distribué l'affaire à cette chambre par ordonnance du 9 février 2009 ; que l'audience a eu lieu en chambre du conseil le 21 avril 2009 ; que l'arrêt a été prononcé par Madame A... président de chambre en chambre du conseil le 5 mai 2009, soit plus de 5 mois après la transmission de l'affaire au Président de la Cour d'appel de RENNES, d'où il suit une violation de l'article 359, alinéa 2, du Code de procédure civile et de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:
- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la requête en suspicion légitime de Monsieur Y....
- AU MOTIF QUE Monsieur Z... substitut général a pris des réquisitions écrites ;
- ALORS QUE D'UNE PART le ministère public, dans le cas où il est partie jointe, et sauf si la loi impose sa présence à l'audience, peut faire connaître son avis à la juridiction soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition des parties, soit oralement à l'audience ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas de l'arrêt que les conclusions écrites que le ministère public, présent à l'audience, a déposé aient été mises à la disposition des parties, ni qu'elles aient été soutenues oralement à l'audience ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 16 et 431 du nouveau Code de procédure civile ;
- ALORS QUE D'AUTRE PART conformément à l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le droit pour une personne à ce que sa cause soit entendue équitablement comporte le respect du principe de l'égalité des armes ; qu'en l'espèce, il ne résulte pas de l'arrêt que Monsieur Y... qui était comparant en personne ait été mis dans la possibilité de répondre au substitut général, présent à l'audience, d'où il suit une violation de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-15445
Date de la décision : 10/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 § 1 - Domaine d'application - Exclusion - Procédure de renvoi pour cause de suspicion légitime

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 § 1 - Domaine d'application - Exclusion - Procédure de récusation MINISTERE PUBLIC - Attributions - Attributions en matière civile - Renvoi pour cause de suspicion légitime - Audience - Modalités - Détermination - Portée SUSPICION LEGITIME - Procédure - Audience - Intervention du ministère public - Obligations - Etendue - Limites - Détermination RECUSATION - Procédure - Audience - Convocation des parties - Necessité (non) COURS ET TRIBUNAUX - Débats - Publicité - Exclusion - Possibilité - Cas - Procédure de suspicion légitime COURS ET TRIBUNAUX - Débats - Publicité - Exclusion - Possibilité - Cas - Procédure de récusation

La procédure de récusation et de renvoi pour cause de suspicion légitime, qui ne porte pas sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale et ne concerne pas une contestation sur un droit ou une obligation de caractère civil, n'entre pas dans le champ d'application de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, il est statué sans qu'il soit nécessaire d'appeler les parties, et le ministère public n'a pas à communiquer ses conclusions ou à les mettre à la disposition des parties


Références :

article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

articles 351 et 359 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 05 mai 2009

Sur l'exclusion de l'application de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à la procédure de récusation, dans le même sens que : 2e Civ., 15 décembre 2005, pourvoi n° 04-17166, Bull. 2005, II, n° 328 (rejet)

arrêt cité ;2e Civ., 26 avril 2006, pourvoi n° 06-01594, Bull. 2006, II, n° 109 (irrecevabilité). Sur l'exclusion de l'application de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à la procédure de suspicion légitime, dans le même sens que : 2e Civ., 15 décembre 2005, pourvoi n° 04-17166, Bull. 2005, II, n° 328 (rejet)

arrêt cité ;Soc., 21 mars 2006, pourvoi n° 04-44621, Bull. 2006, V, n° 115 (rejet) ;2e Civ., 26 avril 2006, pourvoi n° 06-01594, Bull. 2006, II, n° 109 (irrecevabilité). Sur le défaut de nécessité d'appeler les parties à l'audience de récusation, dans le même sens que : 2e Civ., 15 décembre 2005, pourvoi n° 04-17166, Bull. 2005, II, n° 328 (rejet)

arrêt cité ;2e Civ., 26 avril 2006, pourvoi n° 06-01594, Bull. 2006, II, n° 109 (irrecevabilité)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 jui. 2010, pourvoi n°09-15445, Bull. civ. 2010, II, n° 111
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, II, n° 111

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : M. Marotte
Rapporteur ?: M. Alt
Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.15445
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