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19/05/2015 | FRANCE | N°14-81592

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 mai 2015, 14-81592


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'Office national de la chasse et de la faune sauvage,
contre un arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 13 février 2014, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 26 juin 2012, n° 11-87.416), dans la procédure suivie contre MM. Marc X... et Bernard Y... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 mars 2015 où étaient présents dans la formati

on prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, pré...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'Office national de la chasse et de la faune sauvage,
contre un arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 13 février 2014, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 26 juin 2012, n° 11-87.416), dans la procédure suivie contre MM. Marc X... et Bernard Y... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 mars 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Fossier, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de M. le conseiller FOSSIER, les observations de la société civile professionnelle MONOD, COLIN et STOCLET, de la société civile professionnelle MEIER-BOURDEAU et LÉCUYER et de la société civile professionnelle RICHARD, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire, des articles 12, 14, 15, 28, 230 et 593 du code de procédure pénale et de l'article L. 172-1 du code de l'environnement ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable l'appel en cause de l'Agent judiciaire de l'Etat et a condamné l'Office national de la chasse et de la faune sauvage à payer à M. Z..., la somme provisionnelle de 5 000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice et la somme de 5 000 euros, en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
"aux motifs figurant que, dans l'arrêt du 22 mai 2013, les agissements reprochés aux agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, commis à l'occasion de la constatation d'infractions à la réglementation de la chasse se rattachent à des opérations de police judiciaire ; que la cour est, par conséquent, compétente pour connaître des demandes en réparation formées par la partie civile sans même qu'il soit besoin de déterminer si le dommage trouve son origine dans une faute dommageable du service ; que la faute d'imprudence qui est imputée aux agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, consistant dans une appréciation erronée de leur habilitation à appréhender l'auteur d'une infraction de chasse, ne constitue pas un manquement volontaire et inexcusable à leurs obligations d'ordre professionnel et déontologique ; qu'il ne s'agit pas d'une faute détachable du service susceptible de mettre en jeu leur responsabilité personnelle ; que, pour permettre à la partie civile de diriger sa demande en réparation à l'encontre de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, il convient de renvoyer l'affaire à l'audience de la cour d'appel sur intérêts civils qui se tiendra le 3 octobre 2013 ;
"et aux motifs que l'action civile de M. Z... n'a été dirigée qu'à l'encontre de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage en sa qualité de civilement responsable de ses deux agents jusqu'aux présentes conclusions où il se borne à demander à la cour d'appel de se prononcer sur la substitution de l'Etat à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage dans la prise en charge de l'indemnisation de son préjudice ; que l'appel en garantie formé par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage a pour objet de faire condamner l'agent judiciaire de l'Etat à régler en ses lieu et place la provision susceptible d'être allouée à la partie civile ; que cet appel en garantie ne peut être fondée sur la loi du 31 décembre 1957 qui ne concerne que les actions en responsabilité des dommages causés par tout véhicule dirigées contre une personne morale de droit public, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que si le juge judiciaire est compétent pour statuer sur le demande en réparation des dommages résultant d'incidents survenus au cours d'une action de police judiciaire, ce ne peut être que lorsque la responsabilité de l'Etat est recherchée par la victime ou lorsque le ministère public a lui-même fait citer l'Etat comme civilement responsable ; que tel n'est pas le cas, lorsque, comme en l'espèce, c'est l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, organisme public, qui demande à être relevé et garanti par l'Etat des condamnations prononcées à son encontre ; qu'en tout état de cause, l'agent judiciaire de l'Etat fait valoir, à juste titre, qu'il a été bien trop tardivement appelé en cause, puisqu'il n'a participé ni aux débats dans le cadre de l'action publique, ni même à la discussion sur la faute commise par les agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage dans le cadre de l'action civile ; que la cour d'appel ne peut donc que déclarer bien fondée l'irrecevabilité de l'appel en intervention de l'agent judiciaire de l'Etat par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage ;
"et qu'en l'état des éléments dont elle dispose, et notamment du certificat médical initial, du certificat établi le 17 septembre 2007, des résultats de l'IRM pratiquée le même jour suivis de l'intervention chirurgicale réalisée le 13 novembre 2007, il apparaît justifié d'allouer d'ores et déjà à la partie civile une indemnité provisionnelle de 5 000 euros ; qu'il convient d'accorder, en outre à M. Z..., la somme de 5 000 euros, en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale compte tenu des frais qu'il a exposés depuis la procédure devant le tribunal correctionnel de Bonneville ; que la faute commise par les agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage ne mettant pas en jeu leur responsabilité personnelle, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage seul doit être condamné au paiement de ces sommes ;
"1°) alors que l'insuffisance des motifs équivaut à leur absence ; que l'appel en cause de l'Etat par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage ne tendait pas à ce que l'Etat garantisse l'Office national de la chasse et de la faune sauvage des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui mais visait à ce que l'Etat soit mis en cause comme seul civilement responsable des fautes commises par MM. Y... et X... ; qu'en se fondant, pour condamner l'Office national de la chasse et de la faune sauvage à payer une provision, sur le motif inopérant que l'Office national de la chasse et de la faune sauvage ne pouvait être relevé et garanti par l'Etat des condamnations prononcées à son encontre et en se contentant des motifs selon lesquels l'Etat n'avait pas été régulièrement mis en cause, sans rechercher qui, de l'Etat ou de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, devait être déclaré civilement responsable, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"2°) alors que, lorsqu'il se prononce sur un litige relatif aux dommages causés lors d'une opération de police judiciaire, le juge judiciaire doit se référer aux règles du droit public ; que parmi elles figure le principe, d'ordre public, selon lequel les personnes morales de droit public ne peuvent jamais être condamnées à payer une somme qu'elles ne doivent pas ; que seul l'Etat est tenu de réparer les dommages causés par l'exécution fautive d'une opération de police judiciaire ; qu'en l'espèce, en condamnant l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, établissement public administratif, du fait de fautes commises par MM. Y... et X... dans le cadre d'une opération de police judiciaire, la cour d'appel a violé le principe et les textes susvisés ;
"3°) alors, qu'en tout état de cause, la responsabilité d'une personne publique du fait d'une faute commise lors d'une opération de police judiciaire ne peut être engagée qu'en cas de faute lourde, sur le fondement de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ; qu'en condamnant l'Office national de la chasse et de la faune sauvage pour ce qu'elle a elle-même qualifié de faute d'imprudence commise par MM. Y... et X..., la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
"4°) alors que, à titre infiniment subsidiaire, les juges du fond doivent répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'Office national de la chasse et de la faune sauvage faisait valoir que l'Etat était l'employeur de MM. Y... et X..., agents techniques de l'environnement et fonctionnaires du ministère de l'écologie, et que celui-ci était donc seul tenu de réparer les dommages causés par ces agents dans l'exercice de leur fonction ; qu'en rejetant l'appel en intervention de l'Etat et en condamnant l'Office national de la chasse et de la faune sauvage du fait de fautes commises par MM. Y... et X..., sans répondre à ces conclusions déterminantes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que dans un précédent arrêt devenu définitif, la cour d'appel a retenu contre deux agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage le délit de blessures involontaires, en précisant que ces faits avaient été commis à l'occasion d'une opération de police judiciaire ; que les juges du second degré ayant estimé que les agents n'avaient pas commis de faute détachable du service susceptible de mettre en jeu leur responsabilité personnelle, M. Z..., partie civile, a formé sa demande de réparation contre ledit Office, lequel a fait appeler l'Etat à la cause ;
Attendu que, pour déclarer bien fondée l'exception d'irrecevabilité soulevée par l'Agent judiciaire de l'Etat, l'arrêt énonce que celui-ci a été bien trop tardivement appelé en la cause, puisqu'il n'a participé ni aux débats dans le cadre de l'action publique ni même à la discussion sur la faute commise par les agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage dans le cadre de l'action civile ; que les juges en déduisent qu'ils ne peuvent que déclarer bien fondée l'irrecevabilité de l'appel en intervention de l'Agent judiciaire de l'Etat par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que les juges répressifs, sous réserve des règles propres à la mise en cause et à l'intervention de l'assureur, ne sauraient, après un jugement définitif qui a statué sur l'action publique et sur la recevabilité de la constitution de partie civile de la victime, admettre la mise en cause, en appel, d'une partie n'ayant pas été citée en vue du jugement sur ladite action, ce à quoi, nonobstant ses énonciations contraires, ne pouvait, conformément à l'article 38 de la loi n° 55-366 du 3 avril 1955, que tendre la citation délivrée à l'Agent judiciaire de l'Etat, la cour d'appel a justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen doit être écarté ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme que l'Office national de la chasse et de la faune sauvage devra payer à M. Yvan Z..., en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
DIT n'y avoir lieu à application dudit article au profit de l'Agent judiciaire de l'Etat ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-neuf mai deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 14-81592
Date de la décision : 19/05/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INTERVENTION - Moment - Intervention en cause d'appel - Irrecevabilité - Agent judiciaire de l'Etat - Citation tardive

N'encourt pas la censure l'arrêt qui, ayant jugé définitivement que deux agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage s'étaient rendus les auteurs de blessures involontaires à l'occasion d'une opération de police judiciaire sans engager leur responsabilité personnelle pour faute détachable du service, relève que la citation de l'Agent judiciaire de l'Etat à hauteur d'appel pour la première fois est irrecevable


Références :

article 38 de la loi n° 55-366 du 3 avril 1955

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 13 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 mai. 2015, pourvoi n°14-81592, Bull. crim. criminel 2015, n° 114
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2015, n° 114

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : Mme Le Dimna
Rapporteur ?: M. Fossier
Avocat(s) : SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, SCP Monod, Colin et Stoclet, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.81592
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