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15/01/2014 | FRANCE | N°11-29038

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 15 janvier 2014, 11-29038


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 21 de la Convention de Montréal, du 28 mai 1999, pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international, ensemble l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt que, le 30 juin 2009, un aéronef, exploité par la société Yemenia Airways (le transporteur aérien), en provenance de Sanaa (Yemen) et à destination de Moroni (Comores), s'est abîmé en mer, causant la

mort de cent cinquante-deux passagers ; que les ayants droit de l'une des vi...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 21 de la Convention de Montréal, du 28 mai 1999, pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international, ensemble l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt que, le 30 juin 2009, un aéronef, exploité par la société Yemenia Airways (le transporteur aérien), en provenance de Sanaa (Yemen) et à destination de Moroni (Comores), s'est abîmé en mer, causant la mort de cent cinquante-deux passagers ; que les ayants droit de l'une des victimes, Zaïnaba D..., ont assigné en référé-provision le transporteur aérien sur le fondement de la Convention de Montréal ;
Attendu que, pour condamner ce dernier à payer à l'époux de la victime des indemnités provisionnelles s'élevant à un certain montant, l'arrêt relève qu'à ce jour, l'enquête en cours n'ayant pas permis de déterminer les causes de l'accident, le transporteur aérien ne fait pas la preuve, qui lui incombe, de faits exonératoires de sa responsabilité, et en déduit que ce dernier n'est pas fondé à opposer aux ayants droit de la passagère décédée la limitation de leur indemnisation à 100 000 DTS ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'une enquête était en cours pour déterminer les causes de l'accident, ce qui suffisait à caractériser l'existence d'une contestation sérieuse sur l'étendue de l'obligation à réparation du transporteur aérien, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a confirmé l'ordonnance entreprise ayant rejeté les demandes de Mme Roukia X..., l'arrêt rendu le 12 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. Z...
Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Yemenia Airways Company
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Yemenia Airways Company à payer à M. Saïd Z...
Y... une somme de 14. 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice moral et la somme de 1. 000 euros à titre de provision ad litem ;
AUX MOTIFS QU'en vertu de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier ; que le montant de la provision qui peut être allouée n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance ; qu'il n'existe aucune contestation du régime juridique applicable à l'indemnisation des préjudices subis par les ayantsdroit de la passagère décédée, à savoir, compte tenu du trajet effectué par celle-ci (Paris-Moroni Aller-retour avec escale à Sanaa, Yemen), la Convention de Montréal du 28 mai 1999 ; qu'aux termes de l'article 17 de la Convention, le transporteur est responsable du préjudice subi en cas de mort ou de lésion corporelle subie par un passager, par cela seul que l'accident qui a causé la mort ou la lésion s'est produit à bord de l'aéronef ; que l'article 21 dispose : 1- pour les dommages visés au paragraphe 1 de l'article 17 et ne dépassant pas 100. 000 DTS par passager, le transporteur ne peut exclure ou limiter sa responsabilité ; 2- le transporteur n'est pas responsable des dommages visés au paragraphe 1 de l'article 17 dans la mesure où ils dépassent 100. 000 DTS par passager, s'il prouve : a) que le dommage n'est pas dû à la négligence ou à un autre acte ou omission préjudiciable du transporteur, de ses préposés ou de ses mandataires, ou ; b) que ces dommages résultent uniquement de la négligence ou d'un autre acte ou omission préjudiciable d'un tiers ; que ce texte met à la charge du transporteur, d'une part, une présomption de responsabilité irréfragable pour les dommages ne dépassant pas 100. 000 DTS par passager, d'autre part une présomption de responsabilité pouvant être combattue par la preuve, soit de l'absence de faute commise par lui ou ses préposés ou ses mandataires, soit de la faute d'un tiers ; qu'il est constant qu'à ce jour l'enquête en cours n'a pas permis de déterminer les causes de l'accident ; que dès lors, Yemenia ne fait pas la preuve, qui lui incombe, de faits exonératoires de sa responsabilité ; qu'elle n'est donc pas fondée à opposer aux ayants-droit de la passagère décédée la limitation de leur indemnisation à 100. 000 DTS ; que Saïd Z...
Y... produit des attestations émanant des six enfants majeurs de son épouse décédée, affirmant que leur mère vivait bien avec son mari et qu'elle était venue en France pour se faire soigner ; que, si pour cinq des enfants, cette attestation est écrite par un seul d'entre eux, elle est bien signée de l'ensemble des attestants et accompagnée de la pièce d'identité de chacun d'eux, ce qui lui confère une force probante suffisante ; que ces attestations sont corroborées par une attestation du maire de la commune de Vouvouni-Bambao en date du 4 novembre 2010, certifiant que les époux vivaient sous le même toit à la date du décès de l'épouse, et par le certificat du Docteur Pascal A..., endocrinologue, certifiant qu'elle a donné des soins de façon régulière et pluriannuelle à Zanaïba D... entre octobre 2005 et juin 2009 ; qu'est ainsi rapportée, avec l'évidence requise en référé, la preuve d'une communauté de vie entre Saïd Z...
Y... et son épouse ; qu'il convient d'accorder à celui-ci une provision de 14. 000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice moral, ainsi qu'une provision pour frais d'instance de 1000 euros ;
1) ALORS QU'au-delà de la limite de 100. 000 DTS, le transporteur aérien peut s'exonérer de responsabilité en établissant l'absence de faute personnelle ou le fait d'un tiers ; qu'en l'espèce, la société Yemenia faisait valoir que sa responsabilité au-delà de la limite de 100. 000 DTS se heurtait à une contestation sérieuse, les causes de l'accident aérien n'étant pas connues et une enquête impliquant les Etats d'immatriculation et de construction de l'aéronef ainsi que de conception et de fabrication des moteurs étant en cours pour déterminer ces causes ; qu'en décidant qu'aucune contestation sérieuse n'affectait l'obligation d'indemnisation pesant sur la société Yemenia, aux motifs que cette dernière ne rapportait pas la preuve lui incombant de faits exonératoires de sa responsabilité, quand il lui revenait seulement d'établir l'existence d'un aléa sérieux quant à l'issue de la procédure au fond, ce qui ressortait suffisamment du fait que les causes de l'accident n'étaient pas connues, les juges d'appel ont violé l'article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile, ensemble l'article 21 de la Convention de Montréal du 28 mai 1999 pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE seuls peuvent demander réparation du préjudice d'affection, les proches qui prouvent que le dommage qui a atteint la victime immédiate a provoqué un trouble dans leurs conditions d'existence en raison de la rupture d'une communauté de vie qui existait auparavant ; qu'en retenant le droit à indemnisation de M. Y... en raison de la communauté de vie avec Mme D..., tout en constatant que, si certains éléments de preuve attestaient d'une résidence commune des époux aux Comores au jour du décès de l'épouse, d'autres éléments de preuve établissaient que cette dernière résidait en France depuis quatre ans au jour de son décès, les juges d'appel ont tranché une contestation sérieuse en violation de l'article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile, ensemble l'article 17 de la Convention de Montréal.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-29038
Date de la décision : 15/01/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

TRANSPORTS AERIENS - Transport de personnes - Responsabilité des transporteurs de personnes - Contestation sérieuse - Caractérisation - Cas - Enquête en cours destinée à déterminer les causes de l'accident - Portée

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accords et conventions divers - Convention de Montréal du 28 mai 1999 - Transport aérien international - Responsabilité du transporteur - Contestation sérieuse - Caractérisation - Cas - Enquête en cours destinée à déterminer les causes de l'accident - Portée REFERE - Contestation sérieuse - Applications diverses - Accident aérien - Responsabilité du transporteur - Enquête en cours destinée à déterminer les causes de l'accident

L'existence d'une enquête en cours, destinée à déterminer les causes d'un accident de transport aérien international, suffit à caractériser l'existence d'une contestation sérieuse sur l'étendue de l'obligation à réparation du transporteur aérien et à justifier à ce titre, en vertu de l'article 21 de la Convention de Montréal, une limitation des sommes réclamées, à titre de provision à valoir sur l'indemnisation des passagers, au seuil de 100.000 droits de tirage spéciaux


Références :

article 21 de la Convention de Montréal, du 28 mai 1999, pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international

article 809, alinéa 2, du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 15 jan. 2014, pourvoi n°11-29038, Bull. civ. 2014, I, n° 5
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, I, n° 5

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: Mme Maitrepierre
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:11.29038
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