LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° K 15-86.434 FP-P+B+R+I
N° 1014
VD1
29 MARS 2017
CASSATION
M. GUÉRIN président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :
CASSATION et désignation de juridiction sur les pourvois formés par M. [P] [F] [W], Mme [L] [W], Mme [H] [H], M. [S] [P], M. [Q] [D], contre l'arrêt de la cour d'appel de Bastia, chambre correctionnelle, en date du 30 septembre 2015 qui a condamné :
- le premier, pour abus de biens sociaux en récidive, banqueroute, abus de confiance, faux et usage en récidive, à deux ans d'emprisonnement, 100 000 euros d'amende et à l'interdiction définitive de gérer,
- la deuxième, pour recels et complicité d'abus de biens sociaux, à six mois d'emprisonnement avec sursis et 20 000 euros d'amende,
-la troisième, pour recels et abus de biens sociaux, à six mois d'emprisonnement avec sursis, 20 000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction de gérer,
- et les quatrième et cinquième, pour abus de biens sociaux et recel, à 10 000 euros d'amende ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 23 mars 2017 où étaient présents : M. Guérin, président, Mme de la Lance, conseiller rapporteur, MM. Pers, Straehli, Castel, Soulard, Mme Dreifuss-Netter, MM.Buisson, Fossier, Raybaud, Moreau, Steinmann, Mme Chaubon, M. Germain, Mmes Drai, Planchon, Durin-Karsenty, Schneider, Ingall-Montagnier, MM. Bellenger, Larmanjat, Ricard, Parlos, Mme Zerbib, MM. Stephan, Bonnal, d'Huy, Lavielle, Wyon, Guéry, Mme Ménotti, conseillers de la chambre, Mme Harel-Dutirou, M. Laurent, Mme Chauchis, MM. Barbier, Talabardon, Beghin, Mmes Guého, Pichon, M. Ascensi, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Wallon ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller de la LANCE, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général WALLON, les avocats des parties ayant eu la parole en dernier ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I - Sur les pourvois de MM. [P] et [D] :
Attendu qu'aucun mémoire n'est produit ;
II - Sur les autres pourvois :
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 509, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que la cour d'appel a entendu la partie civile, non appelante du jugement ;
"alors que la victime, partie civile, non appelante d'un jugement de condamnation, n'est plus partie à l'instance et ne peut pas être entendue en cette qualité, lorsque les dispositions civiles du jugement sont définitives ; qu'en donnant la parole à l'avocat de la partie civile non appelante d'un jugement frappé d'appel par le seul ministère public, et en l'entendant en sa plaidoirie, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des dispositions de l'article 509 du code de procédure pénale" ;
Vu l'article 509 du code de procédure pénale, ensemble l'article 513, alinéa 3, du même code ;
Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, l'affaire est dévolue à la cour d'appel dans la limite fixée par l'acte d'appel et la qualité de l'appelant ; qu'il se déduit du second que seuls le ministère public et les parties en cause ont la parole devant ladite cour ;
Attendu que, par jugement du 18 juin 2013, les demandeurs ont été condamnés à diverses peines pour une partie des faits qui leur étaient reprochés ainsi qu'à payer des dommages-intérêts à deux parties civiles constituées ; que, devant la cour d'appel, saisie du seul appel du procureur de la République, l'avocat de l'une des parties civiles a été entendu en sa plaidoirie ;
Mais attendu qu'en procédant ainsi, alors que lorsque les dispositions civiles du jugement sont devenues définitives, la partie civile, constituée en première instance, qui n'est plus partie en appel, ne peut comparaître à l'audience ou s'y faire représenter et ne peut être entendue qu'en qualité de témoin, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et des principes ci-dessus énoncés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bastia, en date du 30 septembre 2015 ;
DIT qu'en application de l'article 612-1 du code de procédure pénale, et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, la cassation aura effet à l'égard de MM. [S] [P] et [Q] [D] et de la société Corsea Patrimoine, condamnés par le même arrêt ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bastia et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-neuf mars deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.