Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 22 octobre 2015 par laquelle le directeur du service départemental d'incendie et de secours de la Drôme (SDIS) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie.
Par un jugement n° 1507692 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision.
Par un arrêt n° 18LY00922 du 30 juin 2020, la cour a rejeté la requête d'appel formée par le SDIS de la Drôme tendant à l'annulation de ce jugement.
Procédure d'exécution devant la cour
Par un courrier du 13 juillet 2021, M. B... a saisi la cour administrative d'appel de Lyon d'une demande tendant à obtenir l'exécution du jugement n° 1507692 rendu le 29 décembre 2017 par le tribunal administratif de Grenoble, confirmé par l'arrêt de la cour n° 18LY00922 du 30 juin 2020.
Par une ordonnance du 29 septembre 2021, le président de la cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle pour qu'il soit statué sur la demande de M. B... tendant à l'exécution de ce jugement.
Par un arrêt du 2 mars 2022, la cour a en premier lieu, enjoint au service départemental d'incendie et de secours de la Drôme, d'une part, de prendre un arrêté reconnaissant l'imputabilité au service de la pathologie lombaire ou dorsale déclarée par M. B... le 19 janvier 2015 et de le placer en congés pour maladie imputable au service pour les périodes couvertes par les arrêts de travail justifiés par cette pathologie, d'autre part, de le rétablir dans ses droits à plein traitement pour ces périodes, avec versement des intérêts au taux légal produits par ces sommes à compter du 13 juillet 2021 et capitalisation des intérêts échus chaque année. En second lieu, la cour a prononcé une astreinte à l'encontre du service départemental d'incendie et de secours de la Drôme s'il ne justifiait pas avoir exécuté, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, le jugement n° 1507692 rendu le 29 décembre 2017 par le tribunal administratif de Grenoble, et jusqu'à la date de cette exécution, et a fixé le taux de cette astreinte à 100 euros par jour de retard.
Par des mémoires enregistrés les 20 mai, 12 juillet, 31 août, 19 septembre, 14 novembre 2022, et 12 juin 2023, M. B..., représenté par Me Bacha, demande à la cour, dans le dernier état de ses conclusions :
1°) de procéder à la liquidation à son profit, de l'astreinte prononcée par l'arrêt du 2 mars 2022, correspondant à 400 jours au 12 juin 2023, à hauteur de 40 000 euros ;
2°) de fixer une nouvelle astreinte à hauteur de 200 euros par jour de retard, jusqu'à complète exécution du jugement du 29 décembre 2017, incluant la rectification de l'arrêté du 2 septembre 2022, l'édiction d'un arrêté portant placement en congé de maladie imputable au service pour la période du 4 décembre 2014 au 16 mars 2016, et la prise en charge effective de la totalité des frais et honoraires médicaux engagés par M. B..., indépendamment de leur prise en charge, ou non, par sa mutuelle ;
3°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours de la Drôme une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que :
- le SDIS n'a pas exécuté, totalement ou partiellement, les mesures d'injonction prononcées par l'arrêt du 2 mars 2022, alors qu'un délai de deux mois lui avait été imparti ;
- il n'a exécuté la première injonction que de façon tardive, partielle et erronée en identifiant la pathologie de façon restrictive et limitée dans le temps ;
- il n'a pas exécuté la deuxième injonction, en l'absence d'arrêté portant placement en congé de maladie imputable au service pour la période visée par l'arrêt ;
- il a exécuté de façon tardive la troisième injonction relative à la reconstitution de carrière ;
- le SDIS n'a procédé à aucun règlement des frais et honoraires qu'il justifie pourtant avoir engagés au titre de la " pathologie dorsale ou lombaire ".
Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 septembre, 26 octobre, 1er décembre 2022 et 7 juillet 2023, le service départemental d'incendie et de secours de la Drôme, représenté par Me Tertrain, demande à la cour de rejeter la demande de liquidation d'astreinte.
Il soutient qu'il a exécuté l'arrêt de la cour du 2 mars 2022 en prenant dès le 2 septembre 2022 un arrêté reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie de M. B..., en plaçant celui-ci en congés pour maladie imputable au service pour les périodes d'arrêt de travail comprises entre le 6 juin 2013 et le 3 mars 2016 et en versant les sommes relatives au plein traitement et les intérêts afférents à l'agent ou aux organismes sociaux.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Bacha, représentant M. B..., et celles de Me Tertrain, représentant le service départemental d'incendie et de secours de la Drôme.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., sapeur-pompier professionnel au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Drôme a demandé, depuis le 19 janvier 2015, la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie. A la suite de l'avis rendu par la commission départementale de réforme le 13 octobre 2015, le chef du groupement des ressources humaines de la Drôme a, par une décision du 22 octobre 2015, refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de M. B.... Par une décision du 24 mai 2016, signée par délégation par le directeur départemental adjoint, le SDIS de la Drôme a confirmé la décision du 22 octobre 2015. Par un jugement du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 22 octobre 2015. Ce jugement a été confirmé par un arrêt du 30 juin 2020 de la cour administrative d'appel de Lyon. M. B... a demandé à la cour l'exécution de ce jugement du 29 décembre 2017, laquelle, par un arrêt du 2 mars 2022, a en premier lieu, enjoint au service départemental d'incendie et de secours de la Drôme, d'une part, de prendre un arrêté reconnaissant l'imputabilité au service de la pathologie lombaire ou dorsale déclarée par M. B... le 19 janvier 2015 et de le placer en congés pour maladie imputable au service pour les périodes couvertes par des arrêts de travail justifiés par cette pathologie, d'autre part, de le rétablir dans ses droits à plein traitement pour ces périodes, avec versement des intérêts au taux légal produits par ces sommes à compter du 13 juillet 2021 et capitalisation des intérêts échus chaque année. En second lieu, la cour a prononcé une astreinte à l'encontre du service départemental d'incendie et de secours de la Drôme s'il ne justifiait pas avoir exécuté, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, le jugement n° 1507692 rendu le 29 décembre 2017 par le tribunal administratif de Grenoble, confirmé par l'arrêt de la cour n° 18LY00922 du 30 juin 2020 et jusqu'à la date de cette exécution, et a fixé le taux de cette astreinte à 100 euros par jour.
2. Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée ". Selon l'article R. 921-7 du même code : " Lorsque à la date d'effet de l'astreinte prononcée par le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, cette juridiction constate, d'office ou sur la saisine de la partie intéressée, que les mesures d'exécution qu'elle avait prescrites n'ont pas été prises, elle procède à la liquidation de l'astreinte dans les conditions prévues aux articles L. 911-6 à L. 911-8 ".
3. Il résulte de ces dispositions que l'astreinte a pour finalité de contraindre la personne qui s'y refuse à exécuter les obligations qui lui ont été assignées par une décision de justice et, ainsi, à respecter l'autorité de la chose jugée. Sa liquidation a pour objet de tirer les conséquences du refus ou du retard mis à exécuter ces obligations. Le juge de l'exécution saisi, sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, aux fins de liquidation d'une astreinte précédemment prononcée peut toutefois la modérer ou la supprimer, même en cas d'inexécution constatée, compte tenu notamment des diligences accomplies par l'administration en vue de procéder à l'exécution de la chose jugée.
4. En premier lieu, il résulte des termes de l'arrêt de la cour du 2 mars 2022, tel qu'éclairci par la lettre du président de la cour du 29 juillet 2022, que celui-ci impliquait nécessairement que le service départemental d'incendie et de secours de la Drôme reconnaisse l'imputabilité au service de la pathologie de M. B... relative à la sciatique par hernie discale pour la période du 4 décembre 2014 au 3 mars 2016, date à laquelle ce dernier a été placé en congés de maladie en raison des seules séquelles de l'accident vasculaire cérébral qu'il a ensuite subi, ces congés ayant été ultérieurement requalifiés en congés pour maladie ordinaire, jusqu'à son admission à la retraite. Le SDIS produit dans la présente instance un arrêté du 2 septembre 2022, reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie de M. B... et plaçant celui-ci en congés pour maladie imputable au service pour les périodes d'arrêt de travail comprises entre le 6 juin 2013 et le 3 mars 2016, de nature à justifier la correcte exécution de l'arrêt de la cour. Contrairement à ce que le requérant soutient, cet arrêt et l'arrêté de reconnaissance d'imputabilité au service n'impliquaient aucunement que le SDIS procédât au retrait préalable des arrêtés le plaçant en congés de maladie ordinaire pour la même période, dès lors que les décisions juridictionnelles précitées annulant la décision du 22 octobre 2015 de refus de reconnaissance de l'imputabilité et confirmant cette annulation emportaient nécessairement disparition rétroactive de ces actes.
5. En deuxième lieu, l'arrêt précité de la cour impliquait que le SDIS verse à M. B... un plein traitement pour les périodes couvertes par les arrêts de travail justifiés par cette pathologie, et qu'il reconstitue ses droits à retraite, dans la mesure rendue nécessaire par l'attribution rétroactive de ses congés pour maladie imputable au service, notamment en effectuant le versement des cotisations dont il a été privé durant ces périodes auprès de la CNRACL. M. B... ne conteste pas que les sommes relatives à la reconstitution de carrière ont été versées au plus tard en octobre 2022 pour un montant de 4 795,62 euros, à l'exception du reliquat de 299,96 euros correspondant à une erreur de calcul qu'il a dénoncée en cours d'instance, lequel a toutefois été versé le 22 novembre 2022.
6. En troisième lieu, s'il résulte des dispositions du 2° de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, désormais repris à l'article L. 822-24 du code général de la fonction publique, que l'administration employeur à la date de l'accident ou au cours de la période à laquelle se rattache la maladie professionnelle est tenue de prendre en charge les honoraires médicaux et les frais exposés à ce titre, directement entraînés par la maladie ou l'accident, il appartient toutefois à l'agent de justifier tant du montant des frais réels qu'il a exposés que du caractère d'utilité directe que ceux-ci ont présenté pour parer aux conséquences de l'accident. Il ressort également du courrier du président de la cour du 27 juillet 2022 qu'il incombait au SDIS de faire préciser les montants devant être pris en charge par lui, et de demander à cette fin à M. B... la production de tout document de nature à établir l'absence de prise en charge par un organisme de sécurité sociale et de tirer les conséquences des réponses et justificatifs obtenus ou de l'absence de ces éléments.
7. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du courrier adressé le 3 mars 2022 au SDIS de la Drôme, que M. B... a entendu récapituler les frais occasionnés par sa maladie, relatifs aux soins et transports nécessités par ces soins. Ce dernier s'est cependant borné à présenter un tableau des frais de transport médical au moyen de son véhicule dont il a produit la photocopie de la carte grise, sans fournir aucun autre justificatif de ces frais. Il a également présenté plusieurs factures relatives à son hospitalisation entre le 8 et le 20 mars 2015 puis entre le 31 mars et le 5 avril 2015 ainsi qu'un simple devis relatif à l'anesthésie nécessaire à l'une des interventions chirurgicales dont il a fait l'objet, un second devis pour une chambre double et un reçu relatif à un dépôt de provision pour la première hospitalisation mentionnée, sans que ces documents n'apportent aucune précision sur la nature des interventions qu'il a subies et leur lien avec la pathologie de M. B... reconnue imputable au service, relative à une sciatique par hernie discale. Les trois factures relatives à des soins prodigués par une infirmière ne sont pas davantage de nature à établir un tel lien. De même, la seule mention du nom du chirurgien, prescripteur de certains des actes médicaux dont le remboursement est demandé, n'est pas suffisante sur ce point. En outre, M. B..., qui relève de l'assurance médicale complémentaire auprès de la Mutuelle nationale des sapeurs-pompiers de France (MNSPF) ayant notamment pour objet de couvrir les frais d'hospitalisation et soins courants, ne justifie pas davantage avoir produit les décomptes de sécurité sociale et de sa complémentaire santé relatifs au remboursement de soins, ou à leur absence, de la part de ces organismes. Il n'a ainsi pas répondu aux demandes faites par l'administration, en dernier lieu le 7 mars 2023, tendant à obtenir des justificatifs des frais médicaux et de déplacement. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le SDIS de la Drôme aurait refusé de prendre en charge les frais médicaux de toute nature et utiles pour parer aux conséquences de sa pathologie. Par suite, ce dernier ne peut se prévaloir d'une incorrecte exécution de l'arrêt de la cour du 2 mars 2022.
8. En quatrième et dernier lieu, si la Cour a prononcé une astreinte à l'encontre du service départemental d'incendie et de secours de la Drôme dans l'hypothèse où il n'aurait pas justifié avoir exécuté, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, le jugement n° 1507692 rendu le 29 décembre 2017 par le tribunal administratif de Grenoble, confirmé par l'arrêt de la cour n° 18LY00922 du 30 juin 2020 et jusqu'à la date de cette exécution, et a fixé le taux de cette astreinte à 100 euros par jour, il résulte des éléments retenus aux points précédents que, d'une part, une demande d'éclaircissement de l'arrêt a été formulée par le SDIS dès le 18 mars 2022 sur le fondement de l'article R. 921-1 du code de justice administrative, d'autre part, les mesures d'exécution de l'arrêt de la cour ont été prises immédiatement après la lettre du président de la cour intervenue le 27 juillet 2022 en réponse à cette demande, manifestant ainsi la volonté de l'administration de mener ce processus à terme. Dans ces conditions, et alors qu'il ressort du point 7 que le requérant n'a pas répondu aux demandes répétées émanant de l'administration tendant à la production des justificatifs nécessaires à l'appréciation de la réalité et de l'utilité des frais exposés, le SDIS doit être regardé, en dépit de l'intervention, au-delà du délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt du 2 mars 2022, de l'arrêté du 2 septembre 2022 reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie de M. B..., comme ayant assuré l'exécution du jugement du tribunal administratif de Grenoble et l'arrêt de la cour du 2 mars 2022. Il n'y a pas lieu, dès lors, de procéder à la liquidation de l'astreinte demandée. Par voie de conséquence, les conclusions de M. B... tendant à ce que la cour prononce une nouvelle astreinte pour assurer l'exécution de sa décision ne sauraient être accueillies, et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte prononcée par l'arrêt n° 21LY03154 à l'encontre du service départemental d'incendie et de secours de la Drôme.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. A... B... et au service départemental d'incendie et de secours de la Drôme.
Délibéré après l'audience du 31 octobre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
M. Joël Arnould, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.
La rapporteure,
Emilie FelmyLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au préfet de la Drôme en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 21LY03154