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30/01/2019 | FRANCE | N°16-25259

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 30 janvier 2019, 16-25259


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :

Vu l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 7 octobre 2015, pourvoi n° 14-16.898), que la société eBizcuss.com (eBizcuss) s'est vue reconnaître la qualité de revendeur agréé pour les produits de la marque Apple par contrat conclu le 10 octobre 2002 avec la société Apple Sales International, contenant une clause attributive de compÃ

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :

Vu l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 7 octobre 2015, pourvoi n° 14-16.898), que la société eBizcuss.com (eBizcuss) s'est vue reconnaître la qualité de revendeur agréé pour les produits de la marque Apple par contrat conclu le 10 octobre 2002 avec la société Apple Sales International, contenant une clause attributive de compétence au profit des juridictions irlandaises ; qu'invoquant des pratiques anticoncurrentielles et des actes de concurrence déloyale qui auraient été commis à partir de l'année 2009 par les sociétés Apple Sales International, Apple Inc. et Apple retail France (Apple), la société eBizcuss, désormais représentée par la société MJA, en qualité de mandataire liquidateur, les a assignées en réparation de son préjudice devant un tribunal de commerce sur le fondement des articles 1382, devenu 1240 du code civil, L. 420-2 du code de commerce et 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; que l'arrêt ayant accueilli l'exception d'incompétence soulevée par la société Apple Sales International a été cassé, au visa de l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

Attendu que, pour accueillir le contredit de compétence et renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris, l'arrêt retient que la clause attributive de compétence invoquée par les sociétés Apple ne stipule pas expressément qu'elle trouve à s'appliquer en matière d'abus de position dominante ou de concurrence déloyale ;

Attendu cependant que, saisie par voie préjudicielle, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE 24 octobre 2018, C-595/17) a dit pour droit que l'article 23 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que l'application, à l'égard d'une action en dommages-intérêts intentée par un distributeur à l'encontre de son fournisseur sur le fondement de l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, d'une clause attributive de juridiction contenue dans le contrat liant les parties n'est pas exclue au seul motif que cette clause ne se réfère pas expressément aux différends relatifs à la responsabilité encourue du fait d'une infraction au droit de la concurrence ;

Et attendu que, par arrêt du 20 octobre 2011 (C-396/09 Interedil), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que le droit de l'Union s'oppose à ce qu'une juridiction nationale soit liée par une règle de procédure nationale, en vertu de laquelle les appréciations portées par une juridiction supérieure nationale s'imposent à elle, lorsqu'il apparaît que les appréciations portées par la juridiction supérieure ne sont pas conformes au droit de l'Union, tel qu'interprété par la Cour de justice de l'Union européenne ;

D'où il suit que, bien que la cour d'appel de renvoi se soit conformée à la doctrine de l'arrêt qui l'avait saisie, l'annulation est encourue ;

Vu les articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

Attendu que la société eBizcuss a assigné les sociétés Apple devant le tribunal de commerce de Paris en soutenant que, dès l'ouverture de son premier Apple Store en France, en novembre 2009, Apple avait décidé le développement de son propre réseau de distribution et réservé, à cette fin, un traitement discriminatoire aux distributeurs indépendants qui, comme elle, en sont les principaux concurrents, en refusant ou en retardant la fourniture de nouveaux modèles au moment de leur mise sur le marché, puis en retardant les livraisons, la plaçant ainsi en situation de pénurie par rapport à son propre réseau de distribution, lui-même abondamment achalandé, en lui refusant la possibilité de procéder à la pré-vente de certains produits, par ailleurs offerte aux clients se rendant sur le site Internet Apple Store ou dans les magasins Apple Store, et en imposant à eBizcuss des tarifs grossistes supérieurs aux prix de vente au détail pratiqués sur le site Internet Apple Store ou dans les magasins Apple Store ; que ces pratiques anticoncurrentielles alléguées, qui se seraient matérialisées dans les relations contractuelles nouées entre les sociétés eBizcuss et Apple Sales International, au moyen des conditions contractuelles convenues avec elle, ne sont donc pas étrangères au rapport contractuel à l'occasion duquel la clause attributive de juridiction a été conclue ; que cette clause doit, donc, recevoir application ;

D'où il suit que, le comportement anticoncurrentiel allégué à l'encontre des sociétés Apple étant en lien avec le contrat contenant la clause attributive de juridiction, la Cour de cassation est en mesure de mettre fin au litige en constatant l'incompétence des juridictions françaises ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il fixe à la somme de 1 000 euros la créance de la société Apple Sales International, au passif de la liquidation judiciaire de la société eBizcuss.com au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société MJA, ès qualités, aux dépens de l'entier litige ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette toutes les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour les sociétés Apple Sales International, Apple Inc. et Apple retail France

Les sociétés Apple reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir fait droit au contredit formé par le liquidateur de la société eBizcuss et d'avoir renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris pour examen au fond,

AUX MOTIFS QUE la clause d'attribution litigieuse est ainsi libellée, en langue anglaise : « This agreement and the corresponding relationship between the parties shall be governed by and construed in accordance with the laws of the Republic of Ireland and the parties shall submit to the jurisdiction of the courts of the Republic of Ireland. Apple reserves the right to institute proceedings against reseller in the courts having jurisdiction in the place where reseller has its seat or in any jurisdiction where a harm to Apple is occurring » ; que la cour d'appel de Paris a relevé que les parties ne s'accordaient pas sur la traduction de cette clause, la société eBizcuss en donnant une traduction assermentée selon laquelle : « Le présent contrat et la relation correspondante entre les parties seront régis par et interprétés conformément au droit de la République d'Irlande et les parties se soumettent à la compétence des tribunaux de la République d'Irlande. Apple se réserve le droit d'engager des poursuites à l'encontre du revendeur devant les tribunaux dans le ressort duquel est situé le siège du revendeur ou dans tout pays dans lequel Apple subit un préjudice », tandis que, pour la société Apple Sales International la clause, devait être traduite par : « Le présent contrat et les relations en découlant entre les parties (le reste sans changement) » ; que, toutefois, si les parties ne s'accordaient pas sur la portée de cette clause au regard de la formule « and the corresponding relationship », sur la traduction de laquelle elles divergeaient, la société eBizcuss la traduisant par « la relation correspondante » et la société Appel Sales International par « les relations en découlant », il ne pouvait être contesté que celle-ci donnait expressément compétence aux juridictions de la République d'Irlande pour les litiges nés de l'exécution du contrat, estimant ainsi que le litige qui lui était soumis était de nature contractuelle et non délictuelle ; qu'à cet égard, il sera rappelé que l'article 23 du règlement (CE) n°44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions de justice en matière civile et commerciale, traitant des prorogations de compétence, prévoit que : « 1. Si les parties, dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un État membre, sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État membre sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties » ; qu'il n'est pas contesté que la clause litigieuse s'inscrit dans le cadre de cet article, mais les parties s'opposent sur son applicabilité au litige introduit par la société eBizcuss devant le tribunal de commerce de Paris ; que les clauses de prorogation de compétence, pour autant qu'elles respectent les dispositions des sections 3, 4, 5 du règlement n° 44/2001, en matière d'assurance, de contrats conclus avec les consommateurs ou de contrats individuels du travail et les compétences exclusives de la section 6, peuvent déroger aux règles de compétences spéciales prévues en ses articles 5 et 6 ; que la formulation de l'article 23 du règlement, selon laquelle la clause de prorogation de compétence donne compétence à une juridiction choisie pour des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, concerne au premier chef l'exécution du contrat qui la stipule, mais elle peut également y inclure des litiges de nature extra-contractuelle pouvant survenir entre les parties, à la condition expresse qu'elle les énumère précisément, dans un souci de prévisibilité, ayant pour objectif d'éviter qu'une partie ne soit surprise par l'attribution à un for déterminé de l'ensemble des différends dans les rapports qu'elle entretient avec son cocontractant et qui trouveraient leur origine dans des rapports autres que celui à l'occasion duquel l'attribution de juridiction a été convenue ; que le fondement délictuel des demandes formulées par la société eBizcuss devant le tribunal de commerce de Paris à l'encontre des sociétés du groupe Apple, qui a trait à la concurrence déloyale et à la violation des règles, tant françaises qu'européennes, en matière d'abus de position dominante, ne saurait, en l'espèce, être valablement contesté et c'est vainement que la société Apple Sales International tente de rattacher ce litige à l'exécution du contrat ; qu'en effet, si la position dominante d'une partie peut être connue de son cocontractant et se rencontre fréquemment dans les contrats de distribution ou d'adhésion, l'abus de celle-ci, par essence délictuel, ne peut découler d'une exécution loyale de ce rapport de droit ; que la clause attributive de compétence, sur laquelle la société Apple Sales International a fondé son exception, à la formulation générale, quelle qu'en soit la traduction retenue, ne stipulant pas expressément qu'elle trouve à s'appliquer en matière d'abus de position dominante ou de concurrence déloyale, est donc inapplicable au litige qui a été soumis à l'appréciation du tribunal de commerce de Paris, dont il n'est pas contesté par ailleurs qu'il est compétent au regard des règles de droit commun pour en connaître ; que, sans qu'il soit nécessaire de poser une question préjudicielle ou de restreindre la portée du contredit, la cour fera donc droit à ce contredit et, par application de l'article 86 du code de procédure civile, renverra l'affaire au tribunal de commerce de Paris, compétent pour en connaître ;

1°/ ALORS QU' une clause attributive de juridiction ne peut concerner que des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce qui limite la portée d'une convention attributive de juridiction aux seuls différends qui trouvent leur origine dans le rapport de droit à l'occasion duquel cette clause a été convenue ; qu'il s'en déduit qu'une clause attributive de juridiction se référant de manière abstraite aux différends surgissant dans les rapports contractuels a vocation à s'appliquer à tous les litiges qui trouvent leur origine dans la relation contractuelle, que la responsabilité encourue soit de nature contractuelle ou délictuelle ; qu'en revanche, les différends étrangers à la relation contractuelle ne peuvent bénéficier de la prorogation conventionnelle de compétence que s'ils sont expressément mentionnés dans la clause attributive de juridiction ; qu'en énonçant, pour refuser de donner effet à la clause d'élection de for stipulée dans les contrats liant la société ASI à la société eBizcuss, que les demandes de la société eBizcuss fondées sur la violation des règles de concurrence en matière d'abus de position dominante avaient un fondement délictuel et que la clause attributive de juridiction ne prévoyait pas expressément son application en matière d'abus de position dominante, bien que les faits d'abus de position dominante invoqués par la société eBizcuss trouvent leur origine dans les rapports contractuels avec la société ASI, la cour d'appel a violé l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

2°/ ALORS QU' une clause attributive de juridiction ne peut concerner que des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce qui limite la portée d'une convention attributive de juridiction aux seuls différends qui trouvent leur origine dans le rapport de droit à l'occasion duquel cette clause a été convenue ; qu'il s'en déduit qu'une clause attributive de juridiction se référant de manière abstraite aux différends surgissant dans les rapports contractuels a vocation à s'appliquer à tous les litiges qui trouvent leur origine dans la relation contractuelle, que la responsabilité encourue soit de nature contractuelle ou délictuelle ; qu'en revanche, les différends étrangers à la relation contractuelle ne peuvent bénéficier de la prorogation conventionnelle de compétence que s'ils sont expressément mentionnés dans la clause attributive de juridiction ; qu'en énonçant, pour refuser de donner effet à la clause d'élection de for stipulée dans les contrats liant la société ASI à la société eBizcuss, que les demandes de la société eBizcuss fondées sur la concurrence déloyale avaient un fondement délictuel et que la clause attributive de juridiction ne prévoyait pas expressément son application en matière de concurrence déloyale, bien que les faits de concurrence déloyale invoqués par la société eBizcuss trouvent leur origine dans le rapport contractuel avec la société ASI, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

3°/ ALORS QU' une clause attributive de juridiction ne peut concerner que des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce qui limite la portée d'une convention attributive de juridiction aux seuls différends qui trouvent leur origine dans le rapport de droit à l'occasion duquel cette clause a été convenue ; qu'il s'en déduit qu'une clause attributive de juridiction se référant de manière abstraite aux différends surgissant dans les rapports contractuels a vocation à s'appliquer à tous les litiges qui trouvent leur origine dans la relation contractuelle, que la responsabilité encourue soit de nature contractuelle ou délictuelle ; qu'en revanche, les différends étrangers à la relation contractuelle ne peuvent bénéficier de la prorogation conventionnelle de compétence que s'ils sont expressément mentionnés dans la clause attributive de juridiction ; qu'en énonçant, pour refuser de donner effet à la clause d'élection de for stipulée dans les contrats liant la société ASI à la société eBizcuss, que les demandes de la société eBizcuss avaient un fondement délictuel et que la clause attributive de juridiction n'énumérait pas précisément les litiges de nature délictuelle pouvant surgir entre les parties, bien que les fautes invoquées par la société eBizcuss trouvent leur origine dans le rapport contractuel avec la société ASI, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

4°/ ALORS QU' une clause attributive de juridiction a vocation à s'appliquer à tous les différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé ; que la formation et l'exécution du contrat peuvent donner naissance à des litiges de nature délictuelle, qui sont prévisibles pour les cocontractants et doivent bénéficier de la prorogation conventionnelle de compétence ; qu'en affirmant, pour refuser de donner effet à la clause d'élection de for stipulée dans les contrats liant la société ASI à la société eBizcuss, que, dans un souci de prévisibilité, une clause se réfèrant de manière abstraite aux différends surgissant dans les rapports contractuels ne pouvait s'appliquer aux litiges de nature délictuelle trouvant leur source dans le rapport contractuel qu'à la condition d'y être expressément énumérés, la cour d'appel a violé l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

5°/ ALORS QU' en énonçant, pour affirmer que le litige résultant d'un abus de position dominante du cocontractant ne saurait être rattaché à l'exécution du contrat, qu'il ne peut résulter d'une exécution loyale du rapport de droit, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

6°/ ALORS QU' en toute hypothèse, une clause attributive de juridiction ne peut concerner que des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce qui limite la portée d'une convention attributive de juridiction aux seuls différends qui trouvent leur origine dans le rapport de droit à l'occasion duquel cette clause a été convenue ; qu'il s'en déduit qu'une clause attributive de juridiction se référant de manière abstraite aux différends surgissant dans les rapports contractuels a vocation à s'appliquer à tous les litiges qui trouvent leur origine dans la relation contractuelle, que la responsabilité encourue soit de nature contractuelle ou délictuelle ; qu'en revanche, les différends étrangers à la relation contractuelle ne peuvent bénéficier de la prorogation conventionnelle de compétence que s'ils sont expressément mentionnés dans la clause attributive de juridiction ; qu'il s'en déduit que l'action en responsabilité délictuelle fondée sur une violation des règles de concurrence trouvant sa source dans la relation contractuelle a vocation à bénéficier de la prorogation conventionnelle de compétence, à l'inverse de l'action tendant à la réparation du préjudice résultant d'une infraction au droit de la concurrence constatée par l'autorité de concurrence, européenne ou nationale (action dite de « follow-on ») ; qu'en refusant de donner effet à la clause d'élection de for stipulée dans les contrats liant la société ASI à la société eBizcuss, bien qu'aucune infraction au droit de la concurrence n'ait été constatée par une autorité de concurrence, européenne ou nationale, la cour d'appel a violé l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

7°/ ALORS, enfin, QUE la société eBizcuss invoquait, au soutien de son action, des faits de concurrence déloyale, d'abus de position dominante et d'abus de dépendance économique ; qu'en se bornant à énoncer, pour refuser de donner effet à la clause d'élection de for stipulée dans les contrats liant la société ASI à la société eBizcuss, qu'elle ne prévoyait pas expressément son application en matière d'abus de position dominante et de concurrence déloyale, sans rechercher si elle ne devait pas s'appliquer aux faits allégués d'abus de dépendance économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 16-25259
Date de la décision : 30/01/2019
Sens de l'arrêt : Annulation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

CASSATION - Moyen - Décision d'une juridiction de renvoi - Doctrine conforme à celle de l'arrêt de cassation - Moyen le critiquant de ce chef - Recevabilité - Cas - Appréciation de la Cour de cassation non conforme au droit de l'Union tel qu'interprété par la Cour de justice de l'Union européenne

Par arrêt du 20 octobre 2011 (C-396/09 Interedil), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que le droit de l'Union s'oppose à ce qu'une juridiction nationale soit liée par une règle de procédure nationale, en vertu de laquelle les appréciations portées par une juridiction supérieure nationale s'imposent à elle, lorsqu'il apparaît que les appréciations portées par la juridiction supérieure ne sont pas conformes au droit de l'Union, tel qu'interprété par la Cour. Il s'ensuit qu'un moyen, qui reproche à la juridiction de renvoi d'avoir statué conformément à l'arrêt de cassation qui la saisissait, est recevable lorsqu'il soutient, à bon droit, que les appréciations portées par la juridiction supérieure ne sont pas conformes au droit de l'Union, tel qu'interprété par la Cour de justice de l'Union européenne


Références :

Sur le numéro 1 : article 23 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 25 octobre 2016

N1A rapprocher :1re Civ., 11 octobre 2017, pourvoi n° 16-25259, Bull. 2017, I, n° 216 (renvoi devant la Cour de justice de l'Union européenne)

arrêt cité.Sur la portée d'une clause attributive de juridiction ne se référant pas expressément aux différends relatifs à la responsabilité encourue du fait d'une infraction au droit de la concurrence, cf. : CJUE, arrêt du 24 octobre 2018, Apple Sales International e.a., C-595/17 ;

N2 A rapprocher :Ch. mixte, 30 avril 1971, pourvoi n° 61-11829, Bull. 1971, Ch. mixte, n° 8 (rejet). Sur l'obligation de laisser inappliquées des appréciations portées par une juridiction supérieure nationale lorsque celles-ci ne sont pas conformes au droit de l'Union, tel qu'interprété par la CJUE, cf. :CJUE, arrêt du 20 octobre 2011, Interedil, C-396/09 ;

CJUE, ordonnance du 24 mai 2016, Leonmobili et Leone, C-335/15.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 30 jan. 2019, pourvoi n°16-25259, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:16.25259
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