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22/09/2016 | FRANCE | N°15-17041

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 22 septembre 2016, 15-17041


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 111-1 et L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution ;

Attendu que l'obligation de rembourser résulte de plein droit de la décision qui constate la caducité d'une prestation compensatoire ; que la créance est liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par un précédent arrêt irrévocabl

e, une cour d'appel a converti en divorce la séparation de corps prononcée entre Mme X... e...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 111-1 et L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution ;

Attendu que l'obligation de rembourser résulte de plein droit de la décision qui constate la caducité d'une prestation compensatoire ; que la créance est liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par un précédent arrêt irrévocable, une cour d'appel a converti en divorce la séparation de corps prononcée entre Mme X... et M. Y... et a condamné ce dernier à lui verser à titre de prestation compensatoire, une rente viagère mensuelle ; que M. Y... et Mme X..., qui se sont remariés le 13 mai 1992, ont à nouveau divorcé ; que Mme X... a été déboutée de sa demande de prestation compensatoire au motif que son remariage avec le débiteur de la prestation n'avait pas mis fin à son obligation de la payer ; que M. Y... a saisi un juge de l'exécution afin de faire constater la caducité de la prestation compensatoire suite à la célébration de leur second mariage ; que saisie sur renvoi après cassation (1re Civ., 17 octobre 2007, pourvoi n° 06-20.451), une cour d'appel a constaté, par un arrêt irrévocable, la caducité de la prestation compensatoire allouée à Mme X... à compter du 13 mai 1992 ; qu'agissant sur le fondement de cet arrêt, M. Y... a fait délivrer à Mme X... un commandement de payer à fin de saisie-vente, pour obtenir la restitution d'une certaine somme ; que Mme X... a contesté ce commandement devant un juge de l'exécution, qui l'a annulé ;

Attendu que, pour confirmer le jugement, l'arrêt retient que, la décision ordonnant le versement d'une prestation compensatoire sous la forme d'une rente mensuelle viagère, la répétition doit s'exercer par référence à une période de temps donnée pendant laquelle l'obligation était exigible, ce qui conduit nécessairement à vérifier l'imputation qui a été donnée aux paiements effectués, et que la rente viagère est assimilable à une obligation naturelle, et qu'ainsi Mme X... est susceptible d'opposer des exceptions aux demandes qui lui sont faites dans le cadre de la répétition de l'indu dont la connaissance appartient au juge du fond ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants à caractériser l'absence de caractère évaluable de la créance par le juge de l'exécution et alors que l'obligation de rembourser résultait de plein droit de la décision constatant la caducité de la prestation compensatoire à compter du 13 mai 1992, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. Y...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan en date du 6 décembre 2012 ayant dit que M. Y... ne disposait pas d'un titre exécutoire lui permettant de poursuivre le recouvrement des sommes versées indûment du fait de la caducité de la prestation compensatoire, annulé le commandement du 25 avril 2012, dit que celui-ci serait privé de tout effet et dit enfin que son coût resterait à la charge de M. Y... ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE l'indu qui fonde la procédure d'exécution entreprise résulte de la caducité du jugement de divorce et de l'arrêt confirmatif de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 13 novembre 1990 prévoyant le service d'une prestation compensatoire viagère au profit de l'épouse ; que ces décisions ont été frappées de caducité pour la période postérieure au remariage des époux mais conservent tous leurs effets pour la période antérieure ; que la répétition doit par conséquent s'exercer par référence à une période de temps donnée pendant laquelle l'obligation était exigible, ce qui conduit nécessairement à vérifier l'imputation qui a été donnée aux paiements effectués ; qu'en outre, s'agissant du service d'une rente viagère destinée à compenser la différence de situation entre les époux, celle-ci est assimilable à une obligation naturelle, surtout quand, par l'effet de décisions contraires, l'épouse se trouve privée d'une prestation dont le principe même avait été retenu par les cours d'appel ayant successivement statué sur le divorce ; qu'ainsi donc, Mme X... est susceptible d'opposer des exceptions aux demandes qui lui sont faites dans le cadre de la répétition de l'indu dont la connaissance appartient au juge du fond ; que la décision rendue par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nice considérant que l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 12 décembre 2008 prononçant la caducité de la prestation compensatoire ne constitue pas un titre exécutoire de restitution sera, dans ces conditions, confirmée en toutes ses dispositions ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' en ce qui concerne la caducité, il s'agit de l'inefficacité d'un acte pour l'avenir en raison de la survenance d'un événement ou de l'absence d'accomplissement d'une condition ; qu'en l'espèce, c'est le remariage entre eux des ex-époux qui a rendu inefficace la décision de condamnation au paiement d'une prestation compensatoire au profit de Mme X..., alors que le titre initial conserve sa valeur pour la période antérieure à la date du remariage ; que dans le cas de l'annulation du titre, toutes les sommes réglées en application du titre, par mesure d'exécution forcée ou volontairement, doivent être restituées ; qu'alors que dans le cas de la caducité, qui ne concerne qu'une période donnée, il y a lieu d'analyser l'imputation des paiements et aussi l'intention du solvens car, dans le cadre de l'action en répétition de l'indu, l'accipiens peut opposer des exceptions ; que l'arrêt de 2008 ne constitue donc pas un titre exécutoire de restitution et que le commandement du 25 avril 2012 sera annulé ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de son débiteur ; que la créance est liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation ; que le titre exécutoire sur le fondement duquel M. Y... a fait délivrer le commandement de payer avant saisie vente du 25 avril 2012 réside dans l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 12 décembre 2008, constatant « la caducité de la prestation compensatoire allouée à Madame Ginette X... par le jugement du 18 juin 1989 et l'arrêt du 13 novembre 1990 à compter du 13 mai 1992 » ; qu'en estimant que M. Y... ne pouvait se prévaloir d'aucun titre exécutoire justifiant une action en répétition de l'indu et une action en exécution forcée sur les biens de son débiteur sur le fondement d'une telle action, au motif que la caducité n'était encourue qu'à compter d'une date précise, de sorte que le juge saisi de l'action en répétition de l'indu se trouvait contraint de vérifier l'imputation donnée aux paiements effectués (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 4), cependant que le fait que le juge ait à vérifier que les paiements dont le remboursement était sollicité étaient intervenus postérieurement au 13 mai 1992 ne privait nullement l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 12 décembre 2008 de sa nature de titre exécutoire, la créance de M. Y... restant évaluable dès lors qu'il résultait sans ambiguïté de cette décision de justice, l'obligation pour Mme X... de rembourser les sommes perçues par elle sans cause à compter du 13 mai 1992, la cour d'appel, qui s'est en définitive déterminée par une motivation inopérante, a privé sa décision de base légale au regard des articles L.111-2, L.111-6 et L.221-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ; que l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 12 décembre 2008, définitif, constate « la caducité de la prestation compensatoire allouée à Madame Ginette X... par le jugement du 18 juin 1989 et l'arrêt du 13 novembre 1990 à compter du 13 mai 1992 », ce dont il se déduit que l'obligation de M. Y... portant sur le paiement d'une prestation compensatoire était sans cause à compter du 13 mai 1992 et que celui-ci se trouvait dès lors titulaire d'une action en répétition de l'indu à hauteur des sommes versées sans cause à Mme X... ; qu'en estimant que M. Y... restait en toute hypothèse redevable des sommes versées à Mme X..., dans la mesure où « s'agissant du service d'une rente viagère destinée à compenser la différence de situation entre les époux, celle-ci est assimilable à une obligation naturelle » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 5), la cour d'appel a méconnu la chose jugée par l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 12 décembre 2008 conformément à la décision rendue le 17 octobre 2007 par la Cour de cassation et a violé les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile ;

ALORS, ENFIN, QU' il ressort de l'article 1235, alinéa 2, du code civil que la répétition n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées ; que le paiement est volontaire lorsque le débiteur a la possibilité, juridique et matérielle, de ne pas l'exécuter ; qu'à l'inverse, lorsque le paiement en cause n'a aucun caractère volontaire, il ne peut se transformer en l'exécution d'une obligation naturelle ; qu'en estimant que le service de la rente viagère par M. Y... était assimilable à une obligation naturelle, tout en constatant que celui-ci avait réglé les sommes en cause en exécution d'une condamnation qui lui avait été infligée par un « arrêt confirmatif de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 13 novembre 1990, prévoyant le service d'une prestation compensatoire viagère au profit de l'épouse » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 3), ce dont il résultait que M. Y... n'avait pas volontairement acquitté les sommes dont la répétition était sollicitée, de sorte qu'il n'existait aucun obstacle à son action en répétition de l'indu, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1235, alinéa 2, du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-17041
Date de la décision : 22/09/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures d'exécution forcée - Titre - Titre exécutoire - Définition - Titre constatant une créance liquide et exigible - Portée

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures d'exécution forcée - Titre - Titre exécutoire - Définition - Arrêt constatant la caducité d'une prestation compensatoire - Portée JUGE DE L'EXECUTION - Compétence - Compétence d'attribution - Etendue - Détermination

L'obligation de rembourser résulte de plein droit de la décision qui constate la caducité d'une prestation compensatoire et la créance est liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation. Encourt en conséquence la censure l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour confirmer la décision d'un juge de l'exécution annulant un commandement de payer à fin de saisie-vente délivré pour obtenir le remboursement de prestations compensatoires dont la caducité a été constatée, retient que la vérification de l'imputation des paiements et la connaissance des exceptions opposées à l'occasion de la répétition de l'indu appartiennent au juge du fond


Références :

articles L. 111-1 et L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 22 sep. 2016, pourvoi n°15-17041, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Girard
Rapporteur ?: Mme Lemoine
Avocat(s) : Me Balat, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.17041
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