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23/06/2016 | FRANCE | N°15-19671

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 23 juin 2016, 15-19671


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Too Faire a saisi le juge des référés d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête du 24 octobre 2012 ayant accueilli, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, la demande de mesure d'instruction présentée par le conseil régional de l'ordre des experts-comptables et exécutée dans ses locaux et au domicile de sa gérante, Mme X... ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 145 et

495, alinéa 3, du code de procédure civile ;
Attendu que pour dire n'y avoir li...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Too Faire a saisi le juge des référés d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête du 24 octobre 2012 ayant accueilli, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, la demande de mesure d'instruction présentée par le conseil régional de l'ordre des experts-comptables et exécutée dans ses locaux et au domicile de sa gérante, Mme X... ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 145 et 495, alinéa 3, du code de procédure civile ;
Attendu que pour dire n'y avoir lieu à rétractation de l'ordonnance sur requête du 24 octobre 2012, l'arrêt retient que l'huissier de justice a signifié à la société Too Faire le 28 mars 2013 à 7 heures 40, par dépôt en son étude, copie de l'ordonnance et de la requête et exécuté le même jour la mission, assisté d'un expert-comptable, de deux gendarmes, d'un informaticien et d'un serrurier ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans constater qu'indépendamment de la signification de l'ordonnance, copie de cette dernière et de la requête avait été laissée à un représentant de la société Too Faire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 145 et 493 du code de procédure civile ;
Attendu que pour dire n'y avoir lieu à rétractation de l'ordonnance sur requête du 24 octobre 2012, l'arrêt retient que la nécessité de recourir à une procédure non contradictoire a été appréciée eu égard au risque de déperdition des preuves en cas de débat contradictoire préalable ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la requête ne faisait état d'aucune circonstance susceptible de justifier qu'il soit procédé non contradictoirement et que l'ordonnance n'était motivée que par renvoi à la requête, la cour d'appel, qui ne pouvait suppléer la carence de motivation du juge des requêtes, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Condamne le conseil régional de l'ordre des experts-comptables Picardie Ardennes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le conseil régional de l'ordre des experts-comptables Picardie Ardennes à payer à la société Too Faire la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Too Faire
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 6 mars 2014 par le président du tribunal de grande instance de Beauvais ayant dit n'y avoir lieu à rétracter son ordonnance du 24 octobre 2012 rendue sur requête du Conseil régional de l'Ordre des experts comptables (Région Picardie-Ardennes) ;
AUX MOTIFS QUE «- l'article 145 du code de procédure civile : « S'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout « procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction « légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »,- l'article 493 du même code : « L'ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non « contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse. »,- l'article 495 : « L'ordonnance sur requête est motivée. « Elle est exécutoire au seul vu de la minute. « Copie de la requête et de l'ordonnance est laissée à la personne à laquelle elle est opposée. »,- l'article 496 alinéa 2 : « S'il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu « l'ordonnance »,- l'article 497 : « Le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est « saisi de l'affaire » ; pour dire n'y avoir lieu de rétracter son ordonnance rendue le 26 octobre 2012 sur requête du Conseil régional de l'Ordre des experts-comptables (région Picardie Ardennes) et constater l'irrecevabilité des autres demandes, le premier juge a retenu les éléments suivants :- à la date de la présentation de la requête, le Conseil de l'Ordre a justifié d'éléments constituant un possible exercice illégal de la profession d'expertise comptable par la SARL TOO FAIRE, faits susceptibles de surcroît de constituer une infraction pénale,- la nécessité de solliciter non contradictoirement une mesure de constat a été appréciée eu égard au risque de déperdition des preuves en cas de débat contradictoire préalable,- le secret des affaires ne constitue pas en lui-même un obstacle à l'application des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile dès lors que les mesures ordonnées procèdent d'un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées,- la mission donnée à l'huissier était circonscrite aux faits d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable,- la saisie autorisée s'est limitée à la copie des documents litigieux,- la question de l'éventuel dépassement par l'huissier de ses pouvoirs est étrangère au présent litige,- l'instance en rétractation d'une ordonnance sur requête a pour seul objet de soumettre à l'examen d'un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire, et la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet ; si comme le fait justement observer la SARL TOO FAIRE, les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile ne sont visées ni dans la requête du Conseil régional de l'Ordre des experts-comptables ni dans l'ordonnance rendue sur cette requête, il est en revanche inexact de prétendre comme elle le fait que la décision du 26 octobre 2012 est dépourvue de fondement juridique, La lecture de la requête-intitulée « requête à fin de constat »- met en effet en évidence que le Conseil régional de l'Ordre des experts-comptables (région Picardie Ardennes) a :- rappelé que par application de l'article 31 de l'ordonnance n° 045-2138 du 19 septembre 1945 il a qualité notamment pour « surveiller dans sa circonscription l'exercice de la profession d'expert-comptable... et si nécessaire, saisir les Tribunaux en cas d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable »,- exposé que la SARL TOO FAIRE, administrée par Mme Christel X..., exerce une activité de « Conseil et Assistance aux entreprises en matière d'organisation-gestion-décoration-conseil et assistance-conseil patrimonial-courtage en assurance-vente immobilière-délégation-assurance de précourtage »,- précisé que ni la société TOO FAIRE ni Mme X...ne sont inscrits au Tableau de l'Ordre des experts comptables,- indiqué avoir été avisé le 9 mars 2012 par l'EURL « The New Anthropology » de faits d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable par Mme X...et la SARL TOO FAIRE,- exposé avoir été informé le 6 septembre 2012 par le Commissaire du Gouvernement que l'enquête menée à sa demande par les services de la Direction Départementale des Finances Publiques de l'Oise sur les activités de Mme X... et de la SARL TOO FAIRE avait permis « de recueillir quelques indications constituant des présomptions d'exercice illégal de l'activité d'expert-comptable »,- conclu que pour lui « permettre » de « prendre toute initiative utile, il lui apparaissait souhaitable d'identifier les clients pour lesquels Mme X... et la société TOO FAIRE exercent leur activité comptable et/ ou fiscale et de déterminer avec précision les missions qui leur sont confiées »,- sollicité en conséquence la désignation d'un huissier de justice avec la mission sus-exposée et possibilité pour celui-ci de se faire assister si nécessaire de la force publique, d'un informaticien de son choix, d'un serrurier et d'un Membre de l'Ordre des experts-comptables ; la requête rédigée en ces termes et l'ordonnance y faisant droit, rendue : « Vu la requête qui précède, les motifs exposés et les pièces à l'appui produites » s'inscrivent ainsi sans ambiguïté dans le cadre des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile, dont il est dès lors indifférent qu'elles n'aient pas été expressément visées ; il est d'ailleurs exactement relevé par l'intimé que la société TOO FAIRE dans son assignation en référé rétractation du 11 juillet 2013 critique la mission donnée à l'huissier au motif que celle-ci excéderait les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile ; comme le rappelle à bon droit l'intimé, le juge saisi d'une demande de rétractation de l'ordonnance sur requête ayant ordonné une mesure sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, tenu d'apprécier au jour où il statue les mérites de la requête, doit s'assurer seulement de l'existence d'un motif légitime à ordonner la mesure probatoire et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement, doit uniquement vérifier si les conditions étaient réunies au jour où la mesure d'instruction préventive a été ordonnée sur requête, avec la précision que les conditions d'exécution ne relèvent pas de la compétence du juge de la rétractation mais de celui de l'exécution ; il est certain qu'en l'espèce le motif légitime était celui de révéler et démontrer les actes de comptabilité entrant dans le cadre de la profession réglementée d'expertise comptable que la SARL TOO FAIRE et sa gérante Mme X... pourraient accomplir pour certains clients, en violation des dispositions de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 ; contrairement aux affirmations de l'appelant, et comme l'a justement estimé le premier juge, c'est sur des éléments tangibles d'un possible exercice illégal de la profession d'expertise comptable par ceux-ci que reposait la requête, au vu des pièces jointes à celle-ci, à savoir : « 1/ Extrait KBIS du 12 mars 2012 de la SARL TOO FAIRE, 2/ Attestation de non-inscription à l'Ordre des Experts Comptables, 3/ Correspondance de l'EURL « The New Anthropology » (Mr. Sylvain Y...), 4/ Correspondance de l'Ordre des Experts Comptables à Mr. Sylvain Y...du 2 avril 2012, 5/ Correspondance du Commissaire du Gouvernement, Madame Chantal Z... du 6 septembre 2012 adressée au Président de l'Ordre des Experts Comptables de Picardie-Ardennes » ; par ailleurs le risque de déperdition des preuves en cas de débat contradictoire préalable justifiait le recours à la procédure sur requête, ce qu'a exactement relevé le premier juge ; c'est vainement que la société TOO FAIRE invoque la violation du principe fondamental du secret des affaires. Comme l'a exactement rappelé le premier juge, ce dernier ne constitue pas en effet en lui-même un obstacle à l'application des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile dès lors que le juge constate, comme en l'espèce, que les mesures qu'il ordonne procèdent d'un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées ; l'intimé souligne au surplus avec pertinence qu'il n'est pas un concurrent direct susceptible d'être intéressé par l'activité déployée par la société TOO FAIRE ; à hauteur d'appel, la société TOO FAIRE soutient que l'autorisation de vérifications au domicile de Mme X... constitue une perquisition qui ne peut être décidée par ordonnance d'un juge civil ; le Conseil régional de l'Ordre des Experts Comptables oppose toutefois valablement que le droit au respect du domicile ne constitue pas en lui-même un obstacle à l'application de l'article 145 du code de procédure civile dès lors que, comme en l'espèce, le juge constate que les mesures qu'il ordonne procèdent d'un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées ; la SARL TOO FAIRE affirme que la mission confiée à la SCP Lewintre Touche Christien est si large quant aux documents appréhendés qu'elle l'empêche d'exercer son activité, et qu'elle excède les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile, les mesures ordonnées n'étant pas limitées dans leur objet et dans le temps, et ce en contradiction avec les exigences de la Cour de Cassation ; la cour observe en premier lieu que la société appelante n'établit pas être empêchée d'exercer son activité depuis les opérations de constat, lesquelles ont d'ailleurs consisté en l'appréhension des seules copies de documents (pièce 8 de l'intimé) ; s'agissant de la mission confiée à l'Huissier, sus-rappelée, il sera relevé d'une part qu'elle est limitée géographiquement à deux sites, le siège social de la SARL TOO FAIRE et le domicile de sa gérante, d'autre part qu'elle porte sur les seules activités comptables et fiscales de la société TOO FAIRE et de Mme X..., enfin qu'elle tend (point n° 3 de la mission) à l'appréhension de : « documents, bilan, journaux, déclarations, factures qui ont pu être établis par Mme X... et/ ou par la SARL TOO FAIRE et reçus par eux dans le cadre de leur mission », étant précisé que nonobstant ces derniers mots, sont exclusivement concernées les missions comptables et fiscales comme énoncé aux points 1, 2 et 4 de la mission ; dans ces conditions la Cour considère que la mesure, autorisant des constatations à l'objet circonscrit par la mission donnée à l'Huissier désigné, ne comportant aucune atteinte à une liberté fondamentale, n'excède pas les prévisions de l'article 145 du code de procédure civile, elle approuve par conséquent le premier juge de n'avoir pas rétracté son ordonnance rendue le 24 octobre 2012 sur la requête du Conseil régional de l'Ordre des Experts Comptables (région Ardennes Picardie) ; les conditions d'exécution de la mesure ainsi autorisée ne relevant pas de la compétence du juge de la rétractation, ce qu'ajustement rappelé le premier juge, le surplus des griefs formulés par l'appelant, notamment en termes d'abus de droit, ne saurait prospérer » (cf. arrêt p. 4-6) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'« à la date de la présentation de la requête, le 19 octobre 2012, le Conseil régional de l'ordre des experts-comptables de la région Picardie-Ardennes a justifié d'éléments constituant un possible exercice illégal'de la profession d'expertise comptable par la SARL TOO FAIRE, faits susceptibles de surcroît de constituer une infraction pénale ; que la nécessité de solliciter non contradictoirement une mesure de constat a été appréciée eu égard au risque de déperdition des preuves en cas de débat contradictoire préalable ; attendu que le secret des affaires ne constitue pas en lui-même un obstacle à l'application des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile dès lors que les mesures ordonnées procèdent d'un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées ; attendu que la mission donnée à l'huissier était circonscrite aux faits d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable ; que la saisie autorisée s'est limitée à la copie des documents litigieux ; que la question de l'éventuel dépassement par l'huissier de ses pouvoirs est étrangère au présent litige, le juge des référés ne pouvant statuer sur le fondement de l'article 497 du code de procédure pénale que sur une éventuelle rétractation de l'ordonnance et non sur l'usage qu'on en a fait » ; (cf. ordonnance p. 3) ;
1°/ ALORS QUE, d'une part, l'ordonnance sur requête autorisant un huissier à diligenter une mesure d'investigation sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile doit être laissée en copie à ceux à qui elle est opposée antérieurement à l'exécution des mesures d'instruction qu'elle ordonne et impose qu'elle ne puisse être exécutée contre cette personne qu'après lui avoir été notifiée ; qu'en refusant de rétracter l'ordonnance désignant un huissier de justice aux fins d'investigations et de constatations après avoir constaté que l'huissier avait signifié à la Sarl Too Faire le 28 mars 2013 à 7h40, soit en dehors des heures d'ouverture du siège social comme le relevait l'exposante, par dépôt en son étude, copie de cette ordonnance et de la requête le précédant et avait exécuté le même jour la mission pour laquelle il avait été désignée, ce dont il s'évinçait que la copie de l'ordonnance et de la requête n'avait pas été remise à la Sarl Too Faire préalablement aux opérations conduites par l'huissier en exécution de l'ordonnance sur requête, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 16, 495 et 503 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ ALORS QUE, d'autre part, le juge de la rétractation doit se placer au jour où il statue en considérant la situation qui existe à cet instant ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de la cour d'appel et il est reconnu par les parties que la mesure a été exécutée à 7h40 soit avant l'ouverture des locaux de la Sarl Too Faire, l'huissier ayant eu recours à un serrurier ; qu'en refusant de rétracter l'ordonnance quand celle-ci prévoyait que l'huissier pouvait se faire aider de la force publique et d'un serrurier « si nécessaire » cette indication impliquant nécessairement une demande préalable de remise des documents et non l'usage immédiat de la force pour entrer dans les locaux et appréhender les documents visés par l'ordonnance, la cour d'appel a violé l'article 497 du code de procédure civile, ensemble l'article 16 du même code et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ ALORS QUE, en outre, qu'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur requête que si une dérogation au principe du contradictoire s'impose ; qu'en se bornant à énoncer que la mesure se justifiait en raison du risque de déperdition des preuves si elle était non contradictoire, la cour d'appel n'a pas caractérisé en quoi une telle dérogation s'imposait, privant sa décision de base légale au regard des articles 145 et 493 du code de procédure civile ;
4°/ ALORS QUE, par ailleurs, le juge saisi sur requête, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, ne peut ordonner que des mesures légalement admissibles ; qu'il n'en est pas ainsi d'une mission qui consiste à confier à l'huissier une mission générale d'investigation et un pouvoir d'enquête lui permettant de mener une véritable perquisition civile des locaux visés par l'ordonnance ; qu'en l'espèce, selon la description même de la mission donnée, il apparaît que l'huissier instrumentaire a reçu mission de « réunir appréhender ou prendre copie » tant au siège social de la société qu'au domicile de Madame X... des documents visés et ce avec l'aide si nécessaire de la force publique et d'un serrurier ; qu'en refusant néanmoins de rétracter l'ordonnance, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5°/ ALORS QUE, de surcroît, le juge saisi sur requête, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, ne peut ordonner que des mesures légalement admissibles ; qu'il n'en est pas ainsi d'une mission qui consiste à confier à l'huissier instrumentaire une mesure d'investigation générale, laquelle est, partant, sans limite ; qu'en l'espèce, selon la description même de la mission donnée, il apparaît que l'huissier instrumentaire a reçu mission d'« établir une liste des clients pour lesquels Madame Christelle X... et/ ou la SARL TOO FAIRE exercent ou ont exercé des missions comptables et fiscales », de « réunir appréhender ou prendre copie », « sur tous supports ou procédés techniques, de tous éléments, données informatiques, documents, bilans, journaux, déclarations, factures » établis dans le cadre de leurs missions visées comme « comptables et fiscales » et « d'une manière générale, entendre tous sachants et réunir tous éléments permettant de déterminer les conditions dans lesquelles Mme X... et la Sarl Too Faire exercent les missions comptables et fiscales » ; qu'aussi en refusant néanmoins de rétracter l'ordonnance, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;
6°/ ALORS QUE, enfin, toute mesure d'instruction in futurum doit être strictement limitée aux seules investigations nécessaires à la preuve des faits litigieux, de manière à ne pas porter une atteinte illégitime aux libertés fondamentales du défendeur, et notamment au secret des affaires, au droit au respect du domicile ; qu'en l'espèce, les mesures d'instruction tendant à la recherche « sur tous supports ou procédés techniques, de tous éléments, données informatiques, documents, bilans, journaux, déclarations, factures » établis dans le cadre de leurs missions visées comme « comptables et fiscales » et « d'une manière générale, entendre tous sachants et réunir tous éléments permettant de déterminer les conditions dans lesquelles Mme X... et la Sarl Too Faire exercent les missions comptables et fiscales » et ce tant au siège social de la société qu'au domicile de Mme X... constituent une atteinte illégitime au secret des affaires et à la violation du domicile ; qu'en déclarant néanmoins ces mesures légalement admissibles, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-19671
Date de la décision : 23/06/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Ordonnance sur requête - Requête - Copie - Délivrance - Défaut - Cas - Signification de l'ordonnance à étude d'huissier

PROCEDURE CIVILE - Ordonnance sur requête - Exécution - Condition

La signification à l'étude de l'huissier de l'ordonnance ayant autorisé sur requête une mesure d'instruction avant tout procès sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ne peut tenir lieu de remise de l'ordonnance et de la requête à celui à qui la mesure est opposée, exigée par l'article 495, alinéa 3, du même code


Références :

articles 145 et 495, alinéa 3, du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 06 mars 2015

Sur la détermination de la personne à laquelle doit être remise copie de la requête et de l'ordonnance, à rapprocher :2e Civ., 13 novembre 2015, pourvoi n° 13-27563, Bull. 2015, II , n° ??? (cassation partielle), et les arrêts cités


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 23 jui. 2016, pourvoi n°15-19671, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Girard
Rapporteur ?: M. Adida-Canac
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.19671
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