LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 septembre 2015), que les consorts X..., venant aux droits de Bernadette X..., propriétaire de locaux à usage commercial donnés à bail à la société King George à qui elle avait délivré congé avec refus de renouvellement et offre d'indemnité d'éviction qui a été fixée par un arrêt du 16 juin 2010, rectifié le 31 octobre 2012, ont, après un arrêt rendu le 10 septembre 2014 et devenu irrévocable ayant dit que Bernadette X... n'avait pas valablement exercé son droit de repentir par un acte du 30 juin 2010, saisi la cour d'appel d'une requête en omission de statuer sur la validité du repentir exercé par acte signifié le 14 novembre 2012 ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt, complétant l'arrêt précédent du 10 septembre 2014, de dire que Bernadette X... n'a pas valablement exercé son droit de repentir par la délivrance, le 14 novembre 2012, d'un nouvel acte, alors, selon le moyen :
1°/ que le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité, à charge par lui de supporter les frais de l'instance et de consentir au renouvellement du bail dont les conditions, en cas de désaccord, sont fixées conformément aux dispositions réglementaires à cet effet ; qu'en cas de décision rectificative venant rétablir dans le dispositif de la décision rectifiée, le montant exact de l'indemnité d'éviction due en définitive par le propriétaire, la mention de la rectification ne prend effet qu'à compter de sa date et non de manière rétroactive de sorte que le propriétaire dispose d'un nouveau délai de quinze jours pour exercer son droit de repentir ; qu'en énonçant que l'arrêt rectificatif du 31 octobre 2012 n'avait ouvert aucun droit nouveau aux parties pour en déduire que Mme X... n'avait pu exercer valablement son droit de repentir par un nouvel acte d'huissier en date du 14 novembre 2012, la cour d'appel a violé l'article L. 411-58 du code de commerce ;
2°/ que le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité, à charge pour lui de supporter les frais de l'instance et de consentir au renouvellement du bail dont les conditions, en cas de désaccord, sont fixées conformément aux dispositions réglementaires à cet effet ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt qu'à la suite de l'arrêt rectificatif rendu le 31 octobre 2012 par la cour d'appel de Paris, Mme Bernadette Y..., épouse X..., a exercé son droit de repentir par un acte d'huissier en date du 14 novembre 2012, soit dans le délai de quinze jours fixé par l'article L. 411-58 du code de commerce ; qu'en énonçant que ce droit de repentir a été formé hors délai, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le texte susvisé ;
Mais attendu que la décision rectificative n'a pas d'autre autorité que celle de la décision rectifiée à laquelle elle s'incorpore ; qu'ayant constaté que l'arrêt du 31 octobre 2012, devenu irrévocable, réparait une erreur purement matérielle affectant le dispositif de l'arrêt du 16 juin 2010 sur le montant de l'indemnité d'éviction, la cour d'appel a exactement retenu que l'arrêt rectificatif du 31 octobre 2012 n'avait pas ouvert un nouveau délai pour l'exercice du droit de repentir ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres branches du moyen qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts X... et les condamne à payer à la société King George la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte et Briard, avocat aux Conseils, pour les consorts X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué recevant les consorts X... en leur requête et recevant la société King George en son moyen tendant à contester la validité du second acte de repentir exercé par Mme X... le 14 novembre 2012, d'avoir complété l'arrêt précédent du 10 septembre 2014 et dit que Mme X... n'a pas valablement exercé son droit de repentir par la délivrance le 14 novembre 2012 d'un nouvel acte d'huissier,
Aux motifs que « la société King George soutient tout d'abord que la cour a déjà tranché le point relatif à la validité de la seconde notification du droit de repentir, qu'elle y fait référence au moins à deux reprises dans son arrêt et que dans le dispositif, elle indique clairement : "Dit que le bail a pris fin par l'effet du congé du 3 février 2004 et que Mme X... reste débitrice de l'indemnité d'éviction telle que fixée par l'arrêt du 16 juin 2010, rectifié par arrêt du 30 octobre 2012" ; qu'il résulte cependant de l'arrêt du 10 septembre 2014 que la cour n'a pas, dans le dispositif de son arrêt, statué sur l'acte de repentir du 14 novembre 2012 puisqu'elle y indique "Dit que Mme X... n'a pas valablement exercé son droit de repentir par acte d'huissier de justice du 30 juin 2010" sans faire à ce stade référence à la seconde notification, que la cour n'a pas davantage dans les motifs de sa décision, statué sur la validité de l'acte du 14 novembre 2012, puisqu'il y est indiqué : "Il s'ensuit que l'acte d'huissier du 30 juin 2010 par lequel Mme X... a manifesté l'intention de renouveler le bail et qui contient une réserve quant à l'exercice du pouvoir qu'elle a entendu former contre l'arrêt de la cour d'appel est dépourvu de caractère irrévocable et ne peut caractériser l'exercice par la bailleresse de son droit de repentir" sans viser expressément et clairement l'acte du 14 novembre 2012 ; qu'il en résulte que la requête en omission de statuer est recevable ; que les consorts X... soutiennent que la société King Georges pour voir écarter la validité de la seconde notification de l'exercice du droit de repentir fait valoir un moyen nouveau qui doit être rejeté, la cour ne pouvant admettre d'autres moyens que ceux débattus contradictoirement avant le prononcé de l'arrêt à compléter ; que la cour a cependant pendant le cours de son délibéré sur l'omission de statuer dont elle est saisie, entendu interroger les parties sur la régularité de la signification de l'exercice du droit de repentir, par lettre adressée aux parties qui y ont répondu par observations jointes à la procédure, de sorte que le moyen invoqué en réponse à l'interrogation soulevée par la cour doit être accueilli ; que les consorts X... soutiennent également que l'autorité de la chose jugée s'attachant au seul dispositif d'un jugement et non à ses motifs, le second arrêt rectificatif du 31 octobre 2012 a autorité de chose jugée relativement à la somme contenue dans son dispositif concernant l'indemnité d'éviction, que Mme X... pouvait donc valablement signifier à nouveau l'exercice de son droit de repentir à la suite de l'arrêt rectificatif qui seul lui a permis de connaître le montant de l'indemnité d'éviction qu'elle allait devoir verser ; que les consorts X... invoquent au surplus que la nullité alléguée de l'acte du 14 novembre 2012 obéit au régime des articles 117 et suivants du code de procédure civile et que, à supposer que le vice allégué de l'acte précédent constitue une irrégularité de fond, l'acte d'huissier, signifié par Mme X... le 14 novembre 2012, a régularisé l'acte précédent en ce qu'il a affirmé de nouveau la volonté de la bailleresse d'exercer son droit de repentir, sans faire aucunement référence à son droit de critiquer la décision rendue par la cour d'appel de Paris le 16 juin 2010 qui a écarté l'exception de prescription qui avait été accueillie par les premiers juges, et de former un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt précité ; que la société King Georges fait valoir au contraire que la bailleresse ne pouvait exercer son droit de repentir que dans le délai légal prévu à l'article L 145-58 du code de commerce, de 15 jours à compter de la date à laquelle la décision initiale du 16 juin 2010 est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité à charge par elle d'en supporter les frais de l'instance et consentir au renouvellement du bail, que l'arrêt du 31 octobre 2012 n'a pas d'autre autorité que celle de l'arrêt rectifié ; qu'en application de l'article 462 du code de procédure civile, les erreurs ou omissions affectant une décision ne peuvent être réparées par la juridiction qui l'a rendue qu'à la condition que celle-ci ne modifie pas les droits et obligations reconnus aux parties et ce en raison de l'autorité de chose jugée qui s'attache à la décision qui a tranché le fond du litige sous peine de porter atteinte à celle-ci ; que les limites de l'erreur réparable sont donc qu'elle doit se déduire aisément de la décision à rectifier et ne souffrir aucune contestation sérieuse ; qu'en l'espèce, aucune partie ne peut contester sérieusement que l'arrêt du 31 octobre 2012 ne vise qu'à réparer une erreur matérielle de rédaction contenue dans l'arrêt du 16 juin 2010 et résultant de la différence entre les motifs de l'arrêt comportant le calcul de l'indemnité globale d'éviction - tant principale qu'accessoire - et le dispositif qui ne reprenait que la fixation de l'indemnité principale ; qu'en conséquence, Mme X... ayant exercé son droit de repentir à la suite du jugement du 16 juin 2010, par acte d'huissier du 30 juin 2010, dans le délai de l'article L.145-58 du code de commerce, et alors que le jugement rectificatif du 31 octobre 2012 n'a ouvert aucun droit nouveau aux parties, elle n'a pu exercer valablement son droit de repentir par un nouvel acte d'huissier en date du 14 novembre 2012 qui peut d'autant moins valoir régularisation de celui du 30 juin 2010 qu'il ne comporte aucune mention de ce qu'il ne tend qu'à annuler le précédent en s'y substituant et qu'il a été formé hors délai ; qu'il s'ensuit que l'arrêt du 10 septembre 2014 doit être complété par l'indication que Mme X... n'a pas valablement exercé son droit de repentir en délivrant un nouvel acte d'huissier le 14 novembre 2012 »,
Alors, en premier lieu, que la juridiction saisie d'une requête en omission de statuer ne peut accueillir un moyen qui n'a été présenté qu'au cours de cette procédure ; qu'elle ne peut que rétablir, s'il y a lieu, le véritable exposé des prétentions des parties et de leurs moyens sans en admettre d'autres qui n'ont pas été contradictoirement débattus avant le prononcé de la décision qu'elle complète; que les explications de droit ou de fait fournies sous la forme d'une note en délibéré ne sauraient modifier les éléments du litige fixés dans les écritures des parties; que pour réparer l'omission de statuer affectant l'arrêt du 10 septembre 2014, la cour d'appel relève que pendant le cours de son délibéré, elle a entendu interroger les parties sur la régularité de la signification de l'exercice du droit de repentir, par lettre adressée aux parties qui y ont répondu par observations jointes à la procédure, de sorte que le moyen invoqué par la société King George en réponse à l'interrogation soulevée par la cour doit être accueillie ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 442 et 463 du code de procédure civile,
Alors, en deuxième lieu, que le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité, à charge par lui de supporter les frais de l'instance et de consentir au renouvellement du bail dont les conditions, en cas de désaccord, sont fixées conformément aux dispositions réglementaires à cet effet ; qu'en cas de décision rectificative venant rétablir dans le dispositif de la décision rectifiée, le montant exact de l'indemnité d'éviction due en définitive par le propriétaire, la mention de la rectification ne prend effet qu'à compter de sa date et non de manière rétroactive de sorte que le propriétaire dispose d'un nouveau délai de quinze jours pour exercer son droit de repentir ; qu'en énonçant que l'arrêt rectificatif du 31 octobre 2012 n'avait ouvert aucun droit nouveau aux parties pour en déduire que Mme X... n'avait pu exercer valablement son droit de repentir par un nouvel acte d'huissier en date du 14 novembre 2012, la cour d'appel a violé l'article L.411-58 du code de commerce,
Alors, en troisième lieu, que le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité, à charge pour lui de supporter les frais de l'instance et de consentir au renouvellement du bail dont les conditions, en cas de désaccord, sont fixées conformément aux dispositions réglementaires à cet effet ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt qu'à la suite de l'arrêt rectificatif rendu le 31 octobre 2012 par la cour d'appel de Paris, Mme Bernadette Y..., épouse X..., a exercé son droit de repentir par un acte d'huissier en date du 14 novembre 2012, soit dans le délai de quinze jours fixé par l'article L.411-58 du code de commerce ; qu'en énonçant que ce droit de repentir a été formé hors délai, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le texte susvisé,
Alors, enfin, que le juge ne peut modifier les termes du litige dont il est saisi ; qu'en énonçant que l'arrêt rectificatif du 31 octobre 2012 n'ayant ouvert aucun droit nouveau aux parties, Mme X... n'a pu exercer valablement son droit de repentir par un nouvel acte d'huissier en date du 14 novembre 2012 qui peut d'autant moins valoir régularisation de celui du 30 juin 2010, qu'il ne comporte aucune mention de ce qu'il ne tend qu'à annuler le précédent en s'y substituant, alors que dans ses conclusions d'appel signifiées le 24 avril 2014, Mme X... faisait valoir qu'étant encore moins en mesure de régler la nouvelle somme allouée à la société King George par l'arrêt rectificatif rendu le 14 novembre 2012, elle avait dû affirmer de nouveau par acte extrajudiciaire en date du 14 novembre 2012 sa volonté de se soustraire au paiement de l'indemnité d'éviction et porté à la connaissance du preneur la notification du droit de repentir prévue à l'article L.145-58 du code de commerce, sans soutenir que cet acte venait annuler l'acte précédent du 30 juin 2010 en s'y substituant, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé l'article 4 du code de procédure civile.