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18/03/2019 | FRANCE | N°411640

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 18 mars 2019, 411640


Vu les procédures suivantes :

1° M. G...D...a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2007. Par un jugement no 1303500 du 16 février 2016, le tribunal a fait droit à sa demande au titre des années 2006 et 2007, et a rejeté le surplus de ses conclusions au titre de l'année 2005 comme étant sans objet.

Par un arrêt n° 16VE01813 du 20 avril 2017, la cour administrative d'appel de Versailles a fait partiellement droit à l'a

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Vu les procédures suivantes :

1° M. G...D...a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2007. Par un jugement no 1303500 du 16 février 2016, le tribunal a fait droit à sa demande au titre des années 2006 et 2007, et a rejeté le surplus de ses conclusions au titre de l'année 2005 comme étant sans objet.

Par un arrêt n° 16VE01813 du 20 avril 2017, la cour administrative d'appel de Versailles a fait partiellement droit à l'appel formé par le ministre des finances et des comptes publics contre ce jugement, en rétablissant M. D...au rôle de l'impôt sur le revenu à concurrence du complément d'impôt résultant de la réintégration à son revenu imposable d'une somme de 1 195 euros au titre de revenus distribués en 2006 et de 48 773 euros au titre de revenus distribués en 2007, et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Sous le n° 411640, par un pourvoi et un nouveau mémoire enregistrés le 20 juin 2017 et le 24 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

2° M. F...D...a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2007. Par un jugement no 1303499 du 16 février 2016, le tribunal a fait droit à sa demande au titre des années 2006 et 2007, et a rejeté le surplus de ses conclusions au titre de l'année 2005 comme étant sans objet.

Par un arrêt n° 16VE01811 du 20 avril 2017, la cour administrative d'appel de Versailles a fait partiellement droit à l'appel formé par le ministre des finances et des comptes publics contre ce jugement, en rétablissant M. D...au rôle de l'impôt sur le revenu à concurrence du complément d'impôt résultant de la réintégration à son revenu imposable d'une somme de 198 417 euros au titre de revenus distribués en 2006 et de 167 903 euros au titre de revenus distribués en 2007, et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Sous le n° 411643, par un pourvoi enregistré le 20 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêt en tant qu'il n'a pas rétabli les impositions à concurrence de 223 667 euros, en bases, au titre de l'année 2007.

....................................................................................

3° Mme E...D...a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 à 2007. Par un jugement nos 1303059, 1307022 du 16 février 2016, le tribunal a fait droit à sa demande au titre de l'année 2006 et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un arrêt n° 16VE01812 du 20 avril 2017, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par le ministre des finances et des comptes publics contre ce jugement.

Sous le n° 411644, par un pourvoi enregistré le 20 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Le ministre soulève les mêmes moyens que sous le n° 411640.

Le pourvoi a été communiqué à Mme D...qui n'a pas produit de mémoire.

....................................................................................

4° Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2005 à 2007. Par un jugement no 1305606 du 16 février 2016, le tribunal a fait droit à sa demande au titre des années 2006 et 2007, et a rejeté le surplus de ses conclusions au titre de l'année 2005 comme étant sans objet.

Par un arrêt n° 16VE01814 du 20 avril 2017, la cour administrative d'appel de Versailles a fait partiellement droit à l'appel formé par le ministre des finances et des comptes publics contre ce jugement, en rétablissant Mme C...au rôle de l'impôt sur le revenu à hauteur du complément d'impôt résultant de la réintégration à son revenu imposable au titre de l'année 2007 de revenus distribués à hauteur de 100 134 euros, et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Sous le n° 411645, par un pourvoi et un nouveau mémoire enregistrés le 20 juin 2017 et le 24 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Le ministre soulève les mêmes moyens que sous le n° 411640.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C...conclut au rejet du pourvoi et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.

....................................................................................

5° Sous le n° 411724, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire enregistrés les 21 juin et 20 septembre 2017 et le 21 août 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le même arrêt n° 16VE01814 du 20 avril 2017 de la cour administrative d'appel de Versailles ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre,

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. D...et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. Les pourvois du ministre et celui de Mme C...sont relatifs aux conséquences du même contrôle. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a rectifié les résultats des exercices 2006 et 2007 de la société civile immobilière (SCI) Gambetta 113. En conséquence de ces rectifications, des suppléments d'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, ont été mis à la charge de M. B...C..., Mme E...D...et MM. F... et G...D..., associés de la SCI, à concurrence de leur quote-part du capital social. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre les arrêts du 20 avril 2017 par lesquels la cour administrative d'appel de Versailles a, d'une part, rejeté les conclusions principales de l'appel qu'il avait formé contre les jugements du 16 février 2016 du tribunal administratif de Versailles prononçant la décharge de ces suppléments d'impôt sur le revenu, au motif que la SCI Gambetta 113 relevait de l'impôt sur les sociétés, et d'autre part fait partiellement droit à ses conclusions subsidiaires tendant au rétablissement, à la charge de Mme C...venant aux droits de M. C...et de MM.D..., de suppléments d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus distribués. Mme C...se pourvoit également en cassation contre l'arrêt du 20 avril 2017 par lequel la cour a fait droit aux conclusions subsidiaires du ministre dirigées contre le jugement du 16 février 2016 du tribunal administratif de Versailles qui avait prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge de M.C..., aux droits duquel elle vient.

3. Aux termes du 2 de l'article 206 du code général des impôts relatif au champ d'application de l'impôt sur les sociétés : " Sous réserve des dispositions de l'article 239 ter, les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt, (...) si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 ". Aux termes du I de l'article 35 de ce code : " Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières (...). / 1° bis Personnes qui, à titre habituel, achètent des biens immeubles, en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre, en bloc ou par locaux (...) ". Le I de l'article 239 ter du même code prévoit que : " Les dispositions du 2 de l'article 206 ne sont pas applicables aux sociétés civiles créées après l'entrée en vigueur de la loi n° 64-1278 du 23 décembre 1964 et qui ont pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente, à la condition que ces sociétés ne soient pas constituées sous la forme de sociétés par actions ou à responsabilité limitée et que leurs statuts prévoient la responsabilité indéfinie des associés en ce qui concerne le passif social. / Les sociétés civiles visées au premier alinéa sont soumises au même régime que les sociétés en nom collectif effectuant les mêmes opérations ; leurs associés sont imposés dans les mêmes conditions que les membres de ces dernières sociétés. " Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'une société civile exerçant l'une des activités visées à l'article 35 du code général des impôts est en principe assujettie à l'impôt sur les sociétés, sauf à ce que, sous les conditions prévues à l'article 239 ter de ce code, elle ait pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente. Ce régime dérogatoire s'applique aux sociétés civiles qui, tout en remplissant les conditions exigées par ces dispositions, ne se livrent pas effectivement, en plus des opérations de construction-vente et réserve faite, le cas échéant, des opérations accessoires à cette activité, à d'autres opérations qui, si elles étaient effectuées isolément, auraient pour conséquence la soumission de ces sociétés à l'impôt sur les sociétés en application des dispositions combinées des articles 206 et 35 du code général des impôts.

4. En jugeant que la SCI Gambetta 113, qui exerçait une activité de construction-vente entrant dans les prévisions du 1 bis de l'article 35 du code général des impôts cité ci-dessus, de sorte qu'elle relevait en principe de l'impôt sur les sociétés, n'entrait pas dans le champ du régime d'imposition dérogatoire prévu à l'article 239 ter de ce code, en se fondant non sur les opérations effectivement réalisées par la société mais sur la circonstance que son objet social n'était pas exclusivement limité à cette catégorie d'opérations mais mentionnait d'autres opérations de nature commerciale, la cour a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de ses pourvois, que le ministre est fondé à demander l'annulation des arrêts qu'il attaque. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur le pourvoi de MmeC..., qui est devenu sans objet.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'État qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Les arrêts n° 16VE01811, n° 16VE01812, n° 16VE01813 et n° 16VE01814 du 20 avril 2017 de la cour administrative d'appel de Versailles sont annulés.

Article 2 : Les affaires sont renvoyées à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur le pourvoi de MmeC.... Les conclusions qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. G...D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'action et des comptes publics, à M. G... D..., M. F...D..., Mme E...D...et Mme A...C....


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 411640
Date de la décision : 18/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. RÈGLES GÉNÉRALES. IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES. PERSONNES MORALES ET BÉNÉFICES IMPOSABLES. - RÉGIME DÉROGATOIRE DES SCI AYANT POUR OBJET LA CONSTRUCTION D'IMMEUBLES EN VUE DE LA VENTE (ART. 239 TER DU CGI) - CRITÈRES D'APPLICATION - 1) NATURE DES ACTIVITÉS AUXQUELLES SE LIVRENT LES SOCIÉTÉS [RJ1] - EXISTENCE - 2) NÉCESSITÉ D'UN OBJET SOCIAL EXCLUSIVEMENT LIMITÉ À L'ACTIVITÉ DE CONSTRUCTION-VENTE - ABSENCE.

19-04-01-04-01 1) Il résulte de la combinaison du I de l'article 35, du 2. de l'article 206 et du I de l'article 239 ter du code général des impôts (CGI) qu'une société civile exerçant l'une des activités visées à l'article 35 du CGI est en principe assujettie à l'impôt sur les sociétés, sauf à ce que, sous les conditions prévues à l'article 239 ter de ce code, elle ait pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente. Ce régime dérogatoire s'applique aux sociétés civiles qui, tout en remplissant les conditions exigées par ces dispositions, ne se livrent pas effectivement, en plus des opérations de construction-vente et réserve faite, le cas échéant, des opérations accessoires à cette activité, à d'autres opérations qui, si elles étaient effectuées isolément, auraient pour conséquence la soumission de ces sociétés à l'impôt sur les sociétés en application des dispositions combinées des articles 206 et 35 du CGI.... ,,2) En jugeant que la société requérante, qui exerçait une activité de construction-vente entrant dans les prévisions du 1 bis de l'article 35 du CGI, de sorte qu'elle relevait en principe de l'impôt sur les sociétés, n'entrait pas dans le champ du régime d'imposition dérogatoire prévu à l'article 239 ter de ce code en se fondant non sur les opérations effectivement réalisées par la société mais sur la circonstance que son objet social n'était pas exclusivement limité à cette catégorie d'opérations mais mentionnait d'autres opérations de nature commerciale, la cour a commis une erreur de droit.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 28 novembre 2012, SCI Virapin Apou, n° 332110, T. p. 715.


Publications
Proposition de citation : CE, 18 mar. 2019, n° 411640
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Ophélie Champeaux
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:411640.20190318
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