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10/06/2010 | FRANCE | N°08-21561

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 juin 2010, 08-21561


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, et 14 et 19 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, que Mme X... et Mme Y..., avocats salariés de la société d'avocats Fidal, ont démissionné de ce cabinet pour s'inscrire au barreau de Bourges ; qu'ayant rencontré des difficultés pour obtenir la restitution des dossiers de plusieurs clients souhaitant qu'ell

es continuent à assurer leur défense, elles ont saisi le bâtonnier de l...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, et 14 et 19 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, que Mme X... et Mme Y..., avocats salariés de la société d'avocats Fidal, ont démissionné de ce cabinet pour s'inscrire au barreau de Bourges ; qu'ayant rencontré des difficultés pour obtenir la restitution des dossiers de plusieurs clients souhaitant qu'elles continuent à assurer leur défense, elles ont saisi le bâtonnier de leur ordre afin d'obtenir la transmission de ces dossiers en totalité ou en partie ; que la société Fidal a, alors, soutenu que le premier président était incompétent pour statuer sur une difficulté de remise de dossiers entre avocats ;
Attendu que, pour rejeter le recours, l'ordonnance retient que les dispositions des articles 14 et 19, dernier alinéa, du décret du 12 juillet 2005 ne précisent pas si la restitution des pièces doit être faite au client lui-même et que la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 est également applicable aux relations entre avocats ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 à laquelle renvoie l'article 14 du décret du 12 juillet 2005 ne s'applique qu'aux litiges survenus entre un avocat et son client, de sorte que le recours contre la décision du bâtonnier devait être porté devant la cour d'appel, le premier président a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 14 octobre 2008, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Bourges ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare le recours irrecevable ;
Condamne Mmes X... et Y... aux dépens devant les juges du fond et la Cour de cassation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juin deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils pour la société Fidal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance du premier président de la cour d'appel d'AVOIR rejeté les exceptions d'incompétence, d'irrecevabilité et de nullité soulevées par la société FIDAL, constaté qu'il a été partiellement satisfait à l'injonction contenue dans le dispositif de l'ordonnance entreprise, pour le surplus, confirmé cette ordonnance et ordonné la restitution sous bordereau par la société FIDAL à Me X... et Me Y..., dans les trois jours suivant la notification de l'ordonnance, à peine d'astreinte de 200 € par jour de retard, de diverses pièces dans divers dossiers, condamné la société FIDAL à payer à Me X... et à Me Y... la somme de 3500 € à titre de dommages-intérêts et de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;
AUX MOTIFS (sur la compétence) QU'il résulte de la combinaison des articles 14, 19 dernier alinéa du décret du 12 juillet 2005 et des articles 174, 175 et 176 du décret du 27 novembre 1991 que les contestations relatives à la restitution des pièces dont un avocat est dépositaire sont de la compétence en premier ressort du bâtonnier de l'Ordre des avocats et en cas de recours du premier président de la cour d'appel ; que la procédure ainsi prévue ne concerne pas uniquement les litiges pouvant exister entre un avocat et son client qui le déchargerait de la défense de ses intérêts ; qu'elle est également applicable dans les relations entre avocats lorsque l'un d'eux est choisi par un client à la suite de l'un de ses confrères ; qu'en effet, l'avocat nouvellement saisi doit pouvoir obtenir les pièces de procédure et de fond constituant le dossier dont l'avocat dessaisi avait jusque là la charge sans que le cours des procédures ne soit affecté par des retards injustifiés ; que les dispositions de l'article 14 du décret du 12 juillet 2005 ne précisent pas que cette restitution doive être effectuée au client lui-même ; que ce dernier ayant fait choix d'un nouveau conseil, ce dernier a qualité pour demander la restitution des pièces dont son confrère était dépositaire ; que l'exception d'incompétence soulevée par la société FIDAL doit en conséquence être rejetée, la contestation ayant été portée devant la juridiction prévue par l'article 14 susvisé qui renvoie expressément à la procédure prévue en matière de montant et de recouvrement d'honoraires réglementée par les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ; (sur la recevabilité de l'action) qu'ainsi que rappelé ci-dessus, Me X... et Me Y... avaient bien qualité pour agir (ordonnance, p. 4) ;
ALORS, d'une part, QUE la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ne s'applique qu'aux contestations concernant la restitution des pièces qui s'élèvent entre un avocat et son client à l'occasion d'une affaire terminée ou dont l'avocat a été déchargé ; qu'en jugeant cette procédure applicable à la transmission des dossiers entre avocats lorsque l'un d'eux succède à l'autre, le premier président a violé les articles 14 et 19 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005, ensemble les articles 174, 175 et 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 ;
ALORS, d'autre part, QUE l'avocat qui succède à son confrère n'a pas qualité pour agir en restitution de pièces auprès du bâtonnier suivant la procédure des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ; qu'en décidant le contraire, le premier président a violé les articles 14 et 19 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005, ensemble les articles 174, 175 et 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 et les articles 31 et 32 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire
Il est fait grief à l'ordonnance du premier président de la cour d'appel d'AVOIR rejeté les exceptions d'incompétence, d'irrecevabilité et de nullité soulevées par la société FIDAL, constaté qu'il a été partiellement satisfait à l'injonction contenue dans le dispositif de l'ordonnance entreprise, pour le surplus, confirmé cette ordonnance et ordonné la restitution sous bordereau par la société FIDAL à Me X... et Me Y..., dans les trois jours suivant la notification de l'ordonnance, à peine d'astreinte de 200 € par jour de retard, de diverses pièces dans divers dossiers, condamné la société FIDAL à payer à Me X... et à Me Y... la somme de 3500 € à titre de dommages-intérêts et de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;
1° / AUX MOTIFS (sur la recevabilité de l'action) QU E contrairement à ce que soutient la société FIDAL, le bâtonnier de l'ordre a bien été saisi par lettre recommandée avec accusé réception du 25 janvier reçue à l'Ordre le 28 janvier 2008 ; que les prescriptions de l'article 175, alinéa 1 du décret du 27 novembre 1991 ont donc bien été respectées (ordonnance, p. 5)
ALORS QU'en jugeant l'action recevable en se fondant sur une pièce dont la production était contestée et dont il ne résulte ni de la décision, ni des pièces de la procédure qu'elle ait été communiquée à l'exposante et ait fait l'objet d'un débat contradictoire, le premier président de la cour d'appel a violé les articles 15, 16 et 132 du code de procédure civile, ensemble l'article 175 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;
2° / ET AUX MOTIFS (sur la validité de la procédure) QU'il résulte de pièces produites, notamment des correspondances échangées entre les parties et l'ordre des avocats que la société FIDAL était parfaitement informée de l'objet précis du litige rappelé très exactement dans un courrier qui lui a été adressé le 4 février 2008 par le bâtonnier de l'Ordre énumérant les demandes relatives à la restitution des pièces des dossiers concernés ; que les dispositions des articles 15, 16 et 132 du code de procédure civile ont donc été respectées et que l'annulation de la procédure n'est pas encourue (ordonnance, p. 5) ;
ALORS QU'en statuant ainsi sans rechercher si, comme le contestait l'exposante, le bâtonnier l'avait informée du cadre juridique de la contestation et du délai qui lui était imparti pour présenter ses observations, et si elle avait reçu communication des pièces de la procédure, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 15, 16 et 132 du code de procédure civile, ensemble l'article 175 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire
Il est fait grief à l'ordonnance du premier président de la cour d'appel d'AVOIR rejeté les exceptions d'incompétence, d'irrecevabilité et de nullité soulevées par la société FIDAL, constaté qu'il a été partiellement satisfait à l'injonction contenue dans le dispositif de l'ordonnance entreprise, pour le surplus, confirmé cette ordonnance et ordonné la restitution sous bordereau par la société FIDAL à Me X... et Me Y..., dans les trois jours suivant la notification de l'ordonnance, à peine d'astreinte de 200 € par jour de retard, de diverses pièces dans divers dossiers, condamné la société FIDAL à payer à Me X... et à Me Y... la somme de 3500 € à titre de dommages-intérêts et de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;
AUX MOTIFS (sur les demandes incidentes des intimées) QUE la demande tendant à ce que les pièces dont la remise est sollicitée soient transmises sous bordereau ne constitue pas une prétention nouvelle ni ne peut être assimilée à un appel incident ; qu'elle a pour seul effet, dans le cadre de la confirmation qui est demandée, d'en assurer la bonne exécution ; qu'il en est de même de la demande d'astreinte, le juge ayant en tout état de cause la faculté de le prévoir d'office conformément aux dispositions de l'article 33 de la loi du 9 juillet 1991 ; que, s'agissant de la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive présentée par Mes X... et Y..., elle est parfaitement recevable sur le fondement de l'article 559 alinéa 1er, in fine du code de procédure civile ; (sur le fond) qu'il convient de rappeler d'une part que la saisine du bâtonnier ne portait que sur des dossiers précisément énumérés dans le dispositif de son ordonnance ; que des lors le litige qui nous est soumis se trouve limité à ces seuls dossiers ; que d'autre part la décision du Bâtonnier a ordonné la restitution « des pièces de fond et de procédure » relatives à ces dossiers ; qu'elle na pas prévu que soient également remises les notes personnelles, les recherches de jurisprudence ou tout autre document ; qu'il y a lieu de constater par ailleurs que le transfert de clientèle qui s'est opéré entre la Société FIDAL d'une part et Me X... et Me Y... d'autre part ne fait pas l'objet de contestation, la société FIDAL admettant que ces clients ont fait le libre choix de confier la défense de leur intérêt à ses anciennes associées ; qu'il résulte des courriers adressés à la cour les 24 et 26 septembre que pour les dossiers objet de notre saisine seuls restent en litige les restitutions de pièces de fond et de procédure suivantes, auxquelles la société FIDAL s'oppose encore : Dossier C... :-1 bail rural-1 extrait Kbis-statuts Dossier D... :- documents déposés par le client-procédure de sursis devant le tribunal paritaire des baux ruraux de St Amand Dossier E... :- dossier de dévolution successorale et d'envoi en possession Dossier F... :- registres de la sociéte-dossiers de cession de parts-extrait de Kbis original de 2001 Dossier Z... et B...
- actes de cession de fonds entre Monsieur Paul
Z...
et Madame A... ; qu'il convient de constater que les autres injonctions stipulées dans le dispositif de l'ordonnance du bâtonnier ont été satisfaites ce, en cours de délibéré ; que pour le surplus ci-dessus énuméré, il y lieu de confirmer l'ordonnance entreprise, les documents visés constituant bien des pièces de fond et de procédure qui doivent être restitués aux nouveaux avocats des clients concernés conformément aux textes exactement appliqués par le Bâtonnier ; que cette restitution se fera sous bordereau pour éviter toute nouvelle contestation ; qu'en application de l'article 33 de la loi du 9 juillet 1991 une astreinte de 200 euros par jour de retard sera prévue ; que la résistance de la société FIDAL qui a estimé devoir interjeter appel de l'ordonnance entreprise qui sera confirmée, alors qu'elle l'a finalement exécutée en partie au cours du délibéré, a incontestablement occasionné un préjudice aux demanderesses qui ont été mises dans l'impossibilité d'assurer la défense des intérêts de leurs clients et les a contraintes à effectuer des démarches inutiles pour lesquelles elles ont du consacrer du temps ; qu'elles recevront la somme de 3500 euros à titre de dommages-intérêts ; que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile une somme de 2000 euros leur sera allouée pour tenir compte des frais irrépétibles qu'elles ont dû exposer (ordonnance, pp. 5 à 7) ;

1° / ALORS QUE la partie qui n'a pas formé un recours dans le délai de l'article 176 du décret du 27 novembre 1991 ne peut le faire à titre incident après l'expiration de son délai de recours, de sorte qu'en accédant à la demande incidente de Mes X... et Y... en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive formée après l'expiration du délai de recours, le premier président de la cour d'appel a violé les articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, ensemble l'article 559 du code de procédure civile ;
2° / ALORS QUE l'exécution partielle d'une décision contre laquelle a été formé un recours ne permet pas de caractériser l'abus dans l'exercice de ce recours, de sorte qu'en condamnant l'exposante à des dommages-intérêts pour résistance abusive en se fondant sur cette seule circonstance, le premier président de la cour d'appel a violé l'article 559 du code de procédure civile ensemble l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 08-21561
Date de la décision : 10/06/2010
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

AVOCAT - Honoraires - Contestation - Procédure - Domaine d'application - Exclusion - Cas - Contestations relatives à la restitution des pièces d'un dossier opposant des avocats qui se succèdent

AVOCAT - Honoraires - Contestation - Procédure - Caractère exclusif - Portée

La procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 à laquelle renvoie l'article 14 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 ne s'applique qu'aux litiges survenus entre un avocat et son client et non aux contestations relatives à la restitution des pièces d'un dossier opposant des avocats qui se succèdent. Le recours formé contre l'ordonnance d'un bâtonnier ayant statué sur une telle contestation doit en conséquence être porté devant la cour d'appel et non devant le premier président


Références :

ARRET du 14 octobre 2008, Cour d'appel de Bourges, 14 octobre 2008, 08/00642
articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991

articles 14 et 19 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 14 octobre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 jui. 2010, pourvoi n°08-21561, Bull. civ. 2010, II, n° 110
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, II, n° 110

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : M. Marotte
Rapporteur ?: Mme Robineau
Avocat(s) : Me Balat, SCP Defrenois et Levis

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.21561
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