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08/02/2017 | FRANCE | N°15-15005

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 février 2017, 15-15005


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième à sixième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 février 2015), que l'Autorité de la concurrence (l'ADLC) a été saisie par la Fédération nationale des associations de gestion agréées d'une plainte relative à des pratiques mises en oeuvre par le Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables (le CSOEC) dans le secteur de la télétransmission des données comptables et fiscales des entreprises et professions libérales a

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième à sixième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 février 2015), que l'Autorité de la concurrence (l'ADLC) a été saisie par la Fédération nationale des associations de gestion agréées d'une plainte relative à des pratiques mises en oeuvre par le Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables (le CSOEC) dans le secteur de la télétransmission des données comptables et fiscales des entreprises et professions libérales aux autorités fiscales, au moyen de son portail télédéclaratif « jedeclare.com », dont elle avait confié la commercialisation à l'association l'Expert comptable media association (l'ECMA) ; que par une décision n° 13-D-06 du 28 février 2013, l'ADLC a dit que le CSOEC et l'ECMA ont enfreint les dispositions des articles 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et L. 420-2 du code de commerce et leur a infligé des sanctions pécuniaires tenant compte de la non-contestation des griefs et des engagements proposés, qu'elle a rendus obligatoires ; que l'ECMA a formé un recours contre cette décision ;

Attendu que l'ECMA fait grief à l'arrêt du rejet de son recours alors, selon le moyen :

1°/ que le juge est tenu d'examiner tous les éléments de preuve présentés par les parties au soutien de leurs prétentions si bien qu'en se bornant à retenir, pour nier la faculté pour l'ECMA de se prévaloir, dans la détermination du montant de la sanction pécuniaire prononcée à son encontre, du facteur de minoration tenant à l'exercice d'une activité « mono-produit », que l'Autorité de la concurrence avait exactement constaté, au vu des données fournies, que le marché de la télétransmission de données fiscales et comptables sous format EDI représentait environ 63 % du chiffre d'affaires total de l'ECMA, sans examiner l'attestation comptable versée en appel par cette dernière, de laquelle il ressortait clairement que ce pourcentage était de 88,9 % et 96,8 % respectivement pour les années 2011 et 2012, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que seules les entreprises sont soumises à la prohibition des abus de position dominante et partant, au régime de sanction propre aux entreprises qui y est attaché si bien qu'en sanctionnant l'ECMA pour abus de position dominante par application du plafond prévu pour une contrevenante « non entreprise » après avoir auparavant considéré que l'ECMA relevait du champ d'application de la sanction en matière d'abus de position dominante applicable aux entreprises, la cour d'appel a violé les articles L. 464-2, I et L. 420-2 du code de commerce ;

3°/ qu'est une entreprise au sens du droit de la concurrence toute entité exerçant une activité économique consistant à proposer des biens ou des services sur un marché donné, indépendamment de son statut juridique de sorte qu'en jugeant que l'ECMA ne pouvait pas être considérée comme une entreprise au regard de l'article L. 464-2, I du code de commerce au motif que l'ECMA, association régie par la loi du 1er juillet 1901, a pour objet d'assurer l'organisation et la gestion de diverses actions du Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables qui en assume la gouvernance, après avoir pourtant constaté que l'ECMA exerce des activités de production, de distribution et de services, ce dont il résulte qu'elle relève bien de la qualification d'entreprise, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 464-2, I du code de commerce ;

4°/ que les entreprises visées par l'article L. 464-2, I, alinéa 4 du code de commerce recouvrent toutes sortes de structures exerçant une activité économique consistant à proposer des biens ou des services sur un marché donné, indépendamment de leur statut juridique et donc ne visent pas exclusivement les sociétés commerciales de sorte qu'en rejetant comme étant mal fondée la critique reprochant à l'Autorité de la concurrence d'avoir procédé à une confusion, pour l'application de l'article L. 464-2, I, alinéa 4 du code de commerce, entre la notion d'entreprise et celle de société commerciale, quand il ressortait de la décision de l'Autorité de la concurrence que celle-ci avait écarté l'application du régime de sanction propre aux entreprises aussitôt après avoir constaté que l'ECMA était une association régie par la loi du 1er juillet 1901, la cour d'appel a violé l'article L. 464-2, I du code de commerce ;

5°/ que le plafond de sanction forfaitaire de 3 millions d'euros prévu par l'article L. 464-2, I, alinéa 4 du code de commerce, applicable aux structures autres que les entreprises, est justifié par l'absence de chiffre d'affaires réalisé par ladite structure et par là-même, ne s'applique qu'à cette hypothèse si bien qu'en écartant le moyen par lequel l'ECMA faisait valoir qu'en tout état de cause, dès lors qu'elle réalise un chiffre d'affaires, elle ne pouvait être soumise au plafond forfaitaire de 3 millions d'euros, au motif erroné qu'il n'y a pas lieu de procéder à une distinction que le texte ne fait pas, la cour d'appel, qui a constaté que l'ECMA réalisait un chiffre d'affaires, tout en refusant de la soumettre au régime de sanction pécuniaire dont le montant est déterminé en fonction du chiffre d'affaires réalisé par la structure, a encore violé l'article L. 464-2, I du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel, qui a examiné l'attestation comptable invoquée à la première branche, a retenu que le marché de la télétransmission de données fiscales et comptables sous format EDI ne représentait que 63 % du chiffre d'affaires de l'ECMA ;

Attendu, en second lieu, que si toute entité exerçant une activité économique peut, quelle que soit sa forme juridique, faire l'objet d'une sanction fondée sur les articles 102 TFUE et L. 420-2 du code de commerce, il n'en demeure pas moins que l'article L. 464-2, I, alinéa 4, du code de commerce institue un plafond de sanctions différent selon que l'entité contrevenante est ou non une entreprise ; qu' en se référant à la notion d'entreprise, le législateur a entendu distinguer les personnes condamnées en fonction de la nature de leurs facultés contributives respectives ; qu'il a ainsi fixé un montant maximum de la sanction pécuniaire, proportionné au montant du chiffre d'affaires pour celles qui sont constituées selon l'un des statuts ou formes juridiques propres à la poursuite d'un but lucratif et fixé en valeur absolue pour les autres contrevenants ; qu'après avoir relevé que l'ECMA était une entité exerçant une activité économique, comme telle soumise aux dispositions de l'article L. 420-2 du code de commerce qui prohibent l'abus de position dominante, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que cette association, régie par la loi du 1er juillet 1901, n'était pas pour autant une entreprise au sens de l'article L. 464-2, I, alinéa 4, du code de commerce et qu'elle en a déduit qu'en déterminant la sanction au regard du maximum légal de trois millions d'euros, l'ADLC avait fait l'exacte application de ce texte, qui ne distingue pas selon que le contrevenant, qui n'est pas une entreprise, réalise ou non un chiffre d'affaires ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa deuxième branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association l'Expert-comptable média association aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la Fédération nationale des associations de gestion agréées et au président de l'Autorité de la concurrence la somme de 3 000 euros chacun ;

Vu l'article R. 470-2 du code de commerce, dit que sur les diligences du directeur de greffe de la Cour de cassation, le présent arrêt sera notifié, par lettre recommandée avec accusé de réception, à la Commission européenne, à l'Autorité de la concurrence et au ministre chargé de l'économie ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour l'association Expert-comptable media association.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours de l'ECMA à l'encontre de la décision n° 13-D-06 du 28 février 2013 de l'Autorité de la concurrence et débouté l'ECMA de toutes ses demandes tendant à contester la sanction infligée à son encontre, d'un montant de 1.170.000 euros,

AUX MOTIFS QUE

« En ce qui concerne la fixation à 1.617.024 euros du montant de base de la sanction pécuniaire infligée à l'ECMA.

Considérant qu'il se déduit de développements qui précèdent que, eu égard à la gravité des faits et à l'importance du dommage causé à l'économie, le calcul du montant de base qui a été opéré par l'Autorité, en proportion des ventes en relation avec les infractions, d'une part, et en tenant compte de leur durée non contestée par la requérante, d'autre part, n'encourt aucune critique.

En ce qui concerne les circonstances atténuantes.

Considérant que la requérante reproche à l'Autorité d'avoir écarté à tort le facteur de minoration de la sanction tenant, selon elle, au fait qu'elle est une "entreprise mono-produit", en faisant valoir que son activité s'exerce principalement dans un secteur en relation avec l'infraction, et qu'il convient de retenir, en 2011 et en 2012, un pourcentage de son chiffre d'affaires plus élevé que celui de 63 % qui est mentionné par la Décision déférée ;

Mais considérant que le moyen invoqué par la requérante n'est pas de nature à remettre en cause les appréciations de l'Autorité (paragraphe 275 de la Décision) que la cour adopte, dont ressort l'absence d'éléments propres à la situation ou au comportement individuels de l'ECMA qui seraient de nature à augmenter ou à diminuer sa sanction, sous réserve de la mise en oeuvre du III de l'article L. 464-2 du code de commerce ;

Considérant, en particulier, que contrairement à ce qui est soutenu, l'Autorité a exactement constaté qu'au regard des données fournies par les mis en cause dans le cas d'espèce, le marché de la télétransmission de données fiscales et comptables sous format EDI à l'administration fiscale représente bien environ 63 % du chiffre d'affaires total de l'ECMA ;

Que le moyen est dépourvu de portée »,

ALORS QUE le juge est tenu d'examiner tous les éléments de preuve présentés par les parties au soutien de leurs prétentions si bien qu'en se bornant à retenir, pour nier la faculté pour l'ECMA de se prévaloir, dans la détermination du montant de la sanction pécuniaire prononcée à son encontre, du facteur de minoration tenant à l'exercice d'une activité "mono-produit", que l'Autorité de la concurrence avait exactement constaté, au vu des données fournies, que le marché de la télétransmission de données fiscales et comptables sous format EDI représentait environ 63 % du chiffre d'affaires total de l'ECMA, sans examiner l'attestation comptable versée en appel par l'exposante, de laquelle il ressortait clairement que ce pourcentage était de 88,9 % et 96,8 % respectivement pour les années 2011 et 2012, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,

ET AUX MOTIFS QUE

« En ce qui concerne la vérification du maximum applicable à l'ECMA.

Considérant que, devant l'Autorité, le CSOEC et l'ECMA avaient fait valoir qu'ils constituaient une entité économique unique, soit une entreprise au regard du droit de la concurrence, situation dont il convenait de tirer toutes conséquences dans le cadre de la détermination des sanctions en leur appliquant, d'une part, une sanction unique et, d'autre part, le maximum légal applicable aux entreprises ;

Considérant que l'Autorité, qui a imposé à chacun de ces deux organismes une sanction pécuniaire unique au titre de ces deux infractions, a décidé (paragraphe 277 de la Décision), en application des dispositions du I de l'article L. 464-2 du code de commerce, que le maximum de la sanction applicable à l'ECMA est de 3.000.000 d'euros ;

Considérant qu'au soutien de son recours, l'ECMA fait précisément valoir que l'Autorité a commis une erreur de droit en considérant que le plafond applicable à l'ECMA est celui des contrevenants qui ne sont pas des entreprises ;

Que la requérante prétend que le plafond applicable aux contrevenants qui ne sont pas des entreprises ne peut être appliqué aux entités poursuivies pour abus de position dominante, dès lors que si l'article L. 420-2 du code de commerce prohibe "l'exploitation abusive, par une entreprise ou un groupe d'entreprises, d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci", il en va différemment d'une entité poursuivie pour avoir participé à une entente, sur le fondement de l'article L. 420-1 qui prohibe "les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions", qu'elles soient mises en oeuvre par une entreprise au sens du droit de la concurrence ou par une autre entité ;

Qu'ainsi, alors qu'aux termes du troisième alinéa du I de l'article L. 464-2 du code de commerce, le plafond de trois millions d'euros s'applique "lorsque le contrevenant n'est pas une entreprise" et que l'article L. 420-2 du même code prohibant les abus de position dominante n'a pas vocation à s'appliquer à d'autres entités que des entreprises, seul le plafond légal des sanctions concernant les entreprises peut être appliqué à une entité poursuivie pour abus de position dominante ;

Que, dans ces conditions, selon la requérante, l'Autorité ne pouvait, sans se contredire, la condamner pour abus de position dominante tout en considérant qu'elle n'était pas une entreprise ; qu'elle précise, par surcroît, que la qualification d'entreprise au sens de l'article L. 464-2 du code de commerce ne dépend pas de la structure juridique de l'entité poursuivie, mais de la nature de son activité, et qu'exerçant une activité commerciale et réalisant un chiffre d'affaires, elle est indiscutablement une entreprise au sens du droit de la concurrence, qualification d'ailleurs retenue par l'Autorité elle-même (paragraphe 52 de la Décision), alors même qu'elle n'a pas la forme d'une société commerciale ;

Que l'ECMA reproche précisément à l'Autorité d'avoir commis une erreur de droit en lui appliquant le plafond de 1,5 million d'euros en procédant de la sorte à une assimilation entre la notion d'entreprise et celle de société commerciale, alors que l'article L. 464-2 du code de commerce "ne vise pas les contrevenants qui ne seraient pas des sociétés commerciales, mais bien ceux qui ne sont pas des entreprises" et que, pour déterminer le plafond légal applicable, l'Autorité doit nécessairement rechercher si l'entité poursuivie exerce une activité économique indépendamment de sa structure juridique ;

Que la requérante affirme ainsi qu'une société qui ne se livre à aucune activité de production, d'achat ou de vente, ne réalisant pas de chiffre d'affaires, ne peut, dans ces conditions, se prévaloir du plafond fondé sur le chiffre d'affaires et ajoute que l'application, à son encontre, du plafond de trois millions d'euros a été prévue à titre subsidiaire, en l'absence de chiffre d'affaires, en ajoutant que, traditionnellement appliqué aux ordres professionnels ou aux syndicats professionnels, ce plafond peut également être appliqué à une association qui n'exerce pas d'activité économique et ne dégage pas de chiffre d'affaires ;

Qu'à tout le moins, selon l'ECMA, ce plafond "subsidiaire" ne doit pas être appliqué de manière extensive ou aléatoire et que, dès lors qu'une entité exerce une activité économique et dégage un chiffre d'affaires, l'Autorité doit appliquer le plafond légal applicable aux entreprises, quelle que soit la forme juridique de l'entité en cause, étant précisé que toute autre solution porterait nécessairement atteinte au principe d'égalité devant la loi, puisque des associations ou des sociétés commerciales, qui peuvent pourtant exercer des activités identiques, seraient sanctionnées de façon différente ;

Que l'ECMA prétend, enfin, que l'erreur commise par l'Autorité l'a conduite à prononcer une sanction disproportionnée par rapport à ses facultés contributives, dès lors que le plafond fondé sur le chiffre d'affaires permet de s'assurer que l'entreprise condamnée aura vraisemblablement les moyens de payer l'amende prononcée ;

Que, précisément, le plafond d'1,5 million d'euros, qui représente 17 % du chiffre d'affaires de l'ECMA en 2011, ne respecte pas le principe de proportionnalité, dès lors que la condamnation de 1.170.000 euros qui lui a été infligée représente plus de six années de bénéfices sur la base de l'exercice 2011 et plus de 8 années de bénéfice moyen réalisé entre 2009 et 2011 ;

Que c'est dans ces conditions que la requérante, affirmant que l'Autorité ne pouvait, sans se contredire, la condamner pour abus de position dominante tout en considérant qu'elle n'est pas une entreprise, sollicite, en conséquence, l'application du plafond légal de la sanction relatif aux entreprises, soit 5 % de son chiffre d'affaires ;

Mais considérant que, tant en droit de l'Union qu'en droit interne, le champ d'application des règles du droit de la concurrence recouvre toute pratique mise en oeuvre par une entité exerçant une activité économique, quelle que soit sa forme juridique ; qu'en effet :

- d'une part, alors que l'article 101 et l'article 102 du TFUE prohibent les pratiques d'entente ou d'abus de position dominante commises par des entreprises, la notion d'entreprise au sens du droit communautaire de la concurrence est définie par une jurisprudence communautaire constante comme "toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement" (en ce sens : CJCE, 23 avril 1991, Höfner, aff. C-41/90, point 21) ;

- d'autre part, l'article L. 410-1 du code de commerce prévoit que les dispositions relatives aux pratiques anticoncurrentielles s'appliquent à "toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnes publiques" ;

Considérant que si toute entité exerçant une activité économique peut ainsi, quelle que soit sa forme juridique, faire l'objet d'une sanction fondée sur l'article 102 du TFUE et sur l'article L. 420-2 du code de commerce, il n'en demeure pas moins que, dans le cadre distinct de la méthode de détermination des sanctions relevant, en vertu du règlement n° 1/2003 relatif à la mise en oeuvre des règles de concurrence prévues aux articles 101 et 102 du TFUE, de l'autonomie procédurale reconnue aux Etats membres, l'article L. 464-2 du code de commerce institue un plafond de sanctions différent selon que l'entité qui a contrevenu aux règles du droit de la concurrence est ou non une entreprise ;

Considérant qu'au cas d'espèce, il n'est ni contesté, ni contestable, non seulement que les dispositions de l'article L. 420-2 du code de commerce prohibant l'abus de position dominante s'appliquent aux activités de l'ECMA, qui relèvent de la catégorie "des activités de production, de distribution et de services" visées par l'article L. 410-1 du code de commerce, mais encore, que l'ECMA est une entité exerçant une activité économique ;

Considérant, cependant, que l'ECMA, association régie par la loi du 1er juillet 1901, dont l'objet est d'assurer l'organisation et la gestion de diverses actions du Conseil Supérieur de l'Ordre des Experts-comptables qui en assume la gouvernance, n'est pas pour autant une "entreprise" au sens du quatrième alinéa du I de l'article L. 464-2 du code de commerce et aux fins de la détermination des sanctions au regard du maximum légal de trois millions d'euros prévu lorsque le contrevenant n'est pas une entreprise et dont, au cas d'espèce, l'Autorité a fait une exacte application »,

ALORS, D'UNE PART, QUE la déclaration d'inconstitutionnalité d'une disposition législative, en ce qu'elle fait perdre à l'arrêt qui en fait application son fondement juridique, entraîne de plein droit l'anéantissement de celui-ci de sorte que l'inconstitutionnalité de l'article L.464-2, I, alinéa 4 du code de commerce pour méconnaissance du principe d'égalité et de sécurité juridique, prononcée en application de l'article 62 de la Constitution, entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'arrêt attaqué pour perte de fondement juridique,

ALORS, D'AUTRE PART, QUE seules les entreprises sont soumises à la prohibition des abus de position dominante et partant, au régime de sanction propre aux entreprises qui y est attaché si bien qu'en sanctionnant l'ECMA pour abus de position dominante par application du plafond prévu pour une contrevenante « non entreprise » après avoir auparavant considéré que l'ECMA relevait du champ d'application de la sanction en matière d'abus de position dominante applicable aux entreprises, la cour d'appel a violé les articles L. 464-2, I et L. 420-2 du code de commerce,

ALORS, ENCORE, QU'est une entreprise au sens du droit de la concurrence toute entité exerçant une activité économique consistant à proposer des biens ou des services sur un marché donné, indépendamment de son statut juridique de sorte qu'en jugeant que l'ECMA ne pouvait pas être considérée comme une entreprise au regard de l'article L. 464-2, I du code de commerce au motif que l'ECMA, association régie par la loi du 1er juillet 1901, a pour objet d'assurer l'organisation et la gestion de diverses actions du Conseil Supérieur de l'Ordre des Experts-comptables qui en assume la gouvernance, après avoir pourtant constaté que l'ECMA exerce des activités de production, de distribution et de services, ce dont il résulte qu'elle relève bien de la qualification d'entreprise, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 464-2, I du code de commerce,

ET ENCORE AUX MOTIFS QUE

« Considérant que ce n'est qu'au surplus que la cour relève qu'au regard des dispositions claires et précises du I de l'article L. 464-2 du code de commerce, l'ECMA n'est pas non plus fondée à reprocher à l'Autorité d'avoir procédé à une confusion entre la notion d'entreprise et la notion de société commerciale, ni encore de ne pas avoir tenu compte, à titre "subsidiaire", d'une distinction, qui n'est pas instituée par ce texte, selon que le contrevenant réalise ou non un chiffre d'affaires »,

ALORS ENCORE QUE les entreprises visées par l'article L. 464-2, I, alinéa 4 du code de commerce recouvrent toutes sortes de structures exerçant une activité économique consistant à proposer des biens ou des services sur un marché donné, indépendamment de leur statut juridique et donc ne visent pas exclusivement les sociétés commerciales de sorte qu'en rejetant comme étant mal fondée la critique reprochant à l'Autorité de la concurrence d'avoir procédé à une confusion, pour l'application de l'article L. 464-2, I, alinéa 4 du code de commerce, entre la notion d'entreprise et celle de société commerciale, quand il ressortait de la décision de l'Autorité de la concurrence que celle-ci avait écarté l'application du régime de sanction propre aux entreprises aussitôt après avoir constaté que l'ECMA était une association régie par la loi du 1er juillet 1901, la cour d'appel a violé l'article L. 464-2, I du code de commerce,

ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le plafond de sanction forfaitaire de 3 millions d'euros prévu par l'article L. 464-2, I, alinéa 4 du code de commerce, applicable aux structures autres que les entreprises, est justifié par l'absence de chiffre d'affaires réalisé par ladite structure et par là-même, ne s'applique qu'à cette hypothèse si bien qu'en écartant le moyen par lequel l'ECMA faisait valoir qu'en tout état de cause, dès lors qu'elle réalise un chiffre d'affaires, elle ne pouvait être soumise au plafond forfaitaire de 3 millions d'euros, au motif erroné qu'il n'y a pas lieu de procéder à une distinction que le texte ne fait pas, la cour d'appel, qui a constaté que l'ECMA réalisait un chiffre d'affaires, tout en refusant de la soumettre au régime de sanction pécuniaire dont le montant est déterminé en fonction du chiffre d'affaires réalisé par la structure, a encore violé l'article L. 464-2, I du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-15005
Date de la décision : 08/02/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONCURRENCE - Pratique anticoncurrentielle - Sanctions - Sanction pécuniaire - Montant maximum - Détermination - Association - Chiffre d'affaires - Absence d'influence

Si toute entité exerçant une activité économique peut, quelle que soit sa forme juridique, faire l'objet d'une sanction fondée sur les articles 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et L. 420-2 du code de commerce, l'article L. 464-2, I, alinéa 4, du code de commerce institue un plafond de sanctions différent selon que l'entité contrevenante est ou non une entreprise, le législateur ayant ainsi fixé un montant maximum de la sanction pécuniaire, proportionné au montant du chiffre d'affaires pour celles qui sont constituées selon l'un des statuts ou formes juridiques propres à la poursuite d'un but lucratif et fixé en valeur absolue pour les autres contrevenants. Fait l'exacte application de l'article L. 464-2 précité, la cour d'appel qui définit la sanction applicable à une association, régie par la loi du 1er juillet 1901, par référence au plafond encouru pour les contrevenants qui ne sont pas des entreprises, au sens du quatrième alinéa de ce texte, peu important que cette association réalise un chiffre d'affaires


Références :

articles L. 420-2 et L. 464-2, I, alinéa 4, du code de commerce

article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 26 février 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 fév. 2017, pourvoi n°15-15005, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat général : M. Debacq
Rapporteur ?: Mme Tréard
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.15005
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