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10/12/2014 | FRANCE | N°14-80230

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 décembre 2014, 14-80230


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Paul X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-9, en date du 19 décembre 2013, qui pour agressions sexuelles, l'a condamné à 2 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 octobre 2014 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Beghin, conseiller rapporteur, M. Foulquié, M. Moignard, M. Castel, M. Raybaud, Mme Caron, M. Moreau, Mme Drai, conseillers

de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, conseillers référendaires ;
Avocat généra...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Paul X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-9, en date du 19 décembre 2013, qui pour agressions sexuelles, l'a condamné à 2 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 octobre 2014 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Beghin, conseiller rapporteur, M. Foulquié, M. Moignard, M. Castel, M. Raybaud, Mme Caron, M. Moreau, Mme Drai, conseillers de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Bonnet ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire BEGHIN, les observations de la société civile professionnelle GASCHIGNARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BONNET ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 du code de procédure pénale, 222-27 et 222-33 du code pénal, 4-1 du Protocole n° 7 additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, de la règle non bis in idem et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale, contradiction de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la citation et la fin de non recevoir tirée du principe non bis idem ;
"aux motifs que M. Paul X... était cité par le tribunal correctionnel de Paris du chef de harcèlement sexuel sur la personne de Mme F..., faits commis entre le 1er septembre 2008 et le 19 janvier 2009, en l'espèce par des gestes déplacés à connotation sexuelle et par l'envoi de courriers électroniques faisant référence à une relation intime ; que par jugement en date du 9 mai 2012, le tribunal correctionnel de Paris déclarait l'action publique éteinte «pour abrogation de la loi sur les faits de harcèlement pour obtenir des faveurs sexuelles» ; que par citation à la requête du procureur de la République, M. X... était renvoyé devant le tribunal correctionnel pour des faits d'atteintes sexuelles avec violence, contrainte, menace ou surprise sur la personne de Mme F..., en l'espèce en procédant sur elle à des attouchements sexuels sur les seins et le sexe par-dessus les vêtements, faits commis entre le 1er septembre 2008 et le 19 janvier 2009 ; que M. X..., par conclusions déposées et soutenues à la barre, entend développer l'argument selon lequel la présente procédure, portant exactement sur les mêmes faits que ceux ayant donné lieu à un constat d'extinction de l'action publique, par abrogation de la loi pénale sur le harcèlement sexuel, il ne saurait y avoir de nouvelles poursuites sur un fondement juridique différent, le ministère public ne pouvant faire juger une deuxième fois un prévenu pour des faits qui auraient déjà été jugés ; qu'il convient cependant d'observer que les faits initialement poursuivis par le ministère public, au terme d'une citation délivrée le 8 septembre 2011, à l'encontre de M. X..., n'ont nullement fait l'objet d'une décision relative à la culpabilité ou à la relaxe de M. X..., le tribunal ayant uniquement constaté, le 9 mai 2012, l'extinction de l'action publique du fait de la décision du Conseil constitutionnel du 4 mai 2012 constatant l'anticonstitutionalité de l'article 222-33 du code pénal et décidant ainsi l'abrogation de cette disposition ; que le tribunal aurait cependant dû étant saisi «in rem», sous peine de déni de justice, rechercher si les faits qui lui étaient soumis étaient susceptibles de recevoir une autre qualification juridique que celle de harcèlement sexuel et retenir le cas échéant, la qualification juridique la plus adéquate, n'étant point lié par celle retenue par la prévention ; qu'en l'absence de requalification des faits et de relaxe, prononcée par le tribunal de M. X... par le tribunal correctionnel, il était donc loisible au ministère public de renvoyer de nouveau le prévenu devant le tribunal correctionnel du chef d'agressions sexuelles ;
alors que nul ne peut être poursuivi deux fois pour des faits matériellement identiques même sous une qualification différente ; que l'autorité de chose jugée attachée au jugement définitif qui constate l'extinction de l'action publique fait obstacle à ce que soient engagées de nouvelles poursuites portant sur les mêmes faits même autrement qualifiés, quand bien même ce jugement aurait à tort omis de se prononcer sur les autres qualifications envisageables ; que la cour d'appel a elle-même constaté que le tribunal correctionnel, par son jugement du 9 mai 2012, avait déclaré l'action publique éteinte, en négligeant de rechercher si les faits poursuivis sous la qualification de harcèlement sexuel n'auraient pas pu recevoir la qualification d'agression sexuelle ; qu'en décidant que ce jugement ne faisait pas obstacle à l'exercice de nouvelles poursuites, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes et principes susvisés ;
Vu l'article 6, alinéa 1er, du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que l'action publique s'éteint par la chose jugée ;
Attendu que, par jugement définitif en date du 9 mai 2012, le tribunal correctionnel, saisi de poursuites exercées contre M. X... du chef de harcèlement sexuel, pour des faits commis du 1er septembre 2008 au 19 janvier 2009, sur la personne de Mme F..., a déclaré l'action publique éteinte en raison de l'abrogation de l'article 222-33 du code pénal, dans sa version issue de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002, applicable à la cause ; que le 19 novembre 2012, le ministère public a de nouveau fait citer M. X... devant le même tribunal, sous la prévention d'agressions sexuelles, pour avoir commis des attouchements de nature sexuelle sur la personne de Mme F..., entre le 1er septembre 2008 et le 19 janvier 2009 ;
Attendu que pour rejeter l'exception de chose jugée régulièrement invoquée par M. X..., l'arrêt attaqué énonce que les faits initialement poursuivis par le ministère public n'ont fait l'objet d'aucune décision relative à la culpabilité ou à la relaxe du prévenu ; que le tribunal, saisi in rem, aurait dû rechercher si les faits étaient susceptibles de recevoir une autre qualification ; qu'en l'absence d'une telle requalification, il était loisible au ministère public de renvoyer de nouveau le prévenu devant le tribunal correctionnel, du chef d'agressions sexuelles ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que l'autorité de la chose jugée, attachée à la décision définitive du tribunal correctionnel qui a constaté l'extinction de l'action publique par l'abrogation de la loi d'incrimination susvisée, faisait obstacle à la reprise de l'action publique sur les mêmes faits autrement qualifiés, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte et du principe rappelés ci-dessus ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 19 décembre 2013 ;
CONSTATE l'extinction de l'action publique ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix décembre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 14-80230
Date de la décision : 10/12/2014
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHOSE JUGEE - Maxime non bis in idem - Identité de faits - Décision définitive constatant l'extinction de l'action publique - Abrogation de la loi pénale - Poursuite sous une autre qualification (non)

L'autorité de la chose jugée, attachée à la décision définitive d'un tribunal correctionnel qui a constaté l'extinction de l'action publique par l'abrogation de la loi d'incrimination, fait obstacle à la reprise de l'action publique sur les mêmes faits autrement qualifiés


Références :

article 6 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 décembre 2013

Sur l'impossibilité d'introduire à l'encontre du même prévenu, une poursuite sous une nouvelle qualification pour des faits ayant donné lieu sa relaxe du chef d'une première qualification, à rapprocher :Crim., 19 janvier 2005, pourvoi n° 04-81686, Bull. crim. 2005, n° 25 (cassation sans renvoi)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 déc. 2014, pourvoi n°14-80230, Bull. crim. criminel 2014, n° 266
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2014, n° 266

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Bonnet
Rapporteur ?: M. Beghin
Avocat(s) : SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:14.80230
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