LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 5 février 2013), que soutenant que le Syndicat intercommunal d'énergie et de e-communication de l'Ain (le SIEA) avait, sans son autorisation, déployé des câbles de fibre optique dans les chambres de tirage et fourreaux lui appartenant, situés sur le territoire des communes de Châtillon-en-Michaille, Crozet, Divonne-les-Bains, Gex, Giron, Lhôpital et Vesancy, la société Orange, anciennement dénommée France télécom, a saisi les juridictions de l'ordre judiciaire pour obtenir le retrait de ces câbles ; que le SIEA a prétendu que les infrastructures de génie civil en cause dépendaient du domaine public communal et sollicité qu'il soit sursis à statuer jusqu'à ce que soit tranchée par la juridiction administrative la question de la légalité des conventions conclues entre les communes de Vesancy, Giron, Lhôpital et Crozet et la société France Télécom et ayant, selon lui, irrégulièrement transféré à cette dernière la propriété desdites infrastructures ;
Attendu que le SIEA et les communes de Crozet, Divonne-les-Bains, Gex, Giron, Lhôpital et Vesancy font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes de question préjudicielle et sursis à statuer, constater que la société France Télécom est propriétaire des infrastructures de génie civil situées sur le territoire des communes précitées, constater que le SIEA a implanté sans droit ni titre ses câbles de fibre optique dans ces infrastructures et endommagé celles-ci, ordonner au SIEA de retirer, sous astreinte, ses câbles de fibre optique des infrastructures situées sur les territoires des communes de Crozet, Gex, Giron, Vesancy et Lhôpital, autoriser la société France Télécom, à défaut pour le syndicat d'y avoir procédé dans le délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la signification de la décision, à faire procéder, au-delà de ce délai, à l'évacuation des installations occupées par le SIEA et à leur remise en état sous le contrôle d'un huissier de justice aux frais du SIEA, condamner le SIEA à payer à la société France Télécom les sommes de 723,96 euros au titre des frais de remise en état des infrastructures de génie civil situées sur le territoire de la commune de Divonne-les-Bains, 40 275,43 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par l'occupation sans autorisation, la saturation du réseau et les dégradations causées aux installations et 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, alors, selon le moyen :
1°/ que les litiges relatifs aux contrats portant occupation du domaine public relèvent de la compétence des juridictions administratives ; que constitue une occupation du domaine public le simple fait d'utiliser de manière privative une dépendance du domaine public comportant emprise dans son sous-sol ; qu'en se reconnaissant compétente pour connaître de la validité des conventions dites d'enfouissement des lignes aériennes conclues entre France Télécom et les communes de Vesancy le 8 juillet 1998, Giron le 5 août 1998, Lhôpital le 22 décembre 1999 et Crozet le 5 janvier 2001, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III, ensemble l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;
2°/ que les ouvrages et infrastructures de génie civil réalisées par les communes aux fins d'établissement de réseaux de communications sont des biens appartenant à une personne publique, affectés matériellement à l'utilité publique, par affectation à un service public, cette affectation résultant de l'aménagement spécial du bien au service public communal des communications ; qu'en retenant que les conventions en cause ne permettent pas de constater l'existence d'un aménagement spécial des parcelles des communes de sorte que manque le critère de domanialité publique, quand la question n'était pas de déterminer si les parcelles de terrain dans laquelle les fourreaux et chambres de tirage étaient implantés avait fait l'objet d'un aménagement spécial, mais si ces infrastructures de génie civil ne relevaient pas du domaine public communal des télécommunications en raison de leurs aménagements spéciaux pour le service public des communications, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, et ainsi privé de motif sa décision en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que les infrastructures passives constituées par les fourreaux et chambres de tirage ont été financées et construites par les communes et étaient leur propriété puisque les conventions discutées ont justement eu pour objet de transférer cette propriété à France Télécom ; que ces infrastructures sont affectées au service public ou service universel de télécommunications, et ont été spécialement aménagées pour permettre l'exécution de ce service universel d'intérêt général ; qu'ainsi la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III, ensemble l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;
4°/ que les conventions litigieuses sont toutes postérieures au 31 décembre 1996, et ne constituent nullement de permissions de voirie, la société France Télécom n'ayant plus alors la qualité d'exploitant public ; qu'en conséquence les infrastructures de génie civil, fourreaux et chambres de tirage construits dans le cadre de ces conventions ne font pas partie des biens transférés de plein droit et en pleine propriété à la société France Télécom et France Télécom ne saurait se prévaloir d'une « appropriation privative » de ces infrastructures ; qu'en retenant que France Télécom bénéficie d'un droit d'appropriation privative sur les installations en cause en tant que permissionnaire de voirie, la cour d'appel a violé les articles L. 45-1, L. 46 et L. 47 du code des postes et des communications électroniques ;
5°/ qu'il résulte des termes clairs et précis des conventions qu'elles ont pour objet, à Vesancy « La commune prend à sa charge le coût de la main-d¿oeuvre des travaux de génie civil (hors construction des chambres)¿ », à Giron « La commune prend à sa charge le coût de la main-d¿oeuvre des travaux de génie civil (hors construction des chambres)¿ », à Lhôpital « La commune de Lhôpital prend à sa charge le coût de la main-d¿oeuvre des travaux de génie civil comprenant les terrassements, les remblayages ainsi que la pose des conduites et des chambres¿. », à Crozet, « La commune de Crozet prend à sa charge le coût de la main-d¿oeuvre des travaux de génie civil comprenant les terrassements, les remblayages ainsi que la pose des conduites et des chambres¿. » ; qu'ainsi, en énonçant que ces conventions n'avaient pas pour objet la création d'infrastructures par les collectivités la cour d'appel a dénaturé les conventions en violation de l'article 1134 du code civil ;
6°/ que rien n'interdisait même avant la loi du 17 juillet 2001, à des collectivités de financer et réaliser des infrastructures d'accueil de réseaux de communications, pour les mettre ensuite à disposition d'opérateurs, avant qu'elles ne puissent devenir elle-même opérateurs ; qu'en l'espèce, le SIEA avait fait valoir que les infrastructures passives constituées par les fourreaux et chambres de tirage avaient été financées et construites par les communes et étaient leur propriété puisque les conventions discutées prévoyaient justement un transfert de propriété au profit de France Télécom ; qu'en retenant que France Télécom bénéficie d'un droit d'appropriation privative sur les installations en cause en tant que permissionnaire de voirie, la cour d'appel a violé les articles L. 45-1, L. 46 et L. 47 du code des postes et des communications électroniques ;
7°/ que le juge judiciaire doit surseoir à statuer et poser une question préjudicielle lorsqu'une difficulté sérieuse relative à la légalité d'un acte administratif lui est posée ; que le domaine public est incessible et imprescriptible, de sorte qu'une convention portant cession d'une de ses dépendances est en principe illégale ; qu'en se bornant à relever que la société France Télécom se fondait sur des conventions lui transférant la propriété des infrastructures litigieuses, sans se prononcer sur la question de savoir si l'appréciation de la légalité de ces conventions devait être renvoyée au juge administratif, dès lors qu'il était soutenu qu'elles emportaient cession du domaine public, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 49 et 378 du code de procédure civile et L. 1311-1 du code général des collectivités territoriales ;
8°/ que pour les installations établies par France Télécom sur le domaine routier avant le 1er juin 1997, le SIEA avait fait valoir dans ses conclusions que l'article 3 du décret n° 97-683 du 30 mai 1997 impartissait à cette entreprise un délai jusqu'au 1er janvier 1998 pour en procéder à la déclaration aux autorités gestionnaires du domaine routier, cette déclaration valant titre d'occupation du domaine public et servant de base au calcul de la redevance due à la collectivité concernée ; qu'à ce titre les défendeurs faisaient valoir que France Télécom ne produisait aucune déclaration, était donc un occupant sans titre, et que par application de la théorie de l'accessoire, les biens construits par un occupant sans titre sur le domaine public sont de la propriété de la personne publique ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, la cour d'appel a privé de motifs sa décision en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que la loi n° 96-660 du 26 juillet 1996 avait transféré, après déclassement, à la société France Télécom l'ensemble du patrimoine de l'ancienne personne morale de droit public éponyme, les juges du fond ont retenu à bon droit, sans avoir commis la dénaturation alléguée, que la société Orange était propriétaire des installations de communications électroniques réalisées sur le territoire des communes de Giron, Vesancy, Lhôpital et Crozet en vertu des conventions litigieuses, celles-ci ayant seulement pour objet l'enfouissement des infrastructures aériennes implantées, avant juillet 1996, sur le domaine public desdites communes et appartenant, comme telles, à la société France télécom, et non la création d'infrastructures nouvelles ; qu'ils en ont exactement déduit que la question de la légalité de ces conventions ne présentait pas un caractère sérieux, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de saisir par voie préjudicielle la juridiction administrative ;
Et attendu, d'autre part, que la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que les infrastructures souterraines situées sur le territoire des communes de Divonne-les-Bains et Gex avaient été construites antérieurement à 1996 et, partant, intégrées au patrimoine de la société France Télécom par l'effet de la loi précitée ; qu'elle a ainsi répondu aux conclusions prétendument omises, aux termes desquelles il était seulement soutenu que ces installations avaient été édifiées sur le domaine public sans autorisation ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses deuxième, quatrième et sixième branches qui critiquent des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le Syndicat intercommunal d'énergie et de e-communication de l'Ain et les communes de Crozet, Divonne-les-Bains, Gex, Giron, Lhôpital et Vesancy aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour le Syndicat intercommunal d'énergie et de e-communication de l'Ain et les communes de Crozet, Divonne-les-Bains, Gex, Giron, Lhôpital et Vesancy
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté les demandes de question préjudicielle et sursis à statuer concernant les communes de Crozet, Divonne-les-bains, Gex, Giron, Vesancy et Lhopital, constaté que la société France télécom est propriétaire des infrastructures de génie civil objet de la procédure situées Crozet, Divonne-les-bains, Gex, Giron, Vesancy et Lhopital, constaté que le SIEA a implanté sans droit ni titre ses câbles de fibre optique dans les dites infrastructures de génie civil et endommagé celles-ci, ordonné au SIEA de retirer ses câbles de fibres optiques des infrastructures de génie civil appartenant à la société France télécom situées sur les territoires des communes de Crozet, Gex, Giron, Vesancy et Lhopital, ce retrait devant être réalisé en présence de la société France télécom sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard dans le délai de trente jours à compter de la signification du jugement, autorisé la société France télécom, à défaut pour le syndicat d'y avoir procédé dans le délai de 90 jours à compter de la signification du jugement, à faire procéder au delà de ce délai à l'évacuation des installation de génie civil occupées par le SIEA et à leur remise en état sous le contrôle d'un huissier de justice aux frais du SIEA, condamné le SIEA à payer à la société France télécom la somme de 723,96 euros au titre des frais de remise en état des infrastructures de génie civil situé sur la commune de Divonne Les Bains la somme de 40 275,43 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par l'occupation sans autorisation et la saturation du réseau et les dégradations causées aux installations outre la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUESaisi d'une question préjudicielle, le juge n'est tenu de surseoir à statuer que si l'exception présente un caractère sérieux et porte sur une question dont la solution est nécessaire au litige.L'article L. 2331-1 du Code général de la propriété des personnes publiques reprend le principe posé par l'article L.84 du code des domaines de l'Etat codifiant l'article 1er du décret du 17 juin 1938 en application duquel a été décidé par le tribunal des conflits que le juge administratif est compétent pour connaître des litiges relatifs aux autorisations ou contrats portant occupation du domaine public, quelle que soit leur forme ou dénomination, passées par les personnes publiques ou leurs concessionnaires.Sont assimilés à ces contrats, ceux qui sont « relatifs » à une occupation du domaine public selon la jurisprudence du Conseil d'Etat.Préalablement à la question de savoir si un contrat emporte occupation du domaine public, il convient de déterminer s'il appartient au domaine public de la personne concernée.Selon la jurisprudence antérieure à la codification de 2006, font partie du domaine public les biens appartenant à une personne publique affectés matériellement à l'utilité publique, soit par affectation à l'usage direct du public, soit par affectation à un service public, cette affectation devant résulter de l'aménagement spécial du bien au service public en cause.En l'absence d'aménagement spécial, le bien ne fait pas partie du domaine public de la personne publique.Les conventions litigieuses dites d'enfouissement des lignes aériennes conclues entre France Telecom et les communes de Vesancy le 8 juillet 1998, Giron le 5 août 1998, Lhopital le 22 décembre 1999 et Crozet le 5 janvier 2001, stipulent que France Telecom en sa qualité de permissionnaire de voirie « demeurera propriétaire » des installations de télécommunications, ouvrages de génie civil exécutés sur le domaine public ainsi que du câblage réalisé.Les appelants font valoir que les ouvrages appartiennent au domaine public des communes et n'ont pu être transférés à France Telecom en vertu du principe d'inaliénabilité.Cependant, les conventions en cause ne permettent pas de constater l'existence d'un aménagement spécial des parcelles des communes qui servent seulement d'assiette aux infrastructures de génie civil de France Telecom dont elles ne constituent que le support de sorte que manque le critère de domanialité publique.Ces conventions ont été conclues, non dans le cadre de concession de service public auquel la notion de biens de retour serait applicable, mais en application des articles L.45-1, L.46 et L.47 du code des postes et des communications électroniques alors applicable, autorisant les exploitants autorisés de réseaux ouverts au public à implanter dans le domaine public les ouvrages nécessaires au fonctionnement du service universel des télécommunications, ouvrages dont ils restent propriétaires pendant toute la période pendant laquelle ils sont titulaires d'une permission de voirie.Les communes, qui n'avaient pas alors la charge du service universel de télécommunications auquel le domaine public routier est étranger, ne peuvent donc opposer une absence de titre à France Telecom qui avait la qualité d'exploitant public chargé de l'exercice des missions de service public des télécommunications et bénéficiait d'un droit d'appropriation privative sur les installations en cause en tant que permissionnaire de voirie.Selon leurs clauses, les conventions avaient pour objet l'enfouissement des ouvrages aériens de la société France Telecom et non la création d'infrastructures par les collectivités dans les conditions restrictives d'insuffisance qualitative de l'offre des acteurs du marché prévues par l'article 1511-6 du code général des collectivités territoriales créé par la loi du 25 juin 1999 dans sa rédaction en vigueur à l'époque des conventions.Les collectivités territoriales n'ont reçu cette compétence sans restriction que par loi du 17 juillet 2001 postérieure à la dernière convention en cause.Par ailleurs, du fait du transfert et déclassement des biens de l'Etat résultant de l'article 1er-1 ajouté à la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications par la loi no 96-660 du 26 juillet 1996, le patrimoine de l'ancienne personne morale de droit public France Télécom a été intégré au patrimoine privé de la nouvelle société France Telecom s'agissant des biens entrés dans ce patrimoine jusqu'à la publication du décret d'application du 30 mai 1997 lui appartient.France Telecom justifie par les pièces produites l'antériorité des installations sur les communes de Divonne-les Bains et Gex par les pièces produites, notamment les plans de réseau et liste des abonnements téléphoniques depuis 1950 desservis par les câbles transitant dans les chambres aux emplacements visés par les constats d'huissier lesquels relèvent en outre la présence d'équipements anciens dits à quarte le syndicat intercommunal d'énergie et d'E-communication de l'Ain et les communes ne produisent aucun élément contraire.L'exception soulevée par le syndicat et les communes ne présente donc pas un caractère sérieux et nécessaire à la solution au fond du litige justifiant un sursis à statuer.France Telecom, qui peut se prévaloir de bonne foi de son appropriation privative des infrastructures par l'effet des conventions et de la loi, justifie de son intérêt légitime à agir contre le syndicat intercommunal d'énergie et d'E-communication de l'Ain. Les constats d'huissier produits au débat démontrent que le syndicat intercommunal d'énergie et d'E-communication de l'Ain est bien l'auteur des implantations de câbles comportant identification sous forme de sigles aux emplacements visés dans les constats et retenus par le premier juge par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte.L'occupation sans autorisation de la propriété de France Telecom par le syndicat intercommunal d'énergie et d'E-communication de l'Ain est ainsi établie. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné au syndicat intercommunal d'énergie et d'E-communication de l'Ain de retirer ses câbles et fibres optiques et de remettre les installations en l'état, à défaut, a autorisé la société France Telecom à y procéder aux frais du syndicat.Le préjudice de la société France Telecom est actuel, direct et certain. Il résulte, d'une part, de la détérioration des infrastructures de génie civil endommagé sur la commune de Divonne-les-Bains, d'autre part, de l'occupation sans autorisation ni rétribution résultant du partage sans droit des infrastructures passives. Les premiers juges ont fait une exacte appréciation de l'étendue de ce préjudice que la cour adopte, de sorte qu'il convient de confirmer la décision en son entier. L'équité commande d'allouer en appel à la société France Telecom la somme de 5000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.Le syndicat intercommunal d'énergie et d'E-communication de l'Ain, qui succombe, supporte les dépens d'appel.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE
Le Syndicat Intercommunal d'Énergie et d'e-communication de l'Ain conteste à la SA France Télécom la propriété des fourreaux el des chambres de tirage et a saisi le tribunal administratif de la question, cette juridiction étant seule compétente pour reconnaître et déclarer l'étendue et les limites du domaine public.Elle oppose à la demande, les dispositions de l'article 49 du code de procédure civile selon lesquelles "toute juridiction saisie d'une demande de sa compétence connaît, même s'ils exigent l'interprétation d'un contrat, de tous les moyens de défense à l'exception de ceux qui soulèvent une question relevant de la compétence exclusive d'une autre juridiction" pour solliciter un sursis à statuer sur le fondement des dispositions de l'article 378 du code de procédure civile.Saisi d'une question préjudicielle, le juge n'est tenu de surseoir à statuer que si l'exception présente un caractère sérieux et porte sur une question dont la solution est nécessaire au règlement du litige.En l'espèce, la propriété de la SA France Telecom sur les infrastructures concernées résulte des éléments suivants :-jusqu'à la loi N°96-659 du 26 juillet 1996 l'entreprise de droit public France Télécom disposait d'un monopole de la réglementation des télécommunications et de la propriété des réseaux de télécommunication, appartenant à l'ancienne administration des Postes et Télécommunications, qui lui avaient été transférées de plein droit et en pleine propriété par la loi du 2 juillet 1990 dans son article 23.- la loi du 2 juillet 1996 transformant l'entreprise de droit public France Télécom en une entreprise nationale, France Telecom lui a transféré, dans son article 1, le patrimoine de la première.-la loi du 26 juillet 1996 a créé l'actuelle SA France Telecom et a intégré dans son patrimoine la totalité du patrimoine de l'ancienne société.Sa propriété sur les infrastructures de génie civil dédiées à ces réseaux a été consacrée par une jurisprudence constante du Conseil d'Etat depuis 1967.Il est incontestable que tout réseau et toute infrastructure de génie civil construit par France Telecom avant juillet 1996 est la propriété de France telecom.Par voie de conséquence, le réseau actuel qui procède de l'enfouissement de ce réseau ancien est sans conteste, la propriété de la SA France Telecom.Cet enfouissement a pu donner lieu à des conventions entre la SA France Telecom et les communes concernées : ainsi, des conventions ont été signées avec la Commune du Crozet le 5 janvier 2001, la commune de Giron le 5 août 1998, la commune de Lhopital le 22 décembre 1999, la commune de Vesancy le 8 juillet 1998 ; elles prévoient que "France Telecom demeure propriétaire des installations de télécom (ouvrages de génie civil) exécutés sur le domaine public ainsi que du câblage réalisé", ce qui rapporte encore la preuve la preuve, de l'aveu même des communes qui interviennent en la cause, de la propriété de la SA France Telecom sur les ouvrages litigieux.Le Syndicat Intercommunal d'Énergie et d'e-communication de l'Ain prétend contester la validité de ces conventions : pour autant, il ne justifie d'aucune action engagée à fin de nullité et ne saurait se contenter de prétendre que l'irrégularité n'échappera pas au tribunal "dans la mesure où les biens ont été incorporés au domaine public communal".Pour les autres réseaux dont la propriété est contestée à France Télécom dans le présent litige :- à Chatillon-en-Michaille la SA France Telecom indique que les infrastructures ont été créées en 2008 pour satisfaire ses propres besoins et ceux de sa cliente Madame X... ; elle ne verse aux débats aucune preuve de l'antériorité de son réseau à 1996 ; la question préjudicielle dont la solution est nécessaire au règlement du litige est sérieuse ; il sera sursis à statuer sur le cas de la commune de Chatillon-en-Michaille.-à Divonne-Les-Bains et à Gex, le réseau enterré existait antérieurement à 1996 ainsi qu'il résulte des documents produits par France Telecom et notamment de la liste des abonnements souscrits par les habitants de ces communes à partir de 1950.Le SIEA prétend cependant que France Telecom ne fait pas la preuve de sa propriété sur l'ensemble du réseau objet du présent litige, cependant, de son côté, elle ne démontre pas sa propriété sur une partie de ce réseau.
1°) ALORS QUE les litiges relatifs aux contrats portant occupation du domaine public relèvent de la compétence des juridictions administratives ; que constitue une occupation du domaine public le simple fait d'utiliser de manière privative une dépendance du domaine public comportant emprise dans son sous-sol ; qu'en se reconnaissant compétente pour connaître de la validité des conventions dites d'enfouissement des lignes aériennes conclues entre France Telecom et les communes de Vesancy le 8 juillet 1998, Giron le 5 août 1998, Lhopital le 22 décembre 1999 et Crozet le 5 janvier 2001, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III, ensemble l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;
2°) ALORS QUE les ouvrages et infrastructures de génie civil réalisées par les communes aux fins d'établissement de réseaux de communications sont des biens appartenant à une personne publique, affectés matériellement à l'utilité publique, par affectation à un service public, cette affectation résultant de l'aménagement spécial du bien au service public communal des communications ; qu'en retenant que les conventions en cause ne permettent pas de constater l'existence d'un aménagement spécial des parcelles des communes de sorte que manque le critère de domanialité publique, quand la question n'était pas de déterminer si les parcelles de terrain dans laquelle les fourreaux et chambres de tirage étaient implantés avait fait l'objet d'un aménagement spécial, mais si ces infrastructures de génie civil ne relevaient pas du domaine public communal des télécommunications en raison de leurs aménagements spéciaux pour le service public des communications, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, et ainsi privé de motif sa décision en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE les infrastructures passives constituées par les fourreaux et chambres de tirage ont été financées et construites par les Communes et étaient leur propriété puisque les conventions discutées ont justement eu pour objet de transférer cette propriété à France télécom ; que ces infrastructures sont affectés au service public ou service universel de télécommunications, et ont été spécialement aménagées pour permettre l'exécution de ce service universel d'intérêt général ; qu'ainsi la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III, ensemble l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;
4°) ALORS QUE les conventions litigieuses sont toutes postérieures au 31 décembre 1996, et ne constituent nullement de permissions de voirie, la société France télécom n'ayant plus alors la qualité d'exploitant public ; qu'en conséquences les infrastructures de génie civil, fourreaux et chambres de tirage construits dans le cadre de ces conventions ne font pas partie des biens transférés de plein droit et en pleine propriété à la SA France télécom et France télécom ne saurait se prévaloir d'une « appropriation privative » de ces infrastructures ; qu'en retenant que France télécom bénéficie d'un droit d'appropriation privative sur les installations en cause en tant que permissionnaire de voirie, la cour d'appel a violé les articles L.45-1, L.46 et L.47 du code des postes et des communications électroniques ;
5°) ALORS QU'il résulte des termes clairs et précis des conventions qu'elles ont pour objet, à Vesancy « La commune prend à sa charge le coût de la main d¿oeuvre des travaux de génie civil (hors construction des chambres)¿ », à Giron « La commune prend à sa charge le coût de la main d¿oeuvre des travaux de génie civil (hors construction des chambres)¿ » à Lhopital « La commune de Lhopital prend à sa charge le coût de la main d¿oeuvre des travaux de génie civil comprenant les terrassements, les remblayages ainsi que la pose des conduites et des chambres¿. », à Crozet, « La commune de Crozet prend à sa charge le coût de la main d¿oeuvre des travaux de génie civil comprenant les terrassements, les remblayages ainsi que la pose des conduites et des chambres¿. » ; qu'ainsi, en énonçant que ces conventions n'avaient pas pour objet la création d'infrastructures par les collectivités la cour d'appel a dénaturé les conventions en violation de l'article 1134 du code civil ;
6°) ALORS QUE rien n'interdisait même avant la loi du 17 juillet 2001, à des collectivités de financer et réaliser des infrastructures d'accueil de réseaux de communications, pour les mettre ensuite à disposition d'opérateurs, avant qu'elles ne puissent devenir elle-même opérateurs ; qu'en l'espèce, le SIEA avait fait valoir que les infrastructures passives constituées par les fourreaux et chambres de tirage avaient été financées et construites par les Communes et étaient leur propriété puisque les conventions discutées prévoyaient justement un transfert de propriété au profit de France télécom ; qu'en retenant que France télécom bénéficie d'un droit d'appropriation privative sur les installations en cause en tant que permissionnaire de voirie, la cour d'appel a violé les articles L.45-1, L.46 et L.47 du code des postes et des communications électroniques ;
7°) ALORS QUE le juge judiciaire doit surseoir à statuer et poser une question préjudicielle lorsqu'une difficulté sérieuse relative à la légalité d'un acte administratif lui est posée ; que le domaine public est incessible et imprescriptible, de sorte qu'une convention portant cession d'une de ses dépendances est en principe illégale ; qu'en se bornant à relever que la société France télécom se fondait sur des conventions lui transférant la propriété des infrastructures litigieuses, sans se prononcer sur la question de savoir si l'appréciation de la légalité de ces conventions devait être renvoyée au juge administratif, dès lors qu'il était soutenu qu'elles emportaient cession du domaine public, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 49 et 378 du code de procédure civile et L 1311-1 du code général des collectivités territoriales ;
8°) ALORS QUE pour les installations établies par France Télécom sur le domaine routier avant le 1er juin 1997, le SIEA avait fait valoir dans ses conclusions que l'article 3 du décret n° 97-683 du 30 mai 1997 impartissait à cette entreprise un délai jusqu'au 1er janvier 1998 pour en procéder à la déclaration aux autorités gestionnaires du domaine routier, cette déclaration valant titre d'occupation du domaine public et servant de base au calcul de la redevance due à la collectivité concernée ; qu'à ce titre les défendeurs faisaient valoir que France Télécom ne produisait aucune déclaration, était donc un occupant sans titre, et que par application de la théorie de l'accessoire, les biens construits par un occupant sans titre sur le domaine public sont de la propriété de la personne publique ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, la cour d'appel a privé de motifs sa décision en violation de l'article 455 du code de procédure civile.