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22/03/2016 | FRANCE | N°15-84949

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 mars 2016, 15-84949


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- Le procureur général près la cour d'appel de Poitiers,

contre l'arrêt n° 429 de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 2 juillet 2015, qui a renvoyé des fins de la poursuite le groupement agricole d'intérêt économique de Grammont, MM. Stéphane X... et Richard X... du chef d'exécution, sans autorisation, de travaux nuisibles au débit des eaux ou au milieu aquatique ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 2 févr

ier 2016 où étaient présents : M. Guérin, président, Mme Dreifuss-Netter, conseiller ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- Le procureur général près la cour d'appel de Poitiers,

contre l'arrêt n° 429 de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 2 juillet 2015, qui a renvoyé des fins de la poursuite le groupement agricole d'intérêt économique de Grammont, MM. Stéphane X... et Richard X... du chef d'exécution, sans autorisation, de travaux nuisibles au débit des eaux ou au milieu aquatique ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 2 février 2016 où étaient présents : M. Guérin, président, Mme Dreifuss-Netter, conseiller rapporteur, MM. Pers, Fossier, Mmes Schneider, Farrenq-Nési, M. Bellenger, conseillers de la chambre, Mmes Harel-Dutirou, Guého, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Lemoine ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de Mme le conseiller DREIFUSS-NETTER et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs ;
Vu ledit article, ensemble les articles 121-3, alinéa 1, du code pénal et L. 173-1- I du code de l'environnement ;
Attendu que la seule constatation de la violation, en connaissance de cause, d'une prescription légale ou réglementaire implique de la part de son auteur l'intention coupable exigée par le deuxième de ces textes ;
Attendu qu'en application du troisième, est incriminé le fait, sans l'autorisation requise, de conduire ou effectuer l'une des opérations mentionnées à l'article L. 214-3, I du code de l'environnement ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure, que MM. Stéphane et Richard X..., responsables du groupement agricole d'intérêt économique (GAEC) de Grammont, ont réalisé des travaux de drainage sur des parcelles représentant une superficie de 16, 3 hectares et situées dans des zones relevant du périmètre de l'Association syndicale autorisée des marais d'Esnandes et de Villedoux ; qu'ayant été poursuivis, ainsi que le GAEC, pour exécution sans autorisation de travaux nuisibles au débit des eaux ou au milieu aquatique, ils ont été relaxés par le tribunal ; que le procureur de la République a interjeté appel ;
Attendu que, pour confirmer le jugement, l'arrêt attaqué relève que, si la réalisation de réseaux de drainage par drains enterrés en zone de marais relevait bien de la rubrique 3. 3. 1. 0. de la nomenclature annexée à l'article L. 214-1 du code de l'environnement et s'il incombait donc aux prévenus, avant d'entreprendre leurs travaux, sur une surface supérieure à un hectare, de solliciter une autorisation préfectorale, de sorte que l'élément matériel de l'infraction est caractérisé, la preuve de l'élément intentionnel n'est pas rapportée, dès lors que le procès-verbal, établi le 4 octobre 2011, par les agents verbalisateurs de la direction départementale des territoires et de la mer, selon lequel « le passage d'un système en rigoles à un système de drains enterrés est manifestement une opération de drainage » était de nature à avoir induit les prévenus en erreur, que leur bonne foi se trouve, en outre, démontrée, par le recours au cabinet Concept ingénierie dont les conclusions n'ont fait que renforcer leurs croyances dans le fait qu'aucune démarche n'était nécessaire auprès des services de la préfecture ; que les juges ajoutent que le document intitulé « rapport d'évaluation de la mise en oeuvre du plan gouvernemental 2003-2013 pour le marais poitevin », sous la double en-tête du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et du ministère de l'agriculture, de l'alimentation et de la forêt conclut dans le même sens, en ces termes : « d'un point de vue strictement juridique, l'arrêté ministériel de 2008 (modifié en 2009), donne une définition réglementaire des zones humides, désormais caractérisées par des traces d'hydromorphie dans les sols. Si l'état des sols ne correspond pas à celui d'une zone humide, les demandes d'autorisation de drainage ne doivent être instruites qu'au regard du principe communautaire de non-destruction des milieux protégés » ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que les prévenus ne pouvaient ignorer que l'opération qu'ils envisageaient nécessitait une autorisation administrative, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Poitiers, en date du 2 juillet 2015, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bordeaux, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Poitiers et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-deux mars deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 15-84949
Date de la décision : 22/03/2016
Sens de l'arrêt : Cassation et désignation de juridiction
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PROTECTION DE LA NATURE ET DE L'ENVIRONNEMENT - Eaux et milieux aquatiques - Infractions - Exploitation, exercice ou réalisation d'installations, ouvrages, travaux et activités nuisibles sans autorisation de l'autorité administrative - Eléments constitutifs - Elément intentionnel - Violation volontaire d'une prescription légale ou réglementaire

RESPONSABILITE PENALE - Intention coupable - Définition - Violation volontaire d'une prescription légale ou réglementaire

La seule constatation de la violation, en connaissance de cause, d'une prescription légale ou réglementaire impliquant de la part de son auteur l'intention coupable exigée par l'article 121-3 du code pénal et le fait, sans l'autorisation requise, de conduire ou effectuer l'une des opérations mentionnées à l'article L. 214-3, I, du code de l'environnement étant incriminé en application de l'article L. 173-1, I, du même code, une cour d'appel ne peut, pour relaxer des prévenus, ayant réalisé, sans autorisation, des réseaux de drainage par drains enterrés sur une surface supérieure à un hectare située en zone de marais, retenir que la preuve de l'élément intentionnel n'est pas rapportée, aux motifs que le procès-verbal établi par les agents de la direction départementale des territoires et de la mer était de nature à les avoir induits en erreur et que leur bonne foi se trouvait, en outre, démontrée par le recours à un cabinet d'ingénierie dont les conclusions n'avaient fait que renforcer leurs croyances dans le fait qu'aucune démarche n'était nécessaire auprès des services de la préfecture


Références :

article 121-3 du code pénal 

articles L. 173-1 et L. 214-3 du code de l'environnement

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 02 juillet 2015

Sur le caractère suffisant de la seule constatation de la violation, en connaissance de cause, d'une prescription légale ou réglementaire pour caractériser l'intention coupable exigée par l'article 121-3 du code pénal, en droit pénal de l'environnement, à rapprocher : Crim., 28 juin 2005, pourvoi n° 05-82189, Bull. crim. 2005, n° 196 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 mar. 2016, pourvoi n°15-84949, Bull. crim. criminel 2016, n° 98
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2016, n° 98

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Lemoine
Rapporteur ?: Mme Dreifuss-Netter

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.84949
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