LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 18 décembre 2012), qu'Yvonne X... est décédée le 9 janvier 2008, en laissant pour lui succéder son fils, ainsi que Mme Y..., désignée légataire par un testament olographe du 22 avril 1985 ; que Mme Z..., aide ménagère d'Yvonne X..., s'est prévalu d'un testament olographe rédigé et signé par la défunte, mais non daté ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de déclarer valable ce testament et de dire qu'il a révoqué toutes les dispositions antérieures ;
Attendu que, se fondant sur la désignation de Mme Z... en qualité de légataire dans le testament sans date et par là-même sur un élément intrinsèque au testament, la cour d'appel a souverainement estimé, d'une part, que les pièces produites démontraient qu'il n'avait pu être rédigé qu'entre le mois de juin 2001, époque à laquelle la testatrice avait connu et embauché Mme Z..., et le 9 janvier 2008, date de son décès et, d'autre part, qu'aucun élément n'établissait l'insanité d'esprit ou une perte de discernement d'Yvonne X... durant l'intégralité de la période au cours de laquelle le testament avait été nécessairement écrit, l'écriture de ce manuscrit, qui n'était pas altérée, étant semblable à celle des testaments antérieurs, les indications données et les termes choisis révélant la parfaite lucidité d'esprit de son auteur ; qu'ayant constaté qu'aucune révocation de ces dispositions n'était intervenue et sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, elle en a justement déduit qu'il n'y avait pas lieu de prononcer la nullité du testament en raison de son absence de date ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme A... et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme Z... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour Mme A...
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré valable le testament olographe non daté établi par Mme X... au profit de Mme Z... et d'avoir dit que ce testament a révoqué toutes les dispositions antérieures,
AUX MOTIFS QUE «Aux termes de l'article 970 du code civil « le testament olographe ne sera point valable s'il n'est écrit en entier, daté, signé de la main du testateur ».
En l'espèce il est constant que le testament présenté au notaire par Madame Z... n'est pas daté.
Il est cependant admis qu'en dépit de son absence de date un testament olographe n'encourt pas la nullité lorsque des éléments intrinsèques à l'acte, corroborés par des éléments extrinsèques établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible.
La date du testament est un élément essentiel de la validité du testament olographe afin de vérifier la capacité du testateur au jour du testament et de vérifier ainsi qu'il n'y a pas eu fraude.
En l'espèce, ce testament n'a pu être rédigé qu'entre le mois de juin 2001, date de l'embauche de Madame Z..., et le 9 janvier 2008, date du décès de Madame X.... En effet, Madame X... ne la connaissait pas préalablement ainsi qu'il résulte des attestations versées au dossier de Madame Z....
La charge de la preuve de la vulnérabilité d'esprit du testateur repose sur Madame A... qui l'invoque.
Or, force est de constater qu'il n'est pas rapporté la preuve de l'insanité d'esprit de Madame X... pendant cette période. Elle a vécu seule chez elle jusqu'à ces derniers jours, elle n'était atteinte d'aucune maladie atteignant ses facultés intellectuelles, le juge des tutelles n'a jamais été saisi par ses parentes d'une demande de mise sous protection.
Madame A... ne prouve pas davantage que les hospitalisations dont elle fait état soient consécutives à des problèmes psychiques.
Madame X... avait donc toute sa lucidité lorsqu'à une période postérieure aux trois testaments qu'elle a remis à Maître Guérin elle a décidé de gratifier Mme Z..., étant rappelé qu'il n'est pas contesté que ce dernier testament est bien rédigé de sa main.
La cour constate que son écriture est semblable à celle qu'elle avait lors de la rédaction des trois précédents testaments, elle n'est nullement altérée. Par ailleurs, les indications qu'elle donne, les termes choisis révèlent sa parfaite lucidité d'esprit puisqu'elle prévoit même, pour éviter que sa propriété ne se dégrade de donner « l'usufruit » à Madame Z... en attendant le règlement de la succession.
Ainsi ce dernier testament écrit de la main de Madame X..., à une date déterminable (juin 2001 au 9 janvier 2008), à savoir postérieurement aux trois précédents, période pendant laquelle elle a conservé toute sa lucidité d'esprit et période pendant laquelle aucun autre testament n'a été rédigé, doit être déclaré valable au regard de l'article 970 du code civil et a par conséquent révoqué toutes dispositions antérieures.
La première décision sera infirmée.»,
ALORS PREMIEREMENT QU' un testament olographe non daté de la main du testateur comme l'exige l'article 970 du code civil n'encourt pas la nullité à condition que des éléments intrinsèques à l'acte, corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée ; qu'en se contentant, pour retenir que le testament olographe avait été rédigé entre le mois de juin 2001 et le 9 janvier 2008, de se fonder exclusivement sur des éléments extrinsèques à l'acte, tels que la date de l'embauche de Mme Z... et les attestations versées par cette dernière aux débats, sans relever qu'ils étaient corroborés par des éléments intrinsèques à l'acte, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 970 du code civil.
ALORS DEUXIEMEMENT QU' en tout état de cause, en retenant que l'exigence légale de la date de la main du testateur à laquelle est subordonnée la validité du testament olographe était remplie en retenant une période de rédaction déterminée entre le mois de juin 2001 et le 9 janvier 2008 qui s'étend sur presque sept années quand la validité du testament non daté reste l'exception dérogeant au principe, la cour a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 970 du code civil.
ALORS TROISIEMEMENT QU' un testament olographe non daté de la main du testateur est valable s'il est démontré qu'au cours de la période pendant lequel il a été rédigé, il n'est pas démontré que le testateur a été frappé d'une incapacité de tester ou d'une perte de discernement ; qu'en relevant, pour exclure toute incapacité de tester de Mme X..., que celle-ci n'était atteinte d'aucune maladie atteignant ses facultés intellectuelles puisque le juge des tutelles n'a jamais été saisi par ses parentes d'une demande mise sous protection, que ses hospitalisations n'étaient pas consécutives à des problèmes psychiques et enfin que son écriture sur le testament n'est pas altérée et que les termes choisis induisent sa parfaite lucidité d'esprit, motifs qui se rapportent exclusivement à son éventuelle insanité d'esprit et sont impropres à écarter toute vulnérabilité d'esprit chez une femme âgée de 85 ans au moment de sa mort et hospitalisée à plusieurs reprises, la cour a à nouveau privé sa décision de base légale au regard de l'article 970 du code civil.
ALORS QUATRIEMEMENT QU' en omettant totalement de répondre au chef des conclusions de Mme A... faisant valoir que les conditions de la découverte du testament litigieux demeuraient inconnues puisque Mme Z... prétendait que Madame X... lui aurait demandé lors de son départ pour sa dernière hospitalisation de remettre au notaire une enveloppe déposée dans un buffet et que cette remise est survenue tardivement, trois mois après le décès de Mme X..., la cour a violé l'article 455 du code de procédure civile.