LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :
Vu l'article 931 du code civil ;
Attendu que, selon ce texte, les donations entre vifs doivent être passées devant notaire, à peine de nullité ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. X...et de Mme Y...; que des difficultés se sont élevées lors des opérations de liquidation et de partage de leurs intérêts patrimoniaux ;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu de prononcer la nullité de l'acte sous seing privé conclu entre M. X... et Mme Y..., l'arrêt retient que l'engagement aux termes duquel celle-ci a donné un bien immobilier à sa fille, à charge pour le père de rembourser le solde de l'emprunt s'élevant à 143 000 euros, ne peut être qualifié d'acte à titre onéreux ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que l'acte n'avait pas été passé en la forme authentique, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral de Mme Y..., l'arrêt rendu le 14 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré valable l'acte de donation conclu sous seing privé entre un père (M. X..., l'exposant) et une mère (Mme Y...) au profit de leur enfant majeur ;
AUX MOTIFS QUE, à la lecture des termes de l'acte signé par les parties, celui-ci prévoyait : d'un côté, l'engagement de Mme Y... de donner à sa fille un studio dont elle était propriétaire à charge pour cette dernière de supporter le coût du capital restant dû, à la date de l'engagement, au titre de l'emprunt contracté pour financer l'achat dudit bien et les travaux qui y avaient été entrepris ; d'un autre, l'engagement de M. X... de prendre en charge le remboursement incombant à sa fille ; que, certes l'intention libérale de Mme Y... à l'égard de la fille du couple était une condition de l'engagement de M. X... ; que l'intention de Mme Y... de faire supporter à la bénéficiaire de la donation le remboursement du capital restant dû sur l'emprunt attaché au studio objet de cette donation ne pouvait entraîner la requalification de cet engagement de Mme Y... à l'égard de sa fille en contrat à titre onéreux ; qu'il était établi que la charge stipulée par la donatrice avait une valeur équivalente à celle du bien transmis, étant souligné qu'une donation constituait une libéralité pour le tout lorsque la charge stipulée par le donateur avait une valeur inférieure à la valeur du bien transmis ; que si M. X... affirmait que le bien objet de la donation n'avait qu'une valeur de 140 000 €, il n'en justifiait pas alors même que Mme Y... produisait un document daté du 30 juin 2011 – dont M. X... ne contestait pas qu'il avait été établi par Me Z... qui était le notaire des époux – dans lequel ce dernier avait détaillé selon quelles modalités ce logement pouvait être donné à la fille des parties en établissant ses calculs sur la base d'une valeur du studio de 200 000 € ; qu'elle versait également aux débats une attestation d'une agence immobilière, datée du 11 avril 2014, qui évaluait la valeur de ce bien, après l'avoir visité, à une somme comprise entre 170 000 et 176 000 € ; que l'acte litigieux mentionnait que le capital restant dû au titre du prêt était de 143 000 € au 31 décembre 2011 et c'était cette somme en capital que Mme Y... avait entendu faire supporter à sa fille ; que son intention libérale à l'égard de cette dernière – à laquelle elle avait laissé en outre la libre disposition de ce logement à compter de l'année 2009 – était donc suffisamment caractérisée sans que M. X... ne pût valablement soutenir que Mme Y..., au terme de son engagement, n'aurait donné que des dettes à leur fille ; qu'il ne pouvait être tiré de conséquence de l'absence de la fille des parties à l'acte sous seing privé dès lors que l'acceptation d'une donation dans les formes prescrites par les articles 932 et suivants du code civil n'était exigée que pour la donation passée en la forme authentique ; qu'en outre, si effectivement l'acte litigieux contraignait M. X... à supporter le remboursement d'un emprunt auquel il était tiers, cet élément n'avait pas d'incidence sur la réalité de l'intention libérale de Mme Y... à l'égard de sa fille ; que, par conséquent, contrairement à la décision du premier juge, l'engagement de Mme Y... à l'égard de sa fille n'avait pas à être requalifié en contrat à titre onéreux ; que si M. X... contestait avoir participé aux discussions chez Me Z..., notaire, qui auraient eu lieu selon Mme Y... le 30 juin 2011, il n'en demeurait pas moins qu'il avait bien signé cet acte en l'étude dudit officier public ; que l'acte litigieux, rédigé par le notaire, précisait expressément et sans ambiguïté que M. X... assurerait la charge du remboursement de l'emprunt souscrit par son ex-épouse et auquel il était étranger ; que les termes clairs de cet engagement, les circonstances de sa signature, la qualité de M. X... qui était un professionnel de l'immobilier dont le jugement de divorce avait précisé qu'il était maître d'oeuvre et marchand de biens, et l'absence de démonstration que son épouse n'aurait eu aucune intention libérale à l'égard de leur fille ne permettaient pas de considérer qu'il avait commis une erreur – excusable – sur la portée de son engagement ni, comme le premier juge l'avait indiqué dans son jugement, qu'il avait été " piégé " par son ex-épouse, les courriers pris en compte à cet égard par le tribunal et qui correspondaient à des échanges écrits, intervenus en 2012 entre Mme Y... et Me Z..., démontrant simplement le souci de cette dernière d'obtenir l'exécution par M. X... de ses engagements ; que, par conséquent, le vice du consentement allégué par M. X... n'était pas établi et l'acte litigieux du 30 décembre 2011 ne saurait être annulé ;
ALORS QUE, à peine de nullité d'ordre public, l'acte portant donation entre vifs doit être passé en la forme authentique ; qu'en déclarant valable l'acte sous seing privé conclu entre un père et une mère portant donation d'un bien immobilier et d'une somme d'argent au profit de leur enfant majeur, la cour d'appel a violé l'article 931 du code civil ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, la donation doit être acceptée par acte authentique ; qu'en déclarant valable la donation réalisée par des père et mère au profit de leur enfant majeur et en lui faisant produire ses effets quand le donataire n'avait pas accepté la donation par acte authentique, la cour d'appel a violé ensemble les articles 932 et 933 du code civil.