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17/03/2016 | FRANCE | N°15-12456

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 mars 2016, 15-12456


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que suspectant des actes de violation d'une clause de non-concurrence de la part de M. X...et de la société Orapi, dirigée par M. Y..., les sociétés Eurotab et Eurotab Opérations ont saisi le président d'un tribunal de commerce d'une requête aux fins de désignation d'un huissier de justice sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ; que la demande a été accueillie par ordonnance sur requête du 10 avril 2013 qui a été exécutée ; que cette ordonnan

ce a été rétractée par une ordonnance de référé du 6 mai 2013 confirmée...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que suspectant des actes de violation d'une clause de non-concurrence de la part de M. X...et de la société Orapi, dirigée par M. Y..., les sociétés Eurotab et Eurotab Opérations ont saisi le président d'un tribunal de commerce d'une requête aux fins de désignation d'un huissier de justice sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ; que la demande a été accueillie par ordonnance sur requête du 10 avril 2013 qui a été exécutée ; que cette ordonnance a été rétractée par une ordonnance de référé du 6 mai 2013 confirmée par la cour d'appel ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 496, alinéa 2, et 497 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rétracter l'ordonnance du 10 avril 2013, ordonner la restitution des pièces saisies, ordonner leur destruction devant l'huissier instrumentaire et interdire aux requérants d'en faire ultérieurement état à quelque titre que ce soit, l'arrêt se fonde uniquement sur un grief relatif à l'exécution de l'ordonnance, qui n'aurait pas autorisé la présence de clercs ou de stagiaires de l'huissier de justice durant les opérations, et en déduit un vice de procédure justifiant à lui seul la rétractation de l'ordonnance ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le contentieux de l'exécution de la mesure d'instruction ordonnée sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, qui n'affecte pas la décision ayant ordonné cette mesure, ne relève pas des pouvoirs du juge de la rétractation, la cour d'appel, qui n'a pas statué sur les mérites de la requête, a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique, pris sa seconde branche :
Vu l'article 145 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rétracter l'ordonnance du 10 avril 2013, ordonner la restitution des pièces saisies, ordonner leur destruction devant l'huissier instrumentaire et interdire aux requérants d'en faire ultérieurement état à quelque titre que ce soit, l'arrêt se borne à retenir que l'huissier de justice était assisté, dans un cas de personnes présentées comme clerc et comme stagiaire, dans l'autre cas d'une stagiaire, ces trois personnes n'étant ni des sachants au sens de l'ordonnance ni autorisées à assister aux opérations de saisie de sorte que leur présence aux côtés de l'huissier, en méconnaissance de l'ordonnance sur requête mais aussi des exigences de confidentialité inhérentes aux opérations de l'huissier de justice, viciait gravement les opérations et leur constat ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait qu'il n'était pas discuté que l'huissier de justice avait personnellement accompli la mission impartie par l'ordonnance du 10 avril 2013, peu important que les préposés qui l'accompagnaient, clercs ou stagiaires, n'aient pas eu la qualité de sachants au sens de ladite ordonnance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant l'ordonnance du 6 mai 2013, il a rétracté dans son intégralité l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Lyon le 10 avril 2013, ordonné aux huissiers instrumentaires respectifs la restitution de l'intégralité des pièces appréhendées lors des opérations qu'ils ont menées le 23 avril 2013, respectivement à M. Max X...et à la société Orapi, ordonné la destruction devant l'huissier instrumentaire ayant diligenté les opérations de constat du 23 avril 2013 au siège social de la société Orapi de tout autre support qui aurait servi au transfert desdites données, et ce dans un délai de 48 heures à compter de la signification de l'ordonnance, dit qu'il serait dressé procès-verbal de cette destruction, dont un exemplaire serait remis à la société Orapi, fait interdiction à l'huissier instrumentaire et à l'expert informatique dont il était accompagné de faire mention ou de révéler à quelque titre que ce soit des informations auxquelles ils ont eu accès dans le cadre des opérations qu'ils ont menées dans les locaux du siège de la société Orapi l'arrêt rendu le 18 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Orapi et MM. X...et Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Orapi et MM. X...et Y...à payer aux sociétés Eurotab et Eurotab opérations la somme globale de 3 000 euros et rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé par M. Liénard, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour les sociétés Eurotab et Eurotab opérations.
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR rétracté dans son intégralité l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Lyon le 10 avril 2013, d'AVOIR ordonné aux huissiers instrumentaires respectifs la restitution de l'intégralité des pièces appréhendées lors des opérations qu'ils ont menées le 23 avril 2013, respectivement à Monsieur Max X...et à la société ORAPI, d'AVOIR ordonné la destruction devant l'huissier instrumentaire ayant diligenté les opérations de constat du 23 avril 2013 au siège social de la société ORAPI de tout autre support qui aurait servi au transfert desdites données et d'AVOIR interdit à l'huissier instrumentaire et à l'expert informatique dont il était accompagné de faire mention ou de révéler à quelque titre que ce soit des informations auxquelles ils ont eu accès dans le cadre des opérations qu'ils ont menées dans les locaux du siège de la société ORAPI ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « sur la compétence du juge de la rétractation (¿) le juge de la rétractation devant tenir compte des faits survenus depuis la décision contestée, il entre dans ses pouvoirs d'examiner si la mesure ordonnée sur requête respecte les termes de celle-ci et les dispositions légales ; qu'il ne peut donc être fait grief en l'espèce au premier juge d'avoir statué sur les modalités de signification de l'ordonnance sur requête ni sur les circonstances de l'intervention des huissiers de justice (¿) ; que l'ordonnance sur requête du 10 avril 2013 dont les dispositions sont nécessairement limitatives autorise les huissiers instrumentaires à se faire assister seulement d'experts en informatique ou de tout sachant de leur choix, s'ils l'estiment nécessaire ; qu'il résulte du procès-verbal de constat de Me D...que ce dernier était assisté, lors de ses opérations, non seulement de Monsieur Philippe Z..., expert informatique, mais également de Madame Alexandra C...et de Monsieur Grégory A..., présentés comme clerc et stagiaire de l'étude ; qu'il ressort du procès-verbal dressé par Me E...et A... que celle-ci était assistée d'un informaticien en la personne de Monsieur B...et aussi d'une stagiaire de son étude ; que ces trois clercs ou stagiaires ne sont pas des sachants au sens de l'ordonnance sur requête et n'étaient pas autorisés à assister aux opérations de saisie comme l'a justement relevé le premier juge ; que leur présence aux côtés de l'huissier, en méconnaissance de l'ordonnance sur requête et aussi des exigences de confidentialité inhérentes aux opérations de l'huissier, viciait gravement ces opérations et leur constat ; que pour ce seul motif, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres motifs de contestation de l'ordonnance sur requête, il convient de confirmer la décision du premier juge ayant rétracté dans son intégralité l'ordonnance sur requête du 10 avril 2013 » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, aux termes de l'ordonnance entreprise, « l'huissier instrumentaire était autorisé à se faire assister d'experts en informatique, ce qui était le cas en l'espèce en la personne de Monsieur Philippe Z...ou de tout sachant, sous-entendu en relation avec la matière concernée ; qu'il résulte du procès-verbal de constat que Maître François D..., huissier de justice instrumentaire, était assisté de Mademoiselle Alexandra C...et de Monsieur Grégory A..., réputés être clerc d'une part et stagiaire d'autre part de l'étude de Maître D...; que ces deux personnes n'étaient pas autorisées au visa de l'ordonnance querellée à assister aux opérations de constat ; que (¿) selon une jurisprudence constante, les opérations de constat encourent la nullité » ;
ALORS en premier lieu QUE l'instance en rétractation ayant pour seul objet de soumettre à l'examen d'un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire, la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet ; qu'en confirmant l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a rétracté l'ordonnance du 10 avril 2013 au motif de la présence, aux côtés des huissiers ayant pratiqué chacune des deux mesures d'instruction litigieuses, dans un cas d'un clerc et d'un stagiaire de l'étude et dans le second d'un stagiaire de l'étude, et en ordonnant pour le même motif la restitution et la destruction de l'intégralité des pièces appréhendées par lesdits huissiers, la cour d'appel a violé les articles 496, 497 et 875 du code de procédure civile.
ALORS en second lieu QU'aucun texte n'interdit à un huissier autorisé judiciairement à pratiquer une mesure d'instruction d'être assisté d'un clerc ou d'un stagiaire de son étude ; qu'en jugeant du contraire, la cour d'appel a violé les articles 145 et 875 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-12456
Date de la décision : 17/03/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Ordonnance sur requête - Ordonnance faisant droit à la requête - Demande de rétractation - Office du juge - Etendue

MESURES D'INSTRUCTION - Sauvegarde de la preuve avant tout procès - Ordonnance sur requête - Exécution - Mission accomplie par l'huissier - Mission accomplie en présence d'un clerc ou d'un stagiaire de l'huissier - Validité - Portée

Viole les articles 496, alinéa 2, et 497 du code de procédure civile l'arrêt qui rétracte une ordonnance sur requête rendue sur le fondement de l'article 145 du même code, sans se prononcer sur les mérites de la requête, en se fondant exclusivement sur un grief relatif à l'exécution de l'ordonnance, qui n'aurait pas autorisé, au-delà des sachants, la présence de clercs ou de stagiaires de l'huissier de justice durant les opérations, dès lors que ces personnes étaient des préposés de l'huissier ayant personnellement rempli la mission qui lui était impartie


Références :

articles 145, 496, alinéa 2, et 497 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 18 novembre 2014

Sur l'obligation pour le juge, saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête, de se prononcer sur les mérites de la requête, à rapprocher :2e Civ., 8 février 1989, pourvoi n° 87-19935, Bull. 1989, II, n° 40 (cassation), et les arrêts cités ;2e Civ., 22 octobre 2009, pourvoi n° 08-17485, Bull. 2009, II, n° 250 (cassation) ;2e Civ., 11 mars 2010, pourvoi n° 09-66338, Bull. 2010, II, n° 53 (2) (rejet) ;2e Civ., 20 mars 2014, pourvoi n° 12-29913, Bull. 2014, II, n° 74 (2) (cassation) ;2e Civ., 20 mars 2014, pourvoi n° 13-11135, Bull. 2014, II, n° 76 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 17 mar. 2016, pourvoi n°15-12456, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Girard
Rapporteur ?: M. Adida-Canac
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.12456
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