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10/06/2009 | FRANCE | N°07-18618

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 juin 2009, 07-18618


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1184 du code civil, ensemble l'article L. 145-1 du code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence 24 mai 2007) que les consorts X... ont consenti le 1er octobre 1986 à la société Halles des viandes un bail commercial portant sur un magasin avec entrepôt ; qu'ils l'ont assignée en résiliation judiciaire du bail pour défaut d'exploitation du fonds de commerce dans les lieux loués ; que M. Y... étant décédé, ses héritiers ont repris l'inst

ance ;
Attendu que, pour accueillir la demande des bailleurs, l'arrêt retien...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1184 du code civil, ensemble l'article L. 145-1 du code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence 24 mai 2007) que les consorts X... ont consenti le 1er octobre 1986 à la société Halles des viandes un bail commercial portant sur un magasin avec entrepôt ; qu'ils l'ont assignée en résiliation judiciaire du bail pour défaut d'exploitation du fonds de commerce dans les lieux loués ; que M. Y... étant décédé, ses héritiers ont repris l'instance ;
Attendu que, pour accueillir la demande des bailleurs, l'arrêt retient que l'exploitation du fonds de commerce par son propriétaire dans les lieux loués est non seulement une obligation inhérente à l'économie du bail commercial mais aussi une condition de l'application du statut des baux commerciaux inscrite dans l'article L. 145-1 du code de commerce, que le défaut d'exploitation depuis fin 2001 dans les lieux loués par la société Halles des viandes est amplement démontré et constitue un manquement grave justifiant la résiliation du bail aux torts exclusifs du preneur lequel n'a pas repris son activité malgré l'assignation valant mise en demeure ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'obligation d'exploiter est une condition d'application du statut des baux commerciaux dont l'inexécution ne peut entraîner la résiliation du bail en l'absence d'une clause imposant l'exploitation effective et continue du fonds dans les lieux loués, la Cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts X... à payer à la société Halles des Viandes la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des consorts X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juin deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils la société Halles des Viandes,
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du bail commercial du 1er octobre 1986, renouvelé à compter du 1er octobre 1996 liant Jean Y..., Geneviève Y..., Michèle Z... et la SARL HALLES DES VIANDES et portant sur les locaux sis ... à MENTON, aux torts exclusifs de la SARL HALLES DES VIANDES, à compter de la date de l'arrêt ;
AUX MOTIFS QU'un défaut d'exploitation dans les lieux loués, non sanctionné expressément par le bail, ne peut entraîner l'application de la clause résolutoire dans la mesure où cette clause, si elle est prévue, ne peut être invoquée qu'en cas de manquement à une stipulation expresse du bail ; Mais, les consorts X..., bailleurs, agissent, en l'espèce, sur le fondement des articles 1184 et 1741 du code civil, pour demander la résiliation judiciaire du bail du 1er octobre 1986, les liant à la SARL HALLES DES VIANDES, pour défaut d'exécution d'une de ses obligations en qualité de preneur ; Il s'agit ici de faire sanctionner un manquement aux obligations contractuelles ou légales de la locataire commerciale ; la cour apprécie souverainement la gravité de la faute et, là encore, à la différence de la mise en jeu de la clause résolutoire, l'action en résiliation judiciaire n'a pas besoin d'être précédée d'une mise en demeure ; Les consorts X... invoquent à l'appui de leur demande de prononcer de la résiliation judiciaire du bail, le défaut d'exploitation dans les lieux loués par la SARL HALLES DES VIANDES ; L'exploitation du fonds par son propriétaire dans les lieux loués est non seulement une obligation inhérente à l'économie d'un bail commercial mais est aussi une condition de l'application du statut des baux commerciaux, inscrite dans l'article L 145-1 du code de commerce ; en effet, un défaut prolongé d'exploitation entraînerait la disparition du fonds dont l'existence est la condition essentielle du droit au renouvellement du bail ; La SARL HALLES DES VIANDES doit donc respecter cette obligation légale, peu important que le bail du 1er octobre 1986 ne contienne pas de clause lui faisant expressément obligation d'exploiter de manière continue son commerce, ledit bail l'obligeant, en outre, « à peine de dommages intérêts et de résiliation, de tenir les locaux constamment garnis de marchandises et objets mobiliers d'une valeur suffisante pour répondre des loyers et de l'exécution de toutes les charges, clauses et conditions du bail » ; L'exploitation doit être régulière et normale, eu égard à la destination des lieux et non pas affectée par les interruptions correspondant aux périodes normales de congés ; elle doit être effective, une ouverture apparente ne suffisant pas ; La SARL HALLES DES VIANDES exerce une activité de boucherie ... à MENTON 06 ; Il résulte des constats d'huissier, avec clichés photographiques annexés, établis en février, mars et avril 2001, que le magasin est fermé, rideau baissé, sans activité, l'huissier renouvelant ses constatations trois jours de suite chacun de ces mois à des heures ouvrables différentes ; les mêmes constats ont été dressés le 19 décembre 2001, les 27-28-29 et 31 décembre 2001 à des heures ouvrables et encore 6 jours en décembre 2003, dont les 29 au 31 décembre 2003 et le 2 janvier 2004, le 15 mars 2005 à 9 h 50 et le 16 mars 2005 à 9 h 50, toujours avec des clichés photographiques du magasin à l'appui ; C'est à tort que le tribunal a estimé que l'infraction n'était pas suffisamment démontrée ; D'une part, les fêtes de fin d'année pour un commerce de boucherie ne sont pas une période de vacances saisonnières mais au contraire d'activité intense ; D'autre part, à la seule lecture de l'arrêt rendu par cette cour le 25 mars 2004 et confirmant le jugement rendu le 4 mai 2000, fixant le loyer du bail renouvelé à compter du 1er octobre 1996, le défaut d'exploitation du fonds n'est pas évoqué par les bailleurs et n'avait d'ailleurs pas à l'être, ce manquement ayant commencé à l'être constaté en décembre 2001, c'est-à-dire hors de la période de référence prise pour l'évaluation de la valeur locative ; En troisième part, les factures EDF produites permettent de constater des valeurs négatives en juin 2003, en avril 2005 et en juin 2006, si seules les consommations KWH effectivement relevées sont retenues, alors qu'un fonds de commerce de boucherie, pourvu d'une chambre froide, implique une consommation électrique abondante ; En dernière part, les loyers acceptés par les bailleurs ne sauraient valoir renoncement à se prévaloir d'un défaut d'exploitation prolongé ; Ainsi, le défaut d'exploitation, depuis fin 2001, dans les lieux loués, par la SARL HALLES DES VIANDES, est amplement démontré et constitue un manquement grave justifiant la résiliation judiciaire du bail du 1er octobre 1986 aux torts exclusifs du preneur, lequel n'a pas repris son activité malgré l'assignation valant mise en demeure et n'invoque même plus en appel une cession éventuelle des parts sociales pour laquelle il avait demandé un délai de trois mois en première instance ;
ALORS QUE la cour d'appel a constaté que le bail ne mentionnait pas l'obligation d'exploiter de manière continue les lieux loués ; qu'en prononçant cependant la résiliation du bail commercial consenti par les consorts X... à la SARL HALLES DES VIANDES faute à cette dernière d'avoir respecté l'obligation légale inscrite dans l'article L 145-1 du code de commerce d'exploitation des lieux loués, qui était une condition de l'application du statut des baux commerciaux, la cour d'appel a violé les articles 1184 et 1741, ensemble l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07-18618
Date de la décision : 10/06/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL COMMERCIAL - Domaine d'application - Bail d'un local dans lequel un fonds de commerce est exploité - Obligation d'exploiter - Inexécution - Sanction - Résiliation - Condition - Clause expresse imposant l'exploitation effective et continue

L'obligation d'exploiter est une condition d'application du statut des baux commerciaux dont l'inexécution ne peut entraîner la résiliation du bail en l'absence d'une clause imposant l'exploitation effective et continue du fonds dans les lieux loués (arrêt n°1, pourvoi n° 07-18.618). Une cour d'appel ne peut prononcer la résiliation judiciaire du bail commercial pour défaut d'exploitation des locaux si aucune stipulation expresse du bail ne fait obligation au preneur d'exploiter son fonds de commerce dans les lieux loués (arrêt n°2, pourvoi n° 08-14.422)


Références :

article 1184 du code civil

article L. 145-1 du code de commerce (arrêts n° 1 et 2)

article 1134 du code civil (arrêt n° 2)


Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 mai 2007

Sur la sanction du défaut d'immatriculation en l'absence de clause expresse, à rapprocher :3e Civ., 15 mai 1996, pourvoi n° 94-16908 , Bull. 1996, III, n° 114 (cassation ) (arrêt n° 1)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 jui. 2009, pourvoi n°07-18618, Bull. civ. 2009, III, n° 137
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, III, n° 137

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Gariazzo (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Maunand
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.18618
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