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29/09/2009 | FRANCE | N°08-15035

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 septembre 2009, 08-15035


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 février 2008), que la privatisation de la société Snecma a été décidée par le gouvernement le 24 février 2004 ; qu'en application des textes en vigueur, 10 % des actions concernées par l'ouverture du capital devaient être réservées aux salariés de la société et de ses filiales ; que pour donner son avis sur ce projet d'actionnariat salarié, une réunion extraordinaire du Comité central d'entreprise de la société Snecma services, filiale à 100 % de la société Snecma moteurs, elle même détenue à 100 % par Snecma SA, a été con

voquée les 20 et 27 avril 2004 ; que lors de sa séance, le Comité central d'e...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 février 2008), que la privatisation de la société Snecma a été décidée par le gouvernement le 24 février 2004 ; qu'en application des textes en vigueur, 10 % des actions concernées par l'ouverture du capital devaient être réservées aux salariés de la société et de ses filiales ; que pour donner son avis sur ce projet d'actionnariat salarié, une réunion extraordinaire du Comité central d'entreprise de la société Snecma services, filiale à 100 % de la société Snecma moteurs, elle même détenue à 100 % par Snecma SA, a été convoquée les 20 et 27 avril 2004 ; que lors de sa séance, le Comité central d'entreprise a décidé d'exercer son droit d'alerte et désigné en qualité d'expert, pour l'assister dans cette procédure, le cabinet Sofrageco ; que la société Snecma a été déboutée, en référé, de son action tendant à voir annuler la délibération ; que le cabinet Sofrageco a remis, en octobre 2004 un " rapport d'étape " qui a été examiné par le comité central d'entreprise le 19 janvier 2005 ; que lors de cette nouvelle réunion, le comité central d'entreprise a décidé d'étendre la mission de l'expert aux conséquences du projet de fusion, annoncé publiquement par les ministres, entre le groupe Snecma et le groupe Sagem ; que le Comité central d'entreprise et le cabinet Sofrageco ont saisi le tribunal de grande instance pour qu'il soit ordonné à la société Snecma services de fournir à l'expert les documents réclamés par ce dernier concernant le projet de fusion finalement concrétisé le 11 mai 2005 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Snecma services fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la mission d'expertise du cabinet Sofrageco avait été valablement étendue au projet de fusion des groupes Snecma et Sagem et d'avoir ordonné à la société Snecma services de remettre à l'expert les documents réclamés par ce dernier, alors, selon le moyen :
1° / que l'ouverture du capital d'une société constitue une opération juridique distincte d'une opération de fusion ; qu'en l'espèce, il résultait du procès verbal du comité central d'entreprise du 27 avril 2004 expressément cité par la cour d'appel que c'est " l'actionnariat salarié, suite au projet d'ouverture du capital Snecma dans le cadre du processus de privatisation " qui avait déclenché la mise en oeuvre du droit d'alerte ; qu'en jugeant que la fusion de la société Snecma avec la société Sagem annoncée le 29 octobre 2004 était en relation directe avec les faits ayant justifié la procédure d'alerte du comité central d'entreprise de Snecma services, en ce qu'elle s'inscrivait dans le cadre du processus de privatisation, lorsque c'est le projet d'actionnariat des salariés dans le cadre de l'ouverture du capital social de la société Snecma qui avait justifié le droit d'alerte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation des articles L. 2323 78 à L. 2323 82 du code du travail ;
2° / qu'à supposer même que la fusion avec la société Sagem ait été en relation directe avec l'ouverture du capital de la société Snecma, elle ne pouvait justifier l'extension de la mission de l'expert qu'à la condition d'être elle même un fait de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise ; qu'en l'espèce, si les juges du fond ont estimé que l'opération d'ouverture du capital constituait un fait préoccupant ayant justifié la mise en oeuvre du droit d'alerte en 2004, ils se sont bornés pour justifier l'extension de la mission de l'expert à l'opération de fusion de la Snecma avec la Sagem, à constater l'existence d'un lien entre cette opération et l'ouverture du capital de la Snecma ; qu'en statuant ainsi, sans à aucun moment caractériser que l'opération de fusion constituait elle même un fait préoccupant pour la situation économique de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2323 78 à L. 2323 82 du code du travail ;
3° / que l'extension de la mission de l'expert à de nouveaux faits qui sont la suite nécessaire de ceux ayant justifié la mise en oeuvre du droit d'alerte ne peut avoir lieu qu'avant la clôture de celle ci ; qu'en l'espèce, la société Snecma faisait valoir que le rapport d'étape de l'expert qui lui avait été remis le 14 janvier 2005 avait mis fin à la mission initiale de ce dernier de sorte que Comité central d'entreprise ne pouvait l'avoir postérieurement étendue à de nouveaux faits ; qu'en jugeant que la mission d'expertise du cabinet Sofrageco auquel le comité central d'entreprise avait fait appel le 27 avril 2004 en exerçant son droit d'alerte avait été valablement étendue le 19 janvier 2005 au projet de fusion des groupes Snecma et Sagem, sans rechercher comme elle y était invitée si la mission de l'expert n'avait pas été définitivement close par la remise de son rapport d'étape le 14 janvier 2005, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2323 78 à L. 2323 82 du code du travail ;
Mais attendu que la mission de l'expert comptable s'étend aux faits de nature à confirmer la situation économique préoccupante de l'entreprise qui sont la suite nécessaire de ceux qui ont motivé l'exercice du droit d'alerte ; que la cour d'appel, qui a fait ressortir que le projet de fusion des groupes Snecma et Sagem, annoncé alors que l'expert désigné par le Comité central d'entreprise était en cours d'exécution de sa mission, était la suite directe de l'ouverture de capital décidée dans le cadre de la privatisation du groupe Snecma et qui avait justifié l'exercice par le Comité central d'entreprise de son droit d'alerte, a statué à bon droit ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Snecma services fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à verser au Comité central d'entreprise une somme à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, alors, selon le moyen :
1° / qu'il était constant en l'espèce que par ordonnance rendue le 3 août 2004, le juge des référés du tribunal de grande instance de Versailles avait ordonné au président du Comité central d'entreprise de la société Snecma services de répondre aux demandes de communication de pièces et d'informations du cabinet Sofrageco dans le cadre de l'exercice par le Comité central d'entreprise de la société Snecma services de son droit d'alerte mis en oeuvre le 27 avril 2004 relativement à l'ouverture du capital de la société Snecma ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que ce n'est qu'après l'extension par le comité central d'entreprise de la mission du cabinet Sofrageco à la fusion Snecma Sagem que la société Snecma s'était opposée à des demandes d'informations et de communication de pièces concernant cette fusion, et que le Comité central d'entreprise, après que le juge des référés avait dénié sa compétence par ordonnance du 7 mars 2006 en estimant que le projet de fusion n'apparaissait pas avec évidence comme une suite nécessaire de l'ouverture du capital litigieuse, avait saisi au fond le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir juger que la procédure d'alerte avait été valablement étendue au projet de fusion Snecma Sagem et, partant de voir ordonner à la société Snecma de communiquer diverses pièces relatives à ce projet de fusion ; qu'en jugeant que le refus de la société Snecma de communiquer ces pièces traduisait une volonté manifeste de la société Snecma services de faire obstacle à l'exercice, par le Comité central d'entreprise, de son droit consacré par la décision du juge des référés en date du 3 août 2004, pour en déduire que la société Snecma avait fait preuve d'une résistance abusive, lorsque sa résistance était relative, non pas à l'exercice du droit d'alerte concernant l'ouverture de son capital sur lequel s'était prononcé le juge des référés en 2004, mais à l'extension de ce droit à la fusion Snecma Sagem, point non encore tranché définitivement par aucune juridiction du fond et sur lequel le juge des référés avait retenu en 2006 l'absence de trouble manifestement illicite, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article 1382 du code civil ;
2° / que le seul fait pour une partie de ne pas prendre l'initiative de saisir le juge de la contestation qui justifie son opposition à déférer à la demande de la partie adverse ne caractérise pas une résistance abusive ; qu'en reprochant à la société Snecma de n'avoir pas saisi le juge de sa contestation de l'extension du droit d'alerte du Comité central d'entreprise, initialement cantonné à l'ouverture du capital de la Snecma, à la fusion Snecma Sagem, justifiant son refus de lui transmettre des informations relatives à cette fusion, pour en déduire que sa résistance était abusive, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté qu'après une première décision de référé intervenue en 2004, la société Snecma avait délibérément refusé de remettre pendant plusieurs mois les documents réclamés par l'expert désigné par le Comité central d'entreprise, sans pour autant contester judiciairement la nature de l'intervention de l'expert, a pu décider que l'attitude de l'employeur constituait une faute dont il devait réparation ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Snecma services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Snecma services à payer au Comité central d'entreprise de la société Snecma services la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

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Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Snecma services.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la mission d'expertise du cabinet d'expertise comptable SOFRAGECO auquel le comité central d'entreprise a fait appel le 27 avril 2004 en exerçant son droit d'alerte a été étendue au projet de fusion des groupes SNECMA et SAGEM, et d'AVOIR ordonné à la société SNECMA SERVICES de remettre au cabinet d'expertise comptable et de commissariat aux comptes SOFRAGECO les documents énumérés au dispositif du jugement confirmé, et d'AVOIR condamné la société SNECMA SERVICES à verser au Comité Central d'Entreprise la somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive
AUX MOTIFS PROPRES QUE « SUR LES FAITS : Considérant qu'il n'est pas discuté que la loi de privatisation du 19 juillet 1993 a fait figurer la société SNECMA SA au nombre des 21 sociétés " privatisables " ; que le 24 février 2004, le Ministre de la Défense et celui de l'Economie et des Finances ont décidé de procéder à l'application des dispositions de cette loi concernant la société SNECMA SA ; que conformément aux prévisions de la loi du 6 août 1986, 10 % des actions de SNECMA SA mises sur le marché devaient être réservés aux salariés de cette société et de ses filiales : que le comité central d'entreprise de la société SNECMA SERVICES,- filiale à 100 % de la société SNECMA MOTEURS, elle-même détenue à 100 % par SNECMA SA. " holding " du groupe-, était ainsi convoqué en réunion extraordinaire le 7 avril 2004 afin de donner son avis sur ce projet d'actionnariat salarié ; que cette réunion ne pouvant se tenir, en raison de l'occupation des locaux par les salariés de l'entreprise, le comité se tint à nouveau les 20 et 27 avril suivants,- les élus décidant à l'issue de cette dernière réunion, d'exercer le droit d'alerte du comité et désignant en qualité d'expert, le cabinet SOFRAGECO pour l'assister dans le cadre de cette procédure d'alerte ; que par lettre du 11 mai 2004, le cabinet SOFRAGECO adressait vainement à la société SNECMA SERVICES une liste des documents à lui produire et réitérait vainement sa demande le 1er juin, lorsque par assignation en référé du 30 juin 2004. le président de la société SNECMA SERVICES introduisait une procédure, devant le président du tribunal de grande instance de VERSAILLES, à l'effet de voir annuler la résolution du comité central d'entreprise ayant déclenché l'exercice du droit d'alerte et désigné le cabinet SOFRAGECO au motif que le comité central d'entreprise ne justifiait pas que l'ouverture du capital de la société SNECMA SA pouvait affecter de manière préoccupante la situation économique de cette société : que le Juge des référés, par décision définitive du 3 août 2004.- après avoir rappelé, de manière encore aujourd'hui non contestée, qu'à la suite du premier ministre, le 7 mai 2004. la direction de SNECMA SA avait admis, le 25 juin suivant que l'ouverture de son capital était un pas essentiel vers sa privatisation et le désengagement de l'Etat à son égard-a débouté le demandeur de ses prétentions et lui a ordonné de répondre, en sa qualité de président du comité central d'entreprise, aux demandes de communication de pièces et d'informations du cabinet SOFRAGECO dans le cadre de la mission confiée à celui-ci en vertu de l'exercice par le comité de son droit d'alerte ; qu'après que la société SNECMA SERVICES eut envoyé à l'expert les éléments requis, sans toutefois les fournir tous, le cabinet SOFRAGECO qui avait déjà établi un « document du travail » en date du 7 octobre 2004 a remis au comité un « rapport d'étape » qui a été débattu par le comité dans sa réunion du 19 janvier 2005 ; que lors de cette réunion, le comité a décidé que la procédure d'alerte devait se poursuivre en raison du rapprochement entre le groupe SNECMA et le groupe SAGEM, annoncé publiquement par les deux ministres concernés dans un communiqué du 29 octobre 2004 ; que ce rapprochement s'est concrétisé, le 11 mai 2005, par la fusion effective des sociétés mères de chacun des groupes, à la suite de la cession par l'Etat à la société SAGEM d'une partie de ses actions au sein de la société SNECMA SA qui faisait perdre à l'Etat son caractère d'actionnaire majoritaire ; que le cabinet SOFRAGECO rencontrait à nouveau des difficultés pour obtenir, de la société SNECMA SERVICES, la remise de divers documents qu'il lui réclamait dans le cadre de la poursuite de sa mission ; que le comité, lors de ses réunions du 25 avril, puis 18 août 2005 dénonçait l'entrave ainsi commise par la direction de la société et devant la persistance du refus de la société de fournir certaines pièces, le comité central d'entreprise, réuni les 27 et 30 septembre suivants, décidait de saisir, avec le cabinet SOFRAGECO, le juge des référés du tribunal de grande instance de PARIS, puis,- après que celui-ci eut estimé qu'il n'y avait pas lieu à référé-, le tribunal, statuant au fond. afin, de voir juger, notamment, que la procédure d'alerte engagée en avril 2004 s'étendait valablement au projet de fusion des groupes SNECMA et SAGEM et que la société SNECMA SERVICES devait en conséquence remettre au cabinet SOFRAGECO les documents qu'elle se refusait à lui communiquer ; SUR LA PROCEDURE ET LES PRETENTIONS DES PARTIES : Considérant que par le jugement entrepris, le tribunal de grande instance de PARIS, faisant droit aux prétentions des demandeurs, a dit que la mission du cabinet d'expertise-comptable de SOFRAGECO auquel le comité central d'entreprise a fait appel le 27 avril 2004. en exerçant son droit d'alerte, a été étendue au projet de fusion des groupes SNECMA et SAGEM et, en conséquence, a ordonné à la société SNECMA SERVICES de remettre à SOFRAGECO les documents suivants :- brochure et compte consolidés 2004 pour SNECMA et tableau de décomposition du bilan et du résultat consolidé par société intégrée du groupe SNECMA en 2004 balance consolidée et rapport des commissaires aux comptes-éléments de prévisions pour les exercices à venir en terme de résultats, de bilan, effectifs et de synergies (au-delà de 2005 et pour 3 ans) relatifs au groupe SAFRAN (né de la fusion des deux groupes)- rapports et PV des organes dirigeants et procès-verbaux des assemblées générales de SNECMA et SAGEM concernant la fusion des deux groupes-pactes d'actionnaires, rapport des commissaires aux comptes à la fusion-étude du cabinet Roland Y... chargé d'évaluer les synergies des deux groupes en vue de leur fusion,- note du 7 octobre 2004 intitulée " Evaluation des gains découlant des synergies entre SAGEM et SNECMA " ; Considérant qu'il est également acquis aux débats que postérieurement à ce jugement,- non assorti de l'exécution provisoire-la société SNECMA SERVICES a remis au cabinet SOFRAGECO les documents listés par le tribunal dans sa décision, a intégralement acquitté, sans les contester, les honoraires de ce cabinet qui a déposé un rapport final, débattu le 13 juin 2007 par les élus : que ceux-ci le 25 septembre suivant ont repris à leur compte les conclusions de ce rapport et décidé de poursuivre la procédure d'alerte, en saisissant le conseil d'administration de la société SNECMA SERVICES : que dans sa séance du 12 octobre 2007, le conseil d'administration a estimé que " le projet d'offre de SAGEM a été jugé conforme aux intérêts de SNECMA de ses actionnaires et de ses salariés, notamment compte tenu de la qualité du projet industriel, de la complémentarité entre les deux groupes et Je l'absence de conséquences négatives pour l'emploi des salariés {...) L'analyse des principaux vecteurs économiques, financiers et sociaux de la société SNECMA SERVICES révèle que la situation de l'entreprise n'a pas été affectée négativement par le rapprochement de SNECMA et SAGEM " ; que cette considération était conforme à l'avis exprimé publiquement le 2 septembre 2007 lors de son départ en retraite, par M. X..., l'ancien président de SNECMA SA devenu le président du groupe SAFRAN-dénomination du groupe, né de la fusion des groupes SNECMA et SAGEM-l'intéressé ajoutant, néanmoins, de manière critique : " avec les informations que nous avons aujourd'hui, on ne l'aurait pas faite " (la fusion) ; Considérant que sans avoir introduit la moindre procédure de contestation, comme elle l'avait fait devant le juge des référés de VERSAILLES et sans, aujourd'hui, réclamer la restitution des honoraires du cabinet SOFRAGECO-intégralement payés par elle-la société SNECMA SERVICES soutient présentement que la partie de l'expertise effectuée par SOFRAGECO postérieurement à la réunion du comité central d'entreprise du 19 février 2005 et jusqu'au dépôt du rapport en juin 2007 a été conduite par le cabinet SOFRAGECO en qualité d'expert libre du comité d'entreprise, et non pas dans le cadre de la procédure d'alerte, initiée le 27 avril 2004 qui selon elle, se serait achevée lors de la réunion précitée du 19 janvier 2005 : que la société SNECMA SERVICES demande en effet à la Cour de juger, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal dans le jugement déféré, que les opérations auxquelles s'est livré le cabinet SOFRAGECO après le 19 janvier 2005, relatives à la fusion des groupes SNECMA et SAGEM, ne relèvent pas de la mission qui avait été confiée à cet expert-comptable dans le strict cadre de la procédure d'alerte ; qu'à l'inverse, les intimés font valoir que les opérations d'expertise critiquées, s'inscrivent dans le périmètre de la mission confiée dès l'origine au cabinet SOFRAGECO ; qu'en effet, le droit d'alerte a été exercé par le comité central d'entreprise en raison des inquiétudes que généraient pour les salariés de la société SNECMA SERVICES, la nouvelle de l'ouverture du capital de ta société mère, la société SNECMA SA, dont l'actionnaire était jusqu'alors, l'Etat, à 97 % ; que la fusion de SNECMA SA avec la société SAGEM et, partant, la fusion consécutive des deux groupes relevaient du processus de privatisation débuté en avril 2004 qui avait justifié les inquiétudes des salariés et le recours à la procédure d'alerte ; SUR LA MOTIVATION Considérant que la décision du comité central d'entreprise de recourir à la procédure d'alerte a pris source dans la réunion du comité du 20 avril 2004, date à laquelle avait été renvoyée la précédente réunion, fixée au 7 avril 2004, qui n'avait pu se tenir, compte tenu de l'occupation des locaux par les salariés de la société SNECMA SERVICES et avait pour ordre du jour la consultation du comité central d'entreprise sur le projet d'actionnariat salarié, consécutif à la décision prise par l'Etat, au mois de février précédent, d'ouvrir le capital de la société SNECMA SA, jusqu'alors entreprise quasiment nationalisée, puisque détenue par l'Etat à concurrence de 97 % : que l'état d'esprit des salariés, ce même 7 avril, ressortait d'ailleurs des termes d'un document daté du même jour, exposant, en la forme d'un tract, l'avis suivant des élus du comité central d'entreprise SNECMA SERVICES : " Avec la privatisation que vont devenir nos emplois, nos sites de production (...) Quel est le projet industriel pour demain, de cette Entreprise nationale, née à la Libération et qui a réussi à dominer le moteur civil pour être aujourd'hui 4eme motoriste mondial ? Les dirigeants de SNECMA ont choisi le camp de la rupture avec les capitaux public et le statut nationalisé (..) Quelle sera la politique de l'emploi ? Une société comme SNECMA reposant sur des fonds publics depuis un demi-siècle (...) appartient à lu Nation et où ses 39 000 salariés (...) Les élus du C. C. E. demandent l'arrêt du processus de privatisation du groupe SNECMA et sont défavorables à l'actionnariat salarié ; que lors de la réunion du comité central d'entreprise, le 20 avril 2004, les élus qui, plusieurs jours auparavant, avaient adressé au président de la société SNECMA SERVICES une liste de questions sur les diverses répercussions de l'ouverture du capital de la société, mère de leur société, ont cherché à obtenir plus d'informations à ce propos ; qu'ils ont estimé insuffisantes, les réponses fournies en séance, notamment quant au projet industriel qui sous-tendait cette opération, et consistait en réalité, selon eux, " d'abord en une opération à visée typiquement financière " puisque aussi bien, le président du comité exposait lui-même qu'il n'existait pas de projet industriel précis et que l'ouverture du capital avait présentement pour intérêt de donner à la société SNECMA SA " une capacité de manoeuvre pour profiler d'opportunités " lorsque celles-ci se présenteraient ; que les élus s'inquiétaient plus spécialement des conséquences d'une ouverture du capital à des firmes étrangères concurrentes et de la politique de l'emploi prévue, en rappelant que si " l'Etat est obligé de réduire la voilure dans une entreprise industrielle, il met plus de formes que les entreprises privées " ; que tandis que le président du comité invitait les élus à fournir strictement leur avis sur le projet d'actionnariat salarié, seul inscrit à l'ordre du jour, les élus faisaient valoir qu'ils ne pouvaient que réitérer cet avis, l'un d'eux s'exprimant en ces tenues : " S'il y a actionnariat c'est bien parce il y a privatisation et le fait préoccupant pour les salariés est bien le fait d'ouvrir le capital et d'engager le processus de privatisation. Le comité central d'entreprise attendra lu fin du processus avant de donner son avis " ; que finalement lorsqu'il s'est agi pour lui de voter, le comité a constaté n'être pas en mesure de le faire, son secrétaire résumant ainsi le point de vue de ses collègues : " certaines réponses sont soit insuffisantes soit n'ont pu convaincre et n'ont surtout pas ôté les inquiétudes et préoccupations des élus qui sont les préoccupations des salariés : il est donc proposé de déclencher le droit d'alerte " ; Considérant que la décision d'enclencher la procédure d'alerte a été prise au comité suivant, le 27 avril 2004 ; que le président du comité a immédiatement exprimé son opposition, en considérant que la question de l'ouverture du capital de SNECMA SA n'était pas de la compétence du comité central d'entreprise de la société SNECMA SERVICES : que les élus ont voté pour le déclenchement de la procédure d'alerte et la désignation du cabinet SOFRAGECO en ces termes : " le comité central d'entreprise de SNECMA SERVICES, réuni le 27 avril 2004 avec pour ordre du jour : l'actionnariat salarié, suite au projet d'ouverture du capital de Snecma dans le cadre du processus de privatisation (...) Le comité central d'entreprise considère que ces faits ont un caractère préoccupant pour l'avenir de l'Entreprise et du personnel. Ces questions de l'ordre du jour créent l'événement pour déclencher le droit d'alerte (...) " : Considérant qu'il résulte des énonciations précédentes que le fait à l'origine du déclenchement de la procédure d'alerte était l'instauration d'une ouverture du capital de SNECMA SA.- public depuis plus de 50 ans-, au profit d'actionnaires privés, dans des conditions, de surcroît, totalement indéterminées quant à l'identité des futurs investisseurs et la nature du projet industriel que pouvait supporter cette opération ; que ce bouleversement capitalistique allié à l'indécision économique des dirigeants de SNECMA SA ébranlaient, sur ses bases mêmes, le fonctionnement du groupe SNECMA. vieux d'un demi-siècle ; qu'il n'est dès lors pas contestable que l'ouverture du capital de SNECMA SA était bien un fait qui au sens de l'article L 432-5 du code du travail était de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise ; Et considérant que vainement la société SNECMA SERVICES prétend faire une distinction entre la notion d'ouverture de capital-dont elle ne conteste pas qu'elle pouvait justifier l'application de cet article-et celle de fusion du groupe SNECMA et du groupe SAGEM qui selon elle, aurait dû échapper au domaine de la mission confiée au cabinet SOFRAGECO ; qu'en effet, cette fusion qui a été annoncée le 29 octobre 2004 par les ministres concernés-alors que le cabinet SOFRAGECO n'avait donc pas encore déposé son rapport, dit " d'étape ", discuté au comité du 19 janvier 2005- faisait partie du processus de privatisation visé par le comité central d'entreprise, dans son vote du 27 avril 2004 précédemment rappelé, comme le fait générateur préoccupant, justifiant le déclenchement de la procédure d'alerte ; que l'ouverture du capital de SNECMA SA ne consistait d'ailleurs qu'en une décision gouvernementale de principe adoptée dès février 2004, impliquant, par elle-même, nécessairement l'élaboration d'un projet d'actionnariat des salariés du groupe et, à ce titre, la consultation du comité central d'entreprise de la société SNECMA SERVICES prévue le 7 avril 2004 ; que l'opération de fusion, n'était, elle, que la forme définitive prise par cette décision de principe, immédiatement qualifiée d'ailleurs par le gouvernement, lui-même,- ainsi qu'il a été précédemment rappelé-de " premier pas vers la privatisation " ; que de fait, la forme et les partenaires de celle-ci étant encore indéterminés lorsque le comité central d'entreprise a décidé d'exercer son droit d'alerte, le comité n'a pu d'évidence, viser expressément cette fusion, alors inexistante, dans sa résolution du 27 avril 2004 et, donc, dans la mission du cabinet SOFRAGECO ; que néanmoins, procédant d'une cession d'actions à la société SAGEM qui faisait perdre à l'Etat sa qualité d'actionnaire majoritaire au sein de SNECMA SA. la fusion consécutive des sociétés SNECMA SA et SAGEM, faisait bien partie intégrante du " processus de privatisation " engagé par la décision gouvernementale de février 2004 : que compte tenu du lien indissociable qui existait ainsi, entre le fait préoccupant, à l'origine de l'exercice de son droit d'alerte par le comité central d'entreprise, et la fusion litigieuse qui est intervenue postérieurement, au cours de l'expertise diligentée dans le cadre de la procédure d'alerte, c'est à bon droit que le comité central d'entreprise a précisé, lors de sa réunion du 19 janvier 2005, que le cabinet SOFRAGECO devait également faire porter ses investigations sur la fusion envisagée entre les sociétés SNECMA SA et SAGEM, puis réalisée le 11 mai 2005 ; Considérant que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a dit que le domaine de la mission confiée par le comité central d'entreprise au cabinet SOFRAGECO dans le cadre de la procédure d'alerte s'étendait au projet de fusion des groupes SNECMA et SAGEM »

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Attendu qu'il ressort des pièces versées aux débats que le comité central d'entreprise de la société SNECMA SERVICES, filiale de la société SNECMA MOTEURS, elle même filiale détenue à 100 % parla société Holding SNECMA a décidé le 27 avril 2004 d'exercer son droit d'alerte en vertu des dispositions de l'article L. 432-5 du Code du travail, suite au projet d'ouverture du capital de la SNECMA en application de la loi de privatisation du 19 juillet 1993 ; que ledit comité a désigné le cabinet d'expertise-comptable pour l'assister dans le cadre de cette procédure ; que par ordonnance du 3 août 2004 devenue définitive, le juge des référés du tribunal de grande instance de Versailles a débouté le président du comité central d'entreprise de SNECMA SERVICES de sa demande d'annulation de la résolution prise par le comité central d'entreprise d'engager une procédure d'alerte ; que le cabinet d'expertise-comptable SOFRAGECO a présenté un rapport " d'étape " lors de la réunion du comité central d'entreprise de SNECMA SERVICES tenue le 19 janvier 2005 ; qu'au cours de cette même réunion, le comité central d'entreprise a décidé que la procédure d'alerte devait se poursuivre en raison de la fusion SNECMA-SAGEM annoncée à l'automne 2004, et, que la mission du cabinet SOFRAGECO n'était pas de ce fait terminée ; que cette fusion s'est réalisée en définitive le 11 mai 2005 pour constituer le groupe SAFRAN ; que le comité central d'entreprise de SNECMA SERVICES dénonce l'obstruction apportée par les dirigeants de SNECMA SERVICES puis du groupe SAFRAN à l'exécution de la mission de l'expert-comptable en soutenant de manière erronée que la mission qui lui a été confiée dans le cadre de la procédure d'alerte engagée à l'occasion de l'ouverture du capital de SNECMA SA a pris fin le 19 janvier 2005 ; Attendu cela étant exposé, que selon les dispositions de l'article L. 432 5 1 du code du travail, lorsque le comité d'entreprise a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise, il peut demander à l'employeur de lui fournir des explications ; Attendu qu'il est de principe que si, en application du texte susvisé, le comité d'entreprise ne peut se faire assister qu'une seule fois par un expert-comptable lorsqu'il exerce son droit d'alerte, ce comité conserve la faculté de préciser la mission de l'expert et de la compléter lorsque des faits en relation avec ceux ayant motivé l'exercice du droit d'alerte sont portés à sa connaissance pendant le cours de la mission ; Attendu qu'il est indéniable que la fusion SNECMA SAGEM est en relation directe avec les faits qui ont justifié la procédure d'alerte du comité central d'entreprise de SNECMA SERVICES, en ce qu'elle s'inscrit dans le cadre du processus de privatisation ayant suscité les inquiétudes des élus ; que c'est donc de manière fondée que le comité central d'entreprise a demandé au cabinet d'expertise-comptable SOFRAGECO dans le cadre du droit d'alerte de compléter sa mission au projet de fusion SNECMA SAGEM ; Attendu sur la demande de communication de documents, la société SNECMA SERVICES ne saurait légitimement s'opposer à remettre à l'expert désigné par le comité central d'entreprise pour établir le rapport d'alerte dans le cadre du complément de mission qui lui a été confié les documents qu'il sollicite, lesquels apparaissent nécessaires à l'exécution de sa mission :- brochure et comptes consolidés 2004 pour SNECMA et tableau de décomposition du bilan et du résultat consolidé par société intégrée du groupe SNECMA en 2004 ; balance consolidée et rapport des commissaires aux comptes ;- éléments de prévisions pour les exercices à venir en terme de résultats, de bilan, d'effectifs, et de synergies (au-delà de 2005 et pour 3 ans) relatifs au nouveau groupe SAFRAN ; rapports et procès-verbaux des assemblées générales de SNECMA et de SAGEM concernant la fusion des deux groupes ;- pactes d'actionnaires, rapport des commissaires aux comptes ;- étude du cabinet Roland Y... chargé d'évaluer les synergies des 2 groupes ;- note du 7 octobre 2004 intitulée " Evaluation des gains découlant des synergies entre SAGEM et SNECMA " ; Attendu en revanche que le tribunal ne saurait l'organisation d'une " rencontre entre le cabinet SOFRAGECO et les dirigeants de la société holding SAFRAN »

1 / ALORS QUE l'ouverture du capital d'une société constitue une opération juridique distincte d'une opération de fusion ; qu'en l'espèce, il résultait du procès-verbal du comité central d'entreprise du 27 avril 2004 expressément cité par la Cour d'appel que c'est « l'actionnariat salarié, suite au projet d'ouverture du capital SNECMA dans le cadre du processus de privatisation » qui avait déclenché la mise en oeuvre du droit d'alerte ; qu'en jugeant que la fusion de la société SNECMA avec la société SAGEM annoncée le 29 octobre 2004 était en relation directe avec les faits ayant justifié la procédure d'alerte du comité central d'entreprise de SNECMA SERVICES, en ce qu'elle s'inscrivait dans le cadre du processus de privatisation, lorsque c'est le projet d'actionnariat des salariés dans le cadre de l'ouverture du capital social de la société SNECMA qui avait justifié le droit d'alerte, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation des articles L 2323-78 à L 2323-82 du code du travail (L 432-5 ancien) ;
2 / ALORS EN OUTRE QU'à supposer même que la fusion avec la société SAGEM ait été en relation directe avec l'ouverture du capital de la société SNECMA, elle ne pouvait justifier l'extension de la mission de l'expert qu'à la condition d'être elle-même un fait de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise ; qu'en l'espèce, si les juges du fond ont estimé que l'opération d'ouverture du capital constituait un fait préoccupant ayant justifié la mise en oeuvre du droit d'alerte en 2004, ils se sont bornés pour justifier l'extension de la mission de l'expert à l'opération de fusion de la SCNEMA avec SAGEM, à constater l'existence d'un lien entre cette opération et l'ouverture du capital de SNECMA ; qu'en statuant ainsi, sans à aucun moment caractériser que l'opération de fusion constituait elle-même un fait préoccupant pour la situation économique de l'entreprise, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 2323-78 à L 2323-82 du code du travail (L 432-5 ancien) ;
3 / ALORS ENFIN QUE l'extension de la mission de l'expert à de nouveaux faits qui sont la suite nécessaire de ceux ayant justifié la mise en oeuvre du droit d'alerte ne peut avoir lieu qu'avant la clôture de celle-ci ; qu'en l'espèce, la société SNECMA faisait valoir que le rapport d'étape de l'expert qui lui avait été remis le 14 janvier 2005 avait mis fin à la mission initiale de ce dernier de sorte que le comité central d'entreprise ne pouvait l'avoir postérieurement étendue à de nouveaux faits (conclusions d'appel de la société SNECMA p 15 et 18) ; qu'en jugeant que la mission d'expertise du cabinet SOFRAGECO auquel le comité central d'entreprise avait fait appel le 27 avril 2004 en exerçant son droit d'alerte avait été valablement étendue le 19 janvier 2005 au projet de fusion des groupes SNECMA et SAGEM, sans rechercher comme elle y était invitée si la mission de l'expert n'avait pas été définitivement close par la remise de son rapport d'étape le 14 janvier 2005, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 2323-78 à L 2323-82 du code du travail (L 432 5 ancien).

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société SNECMA SERVICES à verser au Comité Central d'Entreprise la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Considérant qu'il n'est pas discuté que la loi de privatisation du 19 juillet 1993 a fait figurer la société SNECMA SA au nombre des 21 sociétés " privatisables " ; que le 24 février 2004, le Ministre de la Défense et celui de l'Economie et des Finances ont décidé de procéder à l'application des dispositions de cette loi concernant la société SNECMA SA ; que conformément aux prévisions de la loi du 6 août 1986, 10 % des actions de SNECMA SA mises sur le marché devaient être réservés aux salariés de cette société et de ses filiales : que le comité central d'entreprise de la société SNECMA SERVICES,- filiale à 100 % de la société SNECMA MOTEURS, elle-même détenue à 100 % par SNECMA SA. " holding " du groupe-, était ainsi convoqué en réunion extraordinaire le 7 avril 2004 afin de donner son avis sur ce projet d'actionnariat salarié ; que cette réunion ne pouvant se tenir, en raison de l'occupation des locaux par les salariés de l'entreprise, le comité se tint à nouveau les 20 et 27 avril suivants,- les élus décidant à l'issue de cette dernière réunion, d'exercer le droit d'alerte du comité et désignant en qualité d'expert, le cabinet SOFRAGECO pour l'assister dans le cadre de cette procédure d'alerte ; que par lettre du 11 mai 2004, le cabinet SOFRAGECO adressait vainement à la société SNECMA SERVICES une liste des documents à lui produire et réitérait vainement sa demande le 1er juin, lorsque par assignation en référé du 30 juin 2004. le président de la société SNECMA SERVICES introduisait une procédure, devant le président du tribunal de grande instance de VERSAILLES, à l'effet de voir annuler la résolution du comité central d'entreprise ayant déclenché l'exercice du droit d'alerte et désigné le cabinet SOFRAGECO au motif que le comité central d'entreprise ne justifiait pas que l'ouverture du capital de la société SNECMA SA pouvait affecter de manière préoccupante la situation économique de cette société : que le Juge des référés, par décision définitive du 3 août 2004.- après avoir rappelé, de manière encore aujourd'hui non contestée, qu'à la suite du premier ministre, le 7 mai 2004. la direction de SNECMA SA avait admis, le 25 juin suivant que l'ouverture de son capital était un pas essentiel vers sa privatisation et le désengagement de l'Etat à son égard-a débouté le demandeur de ses prétentions et lui a ordonné de répondre, en sa qualité de président du comité central d'entreprise, aux demandes de communication de pièces et d'informations du cabinet SOFRAGECO dans le cadre de la mission confiée à celui-ci en vertu de l'exercice par le comité de son droit d'alerte ; qu'après que la société SNECMA SERVICES eut envoyé à l'expert les éléments requis, sans toutefois les fournir tous, le cabinet SOFRAGECO qui avait déjà établi un « document du travail » en date du 7 octobre 2004 a remis au comité un « rapport d'étape » qui a été débattu par le comité dans sa réunion du 19 janvier 2005 ; que lors de cette réunion, le comité a décidé que la procédure d'alerte devait se poursuivre en raison du rapprochement entre le groupe SNECMA et le groupe SAGEM, annoncé publiquement par les deux ministres concernés dans un communiqué du 29 octobre 2004 ; que ce rapprochement s'est concrétisé, le 11 mai 2005, par la fusion effective des sociétés mères de chacun des groupes, à la suite de la cession par l'Etat à la société SAGEM, d'une partie de ses actions au sein de la société SNECMA SA qui faisait perdre à l'Etat son caractère d'actionnaire majoritaire ; que le cabinet SOFRAGECO rencontrait à nouveau des difficultés pour obtenir, de la société SNECMA SERVICES, la remise de divers documents qu'il lui réclamait dans le cadre de la poursuite de sa mission ; que le comité, lors de ses réunions du 25 avril, puis 18 août 2005, dénonçait l'entrave ainsi commise par la direction de la société et devant la persistance du refus de la société de fournir certaines pièces, le comité central d'entreprise, réuni les 27 et 30 septembre suivants, décidait de saisir, avec le cabinet SOFRAGECO, le juge des référés du tribunal de grande instance de PARIS, puis,- après que celui-ci eut estimé qu'il n'y avait pas lieu à référé-, le tribunal, statuant au fond. afin, de voir juger, notamment, que la procédure d'alerte engagée en avril 2004 s'étendait valablement au projet de fusion des groupes SNECMA et SAGEM et que la société SNECMA SERVICES devait en conséquence remettre au cabinet SOFRAGECO les documents qu'elle se refusait à lui communiquer »
ET QUE « Considérant qu'au demeurant, la Cour observe, avec les intimés, que la société SNECMA SERVICES, si déterminée à contester judiciairement l'exercice, à l'origine, de son droit d'alerte par le comité central d'entreprise, n'explique nullement qu'elle n'ait à aucun moment réitéré sa démarche, alors que le dépassement de sa mission par l'expert, était, selon elle, patent, ni qu'elle ait, sans contestation, accepté de régler la totalité des honoraires du cabinet SOFRAGECO ; Considérant que si la résistance manifestée par la société SNECMA SERVICES à participer initialement à la procédure d'alerte n'apparaît pas critiquable, compte tenu du fait que la société a elle-même, saisi, sans retard, le juge des référés du tribunal de grande instance de PARIS de sa contestation, le comportement de l'appelante, postérieur à l'ordonnance de ce magistrat rendue le 3 août 2004 traduit, en revanche, une volonté manifeste de la société SNECMA SERVICES de faire obstacle à l'exercice, par le comité central d'entreprise, de son droit d'alerte pourtant consacré par cette décision ; Considérant qu'en effet, postérieurement à l'ordonnance de référé, la société, à plusieurs reprises, entre le dernier trimestre 2004 et le mois d'août 2005, a refusé de remettre diverses pièces au cabinet SOFRAGECO en faisant valoir d'abord que les pièces réclamées ne la concernaient pas, puis, qu'elle avait demandé les pièces litigieuses auprès des sociétés du groupe intéressées lesquelles se refusaient à les communiquer ; que ces divers arguments sont dépourvus de pertinence puisque aussi bien, l'expert comptable commis dans le cadre d'une procédure d'alerte dispose des mêmes pouvoirs que ceux du commissaire aux comptes et que le cabinet SOFRAGECO pouvait donc régulièrement se faire communiquer des documents visant d'autres sociétés que la société SNECMA SERVICES, appartenant, comme celle ci, au nouveau groupe SAFRAN, issu de la fusion des groupes SNECMA SA et SAGEM ; qu'en sa qualité d'interlocuteur de l'expert comptable dans le cadre de la procédure d'alerte et de l'expertise corrélative la société SNECMA SERVICES se doit de répondre de l'inexécution de l'obligation qui lui incombait, de fournir les éléments et informations requis par l'expert, finalement fournis sur la seule injonction du tribunal de grande instance de Paris dans son jugement du 24 novembre 2006 ; que cette volonté de la société SNECMA SERVICES de porter atteinte aux prérogatives du comité central d'entreprise, est d'autant plus patente que, tout en s'abstenant-pendant de nombreux mois, au total-de satisfaire à son obligation, l'appelante, postérieurement à l'ordonnance du 3 août 2004, n'a à aucun moment exprimé le désir de saisir le juge de la contestation larvée qu'elle manifestait par ses retards, ses réticences, et ses carences, opposés aux demandes du cabinet SOFRAGECO ; Considérant que se trouve dès lors justifiée la demande de dommages et intérêts, formée par le comité central d'entreprise au titre de l'entrave qu'il a ainsi subie dans l'exercice de ses prérogatives qu'au regard des énonciations qui précèdent, la Cour dispose des éléments pour allouer, de ce chef, au comité central d'entreprise une indemnité de 10. 000 »
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Attendu cela étant exposé, que selon les dispositions de l'article L. 432-5-1 du code du travail, lorsque le comité d'entreprise a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise, il peut demander à l'employeur de lui fournir des explications ; Attendu qu'il est de principe que si, en application du texte susvisé, le comité d'entreprise ne peut se faire assister qu'une seule fois par un expert-comptable lorsqu'il exerce son droit d'alerte, ce comité conserve la faculté de préciser la mission de l'expert et de la compléter lorsque des faits en relation avec ceux ayant motivé l'exercice du droit d'alerte sont portés à sa connaissance pendant le cours de la mission ; Attendu qu'il est indéniable que la fusion SNECMA SAGEM est en relation directe avec les faits qui ont justifié la procédure d'alerte du comité central d'entreprise de SNECMA SERVICES, en ce qu'elle s'inscrit dans le cadre du processus de privatisation ayant suscité les inquiétudes des élus ; que c'est donc de manière fondée que le comité central d'entreprise a demandé au cabinet d'expertise-comptable SOFRAGECO dans le cadre du droit d'alerte de compléter sa mission au projet de fusion SNECMA SAGEM ; Attendu sur la demande de communication de documents, la société SNECMA SERVICES ne saurait légitimement s'opposer à remettre à l'expert désigné par le comité central d'entreprise pour établir le rapport d'alerte dans le cadre du complément de mission qui lui a été confié les documents qu'il sollicite, lesquels apparaissent nécessaires à l'exécution de sa mission :- brochure et comptes consolidés 2004 pour SNECMA et tableau de décomposition du bilan et du résultat consolidé par société intégrée du groupe SNECMA en 2004 ; balance consolidée et rapport des commissaires aux comptes ;- éléments de prévisions pour les exercices à venir en terme de résultats, de bilan, d'effectifs, et de synergies (au-delà de 2005 et pour 3 ans) relatifs au nouveau groupe SAFRAN ;- rapports et procès-verbaux des assemblées générales de SNECMA et de SAGEM concernant la fusion des deux groupes ;- pactes d'actionnaires, rapport des commissaires aux comptes ;- étude du cabinet Roland Y... chargé d'évaluer les synergies des 2 groupes ;- note du 7 octobre 2004 intitulée " Evaluation des gains découlant des synergies entre SAGEM et SNECMA " ; Attendu en revanche que le tribunal ne saurait l'organisation d'une " rencontre entre le cabinet SOFRAGECO et les dirigeants de la société holding SAFRAN »

1 / ALORS QU'il était constant en l'espèce que par ordonnance rendue le 3 août 2004, le juge des référés du tribunal de grande instance de Versailles avait ordonné au président du comité central d'entreprise de la société SNECMA services de répondre aux demandes de communication de pièces et d'informations du cabinet SOFRAGECO dans le cadre de l'exercice par le comité central d'entreprise de la société SNECMA de son droit d'alerte mis en oeuvre le 27 avril 2004 relativement à l'ouverture du capital de la société SNECMA ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que ce n'est qu'après l'extension par le comité central d'entreprise de la mission du cabinet SOFRAGECO à la fusion SNECMA-SAGEM, que la société SNECMA s'était opposée à des demandes d'informations et de communication de pièces concernant cette fusion, et que le comité central d'entreprise, après que le juge des référés avait dénié sa compétence par ordonnance du 7 mars 2006 en estimant que le projet de fusion n'apparaissait pas avec évidence comme une suite nécessaire de l'ouverture du capital litigieuse, avait saisi au fond le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir juger que la procédure d'alerte avait été valablement étendue au projet de fusion SNECMA-SAGEM et, partant, de voir ordonner à la société SNECMA de communiquer diverses pièces relatives à ce projet de fusion ; qu'en jugeant que le refus de la société SNECMA de communiquer ces pièces traduisait une volonté manifeste de la société SNECMA SERVICES de faire obstacle à l'exercice, par le comité central d'entreprise, de son droit d'alerte consacré par la décision du juge des référés en date du 3 août 2004, pour en déduire que la société SNECMA avait fait preuve d'une résistance abusive, lorsque sa résistance était relative, non pas à l'exercice du droit d'alerte concernant l'ouverture de son capital sur lequel s'était prononcé le juge des référés en 2004, mais à l'extension de ce droit à la fusion SNECMA-SAGEM, point non encore tranché définitivement par aucune juridiction du fond et sur lequel le juge des référés avait retenu en 2006 l'absence de trouble manifestement illicite, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article 1382 du code civil ;
2 / ALORS QUE le seul fait pour une partie de ne pas prendre l'initiative de saisir le juge de la contestation qui justifie son opposition à déférer à la demande de la partie adverse ne caractérise pas une résistance abusive ; qu'en reprochant à la société SNECMA de n'avoir pas saisi le juge de sa contestation de l'extension du droit d'alerte du comité central d'entreprise, initialement cantonné à l'ouverture du capital de la SNECMA, à la fusion SNECMA-SAGEM, justifiant son refus de lui transmettre des informations relatives à cette fusion, pour en déduire que sa résistance était abusive, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-15035
Date de la décision : 29/09/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

REPRESENTATION DES SALARIES - Comité d'entreprise - Comité central - Attributions - Attributions économiques - Droit d'alerte économique - Assistance d'un expert-comptable - Mission - Etendue

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (prévention et règlement amiable) - Prévention - Procédures d'alerte - Droit d'alerte du comité d'entreprise - Assistance d'un expert-comptable - Mission - Etendue

La mission de l'expert-comptable s'étend aux faits de nature à confirmer la situation économique préoccupante de l'entreprise qui sont la suite nécessaire de ceux qui ont motivé l'exercice du droit d'alerte. Tel est le cas du projet de fusion entre le groupe SNECMA et le groupe SAGEM, annoncé alors que l'expert désigné par le comité central d'entreprise était en cours d'exécution de sa mission, dès lors que la cour d'appel a constaté que ce projet était la suite directe de l'ouverture de capital décidée dans le cadre de la privatisation du groupe SNECMA qui avait justifié l'exercice par le comité central d'entreprise de son droit d'alerte


Références :

ARRET du 28 février 2008, Cour d'appel de Paris, 28 février 2008, 06/22696
articles L. 2323-78 et L.2323-79 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 février 2008

Sur l'étendue de la mission de l'expert-comptable désigné dans le cadre de la procédure d'alerte exercée par la comité central d'entreprise, dans le même sens que : Soc., 11 mars 2003, pourvoi n° 01-13434, Bull. 2003, V, n° 92 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 sep. 2009, pourvoi n°08-15035, Bull. civ. 2009, V, n° 209
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 209

Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat général : M. Allix
Rapporteur ?: Mme Pécaut-Rivolier
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.15035
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