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21/09/2022 | FRANCE | N°21-14171

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2022, 21-14171


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 septembre 2022

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 970 FS-B

Pourvoi n° N 21-14.171

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 SEPTEMBRE 2022

Mme [T] [M], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-14.171 contre

l'arrêt rendu le 28 janvier 2021 par la cour d'appel de Rennes (7e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Cabinet ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 septembre 2022

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 970 FS-B

Pourvoi n° N 21-14.171

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 SEPTEMBRE 2022

Mme [T] [M], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-14.171 contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2021 par la cour d'appel de Rennes (7e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Cabinet de chirurgie dentaire Pasteur, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège social est [Adresse 2],

2°/ à M. [I] [K], domicilié [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Capitaine, conseiller, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mme [M], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Cabinet de chirurgie dentaire Pasteur et de M. [K], et l'avis de Mme Wurtz, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 juin 2022 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Capitaine, conseiller rapporteur, Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen, MM. Pion, Ricour, Mmes Van Ruymbeke, Lacquemant, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, Laplume, conseillers référendaires, Mme Wurtz, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 28 janvier 2021), Mme [M] a conclu un contrat de chirurgien-dentiste collaborateur libéral à effet au 1er septembre 2011 avec M. [K], chirurgien-dentiste, exerçant depuis auprès de la société Cabinet de chirurgie dentaire Pasteur (la société) et a rompu ce contrat le 18 juin 2015.

2.Estimant que le contrat de collaborateur libéral devait être requalifié en contrat de travail, Mme [M] a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Mme [M] fait grief à l'arrêt de dire ses demandes irrecevables en l'état, et que les parties pourront éventuellement le ressaisir après la décision de la commission de conciliation du conseil départemental de l'ordre des médecins-dentistes, alors :

« 1°/ qu'est inopposable la clause de conciliation préalable incluse dans un contrat devenu caduc ; que dans ses conclusions Mme [M] faisait valoir que le contrat de collaboration avait été conclu avec le Dr [K], exerçant alors à titre individuel ; que la cession de sa patientèle par le Dr [K] à la société Cabinet Pasteur au sein de laquelle il a poursuivi son activité n'a pas entraîné le transfert du contrat de collaboration, lequel est devenu caduc faute pour le Dr [K] d'exercer à titre individuel ; qu'en se bornant à énoncer que Mme [M] invoquait la caducité de la convention sans s'expliquer sur la cessation par la partie contractante de son activité à titre individuel et de ses conséquences sur la caducité du contrat et l'inopposabilité de la clause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1103 du code civil ;

2°/ qu'une clause du contrat de collaboration libérale qui institue une procédure de conciliation préalable en cas de litige survenant à l'occasion de ce contrat, n'empêche pas la partie qui sollicite la requalification dudit contrat en contrat de travail de saisir directement le juge prud'homal ; que pour déclarer irrecevable la demande de Mme [M], la cour d'appel a retenu que la clause de conciliation incluse dans son contrat de chirurgien-dentiste collaborateur lui imposait de saisir au préalable le président du conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes en vue d'une tentative de conciliation ; qu'en statuant ainsi quand cette clause n'empêchait pas Mme [M] de saisir directement le juge prud'homal pour voir requalifier le contrat de collaboration libérale en contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1411-1 du code du travail ;

3°/ qu'aux termes de l'article R. 4127-259, alinéa 2, du code de la santé publique « en cas de dissentiment d'ordre professionnel entre praticiens, les parties doivent se soumettre à une tentative de conciliation devant le président du conseil départemental de l'ordre » ; que ce texte n'institue pas une procédure de conciliation obligatoire avant la saisine du juge judiciaire ; qu'en se fondant sur cette disposition pour déclarer irrecevable la demande de Mme [M] en requalification du contrat de collaboration libérale en contrat de travail devant le conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé l'article R. 4127-259 du code de la santé publique, ensemble l'article L. 1411-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

4. Il résulte des articles 122 et 124 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées. Licite, la clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en oeuvre suspend jusqu'à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent.

5. La cour d'appel, qui a constaté, par motifs propres et adoptés, que Mme [M] avait notifié le 18 juin 2015 la rupture du contrat de collaboration libérale conclu le 30 mai 2011, n'avait pas à procéder à une recherche relative à la caducité de ce contrat, que ses constatations rendaient inopérante.

6. Ayant relevé que ce contrat comportait une clause prévoyant que toutes les contestations sur la validité, l'interprétation, l'exécution ou la résolution de la convention devaient, avant toute action en justice, être soumises à une tentative de conciliation devant le président du Conseil départemental, conformément aux dispositions de l'article R. 4127-259 du code de la santé publique, que la société soulevait la fin de non-recevoir tirée de l'absence de mise en oeuvre de cette procédure de conciliation, et que l'intéressée lui soumettait un différend né du contrat de collaboration libérale, la cour d'appel en a exactement déduit l'irrecevabilité de son action.

7. Le moyen, inopérant en sa première branche, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [M] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Pion, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en replacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt et un septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme [M]

Mme [M] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a dit ses demandes irrecevables en l'état, et dit que les parties pourront éventuellement le ressaisir après la décision de la commission de conciliation du conseil départemental de l'ordre des médecins-dentistes.

1°) ALORS QU'est inopposable la clause de conciliation préalable incluse dans un contrat devenu caduc ; que dans ses conclusions (récapitulatives n° 5 p. 9 à 12) Mme [M] faisait valoir que le contrat de collaboration avait été conclu avec le Dr [K], exerçant alors à titre individuel ; que la cession de sa patientèle par le Dr [K] à la société Cabinet Pasteur au sein de laquelle il a poursuivi son activité n'a pas entrainé le transfert du contrat de collaboration, lequel est devenu caduc faute pour le Dr [K] d'exercer à titre individuel ; qu'en se bornant à énoncer que Mme [M] invoquait la caducité de la convention sans s'expliquer sur la cessation par la partie contractante de son activité à titre individuel et de ses conséquences sur la caducité du contrat et l'inopposabilité de la clause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1103 du code civil ;

2°) ALORS QU'une clause du contrat de collaboration libérale qui institue une procédure de conciliation préalable en cas de litige survenant à l'occasion de ce contrat, n'empêche pas la partie qui sollicite la requalification dudit contrat en contrat de travail de saisir directement le juge prud'homal ; que pour déclarer irrecevable la demande de Mme [M], la cour d'appel a retenu que la clause de conciliation incluse dans son contrat de chirurgien-dentiste collaborateur lui imposait de saisir au préalable le président du conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes en vue d'une tentative de conciliation ; qu'en statuant ainsi quand cette clause n'empêchait pas Mme [M] de saisir directement le juge prud'homal pour voir requalifier le contrat de collaboration libérale en contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1411-1 du code du travail ;

3°) ALORS QU'aux termes de l'article R. 4127-259, alinéa 2, du code de la santé publique « en cas de dissentiment d'ordre professionnel entre praticiens, les parties doivent se soumettre à une tentative de conciliation devant le président du conseil départemental de l'ordre » ; que ce texte n'institue pas une procédure de conciliation obligatoire avant la saisine du juge judiciaire ; qu'en se fondant sur cette disposition pour déclarer irrecevable la demande de Mme [M] en requalification du contrat de collaboration libérale en contrat de travail devant le conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé l'article R. 4127-259 du code de la santé publique, ensemble l'article L. 1411-1 du code du travail.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

PRUD'HOMMES - Procédure - Préliminaire de conciliation - Clause d'un contrat instituant un préalable obligatoire de conciliation - Effets - Saisine directe du juge prud'homal - Possibilité - Exclusion - Cas - Contrat de droit commun - Action en requalification en contrat de travail avant la mise en oeuvre de la procédure de conciliation - Portée

PROCEDURE CIVILE - Fin de non-recevoir - Définition - Clause instituant un préalable obligatoire de conciliation - Domaine d'application - Cas - Procédure prud'homale - Contrat de droit commun - Action en requalification en contrat de travail avant la mise en oeuvre de la procédure de conciliation - Portée

La clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en oeuvre suspend jusqu'à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent. Dès lors, la cour d'appel qui a retenu qu'un contrat de collaboration libérale prévoyait le recours à une procédure de conciliation préalable à toute instance judiciaire pour les contestations relatives à la validité, l'interprétation, l'exécution ou la résolution de la convention, en déduit exactement l'irrecevabilité de l'action en requalification de ce contrat en contrat de travail avant que la procédure de conciliation ait été mise en oeuvre


Références :

Articles 122 et 124 du code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 28 janvier 2021

Sur le principe qu'une clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire constitue une fin de non-recevoir, à rapprocher : 1re Civ., 1 octobre 2014, pourvoi n° 13-17920, Bull. 2014, I, n° 157 (cassation)

arrêt cité. Sur l'effet d'une clause contractuelle instituant un préalable de conciliation obligatoire en matière prud'homale, à rapprocher : Soc., 5 décembre 2012, pourvoi n° 11-20004, Bull. 2012, V, n° 326 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 21 sep. 2022, pourvoi n°21-14171, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles
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Composition du Tribunal
Président : M. Cathala
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 21/09/2022
Date de l'import : 27/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21-14171
Numéro NOR : JURITEXT000046330595 ?
Numéro d'affaire : 21-14171
Numéro de décision : 52200970
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2022-09-21;21.14171 ?
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