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28/11/2012 | FRANCE | N°332110

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 28 novembre 2012, 332110


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 septembre et 18 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SCI Virapin Apou, dont le siège est 404 avenue d'Ile-de-France à Saint-A... de la Réunion (97440) ; la SCI Virapin Apou demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 3 de l'arrêt n° 08BX00965 du 18 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté les conclusions de sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0500964 du 21 février 2008 du tribunal administratif de Saint

-B... de la Réunion en tant qu'il rejette sa demande de décharge, d'une...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 septembre et 18 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SCI Virapin Apou, dont le siège est 404 avenue d'Ile-de-France à Saint-A... de la Réunion (97440) ; la SCI Virapin Apou demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 3 de l'arrêt n° 08BX00965 du 18 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté les conclusions de sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0500964 du 21 février 2008 du tribunal administratif de Saint-B... de la Réunion en tant qu'il rejette sa demande de décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 et 2002, d'autre part, du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période allant du 1er janvier 2000 au 31 juillet 2003 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre de procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Josse, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SCI Virapin Apou,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SCI Virapin Apou ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SCI Virapin Apou, qui a pour objet social la construction d'immeubles en vue de leur vente, a fait construire sur le territoire de la commune de Saint-A..., dans le département de La Réunion, un immeuble dont une partie des lots a fait l'objet de ventes en 1994, 1995 et 2000, l'autre partie des lots étant donnée en location ; que les recettes tirées de l'activité de location ont représenté l'intégralité des produits enregistrés par la société en 2001 et en 2002 ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a soumis cette société à l'impôt sur les sociétés, en remettant en cause le bénéfice du régime de l'article 239 ter du code général des impôts dont elle se prévalait et a, en conséquence, assujetti ses opérations à la taxe sur la valeur ajoutée ; que la SCI Virapin Apou se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 juin 2009 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant qu'il rejette sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle sur cet impôt qui ont été mises à sa charge au titre des exercices 2001 et 2002, ainsi que du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période allant du 1er janvier 2000 au 31 juillet 2003 ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, une requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge ; que la cour, pour rejeter comme irrecevables les conclusions de la société requérante tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui avait été réclamé, s'est fondée sur ce qu'aucun moyen n'était articulé à l'appui des conclusions relatives à cet impôt ; qu'il ressort des écritures produites par la société devant la cour avant l'expiration du délai d'appel qu'elles ne comportaient aucun moyen relatif à la taxe sur la valeur ajoutée ni ne reprenaient le moyen, soulevé devant le tribunal administratif, tiré de ce que l'application du régime de l'article 239 ter du code général des impôts, dont la société se prévalait par ailleurs, devait conduire à ce qu'elle ne soit pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ainsi, la cour, qui n'a pas dénaturé les écritures de la SCI Virapin Apou, n'a pas méconnu les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

3. Considérant, en second lieu, que le premier alinéa de l'article 34 du code général des impôts dispose que les bénéfices provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux ; que, selon l'article 35 du même code, présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux les opérations portant, à titre habituel, sur des biens immeubles, en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre, en bloc ou par locaux ; que l'article 206 du même code dispose que les sociétés civiles sont passibles de l'impôt sur les sociétés si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 ; que, toutefois, l'article 239 ter du code prévoit, par dérogation à l'article 206, que, sous certaines conditions, les sociétés civiles qui ont pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés mais sont soumises au même régime que les sociétés en nom collectif effectuant les mêmes opérations ; que ce régime dérogatoire cesse cependant de s'appliquer aux sociétés civiles qui, tout en remplissant, par leur objet statutaire et par leur forme, les conditions exigées par ces dispositions, se livrent, en plus des opérations de construction-vente, à d'autres opérations qui, si elles étaient effectuées isolément, auraient pour conséquence la soumission de ces sociétés à l'impôt sur les sociétés en application des dispositions combinées des articles 206, 34 et 35 du code général des impôts ;

4. Considérant qu'après avoir jugé que, compte tenu de son objet social et du fait qu'elle avait procédé au cours des années 1994, 1995 et 2000 à la cession de certains lots de l'immeuble concerné, la SCI Virapin Apou devait être regardée comme n'ayant pas perdu sa qualité de société de construction-vente au cours des années d'imposition en litige, la cour a jugé qu'elle ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article 239 ter du code général des impôts précité, au seul motif qu'elle avait encaissé au titre de ces années des recettes de location ; qu'en ne recherchant pas si cette activité de location revêtait, en l'espèce et comme le soutenait expressément la société dans ses écritures, une nature civile, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, son arrêt doit être annulé en tant qu'il statue sur la demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle sur cet impôt mises à la charge de la SCI Virapin Apou au titre des exercices 2001 et 2002 ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 3 de l'arrêt du 18 juin 2009 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé en tant qu'il statue sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelles sur cet impôt mises à la charge de la SCI Virapin Apou au titre des exercices 2001 et 2002.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la limite de la cassation ainsi prononcée, devant la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : Le surplus du pourvoi est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SCI Virapin Apou et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 332110
Date de la décision : 28/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. RÈGLES GÉNÉRALES. IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES. PERSONNES MORALES ET BÉNÉFICES IMPOSABLES. - RÉGIME DÉROGATOIRE DES SCI AYANT POUR OBJET LA CONSTRUCTION D'IMMEUBLES EN VUE DE LA VENTE (ART. 239 TER DU CGI) - CIRCONSTANCE QU'UNE SCI AYANT POUR OBJET LA CONSTRUCTION-VENTE EXERCE PAR AILLEURS UNE ACTIVITÉ DE LOCATION DE NATURE CIVILE - CONSÉQUENCE - OBSTACLE AU BÉNÉFICE DE CE RÉGIME DÉROGATOIRE - ABSENCE [RJ1].

19-04-01-04-01 La circonstance qu'une société civile immobilière (SCI) ayant pour objet l'activité de construction-vente exerce, par ailleurs, une activité de nature civile ne saurait faire obstacle à ce qu'elle se prévale des dispositions de l'article 239 ter du code général des impôts (CGI) qui prévoit, par dérogation à l'article 206 du même code, que, sous certaines conditions, les sociétés civiles qui ont pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés mais sont soumises au même régime que les sociétés en nom collectif effectuant les mêmes opérations. Par suite, le juge de l'impôt ne peut exclure une SCI ayant pour objet l'activité de construction-vente du bénéfice de ce régime dérogatoire au seul motif que cette société aurait encaissé au titre des années en litige des recettes de location, sans rechercher si cette activité de location revêtait une nature civile.


Références :

[RJ1]

Rappr. CE, 5 avril 1978, Société X, n° 01211, T. p. 771 ;

CE, 12 mars 2007, SARL Etudes générales immobilières, n° 263850, inédite au Recueil.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 nov. 2012, n° 332110
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Josse
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:332110.20121128
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