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01/03/2018 | FRANCE | N°16-25462

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 01 mars 2018, 16-25462


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que sur des poursuites à fin de saisie immobilière exercées par la société Crédit industriel et commercial (la banque) à l'encontre de la SCI Notre Dame de France (la société) et M. et Mme Z..., un jugement d'orientation d'un juge de l'exécution a ordonné la vente forcée du bien immobilier de ces derniers et fixé la date de la vente ; que la société et M. et Mme Z... ayant interjeté appel du jugement, la banque a sollicité le report de la date de l'audience de v

ente forcée ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que sur des poursuites à fin de saisie immobilière exercées par la société Crédit industriel et commercial (la banque) à l'encontre de la SCI Notre Dame de France (la société) et M. et Mme Z..., un jugement d'orientation d'un juge de l'exécution a ordonné la vente forcée du bien immobilier de ces derniers et fixé la date de la vente ; que la société et M. et Mme Z... ayant interjeté appel du jugement, la banque a sollicité le report de la date de l'audience de vente forcée ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles R. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution, 748-6 du code de procédure civile et 1 de l'arrêté du 7 avril 2009 relatif à la communication par voie électronique devant les tribunaux de grande instance ;

Attendu que les envois, remises et notifications des actes de procédure peuvent être effectués par voie électronique lorsque les procédés techniques utilisés garantissent, dans des conditions fixées par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, la fiabilité de l'identification des parties à la communication électronique, l'intégrité des documents adressés, la sécurité et la confidentialité des échanges, la conservation des transmissions opérées et permettent d'établir de manière certaine la date d'envoi et celle de la réception par le destinataire ; que la communication par voie électronique entre avocats ou entre un avocat et la juridiction dans les procédures devant le tribunal de grande instance est spécialement régie par l'arrêté du 7 avril 2009 ;

Attendu que pour déclarer caduc le commandement valant saisie immobilière, l'arrêt retient que le conseil de la banque a adressé sa demande de report de l'audience de vente forcée et ses pièces par la voie du réseau privé virtuel avocat (RPVA), alors que la convention sur la communication électronique signée entre le barreau de Lorient et le tribunal de grande instance de Lorient n'incluait pas dans son périmètre les saisies immobilières, de sorte que le message, reçu au greffe, n'a pas été transmis au juge de l'exécution, qui en a déduit que la banque n'avait pas déposé de conclusions de report ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'arrêté du 7 avril 2009 n'exclut pas de son champ d'application les procédures de saisie immobilière, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour déclarer caduc le commandement valant saisie immobilière, l'arrêt retient également que l'écrit reçu au greffe par la voie du RPVA, par lequel le conseil de la banque a sollicité le report de la vente forcée ne peut valoir conclusions à défaut d'avoir été signifié aux défendeurs, pour lesquels aucun avocat n'était régulièrement constitué ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions qui faisaient valoir que c'était par erreur qu'il était mentionné dans le jugement du juge de l'exécution que la société et M. et Mme Z... n'avaient pas constitué avocat en première instance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation prononcée sur le fondement de la première et de la troisième branches du moyen unique emporte, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a infirmé le jugement du 26 mars 2015 et, statuant à nouveau, déclaré caduque la procédure de saisie immobilière poursuivie par la banque ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen unique :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne la société Notre Dame de France et M. et Mme Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Notre Dame de France et de M. et Mme Z... ; les condamne à payer à la société Crédit industriel et commercial la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Crédit industriel et commercial

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué,

D'AVOIR confirmé le jugement du 25 juin 2015 en ce qu'il avait constaté la caducité du commandement et D'AVOIR infirmé en revanche le jugement du 26 mars 2015 et déclaré caduque la procédure de saisie immobilière poursuivie par le CIC ;

AUX MOTIFS QUE « en vertu des dispositions de l'article 7 du décret n° 2006-936 du 27 juillet 2006, les contestations et demandes incidentes sont formées devant le juge de l'exécution par des conclusions signées d'un avocat. En l'espèce, ainsi qu'il en justifie par un accusé de réception émis par le greffe du tribunal de grande instance, le conseil du créancier poursuivant a adressé trois jours avant l'audience par RPVA au greffe du juge de l'exécution une demande signée de report en raison de l'appel interjeté par les époux débiteurs saisis ; à cette demande était jointe la copie de l'ordonnance du premier président faisant mention de l'appel et autorisant les débiteurs saisis à assigner à jour fixe. La convention sur la communication électronique signée entre le barreau de Lorient et le tribunal de grande instance de Lorient n'incluant pas dans son périmètre les saisies immobilières, le juge de l'exécution, auquel le message n'avait pas transmis, a considéré que la CIC n'avait pas déposé de conclusions de report et qu'il formulait uniquement une demande orale à l'audience. Toutefois, si même il devait être considéré qu'une utilisation erronée du RPVA n'est pas de nature à interdire à un écrit signé d'un conseil de valoir conclusions du moment que le greffe civil du tribunal de grande instance, encore eut-il fallu que ledit écrit ait été signifié aux défendeurs qui n'avaient pas comparu lors de l'audience d'orientation et pour lesquels aucun avocat n'était régulièrement constitué. Aucune signification du courrier du 23 juin 2015 n'ayant été effectuée, ce courrier ne peut valoir conclusions et le jugement est confirmé en ce qu'il a constaté la caducité de la procédure de saisie immobilière et du commandement valant saisie en date du 14 octobre 2014. La caducité ayant des effets rétroactifs, le jugement du 26 mars 2015 ayant ordonné la vente est annulé » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « l'article R. 322-27 du Code des procédures civiles d'exécution dispose que si aucun créancier ne sollicite la vente, le juge constate la caducité du commandement valant saisie. Par ailleurs, si en application de l'article R. 322-19 du CPCE, lorsque la cour d'appel n'a pas statué au moins un mois avant la date prévue pour l'adjudication, le juge peut à la demande du créancier poursuivant reporter la date de la vente forcée, cependant encore faut-il que le juge de l'exécution soit régulièrement saisi d'une telle demande, c'est-à-dire par conclusions écrites puisque la seule demande dispensée du ministère d'avocat en la matière est celle tendant à l'autorisation de vente amiable. En l'espèce, à défaut de conclusions régulières aux fins de report, étant observé que le dossier ne porte pas trace de l'existence d'un appel, et à défaut de réquisition de vente, la caducité du commandement sera constatée » ;

1°) ALORS QUE les demandes incidentes doivent être formées par dépôts de conclusions au greffe ; qu'en l'espèce, en retenant que le premier juge n'avait pas été saisi de conclusions, bien que l'avocat du CIC avait formalisé sa demande de report de l'adjudication par des écritures dont le greffe avait accusé réception avant l'audience, peu important qu'elles lui soient parvenues par la voie du RVPA, ce que la loi ne prohibe pas, la cour d'appel a violé l'article R. 322-19 du CPCE, ensemble l'article 815 du Code de procédure civile et l'article 6 §1 de la Convention ESDH ;

2°) ALORS QUE l'acceptation des conclusions par le greffe fait présumer la production des actes de signification ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le juge de l'exécution n'avait pas été valablement saisi d'une demande de report, motif pris de ce qu'aucune signification de celle-ci n'a été effectuée aux parties qui n'avaient pas constitué ; qu'en statuant ainsi, après avoir pourtant constaté que le greffe avait accusé réception de la demande, ce dont il résultait que la production des actes de signification était présumée, sans justifier cette affirmation, ni préciser les pièces sur lesquelles elle se fondait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 815 du Code de procédure civile et l'article 6 §1 de la Convention ESDH ;

3°) ALORS QUE les juges du fond doivent répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, le CIC démontrait que les débiteurs avaient constitué avocat en première instance, que leurs avocats avaient conclu sur la demande de report en s'en rapportant à justice et que, en tout état de cause, l'absence de justification de la justification au greffe de la notification des écritures n'entraînait leur nullité qu'en cas de grief, ce qui n'était pas le cas en l'espèce (cf concl., p. 8 et 9 ; pièces d'appel n° 6 et 10) ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces conclusions étayées de preuves, qui démontraient que l'exigence de signification des conclusions de report avait été satisfaite nonobstant l'erreur matérielle affectant le jugement, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE la cassation du chef de dispositif de l'arrêt ayant confirmé le jugement du 25 juin 2015 en ce qu'il avait constaté la caducité du commandement entraînera par voie de conséquence celle des chefs de dispositif par lesquels la cour d'appel a infirmé le jugement du 26 mars 2015 et déclaré caduque la procédure de saisie immobilière poursuivie par le CIC, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-25462
Date de la décision : 01/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Acte de procédure - Notification - Notification par la voie électronique - Domaine d'application - Détermination - Portée

SAISIE IMMOBILIERE - Adjudication - Report de l'audience d'adjudication - Demande - Forme - Communication électronique SAISIE IMMOBILIERE - Commandement - Caducité - Défaut - Cas - Créancier poursuivant ayant adressé sa demande de report de l'audience de vente forcée et ses pièces par la voie du RPVA

Il résulte de la combinaison des articles R. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution, 748-6 du code de procédure civile et 1 de l'arrêté du 7 avril 2009 relatif à la communication par voie électronique devant les tribunaux de grande instance, que les envois, remises et notifications des actes de procédure peuvent être effectués par voie électronique entre avocats ou entre un avocat et la juridiction dans les procédures devant le tribunal de grande instance. Encourt en conséquence la censure l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour déclarer caduc un commandement valant saisie immobilière, retient que le créancier poursuivant ayant adressé sa demande de report de l'audience de vente forcée et ses pièces par la voie du réseau privé virtuel des avocats (RPVA), alors que la convention sur la communication électronique signée entre le barreau et le tribunal de grande instance n'incluait pas dans son périmètre les saisies immobilières, de sorte que le message, reçu au greffe, n'a pas été transmis au juge de l'exécution


Références :

article R. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution 

article 748-6 du code de procédure civile 

article 1 de l'arrêté du 7 avril 2009 relatif à la communication par voie électronique devant les tribunaux de grande instance

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 06 septembre 2016

A rapprocher :2e Civ., 22 février 2012, pourvoi n° 11-11914, Bull. 2012, II, n° 38 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 01 mar. 2018, pourvoi n°16-25462, Bull. civ.Bull. 2018, II, n° 38
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, II, n° 38

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.25462
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