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12/11/2015 | FRANCE | N°15-83714

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 novembre 2015, 15-83714


Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Abdelhamid X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 7 mai 2015, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs, et contrebande de marchandises prohibées, en récidive, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 28 octobre 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procÃ

©dure pénale : M. Guérin, président, M. Sadot, conseiller rapporteur, M. Soulard, ...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Abdelhamid X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 7 mai 2015, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs, et contrebande de marchandises prohibées, en récidive, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 28 octobre 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Sadot, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller SADOT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BONNET ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 27 juillet 2015, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, 323-6 du code des douanes, 171, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation du placement en retenue douanière de M. X... et de tous actes en découlant ;
" aux motifs que le véhicule Audi A4 de M. X... a été fouillé de 3 heures 45 à 3 heures 50 révélant la présence de cinq téléphones portables les messages et appels laissés à intervalles réguliers laissant penser qu'il s'agissait d'un véhicule ouvreur ; que de 3 heures 50 à 4 heures M. X... a été soumis à une fouille qui a amené la découverte d'un morceau de papier comportant un numéro de téléphone portable dans la poche de son jean et une somme de 650 euros en numéraire dans une autre ; qu'à 4 heures les douaniers étaient avisés par la police qu'un véhicule Audi noir avait été vu entrer et circuler dans l'enceinte de la sucrerie d'Escaudoeuvres et s'était arrêté à proximité immédiate d'une poubelle où ont été découverts des produits suspects ; qu'étaient ainsi découverts à 4 heures 15 neuf paquets ressemblant à des paquets de stupéfiants emballés, ramenés à 4 heures 30 à la brigade de Cambrai et représentant un poids total de 247 kg ; que M. X... a ainsi été placé en retenue douanière à 4 heures pour complicité du délit d'opposition à fonctions et pour le délit de circulation irrégulière de marchandises soumises à justificatif réputées avoir été importées en contrebande ; que, pour autant, la retenue douanière ne pouvait lui être notifiée avant que ne soit recueillis les indices de sa participation à une infraction, lesquels en l'espèce ne sont apparus qu'après la découverte de produits stupéfiants abandonnés sur la commune où s'est déroulé le contrôle et après la mise en cause du véhicule Audi S3 qui avait pris la fuite ; que le mis en examen n'est pas fondé à prétendre qu'il aurait dû être placé en retenue douanière dès 0 heures 15, ni présenté à un magistrat le 17 décembre à 20 heures 15 au plus tard, les articles 803-2 et 803-3 du code de procédure pénale étant sans application en l'espèce comme ne concernant que le délai de comparution à l'issue de la garde à vue ; qu'il n'y a pas lieu d'annuler la retenue douanière comme tardive ; qu'au surplus M. X... a reçu notification de ses droits et a pu les exercer dès qu'il en a eu connaissance, sollicitant notamment le droit d'être assisté d'un avocat commis d'office et de faire prévenir sa soeur de la mesure ce à quoi il a été sursis après avis du procureur de la République de Cambrai ; que de la même façon il n'a été entendu qu'à l'expiration du délai de deux heures sans manifestation de l'avocat requis ;
" 1°) alors que la personne qui est, sous la contrainte, mise à la disposition de l'agent des douanes, doit immédiatement être placée en retenue douanière et recevoir notification des droits attachés à cette mesure ; qu'en effet, en l'absence de tout autre cadre légal applicable en cas de privation de liberté mise en oeuvre par les agents des douanes, seul le régime de la retenue douanière permet de maintenir légalement une personne sous contrainte ; que la chambre de l'instruction constate que M. X... a été menotté à 0 heure 15 puis amené à la brigade de Cambrai ; qu'en affirmant que le mis en examen n'était pas fondé à prétendre qu'il aurait dû être placé en retenu douanière à compter de 0 heure 15, moment à partir duquel il a été sous contrainte, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a méconnu l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" 2°) alors que tout retard dans la mise en oeuvre de la notification des droits attachés au placement en retenue douanière, non justifié par des circonstances insurmontables, porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée ; que le mis en examen a été placé sous contrainte à 0 heure 15 et ne s'est vu notifier ses droits qu'à 4 heures ; qu'en considérant que la notification de ses droits n'était pas tardive sans caractériser de circonstance insurmontable justifiant l'écoulement d'un délai de 3 heures 45 entre l'interpellation du mis en examen et la notification de ses droits, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision " ;
Vu l'article 323-1 du code des douanes ;
Attendu qu'il résulte de ce texte qu'une mesure de contrainte physique, d'une durée excédant le temps nécessaire à l'exercice du droit de contrôle prévu par l'article 60 du même code, ne peut être exercée que dans le cadre d'une mesure de retenue douanière ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le 17 décembre 2014, vers 0 heure 15, M. X..., qui faisait l'objet d'un contrôle du service des douanes alors qu'il circulait seul à bord de son véhicule, a été menotté, puis conduit au siège du service, après la survenance d'un incident grave impliquant un autre automobiliste, qui s'était violemment soustrait au contrôle ; qu'à 4 heures, une mesure de retenue douanière lui a été notifiée ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation des procès-verbaux relatifs à la retenue douanière et à la garde à vue subséquente, ainsi que de l'ensemble des actes accomplis ensuite, présentée par M. X..., l'arrêt retient que la retenue douanière ne pouvait lui être notifiée avant que ne soient recueillis les indices de sa participation à une infraction, lesquels en l'espèce ne sont apparus qu'après la découverte de produits stupéfiants abandonnés sur la commune où s'est déroulé le contrôle et après la mise en cause du véhicule Audi S3 dont le conducteur avait pris la fuite ; que les juges ajoutent que l'intéressé ne saurait se plaindre d'avoir été menotté dans les circonstances exceptionnelles susvisées, compte tenu de la nécessité de s'assurer de sa personne, durant le temps nécessaire aux investigations en cours à la suite du délit flagrant commis par un autre individu avec lequel il était suspecté d'être en lien, et durant le temps de trajet pour le ramener à la brigade éloignée du point de contrôle ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle avait constaté que M. X... avait été retenu à la disposition des agents des douanes au-delà du temps nécessaire au contrôle de son véhicule et de sa personne avant d'être placé en situation de retenue douanière, la chambre de l'instruction a méconnu le texte et le principe susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de cassation proposés :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 7 mai 2015, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Grenoble, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze novembre deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 15-83714
Date de la décision : 12/11/2015
Sens de l'arrêt : Cassation et désignation de juridiction
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

DOUANES - Agent des douanes - Pouvoirs - Droit de visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes - Article 60 du code des douanes - Mesures autorisées - Rétention des personnes - Limites - Détermination - Portée

Il résulte de l'article 323-1 du code des douanes qu'une mesure de contrainte physique, d'une durée excédant le temps nécessaire à l'exercice du droit de contrôle prévu par l'article 60 du même code, ne peut être exercée que dans le cadre d'une mesure de retenue douanière. Viole ce texte la chambre de l'instruction qui, pour rejeter une demande d'annulation des procès-verbaux relatifs à la retenue douanière et à la garde à vue subséquente, constate que l'intéressé a été retenu à la disposition des agents des douanes durant le temps nécessaire aux investigations en cours à la suite du délit flagrant commis par un autre individu avec lequel il était suspecté d'être en lien, avant d'être placé en retenue douanière


Références :

articles 60 et 323-1 du code des douanes

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, 07 mai 2015

Sur l'étendue des pouvoirs des agents des douanes, à rapprocher : Crim., 13 juin 1996, pourvoi n° 96-80189, Bull. crim. 1996, n° 252 (cassation partielle) ;Crim., 4 décembre 1997, pourvoi n° 96-83547, Bull crim. 1997, n° 416 (cassation) ;Crim., 10 avril 2013, pourvoi n° 11-88589, Bull. crim. 2013, n° 84 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 nov. 2015, pourvoi n°15-83714, Bull. crim. 2016, n° 839, Crim., n° 438
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle 2016, n° 839, Crim., n° 438

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Bonnet
Rapporteur ?: M. Sadot
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:15.83714
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