LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Djamel X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 8-1, en date du 17 novembre 2015, qui, pour évasion en bande organisée, l'a condamné à six ans d'emprisonnement, à cinq ans d'interdiction de séjour, a ordonné une mesure de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 décembre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Castel, conseiller rapporteur, M. Raybaud, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller CASTEL, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général WALLON ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 122-7 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable d'évasion en bande organisée ;
" aux motifs que les dispositions de l'article 122-7 du code pénal ne peuvent trouver application en l'espèce ; qu'en effet, pour retenir l'état de nécessité, il faudrait démontrer que face à un danger « actuel » ou « imminent » qui aurait menacé M. X..., il a accompli un « acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien » ; que tel n'est pas le cas en l'espèce puisque, s'il est incontestable qu'il y avait bien péril imminent, la réponse à donner à ce danger n'était pas l'évasion mais bien celle d'obtempérer aux fonctionnaires de police qui souhaitaient qu'il se mette au sol à l'intérieur du fourgon, le gardien de la paix M. Y...allant même jusqu'à l'agripper pour le mettre au sol mais en vain ; que la cour constate que M. X... a cessé de soutenir devant elle que les fonctionnaires de police l'avaient utilisé comme bouclier humain et que par son attitude, sauter du fourgon alors que le tireur était proche de lui, il s'est ainsi volontairement exposé aux tirs de l'agresseur ; qu'il doit également être relevé qu'au moment où M. X... prend la décision de s'extraire du fourgon de police, il n'est pas « pris entre deux feux » puisqu'aucun des fonctionnaires se trouvant à l'arrière du fourgon n'a fait usage de son arme justement pour ne pas prendre le risque de blesser l'un des gardés à vue et qu'après avoir sauté du fourgon, l'agresseur a assuré sa fuite en tirant une dernière fois en direction du gardien M. Y...qui a été dans l'obligation de se coucher ralentissant ainsi les forces de police dans l'interpellation de M. X... ;
" 1°) alors que constatant que le prévenu était soumis à un péril imminent pour son intégrité physique et sa vie, la cour d'appel ne pouvait sans erreur de qualification conclure que le fait de chercher à échapper aux tirs en s'enfuyant du véhicule de police qui en était la cible n'était pas justifié par l'état de nécessité dans lequel il se trouvait ;
" 2°) alors que l'état de nécessité dans lequel se trouve une personne au moment où elle fait face à un danger actuel ou imminent doit être apprécié in concreto ; qu'en constatant a posteriori et de manière abstraite qu'il aurait été plus sûr pour M. X... de s'allonger dans le fourgon plutôt que de chercher à s'en échapper, sans tenir compte de ce que le prévenu, menotté dans le dos et de forte corpulence, avait éprouvé des difficultés à s'allonger dans le fourgon, et sans rechercher si la fuite n'avait pas pu apparaître sur le moment comme un acte nécessaire à sa sauvegarde, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., poursuivi du chef d'évasion en bande organisée, a soutenu que seule sa fuite hors du fourgon de police qui le transportait du local de garde à vue vers un hôpital, lui avait permis d'échapper aux tirs d'arme à feu provenant de l'extérieur et dirigés vers le fourgon, ainsi qu'aux tirs de riposte des policiers ; Attendu que, pour écarter l'état de nécessité invoqué par le prévenu et le déclarer coupable de l'infraction poursuivie, la cour d'appel retient que M. X... a refusé de se soumettre à l'injonction d'un des policiers de se coucher au sol dans le fourgon, moyen de protection le plus approprié en l'espèce, qu'il s'est volontairement exposé au tir de l'agresseur en échappant au policier qui tentait de le protéger, qu'il a sauté du véhicule à seule fin de s'évader, qu'au surplus les policiers situés à l'arrière du fourgon n'ont pas fait usage de leurs armes pour ne pas risquer de blesser les passagers ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 132-71, 434-27 et 434-30 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt partiellement confirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable d'évasion en bande organisée et l'a condamné en conséquence à une peine de six ans d'emprisonnement ;
" aux motifs que sur les faits d'association de malfaiteurs, la cour considère que ce sont par des motifs pertinents qu'elle fait siens et par une juste appréciation des faits et circonstances de la cause, exactement rapportés dans la décision attaquée que les premiers juges ont renvoyé à bon droit M. X... des fins de la poursuite de ce chef, étant précisé qu'outre le fait que la prévention ne retient que la date du 17 mai 2009, le malaise dont il a été victime, le 16 mai 2009 et dont l'origine n'est à ce jour pas connue, ne peut être regardé comme un des actes matériels constituant le délit d'association de malfaiteurs puisque sa simulation n'est pas formellement démontrée ; qu'il résulte, par exemple, des éléments du dossier que M. X... savait que, dès lors qu'il demandait à voir un médecin il serait, compte tenu de l'heure de son interpellation, conduit à l'hôpital Jean Verdier de Bondy ; qu'ainsi la simulation d'un malaise ne s'imposait pas pour obtenir ce transfert ; qu'enfin, aucun élément de la procédure n'a permis d'établir que M. X... a eu un quelconque lien avec l'extérieur à compter de son placement en garde à vue, que ce soit par l'intermédiaire d'autres gardés à vue ou de fonctionnaires de police présents au commissariat de la Courneuve le soir des faits ; qu'il doit en conséquence être retenu que l'agression armée du fourgon de police assurant le transfèrement de M. X... du commissariat de la Courneuve à l'hôpital Jean Verdier de Bondy résulte de la seule initiative des agresseurs étant précisé que l'information n'a pas non plus permis de montrer que les protagonistes de cette évasion aient échafaudé ce plan avant même le placement en garde à vue de M. X... ; que s'agissant de la circonstance aggravante de bande organisée, la cour retient que :- les membres actifs de la bande organisée n'étaient pas deux (le tireur et le chauffeur du véhicule Citroën CA) mais au moins trois puisque M. Sliman Z...a également été poursuivi pour complicité d'évasion en bande organisée et condamné pour avoir remis l'arme aux agresseurs ; que bien que Mme Elisabeth A...n'ait pas été poursuivie pour les faits d'évasion en bande organisée, il doit être retenu que celle-ci a remis l'arme à M. Sliman Z..., qu'elle doit ainsi être regardée comme membre de la bande organisée peu important que des poursuites spécifiques n'aient pas été exercées à son encontre ;- l'opération devant permettre l'évasion de M. X... était particulièrement bien préparée puisqu'il a été utilisé deux véhicules automobiles ; que le chemin emprunté par le fourgon de police était connu des agresseurs ;- qu'il n'y pas lieu de démontrer que M. X... ait personnellement pris part, la circonstance aggravante de bande organisée étant une circonstance aggravante réelle qui s'applique à tous les auteurs complices de l'infraction ;
" 1°) alors que la bande organisée se définit comme tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'une ou plusieurs infractions ; qu'ayant constaté que le prévenu n'avait pris aucune part à la préparation de l'évasion qui lui est reprochée et qu'aucune preuve n'était rapportée de ce qu'il aurait eu connaissance du dessein délictueux des agresseurs, la cour d'appel ne pouvait sans se contredire retenir à son encontre la circonstance aggravante de bande organisée ; qu'elle a ce faisant méconnu le principe de personnalité de la responsabilité pénale et n'a pas donné de base légale à sa décision ;
" 2°) alors que la circonstance aggravante de bande organisée, qui se définit, notamment, par la préméditation des infractions et une organisation structurée entre ses membres, est de ce fait une circonstance aggravante personnelle qui ne peut être mise en oeuvre qu'à l'égard des personnes dont la participation à la bande organisée est avérée ; qu'en considérant que la circonstance aggravante de bande organisée était une circonstance aggravante réelle à laquelle il n'importait pas que le prévenu ait personnellement participé, la cour d'appel a méconnu le principe exposé ci-dessus et celui de personnalité de la responsabilité pénale " ;
Attendu que, pour retenir la circonstance aggravante de bande organisée, l'arrêt attaqué relève que l'évasion a été préparée par un groupe structuré, composé du frère du prévenu et d'individus, dont certains ont été identifiés, qui s'était procuré des armes et deux véhicules et dont l'objectif était d'attaquer le fourgon de police afin que M. X... puisse s'échapper ; que les juges ajoutent que la bande organisée s'analyse en une circonstance aggravante réelle qui, ayant trait aux conditions dans lesquelles l'infraction a été commise, a vocation à s'appliquer à l'ensemble des coauteurs et complices, sans qu'il soit besoin de démontrer la participation personnelle et directe de M. X... à la préparation de son évasion ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze janvier deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.