LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que, prétendant que M. X..., notaire, qui avait reçu l'acte constatant la vente à M. Y... d'un fonds de commerce leur appartenant, avait commis une faute à leur égard pour n'avoir pas vérifié la situation juridique d'un immeuble à la vente duquel était subordonné le paiement par M. Y..., ultérieurement placé en liquidation judiciaire, du solde du prix de vente, M. et Mme Z... (les époux Z...) ont assigné M. X... en réparation du préjudice né de cette faute ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Douai, 22 octobre 2007) de rejeter cette demande alors, selon le moyen, "que le juge qui constate l'existence d'une faute d'un notaire rédacteur d'acte ayant causé un préjudice doit, s'il estime que celui-ci n'est pas encore actuel et certain, mais s'abstient de surseoir à statuer jusqu'à l'événement permettant de constater cette condition, en l'espèce le jugement de clôture de la liquidation judiciaire de l'acheteur, limiter l'autorité de la chose jugée de façon à permettre aux demandeurs de le saisir à nouveau le jour où le préjudice sera actuel et certain ; qu'en s'en abstenant, la cour d'appel a porté atteinte de façon définitive au droit de M. et Mme Z... d'obtenir réparation de leur préjudice, violant ainsi les articles 1382 et 1351 du code civil et les articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et 1er du protocole additionnel à ladite Convention" ;
Mais attendu qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge, qui n'est jamais tenu de surseoir à statuer hors les cas où la loi le prévoit, de limiter l'autorité de chose jugée que la loi attache au jugement qui tranche une contestation ;
Attendu qu'après avoir retenu que M. X... avait manqué à son devoir de conseil à l'égard des époux Z... pour avoir omis d'attirer leur attention tant sur le risque résultant des modalités de paiement du prix de vente du fonds de commerce que sur l'insuffisance de la garantie constituée à cet égard, la cour d'appel a constaté que les époux Z..., dont la créance à l'égard de M. Y... avait été admise pour un montant de 45 158,64 euros, ne produisaient aucun élément relatif aux opérations de liquidation judiciaire postérieures à la lettre du liquidateur les informant du versement d'une somme de 6 773,82 euros et de la perspective d'un nouveau versement après la vente de terres appartenant au débiteur, de sorte que, faute de justifier de l'impossibilité de recouvrer le solde de leur créance, ils ne prouvaient pas que leur préjudice, dont ils demandaient immédiatement réparation par l'allocation d'une indemnité d'un montant égal à ce solde, fût actuel et certain ; qu'elle a ainsi, sans encourir le grief du moyen, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour les époux Z...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté monsieur et madame Z... de leurs demandes tendant à obtenir l'indemnisation du préjudice causé par la faute de maître X... ;
AUX MOTIFS QUE le préjudice, pour être réparé, doit être actuel, direct et certain ; que monsieur et madame Z... ont à la suite de la liquidation judiciaire de monsieur Y..., déclaré leur créance entre les mains de maître A..., mandataire liquidateur ; que cette créance a été admise, selon ordonnance rendue par le juge commissaire du tribunal de commerce de Boulogne sur Mer le 7 février 1998 pour un montant de 296.221,25 francs soit 45.158,64 euros ; que selon courrier de maître A... du 9 décembre 2003, un premier dividende leur a été adressé en février 2003 dans le cadre de la procédure pour un montant de 6.773,82 euros ; que ce courrier précise que des terres sises à Haspres restaient à réaliser avant de procéder à une nouvelle répartition et clôturer le dossier ; que dès lors, monsieur et madame Z..., qui ne versent au débat aucun élément relatif à la procédure collective postérieur à ce courrier datant de 2003, ne justifient pas de ce qu'ils ne seront pas en mesure, dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire, de recouvrer les fonds leur restant dus ; qu'ils ne rapportent donc pas la preuve de ce que leur préjudice, qu'ils qualifient de perte de chance d'obtenir le paiement intégral, est actuel et certain ;
ALORS QUE le juge qui constate l'existence d'une faute d'un notaire rédacteur d'acte ayant causé un préjudice doit, s'il estime que celui-ci n'est pas encore actuel et certain, mais s'abstient de surseoir à statuer jusqu'à l'événement permettant de constater cette condition, en l'espèce le jugement de clôture de la liquidation judiciaire de l'acheteur, limiter l'autorité de la chose jugée de façon à permettre aux demandeurs de le saisir à nouveau le jour où le préjudice sera actuel et certain ; qu'en s'en abstenant, la cour d'appel a porté atteinte de façon définitive au droit de monsieur et madame Z... d'obtenir réparation de leur préjudice, violant ainsi les articles 1382 et 1351 du Code civil et les articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et 1er du protocole additionnel à ladite Convention.