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15/01/2014 | FRANCE | N°11-21394

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 15 janvier 2014, 11-21394


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties, en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 17 de la Convention de Montréal, du 28 mai 1999, pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international, applicable en substance à la situation litigieuse en vertu du règlement (CE) n° 2027/ 97 du Conseil, du 9 octobre 1997, relatif à la responsabilité des transporteurs aériens en cas d'accident, applicable à la date des faits litigieux

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Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant ressenti, les 24 et 25 ju...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties, en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 17 de la Convention de Montréal, du 28 mai 1999, pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international, applicable en substance à la situation litigieuse en vertu du règlement (CE) n° 2027/ 97 du Conseil, du 9 octobre 1997, relatif à la responsabilité des transporteurs aériens en cas d'accident, applicable à la date des faits litigieux ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant ressenti, les 24 et 25 juin 2004, de violentes douleurs aux oreilles, au cours d'un vol Cayenne-Bordeaux, via Paris, lors des phases de descente et d'atterrissage de l'appareil, Mme X..., après avoir fait diagnostiquer une lésion auditive, a assigné, en référé puis au fond, la société Air France-KLM, ayant réalisé le vol, ainsi que la CPAM de la Gironde, en indemnisation de son préjudice ;
Attendu que, pour retenir la responsabilité du transporteur aérien, l'arrêt, après avoir constaté que l'intéressée n'invoquait pas d'incident de vol, mais seulement des douleurs ressenties lors des phases de descente et d'atterrissage, relève que le lien de causalité entre le voyage réalisé et les atteintes auditives en cause a été démontré par les consultations réalisées par celle-ci, le jour même de son arrivée à destination, auprès d'un médecin généraliste, puis, quelques jours plus tard, auprès d'un spécialiste ORL, ainsi que par deux rapports d'expertise judiciaire, le dernier ayant spécialement conclu que les causes de l'otopathie barotraumatique diagnostiquée sont dues, non pas à un éventuel état pathologique antérieur de la victime, mais aux conditions de vol, les effets combinés des conditions de climatisation, de recyclage et de circulation de l'air dans les avions, avec la répétition des phases de compression, étant des facteurs de nature à favoriser les barotraumatismes ;
Attendu, qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'imputabilité du dommage à un accident qui serait survenu lors des opérations de vol, la cour d ¿ appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 avril 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

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Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Air France-Klm.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré la société Air France-Klm responsable des conséquences dommageables de l'accident otopathique dysbarique dont Mlle Céline X... a été victime les 24 et 25 juin et de l'AVOIR, en conséquence, condamnée à payer à Mlle X... la somme de 91. 443, 25 euros avec intérêts au taux légal et à la CPAM de la Gironde la somme de 23. 390, 14 euros ;
AUX MOTIFS QUE Mlle X... se plaint d'avoir ressenti de violentes douleurs aux oreilles, lors du vol de retour Cayenne Bordeaux via Paris, à bord de l'appareil, durant la phase de descente et d'atterrissage de l'avion ; qu'ainsi la deuxième des conditions posées par l'article 17 reproduit ci-dessus est établie et non contestée par la compagnie Air France ; qu'en revanche la première condition exigée pour l'application de la présomption de responsabilité du transporteur aérien, à savoir, la notion d'accident, fait l'objet du débat entre les parties ; que la compagnie Air France ¿ Klm ne conteste pas que les rapports d'expertise médicale ont établi que les troubles auditifs de Mlle X... sont en relation certaine directe et exclusive avec le barotraumatisme subi lors des deux atterrissages au retour de son séjour de Cayenne d'abord à Paris-Orly ensuite à Bordeaux-Mérignac, ni que ce barotraumatisme soit à l'origine des lésions de son oreille interne ; qu'elle remarque que les vols litigieux n'ont été marqués par aucun incident notamment de dépressurisation, de sorte qu'il est vraisemblable que le traumatisme subi par la passagère trouve sa source dans une pathologie ou un état antérieur ; qu'à cet égard la compagnie souligne que les renseignements médicaux faisant état d'un audiogramme normal en 2001 soit 3 ans avant l'accident sont insuffisants pour exclure une cause intrinsèque à Mlle X... ou une prédisposition pathologique ; que Mlle X... n'a cependant pas invoqué d'incident de vol mais seulement les douleurs qu'elle a ressenties lors des phases de descente et d'atterrissage ; que c'est à juste titre qu'elle soutient que le lien de causalité entre le voyage réalisé sur les vols d'Air France et les atteintes auditives dont elle a été victime a été démontré ; qu'en effet, elle a consulté un médecin généraliste dès son arrivée à Bordeaux le 25 juin 2004, puis un spécialiste ORL le 28 juin 2004, qui ont diagnostiqué immédiatement une double otite barotraumatique ; que ceci a été confirmé à deux reprises par l'expert judiciaire, tant dans son rapport initial du 19 mai 2005 que dans son deuxième rapport du 5 mars 2008 ; qu'elle insiste sur le fait que sa profession de conseillère en clientèle l'amenait à faire un usage régulier du téléphone et qu'elle n'a jamais éprouvé de gêne auditive avant cet accident ; qu'elle apporte la preuve de l'absence d'antécédents pathologiques de son appareil auditif notamment en produisant un audiogramme antérieur à l'accident ; qu'elle justifie également que pendant son séjour en Guyane, elle n'a pas pratiqué d'activité ayant pu favoriser une sensibilité particulière aux différences de pression et notamment pas de plongée sous-marine ; que les deux rapports d'expertise précités sont clairs sur la question de l'état antérieur ; qu'en particulier le second rapport dans lequel l'expert s'est livré à des analyses poussées, démontre que les effets combinés des conditions de climatisation, de recyclage et de circulation de l'air dans les avions avec la répartition des phases de compression sont des facteurs de nature à favoriser les barotraumatismes ; que ceci a amené l'expert à conclure sans ambiguïté que les causes de l'otopathie barotraumatique subie par Mlle X... sont dues aux conditions de vol et non à un état antérieur de celle-ci ; qu'il convient de rappeler que la charge de la preuve repose sur la Compagnie aérienne qui n'apporte aucun élément susceptible de contredire ceux produits par Mlle X... pour établir qu'elle était, avant les vols des 24 et 25 juin 2004, indemne de toute pathologie auditive préexistante ; qu'en conséquence la condition relative à la survenance d'un accident au sens d'un événement soudain extérieur à la passagère est bien établie, de sorte que la présomption de responsabilité édictée par l'article 17 de la Convention de Varsovie doit recevoir application ;
1) ALORS QUE la présomption de responsabilité pesant sur le transporteur aérien ne trouve application que lorsqu'un accident survenu au cours des opérations de vol, d'embarquement ou de débarquement a été la cause du dommage dont il est demandé réparation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément relevé que Mlle X... n'avait invoqué aucun incident de vol mais seulement les douleurs qu'elle a ressenties lors des phases de descente et d'atterrissage ; qu'en retenant la responsabilité de la société Air France ¿ Klm dans l'apparition de troubles auditifs chez Mlle X..., sans constater l'existence d'un événement extérieur à la personne du passager survenu à l'occasion des opérations de vol, d'embarquement ou de débarquement, les juges d'appel ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 17 de la Convention de Varsovie du 12 octobre 1929 ;
2) ALORS QUE le transporteur aérien ne peut être condamné à réparer d'autres dommages corporels que ceux imputables à un accident survenu à bord de l'aéronef ou pendant les opérations d'embarquement et de débarquement ; qu'en se bornant à constater que les causes de l'affection dont souffrait Mlle X... n'étaient pas connues et qu'à tout le moins, il n'était pas établi que cette affection trouvait son origine dans une pathologie antérieure, les juges d'appel se sont fondés sur des motifs impropres à caractériser l'imputabilité du dommage subi par le passager à un accident à l'occasion des opérations de vol, d'embarquement ou de débarquement, privant ainsi leur décision de base légale au regard de l'article 17 de la Convention de Varsovie du 12 octobre 1929.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-21394
Date de la décision : 15/01/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

TRANSPORTS AERIENS - Transport de personnes - Responsabilité des transporteurs de personnes - Présomption de responsabilité - Domaine d'application - Dommages causés aux voyageurs à bord de l'aéronef ou au cours des opérations d'embarquement ou de débarquement - Caractérisation - Défaut - Cas

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accords et conventions divers - Convention de Montréal du 28 mai 1999 - Transporteur aérien - Responsabilité - Présomption de responsabilité - Domaine d'application - Dommages causés aux voyageurs à bord de l'aéronef ou au cours des opérations d'embarquement ou de débarquement - Caractérisation - Défaut - Cas - Simple concomitance entre le vol et l'apparition de lésions subies par un passager

La simple concomitance entre le vol et l'apparition de lésions subies par un passager ne suffit pas à caractériser l'imputabilité du dommage à un accident qui serait survenu lors des opérations de vol, seule de nature à faire jouer la présomption de responsabilité édictée par l'article 17 de la Convention de Montréal, laquelle est applicable, en substance, à un transport interne, en vertu du Règlement (CE) n° 2027/97


Références :

article 17 de la Convention de Montréal, du 28 mai 1999, pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 27 avril 2011

Dans le même sens que :1re Civ., 6 décembre 1988, pourvoi n° 87-15168, Bull. 1988, I, n° 349 (cassation) ;1re Civ., 14 juin 2007, pourvoi n° 05-17248, Bull. 2007, I, n° 230 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 15 jan. 2014, pourvoi n°11-21394, Bull. civ. 2014, I, n° 6
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, I, n° 6

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: Mme Maitrepierre
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:11.21394
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