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10/05/2012 | FRANCE | N°11-87328

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 mai 2012, 11-87328


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Kiril X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 6 septembre 2011, qui, dans l'information suivie contre lui pour proxénétisme aggravé en bande organisée, traite d'êtres humains aggravée en bande organisée, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 4 novembre 2011, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;

Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Kiril X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 6 septembre 2011, qui, dans l'information suivie contre lui pour proxénétisme aggravé en bande organisée, traite d'êtres humains aggravée en bande organisée, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 4 novembre 2011, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 6 § 1, 5 § 1 c), § 3 et § 4 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit que l'arrestation de M. X... n'est entachée d'aucune nullité affectant la validité de son placement en détention et qu'il n'a pas été porté atteinte aux dispositions de l'article 5 § 1 c) et 5 § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
" aux motifs qu'en l'espèce, si la comparution devant le procureur de la République ne peut être regardée comme la présentation à une autorité judiciaire au sens des articles 5 § 1 c) et 5 § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, force est de constater que la présentation au juge d'instruction remplit les conditions exigées en ce qu'il s'agit d'une autorité indépendante du pouvoir exécutif et des parties, que dès lors qu'il constate que le délai fixé pour la comparution de l'intéressé devant lui n'a pas été respecté, il doit en vertu de l'article 130-1 du code de procédure pénale ordonner sa mise en liberté immédiate et qui, au-delà de ces conditions de forme, procéder à l'audition du mis en examen qui, dès lors, peut faire valoir ses explications sur le fond du dossier ; qu'au terme de celles-ci, le magistrat instructeur peut toujours, nonobstant son appréciation initiale des faits qui a pu se trouver modifiée par les développements de la procédure postérieurs à la délivrance du mandat et en dépit des réquisitions du parquet, décider de conférer à l'intéressé, le statut de témoin assisté ; que, dès lors, M. X..., qui a été remis aux autorités françaises le 16 décembre 2010 à 11 h 45 en vertu du mandat d'arrêt européen, après avoir été en mesure de faire valoir devant les autorités judiciaires allemandes, les arguments recevables selon le droit allemand, a été présenté à l'autorité judiciaire française représentée par le juge d'instruction mandant le 20 décembre 2010 à 10 h 56, soit dans le délai de quatre jours moins quarante-neuf minutes, conforme aux dispositions du code de procédure pénale, que ce délai ne peut être considéré comme excessif au regard de l'article 5 § 3 de la Convention européenne et de l'article 9 du Pacte au regard du délai nécessaire pour s'assurer de la complète information du juge mandant par le procureur de la République de Strasbourg, procéder à la levée de l'écrou de l'intéressé, organiser matériellement un transfert entre deux villes distantes de près de 500 km, impliquant la mise à disposition d'un véhicule administratif, d'une escorte policière et ce, en pleine période hivernale ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de considérer que la détention de M. X... est intervenue sur le fondement d'une arrestation entachée d'irrégularité ; que le conseil de M. X... fait valoir que la comparution devant le magistrat instructeur, ayant décerné le mandat d'arrêt, ne constitue pas le contrôle exigé par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés et le pacte international relatif aux droits civils et politiques ; mais que ce magistrat a compétence, au cas où il estimerait que le mandat d'arrêt n'est pas fondé ou est irrégulier dans son exécution, de le lever à tout moment de la procédure, qu'il dispose bien du pouvoir exigé par la loi de contrôler la légalité de la privation de liberté, son bien-fondé, en ordonnant son élargissement, soit en ne mettant pas en examen la personne qui lui est présentée, après avoir constaté que les indices graves ou concordants n'étaient pas suffisants pour justifier cette décision, soit en levant le mandat d'arrêt ; que, par ailleurs, ce magistrat du siège indépendant ne saurait être considéré comme le soutient le conseil de M. X... comme manquant d'impartialité, au motif qu'il est à l'origine de la délivrance du mandat d'arrêt, son rôle étant précisément d'instruire à charge et à décharge, suite à la présentation de la personne arrêtée et de s'assurer du bien-fondé de sa décision, avant éventuellement de saisir le juge des libertés et de la détention qui, en définitive, prendra la décision d'incarcérer ou non la personne intéressée, en relevant tout motif au soutien de sa décision rejetant la demande de placement en détention provisoire, sa décision en tout état de cause mettant fin à l'exécution du mandat d'arrêt, s'il l'estime non justifié ou irrégulier ; que, dès lors, et sans qu'il n'y ait lieu de saisir d'une question préjudicielle la Cour de justice européenne, il convient de rejeter le grief de nullité présenté par M. X... tiré de l'irrégularité de l'exécution du mandat d'arrêt ;
" 1) alors que toute personne arrêtée ou détenue doit être aussitôt traduite devant un juge ; qu'en l'espèce, il ressort du dossier de la procédure et des énonciations de l'arrêt attaqué que M. X..., interpellé par les autorités françaises le 16 décembre 2010 à 11 h 45, n'a été présenté à un magistrat du siège que le 20 décembre 2010 à 10 h 56, soit près de quatre jours plus tard ; qu'un tel délai, de quatre jours moins 49 minutes, est prima facie incompatible avec cette exigence ; qu'en l'absence de circonstances, tout à fait exceptionnelles, caractérisées par l'arrêt pour justifier un tel délai, la chambre de l'instruction a violé les articles 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme et 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
" 2) alors en toute hypothèse, qu'en refusant de considérer ce délai comme excessif compte tenu du délai nécessaire pour s'assurer de la complète information du juge mandant par le procureur de la république de Strasbourg, procéder à la levée de l'écrou de l'intéressé, organiser matériellement un transfert entre deux villes distantes de près de 500 km, impliquant la mise à disposition d'un véhicule administratif, d'une escorte policière et ce, en pleine période hivernale, c'est-à-dire par des motifs impropres à justifier un délai de quatre jours moins 49 minutes, la chambre de l'instruction a, derechef, violé les articles 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme et 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
" 3) alors que toute personne arrêtée ou détenue doit être aussitôt traduite devant un juge, lequel doit avoir le pouvoir d'ordonner l'élargissement, après avoir entendu la personne et contrôlé tant la légalité que la justification de l'arrestation et de la détention ; qu'elle a également le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale ; que le juge d'instruction qui a délivré le mandat d'arrêt n'est pas compétent pour en contrôler la régularité, ce contrôle étant dévolu à la chambre de l'instruction, qui ne statue pas à bref délai ; qu'en estimant néanmoins que la comparution devant le magistrat instructeur, ayant décerné le mandat d'arrêt, constituait le contrôle exigé par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés et le pacte international relatif aux droits civils et politiques, la chambre de l'instruction a derechef violé les dispositions conventionnelles susvisées ;
" 4) alors que le juge d'instruction qui a délivré le mandat d'arrêt ne peut, sans méconnaître le principe d'impartialité objective, se prononcer sur sa régularité et son bien-fondé ; que la chambre de l'instruction a violé les articles préliminaires du code de procédure pénale, 6 § 1 et 5 § 1 c) et § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., qui avait fait l'objet d'un mandat d'arrêt européen délivré par le juge d'instruction de Lyon, dans le cadre d'une information pour proxénétisme aggravé en bande organisée, traite d'êtres humains aggravée en bande organisée, a été remis le 16 décembre 2010 à 11 h 45 par les autorités judiciaires allemandes aux autorités françaises en la personne du procureur de la République de Strasbourg, lequel, après avoir rendu compte au juge d'instruction de Lyon, a organisé le transfèrement de l'intéressé ; que M. X... a été présenté le 20 décembre 2010 à 10 h 56 au magistrat mandant qui l'a mis en examen des chefs précités ; que le même jour, il a été placé sous mandat de dépôt criminel par le juge des libertés et de la détention ;
Attendu que, pour déclarer compatible avec l'exigence de promptitude prévue par l'article 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme le délai au terme duquel M. X... a été présenté au juge d'instruction, l'arrêt attaqué relève que ce délai a été justifié par la nécessité pour le procureur de la République de Strasbourg d'informer complètement le magistrat mandant, de procéder à la levée d'écrou et d'organiser matériellement un transfert entre deux villes distantes de près de 500 kilomètres, impliquant la mise à disposition d'un véhicule administratif et d'une escorte policière et ce, en pleine période hivernale ;
Attendu qu'en prononçant par ces motifs qui établissent que la durée de la privation de liberté subie par M. X..., avant qu'il soit traduit devant le juge d'instruction mandant, magistrat habilité à statuer en toute impartialité sur la légalité et le bien-fondé de celle-ci, a été compatible avec l'exigence de brièveté résultant des textes conventionnels invoqués, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 20, 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 6 du Traité sur l'Union européenne, 6 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1 de son Protocole n° 12, 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, préliminaire, 171, 593 et 802 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de nullité des interrogatoires et confrontations de M. X... ;
" aux motifs que le conseil de M. X... soutient que sont nuls les interrogatoires et confrontations de M. X... aux motifs qu'ils n'ont pas fait l'objet d'un enregistrement audiovisuel en dépit de la qualification criminelle donnée aux faits qui lui sont reprochés ; que l'article 116-1 du code de procédure pénale dispose que les interrogatoires des personnes mises en examen en matière criminelle, réalisés dans le cabinet du magistrat instructeur font l'objet d'un enregistrement audiovisuel ; que, toutefois, l'alinéa 7 de cet même article précise que cette disposition n'est pas applicable lorsque l'information concerne un crime, mentionné à l'article 706-73 du code de procédure pénale comme en l'espèce ; que le conseil de M. X... soutient que cet alinéa est non conventionnel et contraire au droit communautaire en ce qu'il constitue la violation de l'interdiction de la discrimination et de l'égalité juridique ; que la chambre de l'instruction relève que l'obligation de procéder à des enregistrements audiovisuels, qui ne découle ni d'une règle ni d'un principe européen, a été établie par le législateur français pour répondre à des objectifs particuliers de protection des mineurs, d'une part, et d'autre part, de personnes susceptibles de se trouver en garde à vue, puis dans le bureau du juge d'instruction suite à l'affaire dite d'Outreau pour certains crimes, en dehors de ceux relevant de la criminalité organisée ou le terrorisme ; que le législateur a légitimement pu prévoir l'exclusion des enregistrements pour des faits relevant de la criminalité organisée ; que les peines, légalement encourues par ces derniers, ne sont pas nécessairement supérieures à celles encourues par d'autres personnes suspectées de crimes imposant lors de la procédure d'enquête ou d'information l'enregistrement audiovisuel ; que, par ailleurs, ces dispositions s'appliquent à toutes les personnes impliquées dans des affaires de criminalité organisée sans rompre aucun principe conventionnel d'égalité ; que le principe d'égalité des citoyens devant la loi est respecté, dans la mesure où toutes les personnes impliquées dans les mêmes modes d'action criminelle, en bande organisée, tous sont soumis strictement aux mêmes règles, au regard de l'absence d'enregistrements audiovisuels de leurs interrogatoires devant le juge d'instruction ; que, dès lors, les dispositions de l'article 706-73 du code de procédure pénale ne constituent nullement une discrimination, celle-ci n'étant pas fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue la religion, les opinions politiques ou toute autre opinion, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation, ce terme n'englobant pas le choix des modes d'action criminels mis en oeuvre par les malfaiteurs ; que l'absence d'enregistrement ne contrevient nullement à un procès équitable, d'autant que les conseils des personnes poursuivies pour crimes sont présents dans le bureau du magistrat instructeur pour veiller à la retranscription conforme des propos tenus par leurs clients, formuler toute observation et faire noter toute difficulté à l'issue de chaque interrogatoire ; qu'il n'en résulte aucune violation du principe de la sécurité juridique des procédures, ni privation des parties d'un procès équitable ; qu'aucune violation des engagements internationaux et européens de la France ne résulte de cette dérogation légitime ;
" 1) alors que la Cour de cassation a été saisie, par écrit distinct et motivé, d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à la Constitution de l'article 116-1, alinéa 7, du code de procédure pénale, en ce qu'il écarte l'enregistrement audiovisuel lorsque la personne mise en cause pour un crime, l'est, comme en l'espèce, pour l'un de ceux prévus à l'article 706-73 ; que la déclaration d'inconstitutionnalité à venir privera de fondement juridique la décision de la chambre de l'instruction en ce qu'elle a validé les interrogatoires et confrontations ainsi réalisés ;
" 2) alors que tout accusé a droit à un procès équitable ; que ce droit doit être assuré au plus haut degré possible pour les infractions les plus graves dans une société démocratique ; qu'en matière criminelle, les interrogatoires des personnes mises en examen réalisés dans le cabinet du juge d'instruction, y compris l'interrogatoire de première comparution et les confrontations, font en principe l'objet d'un enregistrement audiovisuel et que l'omission de cette formalité fait nécessairement grief ; qu'en jugeant qu'il n'y avait pas lieu à annulation des interrogatoires et confrontations de M. X..., en dépit de l'omission de cette formalité et de la qualification criminelle donnée aux faits qui lui sont reprochés, et en raison de la seule circonstance qu'ils auraient été commis en bande organisée, la chambre de l'instruction a méconnu le droit précité ;
" 3) alors que le droit à un procès équitable, le principe d'égalité juridique et l'interdiction de toute discrimination interdisent de priver un accusé de la garantie d'un enregistrement audiovisuel des interrogatoires et confrontations applicable pour des faits graves, de nature criminelle, en raison d'un degré supplémentaire de gravité que présenterait les faits criminels qui lui sont reprochés ; que la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés " ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que, dans sa décision du 6 avril 2012, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnels les septièmes alinéas des articles 64-1 et 116-1 du code de procédure pénale, a dit que leur abrogation prendrait effet à compter de la publication de sa décision et qu'elle ne s'appliquerait qu'aux auditions des personnes gardées à vue et aux interrogatoires des personnes mises en examen qui seront réalisés à compter de cette date ; qu'il en résulte que le moyen est devenu, en sa première branche, sans objet ;
Sur les autres branches du moyen :
Attendu que, pour rejeter le moyen d'annulation pris de l'irrégularité des interrogatoires et confrontations, auxquels a été soumis M. X..., en raison de l'absence d'enregistrement audiovisuel de ces actes, l'arrêt attaqué prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu que, si M. X..., qui n'a pas été entendu au cours d'une mesure de garde à vue, n'a pas bénéficié d'un enregistrement audiovisuel de ses interrogatoires par le juge d'instruction, il n'en est résulté aucune atteinte à ses droits conventionnellement protégés, qu'il s'agisse de ses droits de la défense ou de celui à un procès équitable, dès lors que l'intéressé a été mis en mesure d'être assisté par un avocat, qu'il a eu la possibilité de vérifier la transcription sur les procès-verbaux, authentifiée par un greffier, des questions posées et des réponses données, de demander toute rectification et de contester, à tous les stades de la procédure, le sens et la portée de ses propos transcrits ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 706-95, 171, 593 et 802 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; " en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande d'annulation des interceptions de correspondances du 19 août 2009 et des actes subséquents ;

" aux motifs que la mise en place de l'écoute a eu lieu techniquement le 6 août 2008 à 17 heures ; que, nonobstant la mention portée par son rédacteur sur le procès-verbal de la cote D121, cette autorisation ne peut entrer en vigueur qu'à compter du moment où le dispositif est mis en place, en l'espèce, le 6 août 2009, et non à compter de la date de l'ordonnance ; que, dès lors, ces écoutes ont valablement été enregistrées jusqu'au 19 août 2009 ; que le procès-verbal (Dl30) mentionne l'enregistrement d'une communication du 20 août 2009 ; que seule la transcription de l'existence de cette communication, sans mention du contenu figure à la cote D130 ; que cette mention sera annulée par cancellation ; que le conseil de M. X... sollicite, par ailleurs, l'annulation de l'ordonnance de prolongation des écoutes prises pour quinze jours à compter du 28 août, au motif que cette prolongation aurait pour fondement les écoutes du 19 août ; que le juge des libertés et de la détention était en droit, quand bien même la première période d'écoute aurait été infructueuse, d'ordonner de nouvelles écoutes sur la même ligne ; qu'elle est d'autant plus justifiée que, précisément le 19 août 2009, cette ligne s'est révélée active ; que le juge des libertés et de la détention, par ordonnance du 28 août 2009, a autorisé la poursuite des écoutes sur cette ligne, pour quinze jours ; que le dispositif a été réinstallé le même jour ; que ces écoutes ont permis de révéler le numéro de téléphone de Mme J...
A..., le 2 septembre 2009 ; que cette interception est parfaitement régulière, de même que les interceptions réalisées après autorisation du juge des libertés et de la détention du 16 septembre 2009 mises en place le même jour pour quinze jours sur la ligne de cette dernière, fournissant des indications, lors de communications surprises entre le 17 et le 23 septembre sur les faits reprochés à M. X... ; qu'il n'y a lieu à annulation de ces actes ;
" 1) alors que le juge des libertés et de la détention est seul compétent, sur le fondement de l'article 706-95 du code de procédure pénale, pour fixer la durée d'une écoute téléphonique et dès lors, en fixer le point de départ ; que, sauf indication contraire dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant l'interception des correspondances d'une ligne téléphonique, le point de départ de cette autorisation ne peut dès lors courir qu'à compter du jour de cette ordonnance ; qu'en l'espèce, l'ordonnance a été délivrée le 5 août 2009 pour une durée de deux semaines, soit quatorze jours, venant à expiration le 18 août 2009 ; qu'en refusant, dès lors, d'annuler les écoutes illégalement réalisées le 19 août 2009, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;
" 2) alors que le juge des libertés et de la détention ne peut renouveler une fois, dans les mêmes conditions de forme et de durée, une interception téléphonique que si les nécessités de l'enquête l'exigent ; que l'ordonnance de prolongation de l'écoute d'une ligne téléphonique dont les enquêteurs avaient constaté, comme le faisait valoir le demandeur, offre de preuve à l'appui, qu'elle n'était " visiblement pas utilisée " jusqu'au 19 août à 13 h 56, a pour support nécessaire la réactivation de la ligne constatée postérieurement, ainsi que le relève l'arrêt attaqué, qui, seule, caractérise la nécessité, pour les besoins de l'enquête, du renouvellement de la mesure ; qu'en refusant dès lors d'annuler l'ordonnance de prolongation, ayant pour support nécessaire les écoutes illégalement réalisées les 19 et 20 août 2009, et les écoutes subséquentes, faisant grief à M. X... pour avoir été à l'origine de sa mise en cause, la chambre de l'instruction a derechef violé les textes visés au moyen " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, par ordonnance en date du 5 août 2010, le juge d'instruction a ordonné l'interception de communications téléphoniques pour une durée de quatorze jours ;
Attendu que c'est donc à bon droit que la chambre de l'instruction, pour refuser de faire droit au moyen d'annulation, en ce qu'il invoquait l'irrégularité des interceptions effectuées le 19 août 2010 et de celles dont elles seraient le support, a décidé que le point de départ de ces mesures devait être fixé au jour de leur mise en place effective qui a eu lieu le lendemain de l'ordonnance du magistrat les autorisant ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 et 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, 171, 174, 593 et 802 du code de procédure pénale, ensemble les droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en nullité des déclarations des autres mis en cause ;
" aux motifs que, si le requérant à la nullité est en droit d'invoquer l'irrégularité d'actes de la procédure concernant un tiers, encore faut-il que cet acte accompli illégalement ait porté atteinte à ses intérêts et lui fasse grief ; qu'en l'espèce, en l'absence de demande d'annulation par les intéressés de leurs interrogatoires en garde à vue ou des interrogatoires ou confrontations, il ne saurait réclamer que l'annulation des parties de ces actes le mettant directement en cause, en justifiant de son intérêt à agir ; qu'en vain, pour solliciter l'annulation des procès-verbaux d'audition en garde à vue de Mmes Georgiéva J...
A..., C..., D..., MM. E..., F...
G... et H..., le conseil de M. X... fait valoir que leur droit au silence ne leur a pas été notifié, que les intéressés n'ont pas été assistés d'un avocat et que leurs auditions n'ont pas fait l'objet d'enregistrement audiovisuel en raison du régime dérogatoire de ces infractions relevant de la criminalité organisée, dès lors qu'il ressort du dossier que les mises en cause de M. X... ne résultent pas uniquement de ces déclarations, qui, par elles-mêmes, ne valent pas preuve, mais également des écoutes téléphoniques, des déclarations d'Y..., prostituée à Chambéry qui a été entendue en dehors de toute garde à vue, de la main courante établie par Z... et surtout des déclarations précises et circonstanciées qui ont été faites par ces mêmes personnes devant le juge d'instruction au cours des interrogatoires et des confrontations, et ce, en présence de leurs avocats, ces actes n'étant pas la conséquence des déclarations faites en garde à vue qui n'en sont nullement le support exclusif, et qui, ainsi qu'il a été rappelé, ne sauraient être viciés, pour les motifs précédemment énoncés du fait de l'absence d'enregistrement audiovisuel effectué conformément à la loi, et sans aucune violation des engagements conventionnels de la France ; que la mise en cause, en garde à vue par ses personnes ne constitue pas l'unique fondement des poursuites diligentées contre M. X... ; que l'établissement du mandat d'arrêt contre M. X... repose sur les éléments recueillis lors de l'enquête, avant les placements en garde à vue des personnes qui le mettent en cause, et aussi sur la plainte prise par les policiers émanant de Z... et les écoutes régulières ; que, par la suite, la mise en examen de M. X... est fondée sur les déclarations faites devant le juge d'instruction, par les témoins et les comis en examen, en présence de leurs conseils ou ceux-ci dûment convoqués ; qu'ainsi, le 19 et le 20 juillet 2010, M. I..., son conseil dûment convoqué répondait aux questions du magistrat instructeur sur le rôle de Kiro, le mettant une nouvelle fois en cause ; que Mme
J...
, épouse A..., en présence de ses conseils, le 19 juillet 2010, impliquait M. X... dans le réseau de proxénétisme ; que M. E... déclarait, le 20 juillet, qu'il n'avait pas de bonnes relations avec M. X... car il demandait de l'argent à Elena ; que M. F..., le même jour, donnait des précisions sur le rôle de Kiro (Kiril X...), que L..., témoin, le 20 juillet 2010 mettait en cause, pour des remises d'argent en provenance de sa prostitution Mme Elena C...
K..., soeur de M. X... et Iréna
J...
, son concubin ; que Mme A...
C... a reconnu son rôle de proxénète, devant le juge en présence de son conseil, transmettant l'argent à Kiril ; qu'il existait donc, du fait de l'existence de ces éléments, et notamment des mises en cause portées contre lui des indices graves ou concordants rendant vraisemblable sa participation aux faits qui lui sont reprochés lors de la mise en examen parfaitement régulière et justifiée ; qu'il ne peut être soutenu que le fondement des poursuites est constitué par les déclarations faites en garde à vue par ces personnes et que M. X... justifie d'un intérêt à obtenir l'annulation des déclarations faites en garde à vue hors la présence d'un conseil par ses accusateurs, qui ne constituent nullement le seul élément justifiant sa mise en cause ; que, dès lors, aucune nullité n'est encourue de ce chef ;
" 1) alors que les déclarations émanant d'autres mis en cause, mettant directement en cause le requérant dans la commission des faits reprochés, mais irrégulièrement recueillies, faute, d'une part, de notification du droit de se taire et de l'assistance d'un avocat durant la garde à vue, et faute, d'autre part, d'enregistrement audiovisuel des auditions et interrogatoires, lui font nécessairement grief, quand bien même ces déclarations ne constitueraient pas l'unique fondement des poursuites ; que l'existence prétendue d'éléments distincts ayant justifié la mise en cause et la mise en examen de M. X... n'est, en aucun cas, exclusive de l'obligation légale d'annuler les déclarations irrégulièrement recueillies ni de l'intérêt du requérant à obtenir cette annulation ; qu'en décidant le contraire, la chambre de l'instruction a violé les articles susvisés et gravement méconnu le droit à un procès équitable ;
" 2) alors que la Cour de cassation a été saisie, par écrit distinct et motivé, d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à la Constitution de l'article 64-1 du code de procédure pénale en ce qu'il écarte l'enregistrement audiovisuel lorsque la personne gardée à vue pour un crime, est mise en cause, comme en l'espèce, pour l'un de ceux prévus à l'article 706-73 ; que la déclaration d'inconstitutionnalité à venir privera de fondement juridique la décision de la chambre de l'instruction en ce qu'elle a validé les auditions ainsi réalisées ;
" 3) alors, en toute hypothèse, qu'en jugeant qu'il n'y avait pas lieu à annulation des auditions, interrogatoires et confrontations des autres mis en cause, en dépit de l'absence d'enregistrement audiovisuel et de la qualification criminelle donnée aux faits reprochés, la chambre de l'instruction a violé les articles 20, 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 6 du Traité sur l'Union européenne, 6 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1 de son Protocole n° 12 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques " ;
Attendu qu'en déclarant par les motifs reproduits au moyen n'y avoir lieu à annulation des auditions en garde à vue et interrogatoires par le juge d'instruction d'autres personnes que le demandeur, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués, dès lors que la méconnaissance des formalités substantielles auxquelles est subordonnée la garde à vue et l'absence d'enregistrement audiovisuel des auditions ou interrogatoires ne peuvent être invoquées à l'appui d'une demande d'annulation d'acte ou de pièce de procédure que par la partie qu'elles concernent ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Caron conseiller rapporteur, M. Pometan conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Leprey ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 11-87328
Date de la décision : 10/05/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Défaut - Invocation par un tiers (non)

DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Défaut - Invocation par un tiers (non) INSTRUCTION - Interrogatoire - Matière criminelle - Enregistrement - Défaut - Invocation par un tiers (non)

La méconnaissance des formalités substantielles auxquelles est subordonnée la garde à vue et l'absence d'enregistrement des auditions ne peuvent être invoquées, à l'appui d'une demande d'annulation d'acte ou de pièce de la procédure, que par la partie qu'elles concernent


Références :

Sur le numéro 1 : article 5 § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
Sur le numéro 2 : article 706-73 du code de procédure pénale
Sur le numéro 3 : article 706-95 du code de procédure pénale
Sur le numéro 4 : article 171 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, 06 septembre 2011

Sur le n° 4 : Sur l'invocation par un tiers de la méconnaissance des formalités substantielles auxquelles est subordonnée la garde à vue, dans le même sens que :Crim., 14 février 2012, pourvoi n° 11-84694, Bull. crim. 2012, n° 43 (cassation) ;Crim., 14 février 2012, pourvoi n° 11-87757, Bull. crim. 2012, n° 42 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 mai. 2012, pourvoi n°11-87328, Bull. crim. criminel 2012, n° 116
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2012, n° 116

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : Mme Valdès-Boulouque
Rapporteur ?: Mme Caron
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.87328
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