AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de la société civile professionnelle LAUGIER et CASTON, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Michel,
contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 3ème chambre, en date du 12 décembre 2003, qui, pour escroqueries, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d'amende ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 2, 509, 513, 515 et 460, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, violation des droits de la défense, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a entendu la partie civile non appelante, assistée de son conseil, et a autorisé celle-ci à poser des questions au prévenu ;
"aux motifs que si la victime, partie civile, non appelante d'un jugement de relaxe, n'est pas recevable à former des demandes devant la cour d'appel, elle est, cependant, en droit, sur l'appel du ministère public, au vu de l'article préliminaire et de l'article 2 du Code de procédure pénale, d'être présente aux débats, éventuellement assistée d'un conseil et de faire poser, le cas échéant, des questions au prévenu ;
"alors que la partie civile, non appelante d'un jugement de relaxe, n'est plus partie à l'instance d'appel, de sorte que n'ayant pas la qualité de partie en cause, ne peut être entendue, aussi bien elle-même que son conseil, dans l'ordre prévu par l'article 460 du Code de procédure pénale ; qu'aussi bien, l'arrêt attaqué, en retenant que Béatriz Y..., partie civile non appelante du jugement de relaxe, était en droit d'être présente aux débats, éventuellement assistée d'un conseil, de faire poser, le cas échéant, des questions au prévenu, et en entendant le conseil de ladite partie civile en sa plaidoirie, a violé ensemble les textes visés au moyen" ;
Vu l'article 509 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, l'affaire est dévolue à la cour d'appel dans la limite fixée par l'acte d'appel et la qualité de l'appelant ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Jean-Michel X..., renvoyé devant le tribunal correctionnel pour escroqueries, a été relaxé et que Béatriz Y..., partie civile, a été déboutée de ses demandes ; que seul le procureur général a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que les juges du second degré, pour déclarer recevable devant eux l'intervention, contestée par la défense, de Béatriz Y..., énoncent que "si la victime partie civile, non appelante d'un jugement de relaxe, n'est pas recevable à former des demandes devant la cour, elle est cependant en droit, sur l'appel du ministère public, au vu de l'article préliminaire et de l'article 2 du Code de procédure pénale, d'être présente aux débats, éventuellement assistée d'un conseil et de faire poser, le cas échéant, des questions au prévenu" ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que la victime partie civile, non appelante d'un jugement de relaxe, n'est plus partie à l'instance d'appel et ne peut être entendue en cette qualité, la cour d'appel a violé le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé ;
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Rennes, en date du 12 décembre 2003, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Caen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Rennes, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Dulin conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;