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07/04/2016 | FRANCE | N°15-10126

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 07 avril 2016, 15-10126


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite de la destruction d'un local appartenant à la SCI Latour (la SCI), assurée auprès de la sociétés Prudence créole (la société Prudence), donné à bail commercial à la société Dindar autos (la société Dindar), assurée auprès de la société Allianz IARD (la société Allianz), un tribunal de grande instance a jugé la société Dindar responsable du sinistre, fixé les créances respectives des sociétés Prudence et Latour à l'encontre de la sociétÃ

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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite de la destruction d'un local appartenant à la SCI Latour (la SCI), assurée auprès de la sociétés Prudence créole (la société Prudence), donné à bail commercial à la société Dindar autos (la société Dindar), assurée auprès de la société Allianz IARD (la société Allianz), un tribunal de grande instance a jugé la société Dindar responsable du sinistre, fixé les créances respectives des sociétés Prudence et Latour à l'encontre de la société Dindar et condamné la société Allianz à payer par priorité à la SCI une certaine somme et à régler le solde dû au titre de sa garantie aux sociétés Prudence et Dindar à proportion de leurs créances respectives ; que la société Allianz a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été signifié par la société Latour ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu les articles 324 et 529 du code de procédure civile ;
Attendu que c'est seulement dans le cas où le jugement profite solidairement ou indivisiblement à plusieurs parties que chacune peut se prévaloir de la notification faite par l'une d'elles ;
Attendu que pour déclarer irrecevable comme tardif l'appel de la société Allianz, la cour d'appel, après avoir rappelé les termes de l'article 529, alinéa 2, du code de procédure civile et relevé que le jugement avait été signifié à la demande de la SCI à toutes les autres parties dont la société Allianz le 12 novembre 2013, retient que les décisions prises par le tribunal dans son dispositif ont un caractère indissociable, le jugement ayant condamné la société Allianz à garantir la société Dindar à hauteur du plafond de sa garantie, de sorte que toutes les parties intimées bénéficient de manière indivisible du jugement, que les condamnations prononcées par le tribunal procèdent en effet d'un fait générateur unique, l'incendie survenu dans les locaux de la SCI, avec mise en oeuvre de la garantie de l'assureur du locataire, la société Allianz, qu'il en résulte que chacune des parties pouvait se prévaloir de la notification faite par l'une d'elles, de sorte que l'appel formé par la société Allianz le 6 janvier 2014 a été déclaré à bon droit irrecevable à l'égard de toutes les parties, et non pas à l'égard de la seule SCI ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'existait aucune impossibilité d'exécuter séparément les dispositions du jugement concernant chacune des parties, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel :
Attendu que la société Dindar fait grief à l'arrêt de dire la requête en déféré recevable, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge est tenu, en toutes circonstances, de respecter le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur des pièces qui n'ont pas fait l'objet d'un débat contradictoire ; qu'en retenant qu' « il est justifié par la société Allianz de ce que la requête en déféré a été adressée par RPVA à la cour », cependant que la société Allianz, dans ses dernières conclusions d'appel, déposées et signifiées le 29 septembre 2014, ne produisait aucun justificatif de dépôt de sa requête par la voie du RPVA, comme le faisait valoir la société Dindar autos qui soutenait que le dépôt n'était pas conforme aux prescriptions de l'article 930-1 du code de procédure civile, la cour d'appel, qui a statué sur un élément de preuve qui n'avait pas été discuté contradictoirement, sans avoir invité les parties à présenter des observations sur ce point, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédures sont remis à la juridiction par voie électronique ; qu'en considérant, pour déclarer recevable la requête en déféré de la société Allianz, qu'elle avait en outre fait l'objet d'un dépôt à la cour dans les délais requis, sans s'expliquer davantage sur les modalités dans lesquelles ce dépôt est intervenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 930-1 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la requête en déféré étant un acte de la procédure en application de l'article 727 du code de procédure civile, c'est sans violer le principe de la contradiction que la cour d'appel a, pour confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état, préalablement constaté que la requête en déféré lui avait été adressée par la voie électronique ;
Et attendu que la seconde branche du moyen, qui critique un motif surabondant, est inopérante ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen unique du pourvoi principal :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable comme tardif l'appel formé par la société Allianz IARD le 6 janvier 2014 en tant que dirigé contre la SCI Latour, l'arrêt rendu le 6 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne les sociétés Dindar, Prudence créole et Holdar aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société Dindar, de la société Prudence créole et de la société Holdar ; les condamne in solidum à payer à la société Allianz la somme globale de 3 000 euros ; condamne la société Allianz a payer à la société Latour la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Allianz IARD
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme tardif l'appel formé par la société Allianz IARD le 6 janvier 2014 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' il ressort des pièces versées aux débats que le jugement du 6 novembre 2013 a été signifié à la demande de la SCI La Tour à toutes les autres parties dont la société Allianz IARD le 12 novembre 2013, après avoir été notifié aux avocats par acte du palais du même jour, ce qui est mentionné au procès-verbal de signification de l'huissier, cette chronologie ne pouvant donc être utilement contestée en dehors de la procédure d'inscription de faux qui n'a pas été mise en oeuvre en l'espèce ; que la signification a été faite à la société Allianz établissement de La Réunion, adresse figurant sur le jugement, et remis à une personne habilitée ; que, par ailleurs, le conseiller de la mise en état a relevé exactement que les décisions prises par le tribunal dans son dispositif ont un caractère indissociable et le jugement dont appel ayant condamné la société Allianz IARD à garantir la société Dindar Autos à hauteur du plafond de sa garantie, toutes les parties intimées bénéficient de manière indivisible du jugement ; que les condamnations prononcées par le tribunal procèdent en effet d'un fait générateur unique, l'incendie survenu dans la nuit du 11 au 12 octobre 2007 dans les locaux appartenant à la SCI La Tour, avec mise en oeuvre de la garantie de l'assureur du locataire, la société Allianz IARD ; qu'il en résulte que chacune des parties pouvait donc se prévaloir de la notification faite par l'une d'elles ; que la signification du jugement à la société Allianz IARD ayant été effectuée le 12 novembre 2013, le délai d'appel a expiré à l'égard de toutes les parties le 12 décembre 2013, et l'appel formé par la société Allianz IARD le 6 janvier 2014 a été déclaré à bon droit irrecevable à l'égard de toutes les parties, et non pas à l'égard de la seule SCI La Tour (cf. arrêt, p. 6) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' il ressort des pièces versées aux débats que le jugement du 6 novembre 2013 a été signifié à la demande de la SCI La Tour à toutes les autres parties dont la société Allianz IARD le 12 novembre 2013, après avoir été notifié aux avocats par acte du palais le même jour, ce qui est mentionné au procès-verbal de signification de l'huissier ; que la signification a été faite à la société Allianz, établissement de la Réunion, adresse figurant sur le jugement, et remis à une personne habilitée ; que par ailleurs, les décisions prises par le tribunal dans son dispositif ont un caractère indissociable et le jugement dont appel ayant condamné la société Allianz IARD à garantir la société Dindar autos à hauteur du plafond de sa garantie, toutes les parties intimées bénéficient de manière indivisible du jugement ; que chacune des parties peut donc se prévaloir de la notification faite par l'une d'elles ; que la signification du jugement à la société Allianz IARD ayant été effectuée le 12 novembre 2013, le délai d'appel a expiré le 12 décembre 2013 et l'appel formé par la société Allianz IARD le 6 janvier 2014 doit en conséquence être déclaré irrecevable (cf. ordonnance, p. 3) ;
1°) ALORS QUE c'est seulement dans le cas où le jugement profite solidairement ou indivisiblement à plusieurs parties que chacune d'entre elles peut se prévaloir de la notification faite par l'une d'elles ; qu'il n'existe pas d'indivisibilité entre l'action directe exercée par le tiers lésé ou son subrogé à l'encontre de l'assureur du responsable et celle exercée contre ce dernier ; qu'en l'espèce, la société Allianz faisait valoir que les condamnations prononcées à son encontre étaient dissociables puisqu'il était possible de les exécuter séparément (cf. concl., p. 10 § 4) ; que la cour d'appel a considéré que « les décisions prises par le tribunal dans son dispositif ont un caractère indissociable », en se bornant à relever que ce jugement avait « condamné à garantir la société Dindar Autos à hauteur de son plafond de garantie » (cf. arrêt, p. 6 § 3) et que ces condamnations « procèdent en effet d'un fait générateur unique » ; qu'en se prononçant ainsi, par un motif impropre à caractériser l'indivisibilité des condamnations prononcées, et sans rechercher, comme elle y était invitée, si ces condamnations pouvaient être exécutées de manière autonome et séparée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 529 alinéa 2 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE la cour d'appel a constaté que le jugement du 12 novembre 2013 avait condamné la société Allianz à payer à son assurée, la société Dindar Autos, la somme de 3.728.138 € (arrêt, p. 3 § 5), laquelle correspondait à la garantie de la perte des véhicules entreposés dans l'entrepôt détruit par l'incendie, qui se distinguait donc de la garantie de la responsabilité de cette société envers son bailleur, qui avait donné lieu à deux condamnations au profit de la SCI La Tour et de son assureur, la société Prudence Créole, partiellement subrogée dans ses droits ; qu'en se bornant à déduire l'indissociabilité des condamnations prononcées contre la société Allianz de l'unicité du fait générateur des dommages, tout en ayant constaté que les condamnations en cause procédaient de garanties différentes stipulées au contrat d'assurance, à savoir une assurance de choses et une assurance de responsabilité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 529 alinéa 2 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le jugement du 12 novembre 2013 a prononcé trois condamnations à l'encontre de la société Allianz IARD, la première au profit de la SCI La Tour pour une somme de 3.974.015,53 €, la deuxième au profit de la société Prudence Créole d'un montant de 5.849.187 €, la troisième au profit de la société Dindar Autos d'un montant de 3.728.138 € (jugement, p. 16) ; qu'en énonçant que « les décisions prises par le tribunal dans son dispositif ont un caractère indissociable et le jugement dont appel ayant condamné la société Allianz à garantir la société Dindar Autos à hauteur du plafond de sa garantie, toutes les parties intimées bénéficient de manière indivisible du jugement » (arrêt, p. 6 § 3), tandis que le jugement du 12 novembre 2013 ne prononçait aucune condamnation à garantie à l'encontre de la société Allianz IARD, la cour d'appel a dénaturé cette décision et violé l'article 4 du code de procédure civile.

Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils pour la société Dindar autos
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit la requête en déféré recevable ;
AUX MOTIFS QUE « sur la recevabilité de la requête en déféré, la SA HOLDAR a soulevé l'irrecevabilité de la requête en déféré au motif qu'elle émane d'une entité, ALLIANZ DIRECTION OUTRE MER qui n'a pas de personnalité juridique propre et n'a pas de capacité à agir ; que toutefois la requête en déféré a été introduite par la compagnie ALLIANZ, qui est identifiable, dès lors que sur cette requête figure la forme de la société appelante, son capital social, son numéro d'immatriculation au RCS, le lieu du siège social, et l'organe la représentant, de sorte que la mention superfétatoire DIRECTION OUTREMER n' a pu susciter d'erreur sur la personne de la requérante, et ce vice de forme couvert dans les écritures postérieures de la requérante, n'a causé aucun grief ; que par ailleurs il est justifié par la compagnie ALLIANZ de ce que la requête en déféré a été adressée par RPVA à la Cour ainsi qu'à l'ensemble des parties, et que cette requête a en outre fait l'objet d'un dépôt à la Cour dans les délais requis ; qu'il convient donc de déclarer la requête en déféré recevable » ;
1°) ALORS QUE le juge est tenu, en toutes circonstances, de respecter le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur des pièces qui n'ont pas fait l'objet d'un débat contradictoire ; qu'en retenant qu'« il est justifié par la compagnie ALLIANZ de ce que la requête en déféré a été adressée par RPVA à la Cour », cependant que la société Allianz, dans ses dernières conclusions d'appel, déposées et signifiées le 29 septembre 2014, ne produisait aucun justificatif de dépôt de sa requête par la voie du RPVA, comme le faisait valoir la société Dindar Autos qui soutenait que le dépôt n'était pas conforme aux prescriptions de l'article 930-1 du Code de procédure civile, la Cour d'appel, qui a statué sur un élément de preuve qui n'avait pas été discuté contradictoirement, sans avoir invité les parties à présenter des observations sur ce point, a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédures sont remis à la juridiction par voie électronique ; qu'en considérant, pour déclarer recevable la requête en déféré de la société Allianz, qu'elle avait en outre fait l'objet d'un dépôt à la Cour dans les délais requis », sans s'expliquer davantage sur les modalités dans lesquelles ce dépôt est intervenu, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 930-1 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-10126
Date de la décision : 07/04/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Procédure de la mise en état - Conseiller de la mise en état - Ordonnance du conseiller de la mise en état - Voies de recours - Déféré - Requête - Recevabilité - Conditions - Détermination

PROCEDURE CIVILE - Procédure de la mise en état - Conseiller de la mise en état - Ordonnance du conseiller de la mise en état - Voies de recours - Déféré - Requête - Transmission par voie électronique - Transmission à la juridiction - Effet PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Principe de la contradiction - Violation - Défaut - Cas - Acte de la procédure versé au dossier

La requête en déféré de l'ordonnance d'un conseiller de la mise en état étant, en application de l'article 727 du code de procédure civile, versée au dossier de la cour d'appel, c'est sans violer le principe de la contradiction que celle-ci constate, pour écarter une fin de non-recevoir tirée, sur le fondement de l'article 930-1 du code de procédure civile, de l'absence de transmission par voie électronique de cette requête, que celle-ci lui a bien été adressée par cette voie


Références :

articles 727 et 930-1 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 06 novembre 2014

Sur le respect du principe du contradictoire au regard d'actes de procédure versés au dossier, à rapprocher :2e Civ., 4 décembre 2014, pourvoi n° 13-22568, Bull. 2014, II, n° 243 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 07 avr. 2016, pourvoi n°15-10126, Bull. civ. d'information 2016 n° 849, II, n° 1224
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles d'information 2016 n° 849, II, n° 1224

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Mucchielli
Rapporteur ?: M. de Leiris
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.10126
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