Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... G... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'avis de la commission de réforme du 13 octobre 2015 et la décision du 22 octobre 2015 par laquelle le directeur du Service départemental d'incendie et de secours de la Drôme (SDIS) a refusé de prendre en charge sa maladie au titre du service.
Par un jugement n° 1507692 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision précitée du 22 octobre 2015 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mars et 14 août 2018, le SDIS de la Drôme, représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 décembre 2017 ;
2°) de rejeter la demande de M. G... devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de M. G... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les premiers juges auraient dû constater le non-lieu à statuer sur la demande de M. G... en l'absence de contestation de la décision du 24 mai 2016 qui a retiré celle contestée du 22 octobre 2015 ;
- il n'existe pas de lien entre sa pathologie dorsale et son accident de service ;
- il n'est pas démontré que son état antérieur n'aurait pas évolué de manière autonome et conduit à la pathologie dont il est fait état ;
- il ne démontre pas le port de charges lourdes, les manipulations itératives fréquentes ou les positions inappropriées ;
- M. G... n'a pas démontré le lien direct et exclusif entre son activité professionnelle et sa pathologie ;
- sa demande de reconnaissance au service d'imputabilité de sa pathologie présentée le 19 janvier 2015 pourrait être regardée comme prescrite, en application de l'article 32 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, dès lors que sa pathologie a été constatée dès 2009 ;
- M. G... a été convoqué régulièrement aux réunions de la commission de réforme ;
- l'irrégularité de la composition de la commission n'est pas démontrée dès lors qu'elle ne se réunissait pas pour donner son avis sur un congé de longue durée ou longue maladie ou une pathologie psychiatrique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2018, M. G..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête à titre principal, à titre subsidiaire à ce que soit ordonnée une expertise judiciaire, et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du SDIS de la Drôme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme I..., présidente-assesseure,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me F..., représentant le SDIS de la Drôme ;
Considérant ce qui suit :
1. M. G..., sapeur-pompier professionnel au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Drôme a demandé, depuis le 19 janvier 2015, la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie. Sur avis rendu par la commission départementale de réforme le 13 octobre 2015, le chef du groupement des ressources humaines de la Drôme a, par une décision du 22 octobre 2015, refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de M. G.... Par une décision du 24 mai 2016, signée par délégation par le directeur départemental adjoint, le SDIS de la Drôme a confirmé la décision du 22 octobre 2015. Par le jugement attaqué du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 22 octobre 2015. Le SDIS de la Drôme relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il résulte des termes de la décision du 24 mai 2016 qu'elle ne retire pas la décision du 22 octobre 2015. Par suite le SDIS de la Drôme n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges se sont abstenus de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 22 octobre 2015 en l'absence de contestation par M. G... de la décision du 24 mai 2016 qui était insusceptible de faire l'objet d'un recours.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de la décision en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".
4. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduise à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.
5. La décision du 22 octobre 2015 est fondée sur l'avis défavorable de la commission départementale du 13 octobre 2015 relativement à l'imputabilité au service de la pathologie de M. G... au motif " qu'il existe un état antérieur qui évolue pour son propre compte. Ce dernier a été révélé par l'accident de trajet de 1992 ". Le rapport du Dr Mey indique que l'accident de service a été responsable d'un " ébranlement général de la colonne vertébrale ". Si le docteur Le Moal, médecin de prévention a, le 10 février 2015, donné un avis défavorable pour la reconnaissance d'une maladie professionnelle (tableaux 97 et 98) visée à l'article L. 461-2 du code de la sécurité sociale, il a donné un avis favorable à la reconnaissance d'une maladie professionnelle hors tableaux. Il ressort des pièces du dossier que M. G..., dans l'exercice de son activité professionnelle, a été contraint, au moins ponctuellement, à porter de lourdes charges dans le cadre de brancardages, de port de matériel pour les interventions et d'opérations de désincarcération de victimes qui ont été susceptibles d'aggraver sa pathologie dorsale. Le certificat du Dr Fiere, chirurgien, spécialiste de la colonne vertébrale, mentionne que sa pathologie est associée à une activité professionnelle avec des contraintes importantes sur la colonne vertébrale. Si la commission de réforme a relevé l'existence d'un " état antérieur ", mentionné dans des rapports médicaux, résultant de la " malformation du canal lombaire ", décelée lors de l'accident de service survenu en 1992, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa pathologie, objet du présent litige résulte de cet état antérieur, qui aurait évolué de manière autonome sans lien direct avec l'accident de service de 1992 et les missions qui lui ont été confiées. Par suite, la pathologie lombaire de M. G... doit être regardée comme en lien direct et certain avec le service.
6. En second lieu, le décret du 14 mars 1986 a été pris pour l'application des articles 34 et 35 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. Ses dispositions, notamment celles de l'article 32, qui limitent à quatre années le délai pour demander l'imputabilité de la maladie, ne s'appliquent qu'aux fonctionnaires régis par cette loi, à savoir les fonctionnaires de l'Etat. Par suite, le moyen du SDIS de la Drôme tiré de la méconnaissance de l'article 32 du décret du 14 mars 1986 ne peut en tout état de cause qu'être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de prescrire une expertise, que le SDIS de la Drôme n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 22 octobre 2015, confirmée par une décision du 24 mai 2016, refusant de reconnaître l'imputabilité de la pathologie de M. G... au service.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. G..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit du SDIS de la Drôme, au titre des frais exposés par lui à l'occasion du litige. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SDIS de la Drôme le paiement à M. G... d'une somme de 2 000 euros au titre de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du SDIS de la Drôme est rejetée.
Article 2 : Le SDIS de la Drôme versera la somme de 2 000 euros à M. G... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... G... et au service départemental d'incendie et de secours de la Drôme.
Délibéré après l'audience du 2 juin 2020, à laquelle siégeaient :
Mme E... B..., présidente de chambre,
Mme J..., présidente-assesseure,
Mme C... H..., première conseillère.
Lu en audience publique le 30 juin 2020.
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N° 18LY00922