LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et l'article 1er de la loi du 1er juillet 1901 ;
Attendu que, dans le silence des statuts d'une association, seules les modifications statutaires ayant pour effet d'augmenter les engagements des associés doivent être adoptées à l'unanimité ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par délibération du 25 mai 2012, l'assemblée générale de l'Association des chasseurs et propriétaires de Pierrefiche du Larzac (l'association) a décidé, à la majorité des membres présents, de modifier les statuts relatifs à l'admission des sociétaires, celle-ci devenant renouvelable chaque année ; que MM. Christian et Alain X..., dont la demande d'admission pour la saison de chasse 2013-2014 avait été rejetée le 16 juillet 2012, ont assigné l'association en nullité de la délibération et des décisions de refus d'admission ainsi qu'en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que, pour accueillir ces demandes, l'arrêt retient que la modification des statuts, qui a pour effet de permettre l'exclusion d'un adhérent sans motif disciplinaire et sans possibilité d'être entendu, aurait dû, en vertu du principe d'intangibilité des conventions et à défaut de disposition statutaire ou légale, être décidée à l'unanimité des membres participants ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la modification décidée par l'assemblée générale n'avait pas pour effet d'augmenter les engagements des associés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 novembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne MM. Christian et Alain X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à l'Association des chasseurs et propriétaires de Pierrefiche du Larzac la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour l'Association des chasseurs et propriétaires de Pierrefiche du Larzac
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir prononcé l'annulation de la délibération de l'assemblée générale de l'Association des Chasseurs et Propriétaires de Pierrefiche du Larzac en date du 25 mai 2012 ayant modifié les statuts de l'association et, en conséquence, d'avoir prononcé l'annulation des décisions du conseil d'administration de l'Association des Chasseurs et Propriétaires de Pierrefiche du Larzac de non admission pour la saison 2013-2014 et de refus de carte annuelle notifiées à Messieurs Alain et Christian X... par courrier daté du 16 juin 2013, et condamné l'Association des Chasseurs et Propriétaires de Pierrefiche du Larzac à leur payer la somme totale de 2. 300 euros chacun en réparation du préjudice subi du fait de la privation du droit de chasser au titre des saisons 2011, 2013, 2013/ 2014 et 2014/ 2015,
AUX MOTIFS PROPRES QUE conformément aux dispositions de l'article 1134 du code civil, le contrat d'association tient lieu de loi aux parties (…). En vertu du principe d'intangibilité des conventions et à défaut de disposition statutaire ou légale, les décisions qui modifient une ou plusieurs clauses des statuts d'une association et celles qui augmentent l'engagement des sociétaires, nécessitent un vote pris à l'unanimité des membres participants. Il s'avère que l'assemblée générale du 25 mai 2012 a procédé à une véritable refonte des statuts adoptés le 30 août 2004 puisque de nombreuses clauses ont été modifiées, remplacées, voire même supprimées. Ainsi, les statuts d'origine comportaient 35 articles alors que les statuts adoptés le 25 mai 2012 contiennent 19 articles. L'article 2 des statuts d'origine stipulait que « l'association comprendra les chasseurs et propriétaires de Pierrefiche du Larzac et ses environs immédiats ». L'article 2 modifié ne contient plus cette disposition. L'article 11 a été totalement modifié puisqu'il reprend les termes de l'ancien article 16 et prévoit une admission annuelle avec demande de renouvellement tous les ans soumise au conseil d'administration, qui rend une décision sans appel dans un délai de un mois. Cette modification des statuts qui oblige les membres de droit (chasseurs et propriétaires de Pierrefiche du Larzac et de ses environs immédiats) à renouveler chaque année une demande d'admission, qui peut être refusée par le conseil d'administration, a pour effet de permettre l'exclusion sans motif disciplinaire et sans possibilité pour l'adhérent, dont l'admission n'est pas renouvelée, d'être entendu. Une telle modification devait être décidée à l'unanimité des membres participant à l'assemblée générale du 25 mai 2012. Or le procès-verbal de vote mentionne que sur 44 votants, 39 voix ont voté pour, 1 voix a voté contre et 4 nuls. A défaut d'unanimité, c'est à juste titre que le premier juge a fait droit à la demande d'annulation de la délibération de l'assemblée générale du 25 mai 2012 ayant modifié les statuts. Sur les décisions de non-admission La décision du conseil d'administration, notifiée aux consorts X... le 16 juin 2013, de refuser leur demande d'admission pour la saison de chasse 2013/ 2014, a été prise en application du nouvel article 11 des statuts. La nullité de la modification statutaire entraîne l'annulation de cette décision. Tout membre de l'association doit être porteur d'une carte de chasse revêtue de la griffe du président (article 7 des statuts d'origine). Il s'ensuit que le refus de délivrance à chacun des consorts X... de la carte de chasse afférente à la saison 2013/ 2014 et à la saison 2014/ 2015 (cf. courrier du 31 juillet 2014) n'est pas fondé et revêt un caractère abusif. Sur la réparation Le premier juge a relevé, à juste titre, que les consorts X... ont été privés de leur droit de chasser sur les territoires dépendant de l'ACPP, du 11 septembre 2011 au 3 novembre 2011, puis du 23 janvier 2013 au 28 février 2013 et durant toute la saison de chasse 2013/ 2014, étant précisé, qu'à deux reprises, ils ont dû introduire une action en référé pour obtenir la délivrance des cartes de chasse (en octobre 2011 et en septembre 2012). De plus et postérieurement au jugement déféré, l'ACPP a maintenu sa position en refusant de délivrer les cartes de chasse de la saison 2014/ 2015 au motif qu'elle attendait l'issue du litige en appel. Le trouble de jouissance subi par chacun des consorts X... a été justement évalué à la somme de 1. 500 euros. Le jugement sera confirmé. Il sera alloué la somme de 800 euros à chacun, pour la privation du droit de chasse subie durant toute la saison de chasse 2014/ 2015 et, ce, compte tenu de la position arbitraire de l'ACPP qui persiste à appliquer des dispositions statutaires nulles et de nul effet (arrêt, p. 6 à 8) ;
1) ALORS QUE, dans le silence des statuts d'une association dotée de la personnalité morale, seules les modifications statutaires ayant pour effet d'augmenter les engagements des associés doivent être adoptées à l'unanimité d'entre eux ; que pour annuler la délibération de l'assemblée générale du 25 mai 2012, faute d'avoir été adoptée à l'unanimité des membres participants, la Cour d'appel relève que la modification des statuts alors adoptée « oblige les membres de droits (chasseurs et propriétaires de Pierrefiche du Larzac et de ses environs immédiats) à renouveler chaque année une demande d'admission, qui peut être refusée par le conseil d'administration, a pour effet de permettre l'exclusion sans motif disciplinaire et sans possibilité pour l'adhérent, dont l'admission n'est pas renouvelée, d'être entendu » ; qu'en statuant ainsi, cependant que la modification statutaire litigieuse, si elle avait éventuellement pour effet de diminuer les droits des membres de l'association, n'augmentait pas leurs engagements, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, 1er, 5 et 6 de la loi du 1er juillet 1901 ;
2) ALORS QUE, dans le silence des statuts d'une association dotée de la personnalité morale, seules les modifications statutaires ayant pour effet de porter atteinte à une stipulation essentielle des statuts nécessitent d'être adoptées à l'unanimité ; que pour annuler la délibération de l'assemblée générale du 25 mai 2012, la Cour d'appel retient que les décisions qui modifient une ou plusieurs clauses des statuts d'une association nécessitaient un vote pris à l'unanimité des membres participants et que l'assemblée générale avait procédé à une véritable refonte des statuts qui aurait dû être décidée à l'unanimité des membres ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher en quoi les modifications statutaires adoptées auraient porté atteinte à une stipulation essentielle des statuts de l'association dont il n'était pas contesté qu'elle était dotée de la personnalité morale, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et les articles 1er, 5 et 6 de la loi du 1er juillet 1901 ;
3) ALORS QUE la liberté contractuelle autorise toute association dotée de la personnalité morale, sauf dispositions réglementaires ou législatives impératives contraires, à choisir ses membres ; qu'elle ne saurait être restreinte par l'exigence d'une décision unanime des associés pour modifier ses statuts en ce sens ; qu'en décidant que l'Association des Chasseurs et Propriétaires de Pierrefiche du Larzac ne pouvait modifier ses statuts afin de soumettre ses membres à une procédure annuelle d'admission, sans obtenir l'accord de l'unanimité des associés, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, 1er, 5 et 6 de la loi du 1er juillet 1901.